388 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ] 11 novembre 1790.] défaut des agents et peut être dans la négligence ou l’ignorance des essayeurs d’alors : et remarquez que le directeur ne profitait pas de ces fautes ; car s’il rendait des louis à 21 karats, seize, dix-sept ou dix-huit trente-deuxièmes, c’est qu’il avait reçu, comme or de 21 karats, vingt à -vingt-deux trente-deuxièmes de l’or qui n’était réellement qu’à 21 karats, seize, dix-sept ou dix-huit trente-deuxièmes, et ceci n’est point une conjecture : il est si vrai que ces vices de titres provenaient du vice des agents servant à le constater, que ceux dont se servaient les essayeurs qui opéraient à la cour des monnaies pour le jugement du travail des directeurs, avaient les mêmes vices, puisque les arrêts de cette cour justifient que les louis de ce temps ODt été trouvés au titre. On ne pourrait conséquemment accuser de vol les directeurs des monnaies et les juges-gardes, sans accuser de connivence, et les essayeurs de la cour des monnaies, et cette cour elle-même; et l’on ne pourrait en faire grâce à cellë-ci qu’en l’accusant de prévarication ou d’ignorance : prévarication, en ce qu’elle n'aurait pas surveillé ses essayeurs ; ignorance, en ce qu’elle n’eût rien entendu à la manipulation de ce genre d’expériences : et comme en cela consistaient ses fonctions principales, on ne peut guère soupçonner l’ignorance; d’autres raisons s’opposent à ce qu’on la suspecte de défaut de surveillance : enfin, comme il était impossible de corrompre le corps tout entier, on ne peut pas l’accuser de collusion. Donc, les arrêts de la cour des monnaies prouvent contre les agents dont on se servait autrefois ; donc ils prouvent contre l’assertion du comité qui inculpe les directeurs, et contre la dénonciation du membre du comité, qui s’est porté leur dénonciateur et qui se hâtera, sans doute, de rétracter une calomnie atroce dont il a eu le malheur d’être l’organe. TROISIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 11 NOVEMBRE 1790. Projet de décret, proposé par le comité ecclésiastique sur l'exécution du décret du 12 juillet 1790 concernant la constitution civile du clergé. L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité ecclésiastique, a décrété ce qui suit : Art. l6r. A la première convocation qui se fera des assemblées électorales, celles des départements dont le siège épiscopal se trouvera vacant, procéderont à l’élection d’un évêque. Art. 2. Si le métropolitain, ou, à son défaut, le us ancien évêque de l’arrondissement, refuse de lui accorder la confirmation canonique, l’élu se représentera à lui, assisté de deux notaires ; il le requerra de lui accorder la confirmation canonique et se fera donner acte de sa réponse ou de son refus de répondre. Art. 3. Si le métropolitain ou le plus ancien évêque de l’arrondissement persiste dans son premier refus, l'élu se présentera en personne, ou par son fondé de procuration, et successivement tous les évêques de l’arrondissement, chacun suivant l’ordre de leur ancienneté, toujours assisté de deux notaires : il leur exhibera le procès-verbal ou les procès-verbaux des refus qu'il aura essuyés, et il les suppliera de lui accorder la confirmation canonique. Art. 4. Au cas qu’il ne se trouve dans l’arrondissement aucun évêque qui veuille accorder à l’élu la confirmation canonique, il y aura lieu à l’appel comme d’abus. Art. 5. L’appel comme d’abus sera porté au tribunal de cassation. Art. 6. L’élu sera tenu d’interjeter son appel comme d’abus, au plus tard dans le délai d’un mois, à compter de la date du procès-verbal, qui constatera le refus des évêques de l’arrondissement, et de le faire juger dans le mois en suivant, à peine de déchéance. Art. 7. Il ne sera intimé sur l’appel comme d’abus, d’autre partie que le commissaire du roi,> près du tribunal de cassation ; et cependant l’évêque métropolitain, dont le refus aura donné lieu à l’appel comme d’abus, aura la faculté d’intervenir sur l’appel pour justifier son refus, mais sans que son intervention puisse, eu aucun cas, retarder le jugement de l’appel, ni qu’il puisse former opposition au