246 [États gên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage fie Dourdan.] J. André Blanc, procureur de Saint-Martin-des-Champs. Jouan, curé de Saint-Ville. D.-M. Corel, dit F. Benoit, chapelain de la communauté. L’abbé Bêchant. Legueult, vicaire. Lambert, prieur de Saint-Pierre, curé de Corbreuse. Cier-geur, vicaire de Breuillet. Lhomme, curé de Serin aise. Piebourg, vicaire de Saint-Cheron. Ravary, curé de Courson. Goislard, secrétaire. Pour copie conforme à l’original, Goislard, secrétaire. CAHIER De la noblesse du bailliage de Dourdan , remis à M. le baron de Gauville , baron de la Forest-le-Roy , député ; En cas d’empêchement , M. le prince de Broglie-Revel, grand bailli d’épée, député suppléant (1 ). CONSTITUTION. Les citoyens composant l’ordre de la noblesse du bailliage de Dourdan pensent qu’aussitôt que les Etats généraux seront réunis et que l’assemblée sera constituée, il doit être voté une adresse au Roi pour le remercier du grand acte de justice qu’il vient d’accorder à la nation, en lui restituant ses droits, et pour lui jurer, au nom de tous les Français, une reconnaissance et un amour sans bornes, une soumission et une fidélité inviolables pour sa personne sacrée, pour son autorité légitime et pour son auguste maison royale : le premier usage qu’ils voudraient faire de cette liberté serait sans doute de lui faire un nouvel hommage de leur sang et de leur fortune ; mais ils veulent plus, ils veulent contribuer de tout leur pouvoir au bonheur particulier de Sa Majesté, ainsi qu’au bonheur général de ses peuples, en travaillant de concert avec elle à reprendre en sous-œuvre l’édifice ébranlé de la constitution française, en rendant ses fidèles communes plus heureuses, par une juste répartition des impôts nécessaires à l’Etat, en l’affranchissant elle-même des peines et des inquiétudes qu’entraînent nécessairement à sa suite une législation immense et absolue; enfin, en ne laissant à son cœur que des grâces à faire et des bienfaits à répandre sur la nation libre qu’elle gouverne ; c’est ainsi que les sujets de tous les ordres, environnant le monarque de leur liberté, de leur bonheur et de leur dévouement sans bornes, le rendront, s’il se peut, encore plus aimé dans son empire, et certainement plus respectable à l’étranger. En conséquence, les citoyens nobles du bailliage de Dourdan demandent : Que le pouvoir législatif réside collectivement entre les mains du Roi et celles de la nation réunie. Qu’il soit établi une formule, tant pour la publication que pour la formation de la loi , et qu’elle exprime le droit de la nation en meme temps que celui du Roi, par ces mots ou autres semblables : « Les Etats libres et généraux de « France déclarent que la volonté générale est ..... « En conséquence, lesdits Etats supplient très-« respectueusement Sa Majesté de vouloir sanc-« tionner lesdits articles par l’adhésion de la vo-« lonté royale ..... Nous, Roi de France , sur la « demande qui nous a été faite par les Etats « généraux assemblés à..,., avons publié et pu-« blions ..... ordonné et ordonnons ..... Si mandons (1) Noos poblions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. « à tous ceux qu’il appartiendra qu’ils aient à y « tenir la main, et à taire exécuter tous les arti-« clés ci-dessus énoncés selon leur forme et te-« neur : car tel est le résultat de la volonté « nationale qui a reçu le sceau de notre auto-« RITE ROYALE. » Les lois constitutionnelles consistant à assurer à tous et chacun en particulier sa liberté , sa fortune, son état et sa propriété, la noblesse demande : Que tout ordre arbitraire et attentatoire à la liberté des citoyens soit entièrement aboli ; Que la liberté individuelle soit assurée et garantie, de manière que tout citoyen arrêté soit déposé dans les prisons des tribunaux qui doivent connaître de son délit dans le délai de vingt-quatre heures, à compter du moment où il aura été arrêté ; qu’à l’instant de sa détention, il lui soit