[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 octobre 1790.] 21 l’Assemblée nationale a renvoyé aux officiers de la ci-devant sénéchaussée de Marseille la connaissance et la poursuite de la procédure faite par le prévôt général de Provence, sur les troubles de cette ville; qu’il paraît utile et même nécessaire que cette attribution soit conservée aux juges composant le tribunal du district de Marseille dès qu’ils seront en activité. Il propose, en conséquence, le projet de décret suivant, lequel est adopté par l’Assemblée en ces termes : « L’Assemblée nationale décrète que la procédure prévotale, renvoyée par décret du 11 mars dernier par devant les officiers de la ci-devant sénéchaussée de Marseille, sera poursuivie, d’après ses derniers errements, par devant les juges composant le tribunal de district de cette ville, dès qu’ils seront en activité, et par eux jugée conformément et suivant l’attribution ordonnée par le susdit décret de renvoi. » M. Hanrlssart, membre du comité des finances, présente un projet de décret concernant la contribution patriotique. Les articles mis successivement aux voix sont adoptés ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, considérant que les receveurs des districts étant chargés, par l’article 27 du décret du 6 août 1790, de faire toutes diligences pour faire rentrer Jes fermages, loyers, arrérages et toutes autres dettes actives, de quelque nature qu’elles soient, provenant des bénéfices, biens et établissements ecclésiastiques séculiers et réguliers, autres que ceux de l’ordre de-Malte, des fabriques, des hôpiîaux et maisons de charité et d’éducation ; lesquels fermages et arrérages se trouveront échus lors de l’établissement de la caisse du district, même ceux échus avant le lor janvier 1790, et qui écherront par la suite; et néanmoins les titulaires particuliers, dont les revenus forment une mense individuelle, étant autorisés par le même article à toucher directement de leurs fermiers les fermages et arrérages échus avant le 1er janvier 1790, même ceux représentatifs des fruits crûs en 1789 et les années précédentes, à quelque époque qu’ils soient dus, en justifiant qu’ils ont acquitté le premier tiers de leur contribution patriotique; considérant que, d’après ces dispositions, les membres des établissements ecclésiastiques dont les revenus formeut une mense conventuelle, et qui ont fait ou dû faire leurs déclarations en commun pour la contribution patriotique, à raison desdits revenus, ne sont plus dans le cas de remplir les engagements qu’ils ont contractés en commun pour cette contribution, dont le premier tiers a élé prélevé sur lesdits revenus communs, et qu’ils n’en doivent plus qu’une personnelle, à raison du traitement individuel qui leur a été accordé, à compter du 1er janvier dernier, et pour les deux tiers seulement ; voulant terminer toutes les difficultés qui existent ou qui pourraient naître à ce sujet, et quelques autres résultant d’un grand nombre de déclarations qui contiennent des offres de capitaux de rentes ou d’autres objets inadmissibles dans le payement de la contribution patriotique, ou qui ont été faites par plusieurs particuliers en commun, au lieu d’être individuelles, conformément au décret du 6 octobre 1789 ; considérant aussi qu’il est nécessaire de déterminer par qui et comment il sera statué sur les demandes en réduction qui seront dans le cas d’être formées, d’après l’article 2 du décret du 27 mars dernier ; désirant enfin pourvoir à tous les moyens qui peuvent accélérer, faciliter et assurer le recouvrement de la contribution patriotique, a décrété et décrète ce qui suit : Art. 1er. « Toutes les déclarations pour la contribution patriotique, faites en commun par les membres des établissements réguliers et séculiers, dont les revenus échus avant le 1er janvier 1790, et ceux qui écherront par la suite, doivent être perçus par les receveurs de district, conformément à l’article 27 du 6 août 1790, n’auront d’effet que pour le premier tiers qui a dû être acquitté sur le produit desdits biens ; en conséquence, les membres desdits établissements seront tenus de faire, chacun individuellement, leur déclaration personnelle, à raison du traitement qui leur a élé accordé, à compter du 1er janvier dernier, et de payer leur contribution patriotique relativement à ce traitement pour les deux tiers seulement ; savoir : l’un d’ici au 1er avril 1791, et l’autre du 1er avril 1791 au 1er avril 1792, conformément à l’article 11 du décret du 6 octobre 1789. Art. 2. « Les offres faites par les communautés d’habitants collectivement, soit par délibération ou autrement, pour tenir lieu de la contribution patriotique des habitants desdites communautés, et des déclarations faites par plusieurs particuliers réunis, seront regardées comme non-ave-nues; chaque habitant ayant au-dessus de 400 livres de revenu net, sera tenu de faire sa déclaration, conformément aux articles 1 et 2 du décret du 6 octobre 1789 ; et faute de ce faire dans la quinzaine de la publication du présent décret, ils seront taxés d’office, conformément à l’article 6 du décret du 27 mars dernier. Pourront néanmoins les habitants qui n’ont pas au-dessus de 400 livres de rente, et les ouvriers et journaliers sans propriétés, exceptés par l’article 14 du décret du 6 octobre 1789, faire des offres libres et volontaires, et se faire inscrire sur le rôle des contribuants pour telle somme qu’il leur plaira de désigner, conformément audit article. Art. 3. « Toutes les déclarations contenant offres de capitaux de rentes , ou autres objets qui ne font point partie des valeurs déclarées admissibles dans le payement de la contribution patriotique, seront aussi regardées comme non-avenues, et les contribuables tenus d’en faire de nouvelles, ou taxés d’office, ainsi qu’il est prescrit par l’article précédent. Art. 4. « Les corps municipaux et les directoires de district se conformeront, au surplus, à ce qui est prescrit par les cinq premiers articles du décret du 