ARCHIVES PARLEMENTAIRES «B»fr RÈGNE DE LOUIS XVI ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BRIOIS DE BEAUMETZ. Séance du lundi 31 mai 1790, au matin (l). M. le Président ouvre la séance à 9 heures du matin. M. Defermon, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier qui est adopté. M. Fouquier d’Hérouel, député de Saint-Quentin , fait, au nom des communes deTrescon, Villecholles et Vermand , l’hommage de leurs dons patriotiques, et l’abandon de leur bénéfice sur l’imposition des privilégiés pour les six derniers mois 1789, montant, pour la première municipalité, à 1,010 livres ; pour la seconde, à 339 livres 3 sols 6 deniers; pour la troisième, à 7,571 livres 9 sols 3 deniers. L’Assemblée applaudit à ces actes de patriotisme, et aux sentiments exprimés dans les adresses de ces municipalités. M. Prieur, secrétaire, fait connaître, par extrait, à l’Assemblée, une délibération de la municipalité de Véron, district de Sens, par laquelle elle exprime son respect et sa reconnaissance pour tous les décrets de l’Assemblée, et notamment pour ceux qui permettent aux municipalités d’acquérir des biens ecclésiastiques et domaniaux , et se soumet d’en acquérir jusqu’à concurrence de la somme de 133,666 livres; Une adresse d’adhésion du district de Briançon, département des Hautes-Alpes, aux décrets de l’Assemblée; les habitants de ces montagnes seront d’autant plus fidèles à la Constitution, qu’ils en ont toujours senti le prix, et avaient acheté chèrement, du dernier souverain du Dauphiné, des privilèges devenus aujourd’hui le droit commun du royaume: « Notre pauvreté, disent-ils, » était extrême, mais nos larmes ne coulaient » pas sur des fers. » (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 1" Série. T. XVI. Enfin, un procès-verbal du serment civique de la garde nationale de la commune de Briançon ; ce procès-verbal renferme les expressions du plus pur et du plus ferme patriotisme. M. Fieiïlard (de Coûtâmes). Le comité des rapports m’a chargé de vous présenter un projet de décret : voici les faits qui le rendent nécessaire. Lors de la mort de M. de Voisins, à Valence, trois jeunes officiers du régiment de Grenoble, artillerie, ont été arrêtés et mis en prison. Il n’y a aucune inculpation contre eux. La municipalité de Grenoble demande qu’ils soient relâchés. Le comité des rapports pense que l’Assemblée doit déclarer qu’aucun citoyen ne pouvant être détenu qu’en vertu de la loi, et que n’y ayant aucune inculpation contre les trois officiers du régiment de Grenoble, artillerie, en garnison à Valence, ils doivent être mis en liberté. L’avis du comité des rapports est adopté et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports : « Déclare qu’aucun citoyen ne pouvant être arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et suivant les formes qu’elle a prescrites, la détention actuelle des trois officiers du régiment de Grenoble, en garnison à Valence, n’étant précédée ni suivie d’accusation, de décret ni d’information, ne peut être prorogée ; « Déclare qu’elle met lesdits officiers sous la sauvegarde de la loi ; « Ordonne que le président se retirera, dans le jour , par devers le roi , pour Je supplier de donner les ordres nécessaires pour faire remettre lesdits officiers en liberté. » M. Dubois, député de Chàtellerault. Je dois rendre compte à l'Assemblée de la difficulté qu’éprouve, dans certains départements, la libre circulation des grains. La ville de Chàtellerault a envoyé à Orléans un député extraordinaire pour acheter les grains dont elle manque. Les officiers municipaux d’Orléans ont prêté leur concours avec cordialité, mais en observant que le peuple s’opposerait peut-être à l’enlèvement de ces grains. Je demande donc à l’Assemblée de décréter ce qui suit : « L’Assemblée nationale décrète qu’il sera délivré aux députés extraordinaires de Ghâtelle-l \ 2 [Assemblée nationale.) l’ault des expéditions en forme des décrets sanctionnés par le roi, qui autorisent la circulation des grains dans l’intérieur du royaume ; » Décrète, en outre, que son président sera chargé d’écrire que la commission dont sont chargés les députés extraordinaires de Cliâtelle-rault, d’acheter des subsistances dans tes villes d’Orléans, Ëtampes et autres villes, est parfaitement confurme aux vœux ue l’Assemblée nationale, et qu’il ne peut être permis d’en troubler ni arrêter le transport pour le lieu de leur destination. » M. Bouche. Je dépose, sur le bureau, des pièces qui prouvent que dans le région nt de Roya|-Mu-rme, en garnison àAix, on coupe les cheveux et les oreilles aux soldats et qu’on les renvoie ensuite avec des cartouches jaunes. M. d’André. Je vais rendre compte de ce qui s’est passé dans le corps de Ruyal-Maüine. Quelques grenadiers ayant fait des menaces au major du régimeq1, un d’eux ayant été jusqu’à tirer son sabre et porter un coup au major sans l’atteindre, un autre grenadi r cria : « Que ceux des grenadiers qui resient fidèles se joignent à moi. » Sur 80 hommes, 60 se détachèrent. Ils désarmèrent les 20 autres, les emprisonnèrent et arrêtèrent qu’ils seraient rasés et chassés du régiment. Tandis qu’un caporal rasait le grenadier qui a tiré son sabre, celui-ci lui a dit des injures. Ce caporal obéissant à un mouvement de colère, s’tst permis de lui couper une oreille; il n’y a pus de doute qu’il même d’êire puni sévèrement. Voilà le fait. Je demande le renvoi de cette affaire aux trois comités réunis des rapports, des recherches et militaire. (Ce renvoi est pronom é-) L’Assemb'ée reprend \asuitede la discussion du plan du comité ecclésiastique relatif à l'organisation et à la constitution du clergé, M. l’abbé Leclerc, député d'Alençon. Messieurs, !