jugement qui serait intervenu, sous prétexte qu’il n’y aurait pas été partie. Art. 8. Si le tribunal de cassation déclare qu’il n’y a pas d’abus dans le refus, il condamnera l’appelant en une amende de 150 livres et ordonnera que son jugement sera, à la requête du commissaire du roi, signifié au procureur général syndic du département, pour, par lui, convoquer incessamment Rassemblée électorale, à l’effet de procéder à une nouvelle élection de l’évêque. Art. 9. Si le tribunal déclare qu’il y a abus dans le refus, il enverra l’élu en possession du temporel, et nommera l’évêque auquel il sera tenu de se présenter pour le supplier de lui accorder la confirmation canonique. Art. 10. Lorsque» sur le refus du métropolitain et des autres évêques de l’arrondissement, l’élu aura été obligé de se retirer devers un évêque d’un autre arrondissement, pour avoir la confirmation canonique, la consécration pourra se faire par l’évêque qui la lui aura accordée. Art. 11. Pareillement lorsque le siège de l’évêque consécrateur sera d’un autre arrondissement que celui de l’élu, la consécration pourra se faire dans l’église cathédrale de l’évêque consécrateur, ou dans telle autre église qu’il jugera à propos. Art. 12. Les directoires de districts procéderont sans retard à la nouvelle formation et circonscription des paroisses, conformément au titre 1er du • décret du 12 juillet dernier. Ils s’occuperont d’abord de la formation et circonscription de la paroisse cathédrale, puis des paroisses des villes et bourgs, et ensuite des paroisses de campagne. Art. 13. L’évêque diocésain sera invité et même requis de concourir, par lui-même ou par son fondé de procuration, aux travaux préparatoires des suppressions et unions; mais son absence ou son refus d’y prendre part ne pourra, en aucun cas, retarder les opérations des directoires. Art. 14. Pour accélérer leur travail, les directoires de districts chargeront les municipalités des villes et bourgs de chaque canton, de leur envoyer toutes les instructions et tous les éclaircissements nécessaires sur la possibilité des suppressions et unions à faire dans leur territoire et aux environs. Art. 15. En procédant à la formation et circonscription d’une paroisse, les municipalités ou directoires de districts auront soin d’indiquer les ] Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES {12 novembre 1790.] 389 paroisses, quartiers, villages et hameaux qu’ils croiront devoir y être réunis : ils feront connaître la population de chaque endroit : ils expliqueront les raisons qui les détermineront à supprimer ou conserver, à unir ou ériger; et du tout ils dresseront leur procès-verbal. Art. 16. A mesure que les directoires de districts auront achevé leur travail pour la formation et circonscription de la paroisse ou des paroisses d’une ville ou d’un bourg, ils en enverront le procès-verbal au directoire de leur département, qui le fera passer, avec son avis, à l’Assemblée nationale, pour y être décrété. Art. 17. Si l’évêque diocésain est en retard de nommer les vicaires de la paroisse cathédrale, les curés des paroisses qui y auront été réunies en rempliront provisoirement les fonctions, chacun suivant l’ordre de leur ancienneté dans les fonctions pastorales. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHASSET. Séance du vendredi 12 novembre 1790 (1). La séance est ouverte à dix heures moins un quart. M. Lanjutnals, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier au matin. M. de Croix. L’observation faite hier par M. de Beauharnais, sur la question de savoir si le roi pourrait commander les troupes en personne, n ayant point été la matière de la discussion, je demande qu’elle soit rayée du procès-verbal. (Cette proposition est adoptée.) M. de Pardieu. La chose publique souffre; il est dix heures un quart, et nous ne sommes que vingt dans cette salle; je demande qu’à deux heures M. le président veuille bien rappeler à l’Assemblée le décret qu’elle a rendu. M. Rœderer. Hier à onze heures du soir plusieurs comités étaient encore assemblés; nous ne pouvons pas faire plus que nos forces ne nous le permettent. On sait bien que le