322 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE leur rembourser le montant de leurs effets sur le pied de leurs mises et de leurs avances (61). g La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Robert Lindet, au nom de] ses comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, charge ses comités de Commerce et des Finances, de lui faire sous trois jours, un rapport sur les pétitions et mémoires des marchands tenus de verser dans les caisses de district et de la trésorerie nationale les sommes dont ils sont débiteurs envers les étrangers des nations avec lesquelles la République est en guerre (62). h On demande l’impression du rapport fait au nom de ces trois comités, son insertion au bulletin, et l’envoi aux armées, municipalités, autorités constituées et sociétés populaires. Sur cette demande, généralement appuyée, la Convention nationale rend le décret suivant : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de Robert Lindet, au nom] des comités de Sûreté générale, de Législation et de Salut public, réunis, sur la situation de la République, ordonne que ce rapport sera inséré au bulletin, imprimé pour être distribué à chacun de ses membres au nombre de six exemplaires, et envoyé aux armées, aux municipalités, aux autorités constituées et aux sociétés populaires (63). [Ces décrets sont adoptés à l’unanimité et au milieu des plus vifs applaudissements.] (64) 19 N... (65) : Il est beaucoup de Français qui sont arrivés à Paris depuis hier; ils arrivent (61) C 318, pl. 1288, p. 22. Décret n° 10 974. Rapporteur : R. Lindet. Débats, n° 730, 575 ; Moniteur, XXII, 26 ; Bull., 4e jour s.-c. ; Mess. Soir, n° 764 ; Ann. Patr., n° 628 ; C. Eg., n° 763 ; J. Fr., n° 727 ; M. U., XLIII, 560 et XLIV, 11 ; Rép., n° 4 ; J. Perlet, n° 729 ; J. Univ., n° 1763. (62) C 318, pl. 1288, p. 23. Décret n° 10 972. Rapporteur : R. Lindet. Débats, n° 730, 575 ; Moniteur, XXII, 8 et 26 ; Bull., 4e jour s.-c. ; J. Mont., n° 144 ; Mess. Soir, n° 764. J. Fr., n° 727; M.U., XLIII, 560; Rép., n° 4; J. Perlet, n° 729; J. Univ., n° 1763 Ann. R.F., n° 1. (63) P. V., XLV, 353-357. C 318, pl. 1288, p. 24. Décret n° 10 975, minute de la main de Guffroy. Rapporteur anonyme selon C* II 20, p. 307. (64) Moniteur, XXII, 26 ; (65) De nombreuses gazettes attribuent cette intervention à Gouly : Mess. Soir, n° 763 ; Gazette Fr., n° 994. de la Martinique et de Tabago, où ils ont résisté aux insinuations des ennemis de la liberté et à celles de l’étranger. La République leur a déjà donné des secours, mais ils ne sont pas suffisants ; ils ne peuvent se rendre à leur domicile, car la plupart sont restés sans asile, puisque l’étranger s’est emparé de leurs possessions ; vous leur devez secours et protection, puisqu’ils se sont déportés volontairement pour ne pas prêter serment aux ennemis de la République. Je demande que la proposition que je fais pour eux soit renvoyée au comité de Salut public pour qu’il prononce, [à la loi rendue hier] (66), une exception en leur faveur jusqu’à ce qu’ils aient obtenu de votre comité des Secours les moyens d’aller aux environs de Paris. N... : Je demande qu’ils soient autorisés à rester définitivement ; ils ont tout sacrifié pour rester fidèles à la République, et ils ont tout abandonné pour ne pas prêter le serment que l’on exigeait d’eux. Roger DUCOS : Les étrangers, en faveur de qui l’on parle en ce moment, se sont volontairement déportés de la Martinique et de Tabago; ils ont abordé partie au port de Brest, partie au port Malo; ils se sont présentés au comité de Salut public, non pour y demander le droit de rester à Paris, mais pour obtenir des secours. Le comité n’a pu prononcer sur leur demande, parce que la loi [du 20 fructidor] (67) n’accorde de secours qu’à ceux qui auront été acquittés par un représentant du peuple, ou par un comité révolutionnaire. Notre collègue Lion (?) en a fait mettre en liberté deux cents ; mais il ne leur a pu donner des secours suffisants pour pourvoir à leurs besoins. Le plus grand nombre est sans domicile et réduit à une nudité affligeante comme ceux de Tabago. La Convention doit donc prendre une mesure générale pour que le comité des Secours soit autorisé à faire délivrer à ceux dont les passe-ports se trouveront en règle, une somme de 15 sous par lieue de poste. PELET : Il me semble que notre collègue Roger Ducos s’est écarté de la question; il s’agit de savoir si les colons arrivés en France, si des hommes qui se sont volontairement déportés de la Martinique et de la Guadeloupe, si des Français, qui ont fait toutes sortes de sacrifices pour la liberté, seront écartés de Paris. La Convention a justement pris les mesures convenables pour écarter ceux qui n’étaient à Paris que pour y jeter du trouble ; mais elle doit secours et protection aux malheureuses victimes de leur patriotisme. Peut-elle vouloir renvoyer comme dangereux des Français qui ont été mis en liberté avec des pouvoirs des représentants du peuple? La loi n’excepte que les fonctionnaires publics. N... : Dans le nombre de ces colons il en est qui ont été envoyés par notre collègue Lion(?), pour éclairer la Convention. Les au-(66) Débats, n° 730, 567. (67) Débats, n° 730, 567. SÉANCE DU 4e JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (SAMEDI 20 SEPTEMBRE 1794) - N° 19 323 très ont obtenu des congés pour se rendre dans leurs départements, et ce sont ceux-là qui sollicitent des secours pour retourner chez eux. Ceux de Lion(?) ne doivent