612 [30 octobre 1789. J [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. sentée par la commune et le corps municipal de la ville de Nevers, par laquelle ils dénoncent un membre de la municipalité de cette ville, accusé de malversations dans l’administration des subsistances, dont il était chargé, et demandent qu’il en soit fait une prompte et sévère justice. M. De-f'ermon fait lecture d’un projet d’arrêté, proposé par le comité des rapports, tendant à traduire l’accusé par devant le Châtelet, et à inviter le corps municipal de Nevers à continuer ses soins pour le maintien de la tranquillité publique. M. Garat aîné. Il ne faut pas prodiguer les titres d’accusation ; ce n’est là qu’un vol et les tribunaux ordinaires sont compétents ; il suffit donc de renvoyer au pouvoir exécutif, qui donnera les ordres nécessaires pour faire juger l’accusé. M. Haies. J’appuie l’amendement de M. Carat, comme étant conforme aux principes de la justice. M. le Président consulte l'Assemblée et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport d’une dénonciation à elle adressée par la commune et le corps municipal de la ville de Nevers contre un membre de la municipalité de cette ville, accusé de malversations dans l’administration des subsistances, dont il était chargé, a renvoyé l’affaire au pouvoir exécutif, pour en déférer le jugement au tribunal qui doit en connaître. » M. Target fait la motion suivante concernant l’instruction publique et l’éducation nationale (1) : Messieurs, l’Assemblée nationale exerce la plénitude du pouvoir législatif; la liberté de la nation consiste à n’obéir qu’aux lois qui lui sont données par les citoyens qu’elle a choisis elle-même ; mais c’est surtout à cet empire qui vient de la persuasion, que l’Assemblée doit aspirer. Des idées nouvelles ne sont pas toujours facilement saisies par un peuple accoutumé aux procédés du gouvernement absolu ; ou s’il vient à les détester autant qu’ils le méritent, il est à craindre qu’il n’évite pas toujours l’excès contraire. Quel est le préservatif de ces dangers qui bordent la route que nous avons à parcourir? L’instruction ! C’est la législation des esprits ; elle tait descendre sur le peuple la sagesse de ses représentants; elle éclaire quand la loi commande; elle plie les mœurs; elle accommode les idées aux besoins de la révolution; elle donne aux décrets qu’il faut observer, la puissance des pensées que l’esprit humain produit de lui-même et qu’il embrasse comme son propre ouvrage; enfin, dans le temps des intrigues, des fausses rumeurs, des séductions accumulées, des maximes pernicieuses, c’est l’instruction qui doit venir au secours de la vérité outragée et ramener la paix : elle renverse également les projets des esclaves et des despotes. Le moment est donc venu où notre premier devpir est d’instruire. Il ne faut point ici de hautes conceptions ni de principes métaphysiques. Nous avons besoin du ton simple et familier de la vérité qui persuade en se montrant et qui se rend visible à tous les yeux. Les représentants de la nation n’ont pas de plus beau ministère à remplir, puisqu’il est le plus utile. L’Assemblée nationale n’y perd rien en respect, elle y gagne beaucoup en amour. Voici mon projet de décret : « L’Assemblée nationale arrête que le comité de rédaction fera choix de cinq de ses membres, lesquels seront chargés de rédiger sur chacun de! décrets importants de l’Assemblée, de soumettre à son jugement, de faire ensuite imprimer à un très-grand nombre d’exemplaires, publier et distribuer, dans tout le royaume, des instructions simples, précises et familières, dans lesquelles les principes seront mis à la portée de tous, et la� sagesse des décrets rendue sensible. « L’Assemblée arrête également que les mêmesg commissaires prépareront un plan d’éducation nationale et d’instruction publique, et qu’ils en communiqueront avec les membres du comité de Constitution, pour porter ensemble ce travail au degré de perfection dont il est susceptible. » M. Le Chapelier. J’observerai sur cette mo-'1 tion qu’il est infiniment dangereux de faire soi-même le commentaire de sa loi, et que les com� mentaires attaquent toujours et détruisent souvent les lois. ‘ 1 M. Garat aîné. Je l’avoue, les commentaires des commentateurs étrangers à la loi sont destructeurs de la loi; ou ils ne la connaissent pas]- ou ils cherchent à égarer plutôt qu’à instruire. Mais lorsque les commentateurs sont les législateurs eux-mêmes, peut-on conserver ces craintes? Instruire les peuples et les conduire à l’obéissance par la raison, c’est leur rendre le plus grand de tous les services. M. Mo u gin s de Roquefort. Je demande qu$ la motion soit divisée et que l’Assemblée statue sur la partie qui concerne le plan d’éducation nq* tionale. M. de Montlosier. La motion est aussi inutile que dangereuse. Il n’y a pas lieu d’y donner suite. M. le Président consulte l’Assemblée, qui décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer quant à présent. A M. le marquis de Rostaing, l’un des secrétaires, a présenté un extrait du procès-verbal de l’Assemblée nationale, du 29 octobre, revêtu du1 sceau de l’Assemblée, renfermant la mention d’une adresse du clergé de Dax, qui contient des protestations contre le décret de l’Assemblée nationale du 11 août, quoique dans le procès-verbal qui a été lu, il ne soit rien dit de cette adresse. M. de Rostaing a dit l’avoir reçu des mains d’un des commis du secrétariat : celui-ci ayant été appelé, il a été reconnu que l’erreur avait été occasionnée parce que la notice des adresses qui devait être lue à la séance du 29 octobre était restée parmi les papiers de cette séance, quoique la lecture n’en ait pas été faite. . « L’Assemblée a ordonné la suppression du faufl extrait, et cependant que les commis ne pourront donner communication ou copie des procès-vt#- baux, décrets ou papiers, sans un ordre des secrétaires de l’Assemblée nationale, et que sorc imprimeur n’imprimera aucun acte émané d’elle, sans en avoir reçu l’ordre du président ou des secrétaires. » :A M. le Président lève la séance, après avoir (1) Le Moniteur ne fait que mentionner la motion de M. Target.