permis de choisir un conseil ou un défenseur. L’on comprendra sous le titre de liberté le droit d’aller, venir, de vivre et demeurer partout où il plaît, dans l’intérieur et hors du royaume, sans qu’il soit besoin d’aucune permission, s’en rapportant aux Etats généraux pour déterminer les cas où il serait nécessaire de restreindre cette liberté, relativement à la sortie du royaume. Que la liberté de la presse soit acccordée, sauf à l’auteur et à l’imprimeur à être responsables de l’ouvrage ; et les Etats généraux détermineront les restrictions les plus fortes pour empêcher que cette liberté ne dégénère en licence. Demande également la noblesse du bailliage de Dourdan, d’après le vœu formel de Sa Majesté, qu’il ne soit établi aucun impôt et fait aucun emprunt sans le concours de la puissance législative. Qu’il ne puisse être fait, par l’administrateur des finances, aucune anticipation ni assignation que sur les revenus de l’année, sans encourir la peine de lèse-patrie; et les prêteurs déchus de toute réclamation, Que tout particulier convaincu d’avoir perçu une somme quelconque au-dessus de celle fixée par la loi, soit déclaré concussionnaire, et jugé comme tel, Qu’aucun citoyen ne puisse être privé de son rang, de son emploi, de sa charge, que d’après un jugement légal. Que les propriétés soient inviolables et sacrées, quelle que soit la personne qui en jouisse, entendant par propriété ce que chacun a possédé sur la foi publique et sur l’assertion de la loi ; que nul ne puisse en être privé que pour l’intérêt public, et qu’il en soit alors dédommagé sans délai et au plus haut prix possible. Enfin, que les ministres soient à l'avenir responsables et comptables aux Etats généraux. Mais s’il est de la grandeur du monarque français de partager avec des sujets libres le pouvoir législatif, il est en même temps juste et nécessaire qu’il soit revêtu de toute la puissance exécutrice, et que sa personne soit à jamais sacrée. Il doit avoir à ses ordres les troupes de terre et de mer, nommer les emplois militaires, les généraux , les ministres; faire la paix ou la guerre, faire des traités d’alliance ou de commerce avec les puissances étrangères ; convoquer, proroger et dissoudre les Etats généraux, sous la condition expresse, en cas de dissolution, de faire une nouvelle convocation sur-le-champ dans la forme et le nombre qui sera consenti par la nation assemblée. Enfin, le Roi doit conserver seul ce droit si 247 fÉtatsgén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dourdan.] doux, si consolant, si digne d’un grand monarque : ce droit de répandre des bienfaits, d’encourager à la vertu par des dignités et des marques distinctives, et surtout le droit de faire grâce. Le vœu de l’ordre de la noblesse est encore que, dans les Etats généraux, la distinction des trois ordres soit consolidée et regardée comme inhérente à la constitution de la monarchie française ; et que l’on n’y opine que par ordre. Que dans le cas cependant où l’opinion par ordre serait absolument rejetée par les Etats généraux, et lorsque le député du bailliage de Dourdan aura vu qu’une résistance ultérieure à l’opinion par tête deviendrait inutile, qu’il demande alors que cette opinion par tête se prenne dans les chambres séparées de chaque ordre, et non dans l’assemblée des trois ordres réunis. Que l’opinion par tête ne puisse jamais avoir lieu, lorsqu’il s’agira de délibérer sur un objet qui intéresserait particulièrement un seul des trois ordres. Que l’opposition d’un seul ordre ne puisse arrêter les projets formés par les deux autres et acquérir le veto que par les deux tiers des voix au moins. Que les Etats généraux soient périodiques; qu’ils déterminent l’époque de leur retour, la forme de leur convocation et celle de leur composition : qu’ils ne consentent jamais l’impôt que jusqu’à leur prochaine assemblée ; et que s’ils n’étaient pas convoqués par le Roi à l’époque fixée, tous les impôts cessassent de droit et à