pas être compris dans l’exécution de la loi. N... : Notre collègue Lion(?) a mis en réquisition ceux qui pouvaient être utiles pour éclairer la Convention sur ce qui s’est passé dans nos colonies ; les autres sont des vieillards, des mulâtres, des nègres natifs de ce pays, qui n’ont point de commune en France, et qui sollicitent des secours, ceux-là ne doivent point être compris dans l’exécution de la loi ; ils se sont munis de passe-ports de notre collègue Lion(?). On demande l’ordre du jour. [Un autre membre observe que les infortunés dont il s’agit ont été déportés par des Anglais] (68) N... : Il est impossible que vous adoptiez l’ordre du jour sur le sort de Français qui ont tout sacrifié à la République ; vous ne les renverrez pas comme des ennemis de cette République, je ne le crois pas. PRIEUR (de la Marne) : Les députés de la Martinique, de Tabago, sont actuellement à Paris ; les uns sont arrivés d’abord au port Ma-lo, les autres à Brest ; ils furent d’abord consignés sur les vaisseaux parlementaires qui les portaient en France, pour avoir le temps d’examiner la conduite qu’ils avaient tenue : ceux qui furent reconnus ennemis de la patrie furent mis en état d’arrestation ; les autres obtinrent des secours. Depuis le comité de Salut public a mis en état d’arrestation tous ceux qui arrivaient des colonies. Chargé de donner les renseignements qu’il pouvait recueillir sur les colonies, notre collègue Lion (?) a cru nécessaire d’en envoyer quelques uns pour donner des éclaircissements. Après ce premier scrutin épuratoire, les uns ont obtenu des passe-ports pour nous donner des lumières sur ce qui s’est passé dans les colonies; les autres ont eu de simples passeports pour se rendre où ils jugeraient à propos. Quelle mesure devez vous prendre à l’égard des uns et des autres? Renvoyez ce qui les concerne à votre comité de Salut public ; saisi de tout ce qui regarde les déportés des colonies par les Anglais, il a une liste nominative qui contient des renseignements sur leurs opinions, leur conduite et leur caractère ; ils vous indiquera ceux qui doivent rester et ceux qui doivent quitter Paris, et il vous demandera des secours pour ces infortunés. Cette proposition est décrétée. N... : Je demande des secours pour ceux qui sont à Paris pour des liquidations qu’ils sont à la veille d’obtenir. CLAUZEL : Quatre mille individus ne sont pas encore dans le cas de cette réclamation; mais à la nouvelle de cette exception, ils viendront tous solliciter des liquidations. Je demande l’ordre du jour. L’ordre du jour est décrété. (68) Débats, n° 730, 568. N... : Je ne veux pas que des scélérats aient commis impunément tous les crimes ; des scélérats se disant patriotes ont vendu nos colonies. Je veux le maintien de la loi, et pour la maintenir je demande que Merlin fasse son rapport. GOUPILLE AU : Je demande par motion d’ordre que l’Assemblée, pour prononcer sur toutes les exceptions avec connaissance de cause, attende celles que le rapporteur doit lui proposer. [MERLIN (de Douai), au nom des trois comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, expose les motifs qui ont déterminé ces comités à présenter à la Convention quelques exceptions à la loi rendue hier. Les comités ont pensé qu’on devoit excepter d’abord les citoyens appelés en témoignage devant les tribunaux, sauf à eux de se retirer le lendemain du jour où ils auront témoigné : les ministres des Etats alliés ou neutres ont fait aussi des réclamations en faveur des habitans de ces divers pays, et ces réclamations ont paru justes : les réfugiés de Corse ou d’Amérique ont réclamé aussi ; les comités ont pensé qu’il n’y avoit pas lieu à délibérer sur leurs réclamations ; mais comme il leur seroit impossible de retourner dans leurs domiciles, ces comités proposent qu’ils soient seulement tenus à se retirer à dix lieues de Paris : enfin le rapporteur fixe l’attention de l’Assemblée sur les difficultés qu’il y a pour faire viser dans ce moment, par les comités révolutionnaires, les passe-ports accordés par les comités civils. D’après ces observations, le rapporteur propose un projet de décret : la disposition relative aux déportés d’Amérique excite quelques discussions. BOURDON (de l’Oise) observe que ces déportés doivent être l’objet de la sollicitude de l’Assemblée, d’abord parce qu’ils ont combattu pour la liberté, et aussi parce qu’ils peuvent donner des renseignemens utiles dans l’affaire des colonies. On observe que plusieurs d’entre eux sont ici avec des passe-ports ou autorisations des représentans du peuple. Après quelques débats, le projet de décret et un amendement adopté par le rapporteur sont décrétés comme il suit :] (69) MERLIN (de Douai) fait au nom des trois comités un rapport sur les exceptions, à la suite duquel il présente le projet de décret suivant (70) : (69) Débats, n° 730, 568-569. La presse insiste sur l’intervention de Bourdon (de l’Oise) qui redoute de voir écarter de Paris, les accusateurs de Polverel et Sonthonax. J. Perlet, n° 728 ; J. Paris, n° 629. (70) Moniteur, XXII, 15. Débats, n° 730, 567-569. D’après ces gazettes ce débat et le décret qui l’accompagne, suivent les différentes interventions rapportées ci-dessus : Achiv. Parlement., 4e jour s.-c., n° 16. Gazette Fr., n° 994 ; J. Mont., n° 144 ; F. de la Républ., n° 441 ; Mess. Soir, n° 763 ; Ann. Patr., n° 628 ; C. Eg„ n° 763 ; J. Fr., n° 126 ; M. U., XLIII, 558 ; Rép., n° 275 ; J. Perlet, n° 728 ; J. Paris, n° 629.