temps passé dans les comités n’est pas perdu pour l’Assemblée. M. Rabaud. On devrait avoir un peu plus d’indulgence. Je me pique d’être ici de bonne heure; mais ma correspondance en souffre beaucoup. On sait bien qu’il nous faut du temps pour instruire nos commettants, pour répondre à toutes leurs demandes, pour réfléchir sur les matières qui doivent être traitées dans l’Assemblée; je m’élève contre l’obsprvation de M. de Pardieu, qui tendrait à jeter des doutes sur le zèle des députés. (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) M. l’oulland, député du département du Gard. Il est bien douloureux pour moi et pour tous mes collègues d’avoir à vous entretenir aussi souvent des scènes d’horreur qui ne cessent de se renouveler dans nos malheureuses contrées. Aujourd’hui j’ai à vous annoncer que, dans le court espace de dix jours, quatre assassinats ont été commis sur des patriotes; l’un d’eux a été mutilé à coups de sabre, et deux autres ont été frappés de deux coups de poignard. Les affiches pour annoncer la vente des biens nationaux sont enlevées ; on menace effrontément tous ceux qui voudront acquérir et tous ceux qui oseront vendre; une troupe effrénée affecte de parler hautement, dans toutes les rues, de cordes bien et dûment savonnées. Instruit de ces faits parle directoire du district d’Uzès, le directoire du département a requis le commandant de la ville et citadelle de Nîmes de faire porter à Uzès un renfort de trente dragons du régiment de Lorraine. Get officier a prétendu qu’étant subordonné à M. Montaigut, ci-devant marquis de Bouzol,il ne pouvait, sans ordre de sa part, se permettre de faire faire le moindre mouvement aux troupes hors de la place. Sur cette difficulté, que les décrets fondés sur la loi impérieuse du salut du peuple auraient dû trancher, le directoire du département a dépêché un courrier extraordinaire à M. Montaigut. Get officier général, auquel on s’est attaché à peindre la situation de la ville d’Uzès sous le point de vue le plus capable de l’intéresser, s’est refusé à y faire passer les trente dragons, dont la présence devait suffire pour contenir les perturbateurs. Il a prétendu qu'un bataillon du régiment de Bresse, qui forme la garnison d’Uzès, et qui n’a que cent cinquante-huit hommes effectifs, pouvait calmer toutes les inquiétudes dès qu’il serait requis par les officiers municipaux, que la loi martiale serait publiée; et, pensant que le mélange des différentes troupes de ligne était dangereux, il n’a pas voulu laisser partir les dragons. M. Montaigut a violé la loi, et par cette violation il a compromis l’autorité des corps administratifs; il a montré aux peuples l’impuissance du directoire, il a brisé le seul lien qui retenait encore la malveillance, en détruisant celte crainte salutaire que les intentions connues des administrateurs et leur patriotisme éprouvé inspiraient aux perturbateurs. Sur la dénonciation formelle du corps administratif du département du Gard, je demande que les pièces dont cette dénonciation estappuyée soient renvoyées aux comités des rapports et ue3 recherches réunis, pour en rendre compte demain à l’Assemblée naiionale, à deux heures. (Cette demande est décrétée.) M. de Réthtsy, évêque d'Uzès. Je dépose sur le bureau le procès-verbal de la municipalité d’Uzès et j’en demande le renvoi aux mêmes comités. (Ge renvoi est ordonné.) M. l’abbé Gibert, membre du comité des finances, propose et fait adopter le décret suivant relatif à une contribution de 150,000 livres à répartir sur les habitants de Strasbourg : « L’Assemblée nationale, vu la délibération du conseil général de la commune de Strasbourg, du 26 juillet dernier, celle du directoire du département du Bas-Rhin, sur l’avis du district de Strasbourg, et après avoir entendu son comité des finances; « Considérant qu’il est urgent de pourvoir aux dépenses indispensables d’entretien et d’administration à la charge de la commune de Strasbourg, approuve ladite délibération du 26 juillet dernier; en conséquence, autorise le conseil de la commune de ladite ville à imposer et lever en (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.