8 août 1790. Art. 5. « Les directoires de département statueront sur toutes les demandes en réduction et autres relatives aux déclarations des contribuables, 22 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [âo octobre 1790.1 après avoir pris l’avis des directoires de district; et les rédactions qui seront prononcées, seront imputées sur les deux derniers termes, conformément à l’article 2 du décret du 27 mars dernier. Art. 6. « Les directoires des départements seront tenus d’énoncer, dans leurs ordonnances, les motifs qui auront déterminé les réductions qu’ils auront prononcées ; et dans le cas où ils seraient arrêtés par quelques difficultés, ils en référeront au commissaire du roi, chargé du département de la caisse de l’extraordinaire, auquel ils enverront, chaque mois, un étal exact et certifié d’eux, tant des réductions qui auront été prononcées, que du montant des payements faits pendant ledit mois, et des sommes qui restent dues; ils auront soin d’énoncer, dans cet état, le nom des districts et des municipalités dont dépendent les contribuables qui auront obtenu des modérations, et les motifs qui y auront donné lieu. Art. 7. De ces différents états particuliers , il en sera formé un général, qui sera mis, chaque mois, sous les yeux de l’Assemblée nationale, à l’effet de lui faire connaître le montant des déclarations par département, celui des payements faits dans chacun d’iceux, le retard ou lès progrès du recouvrement, et le résultat des mesures prises pour maintenir l’ordre et l’exactitude dans la rentrée de ce secours extraordinaire et patriotique. « M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité militaire sur les congés donnés dans l'armée. M. de Rostalng, président du comité militaire . Je ne m’explique pas comment ce rapport se trouve à l’ordre du jour, car nous n’avons eu encore aucun des états nécessaires pour y travailler. M. Duboig-Crancé. Le comité militaire n’est point assez nombreux. Plusieurs membres ne s’y rendent pas; M. Alexandre de Lameth, dont le talent est connu, vient de donner sa démission parce qu’il a été nouvellement élu à celui de révision. Je demande qu’il soit adjoint six nouveaux membres au comité militaire. M. de Rosîaing. C’est moins le nombre que les absences fréquentes qui ralentissent les travaux du comité militaire; je ne m’oppose cependant pas qu’il lui soit adjoint des membres. M. d’André. L’absence de M. Alexandre de Lame tli ne me paraît pas un motif suffisant pour nommer six membres nouveaux; la monnaie en serait trop chère. M. de Noaillcs insiste p ur qu’il soit adjoint six membres nouveaux. o D'autres demandent qu’il n’en soit adjoint que trois. Cette dernière proposition est adoptée. M. Louis de Grieux, député du ci-devant bailliage de Rouen, demande et obtient un congé pour un mois, auquel ü donne, pour cause, des raisons d’affaires et de santé. M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur la haute cour nationale et le tribunal de cassation. M. Le Chapelier, rapporteur. Le comité cle Constitution doit vous exposer les principes qui l’ont dirigé dans son travail. Il a pensé d’abord qu’étant nécessaire que tous les fonctionnaires publics fussent surveillés par chaque citoyen en particulier, il fallait cependant, pour éviter les dangers des accusations téméraires, conférer le droit de les intenter aux seuls et légitimes représentants du peuple. La haute cour nationale sera composée d’un haut jury et de cinq grands juges pris dans le tribunal de cassation. A l’égard de ce dernier tribunal, le comité a pensé qu’il devait être divisé en plusieurs sections, d’abord pour éviter le danger de l’esprit de corps, en second lieu pour exciter l’émulation entre les juges. Il a pensé ensuite que la cassation des jugements eu contravention à la loi n’était pas un droit du pouvoir exécutif, auquel appartenait seulement celui de réprimande envers les juges, mais à un tribunal de cassation qui, placé entre les tribunaux particuliers et la loi, serait chargé d’en surveiller constamment l’exécution. Ce droit de surveillance doit être conféré par le Corps législatif, parce qu’après le pouvoir de faire la loi venait naturellement celui d’en surveiller l’observation, de telle manière que, si cela était possible, il serait dans les véritables principes que les jugements contraires à la loi fussent cassés par des décrets. C’est donc au Corps législatif à faire le choix des trente membres qui devront composer le tribunal de cassation, sur les quatre-vingt-trois qui seraient élus par les départements. Avant que de discuter, article par article, le projet de décret que je vais vous soumettre, je demande qu’il soit permis de faire sur l’ensemble du plan des observations générales. Voici le projet de décret du comité ; « Art. 1er. La haute cour nationale sera composée d’un haut jury et de cinq grands juges qui dirigeront l’instruction et qui appliqueront la loi après la décision du haut jury sur le fait. « Art. 2. Lors des élections pour le renouvellement d’une législature, les électeurs de chaque département, après avoir nommé les représentants au Corps législatif, éliront au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, un citoyen ayant les qualités nécessaires pour être député au Corps législatif, lequel demeurera inscrit sur le tableau du haut jury pendant tout le cours de cette législature. « Art. 3. Chaque nouvelle législature, après avoir vérifié les pouvoirs de ses membres, dressera la liste des jurés élus par les départements du royaume, et elle la fera publier. « Art. 4. La haute cour nationale connaîtra de tous les crimes et délits dont le Corps législatif jugera nécessaire de se rendre l’accusateur. Nulle autre affaire ne sera portée à la haute cour nationale. « Art. 5. La haute cour nationale ne se formera que quand le Corps législatif aura porté un décret d’accusation. « Art. 6. Elle se réunira à une distance de quinze lieues au moins du lieu où la législature tiendra ses séances. Le Corps législatif indiquera