l’instant dans toute l’étendue du royaume. Que les Etats généraux ne puissent s’occuper d’aucune délibération jusqu’à ce qu’il ait été passé entre eux et le roi un acte déclaratoire de la constitution et des droits ci-dessus mentionnés, pour être dorénavant la loi fondamentale du royaume. Qu’en cas de changement de règne ou de régence les Etats généraux soient convoqués dans le délai de deux mois par le Roi, ou en son nom par une commission du grand sceau, qui sera expédiée par le chancelier de France. Qu’il ne soit point laissé de commission intermédiaire dans l’intervalle des Etats généraux. Que les pouvoirs des députés soient limités au terme de deux ans, à dater de l’ouverture des rochains Etats généraux, et que la personne des éputés soit inviolable pendant la tenue des Etats. Que l’usage des procurations données aux députés des bailliages ayant les plus grands inconvénients , les Etats soient priés de les supprimer ou d’y apporter les restrictions qu’ils jugeraient convenables. Que dans toutes les provinces du royaume il soit établi des administrations provinciales dont la forme et le pouvoir soient déterminés par les Etats généraux. Enfin, pour rendre plus imposantes ces lois des Français, qu’il soit rédigé une formule uniforme et invariable du serment que les rois doivent prêter à leur sacre : par ce serment, ils jureront en présence des Etats généraux d’observer l’acte déclaratoire dont un double sera déposé dans le trésor de l’église de Saint-Remi de Reims , et leur sera présenté avec autant d’appareil que la Sainte-Ampoule. Par ce serment le monarque sera formellement engagé à protéger la religion chrétienne , catholique , apostolique et romaine , à employer également tout son pouvoir et tous ses moyens pour la maintenir dans toute sa pureté, enfin par ce serment la constitution du royaume doit être entièrement garantie. ADMINISTRATION. Sur cet objet important les demandes de la noblesse sont : L’administration générale des provinces confiée aux administrations provinciales, et par conséquent la suppression des intendants. La libre élection des officiers municipaux rendue aux villes. La suppression des municipalités des paroisses de campagne, et la réunion aesdites paroisses au chef-lieu du district, chaque paroisse conservant le droit d’y envoyer deux représentants, qui, conjointement avec "le curé et le seigneur ea personne, ou par procureur, se rendraient à l’assemblée au jour indiqué. L’établissement de greniers publics dans les paroisses sous la direction des administrations provinciales, auxquelles administrations il sera fait rapport tous les ans de la quantité de grains renfermés dans les greniers publics et de la somme des grains excédante, afin que, pour le compte qu’elles seront tenues d’en rendre au gouvernement, celui-ci puisse leur en prescrire l’emploi. Qu’il soit pourvu à une augmentation de revenu pour les curés, vicaires et autres ecclésiastiques qui n’ont pas de quoi vivre, par des rentes prélevées sur la totalité des bénéfices. Qu’il soit établi dans toutes les paroisses des bureaux de charité pour le soulagement des vieillards et infirmes des deux sexes, des femmes en couches et des enfants indigents et en bas âge. Qu’il soit également établi dans toutes les provinces des ateliers publics de charité surveillés par les administrations provinciales; que le prix des journées d’ouvrier y soit fixé à un cinquième au-dessous du prix ordinaire des journées ; qu’il sera arrêté chaque année après la récolte par l’administration de la province, et en raison delà valeur des denrées de première nécessité. Que lesdits ateliers soient employés à la construction des grands chemins, à celle des chemins de communication, à leur entretien et à tous les ouvrages de ce genre, sous l’inspection et conduite des ingénieurs des ponts et chaussées. Que lesdits ingénieurs rendent compte aux administrations provinciales, non-seulement de leurs opérations et gestions, mais encore