-i votre comité sYiait coutenié de vous proposer la réforme des abus qui se sont introduits dans l’administration ecclesiastique, s’il vous avait demandé de piotéger les lègtes de l’Eglise, nous aurions tous applaudi à sou travail ; mais il n’a présenté que suppresion et de.-truction. Déjà Jes maisons religieuses u’existent plus; il lie - reste pointd’asile a la piété fervente. Les évêchés, les un hevècliés, les collégiales et les cathédrales sont menant s de proscription , et dans un royaume qui fait profession de la religion catholique, on n’a pas encore pensé à abolir les maisons de débauche et de prostitution, ces tombeaux de la l'or-? tune et de la vie des citoyens; c’est là que des régénérateurs auraient dû porter toute leur sévérité; mais des vues linancières dirigent cette Assemblée..... Los pouvpirs de l’Eglise sont inaliénables et ’mpn scriptibles; leur essence est divine relie peut donc les exercer dans toute leur indépendance, Saint Albanie demande quel est le canon api aqtorise à envahir les églises, à s’emparer de fadmipjslruUon ecclesiastique. Tel le était I hérésie des prions.... L’Eglise a reçu, avec ledipjt d'eur 6 igner, tous les droits du gouvernement ecclésiastique; la légLIution pour |e bien général; la coacliou pouranêier les in 1 raclions qui seraient fait s à la loi ; la juridiction pour punir les coupables, et l’institution pour instituer les pasteurs. Jésus-Christ était bien loin de donner aux empe-[31 mai 1790.'] renrs ie gouvernement des églises; il a dit qu’ils en seraient les persécuteurs..... L’Eglise a une ju-ri liction extérieure, qui se manifeste par des actes publics; elle a le droit de faire des canons, d’établir la discipline ecclésiastique; elle doit avoir la force nécessaire podr faire exécuter les canons et maint* nir cette discipline, flous iisons dans l’Evangile que l’Eglise doit punir les pécheurs incorrigibles ; les Pères reconnaissent une juridiction; ils reconnaissent que les évêques peuvent recevoir les accusations, entendre les témoins, et juger. Dans les délits ecclésiastiques, dit Justinien, c’est aux évêques à examiner et à punir. Régir, gouverner les églbes, reg er la discipline, faire des lois, instituer les prêtres; telle est la juridiction ecclésiastique. Or, une juridiction pareille ne peut venir que de Jésus Christ; dune elle est indépendante des nistbutious sociales. En envahis ant cette juridiction, on irait contre les intentions de l’Eglise et de s n fondateur. Les princes, protecleursdes droits de l’Eglise, au lieu de les mam.euir, en seraient les usurpateurs. A Dieu ne plaise, dit Fénel n, que le pro-t* cteur gouverne 1 il attend humblement que sa protection soit demandée; il obéit lui-même. Charlemagne, en quali lé de protecteur de-; canons, exeiçait les droiis de sa juridiction en ordonnant l'exécution de ce qui avait été ordonné par les évêques. Lo is le Débonnaire, à l’uni ia-t ton de Charlemagne, s’est renfermé comme lui dans les bornes prescrites; il a pris, non le titre de législateur, mais celui de moniteur des lois ec-clesiu.-tiques. Les princes neièglent donc pas les églises, ne loni donc pas les canons, ils ajoutent à 1 autorité de l’Eglise celle que Dieu a mise dans leurs mains. Ainsi la protection du souv. rain doit se bornera faire les lois nécessaires à l’exécution des lois de l’Eg ise, à faire celles que sollicite 1 Eglise, celles qui la protègent, et que l’Eglise adopte et valide par un consentement exprès ou t.iciie ..... L'Assemblée nationale ne se montrera pas moins attachée que nos rois à faire exécuter les loisecclé>iastiqués.Depuisl’origineiie I Eghse, il n’y a pas eu un évêché institué par la puissance temporelle; il en est de même de la suppression, car celui-là seul qui peut créer peut anéantir. L’autorité séculière est donc toujours incompétente quand il s’agit de faire des chmgemerns à l’état de l'Eglise. Elle ne se gouverne pas par des spéculations de finances ..... Je ue parlerai pas d'un grand nombre d’évêques qui ue peuvent légitimement être déposés s’ils n’ont commis des crimes. Je ne parierai pas des curés que vous estimez, et qui cependant se trouveraient bannis et inleidds.... La puissance spirituelle, étant la seule coilairice nés bénéfices, peut seule juger de la cajiuciié des sujets et de la validité des titres. L’élection par le peuple serait une usurpa ion et peut-être une simonie. Dans les premiers siècle', les élections se faisaient par le peuple, mais comme elles causaient ues iroubl* s, elles ont été attribuées aux évêques, et, depuis, les rois ont succède àce droit.. .Doit-on faire illusion au clergé du second ordre ..... (Il s’élève des murmures.) Je ne IVnvisage point ici comme un ordre politique; je parle seulement d’après la hiérarchie consacrée par le co cile de Trente. En assimilant les curés aux 72 disciples, et non en les indiquant comme les successeurs des apôtres, on ne s’éloigne. pas des principes. Je serai tiuèle à ces principes, parce qu’i s tiennent à la foi. Nous condamnons hautement une doctrine qui couuuitau pie-byté-rauisuie, et si nous pouvions ne pas nous placer contre elle, les évêques, le jour du jugement, archives parlementaires.