de l’emploi et de la conduite desdits ouvriers attachés aux ateliers publics. Que les produits des loteries soient appliqués au soutien des ateliers et des bureaux de charité. Que lesdits ateliers publics de charité étant établis dans les provinces, ils puissent remplacer les corvées, et qu’elles soient en conséquence supprimées. AGRICULTURE. La noblesse du bailliage de Dourdan, intimement convaincue de la nécessité de protéger l’agriculture, demande : Qu’on s’occupe des moyens défaire disparaître, autant qu’il est possible, les anciennes traces du régime féodal, en respectant toutefois le droit sacré de la propriété. Que le ehampart en nature, de tous les droits seigneuriaux le plus contraire aux progrès de l’agriculture et à la liberté du cultivateur, puisse être racheté ou échangé, sansporter atteinte a la propriété, et sans donner ouverture aux droits royaux et seigneuriaux. Dans la supposition, par exemple, ouil seraitperçu au douzième, qu’il soit permis alors de s’en rédimer de gré à gré, et avec le consentement du seigneur suzerain, soit en abandon- m (États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dourdan,] liant le tiers de sa propriété, pour en affranchir les deux autres tiers, soit en payant, argent comptant, la valeur de ce même tiers, d’après l’estimation qui lui en sera faite, à dire d’experts. Que les dîmes, également nuisibles aux progrès de l’agriculture et à la considération due aux curés, qui sont souvent obligés d’avoir des disputes d’intérêts avec des personnes auxquelles ils doivent prêcher le désintéressement, puissent être échangées, d’après une convention faite de gré à gré entre le décimateur et la communauté entière qui serait grevée de la dîme. Qu’il soit libre à la totalité des contribuables d’une même communauté, et non à un particulier isolé, de se racheter des corvées particulières et des banalités, au denier 40 du revenu réel ou fictif, à dire d’experts. Que tous les fermiers qui réunissent sous la même régie une grande quantité de terres, au détriment de l’agriculture et des petits cultivateurs, supportent la majeure partie de l’impôt personnel, dont lesdits cultivateurs peu riches seront soulagés. Que le droit de franc-fief, qui gêne la circulation des fonds de terre, et peut humilier le citoyen qui n’est pas né noble, soit aboli. Que les administrations provinciales regardent comme un de leurs premiers devoirs de s’occuper des moyens de découvrir cette noblesse très-pauvre, qui ne quitte les armes que pour venir labourer son champ, afin de pouvoir la secourir d’une manière digne d’elle et du sacrifice qu’elle fait, malgré les besoins de ses privilèges pécuniaires, en engageant le gouvernement à faire passer annuellement, pour cet objet, une somme déterminée. MORALE. Que tout citoyen ne puisse occuper les emplois civils et militaires avant l’âge de vingt ans révolus , le temps de la vie, jusqu’à cet âge, devant être consacré à l’éducation. Que la religion soit toujours la base de l’éducation scolastique et de l’éducation morale. Qu’il y ait dans les villes des écoles publiques, présidées par des citoyens d’un mérite personnel et distingué, et dont ies lumières soient reconnues ; le seul objet qu’on doit s’y proposer d’y enseigner sont: 1° Les principes du droit naturel, qui éclairent sur les droits et les devoirs de l’homme ; 2° Les principes du droit civil, qui éclairent sur les droits et les devoirs du citoyen; 3° Les principes du droit public, qui éclairent sur les droits et les devoirs de la nation. Qu’on ne soit reçu dans les écoles qu’à dater de l’âge de quinze ans. Que l’éducation scolastique devant préparer à l’éducation morale, les professeurs gouvernant en chef les écoles scolastiques, soient tenus de rendre compte de leur conduite et de leurs élèves aux professeurs gouvernant en chef les écoles morales, et reçoivent leurs documents sur cet objet essentiel. Qu’il y ait, dans les paroisses de campagne, des vicaires ou des religieux desservants, pour aider les curés dans� les fonctions de leur ministère, augmenter les moyens d’assister au service divin, et pour surveiller et conduire les écoles de la jeunesse, sans aucun frais, en faveur de la classe indigente, et cela au moyen des pensions qui leur seraient fixées sur les bénéfices. Afin qu’aucun citoyen ne soit perdu pour la patrie, que les ordres religieux soient partagés en deux classes : l’un destinée à l’éducation de la jeunesse, et l’autre au soin de visiter les malades, pour leur administrer les secours spirituels et temporels. Que, jusqu’à l’âge de vingt ans, les pères et mères aient sur leurs enfants une autorité absolue, et, à leur défaut, leur tuteur naturel ; que, dans le cas où les pères et mères ou tuteurs auraient besoin du secours de la loi contre leurs enfants ou pupilles, il soit, pour éviter les abus d’autorité, nommé un tuteur ad hoc, lequel, de concert avec lesdits pères, mères et tuteurs naturels, s’adresseront aux tribunaux de justice, dans lesquels il y aurait toujours des audiences à huis clos, pour recevoir les plaintes portées en pareil cas. COMMERCE. Que tous les privilèges exclusifs accordés à des particuliers ou à des compagnies, en quelque espèce qu’ils soient, étant attentatoires à la liberté générale, ne puissent jamais être renouvelés, et qu’il n’en soit point accordé de nouveaux. Que ies manufactures d’utilité première soient encouragées et multipliées, de préférence à celles qui n’ont pour objet que le soutien du luxe, et que les premières soient déchargées d’une partie de l’impôt, qui serait reporté sur les secondes. Que la multiplicité des douanes et des barrières, qui gênent le commerce intérieur du royaume, soient reculées aux frontières. Que la trop grande population des villes, qui ne peut avoir lieu que par le dépeuplement pernicieux des campagnes, continue d’être restreinte par la perception des droits d’entrée aux portes des grandes villes. JUSTICE. Que la vénalité des charges soit généralement abolie, et que les Etats généraux avisent aux moyens les plus sages de rembourser les propriétaires des offices, s’occupant en même temps de remplacer par la voie de l’élection les offices vacants. Que la trop grande étendue des ressorts de quelques cours souveraines soit également restreinte; que le nombre des offices y soit diminué, qu’il soit créé de nouvelles cours partout où elles seront nécessaires; qu’il soit fait, de tous ces ressorts respectifs, une distribution plus favorable aux justiciables ; que la fixation de chacun de ces ressorts soit pareillement arrêtée, et que le justiciable ne subisse jamais plus de trois degrés de juridiction, y compris celui des justices seigneuriales. Que ces justices subalternes, répandues dans les campagnes, et faisant partie de la propriété des seigneurs, soient dirigées vers le bien public; que l’on s’occupe de rendre leur composition plus respectable et leur subordination plus régulière; elles appartiennent aux citoyens de tous les ordres et peuvent éclairer de plus près les vices de la société. Que les cours souveraines soient composées de membres choisis indistinctement dans tous les ordres. Ce qui importe le plus dans un magistrat, est qu’il soit intègre et instruit. Que les tribunaux supérieurs, chargés de conserver le dépôt des lois, ne puissent les soumettre à aucun examen, ni s’écarter d’aucunes de leurs dispositions. Qu’aucun procureur ne puisse se charger de la défense d’une cause, sans avoir préalablement l’aveu d’un des avocats consultants qui seraient [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [Bailliage de Donrdan.] 249 désignés à cet effetpar les différents tribunaux, à peine contre ledit procureur contrevenant de perdre son état. Que toutes commissions, évocations, ensemble les lettres de surséance et les droits de commit - timus soient supprimés; et que ceux qui auraient signé ou exécuté des ordres arbitraires, quand bien même ils s’autoriseraient d’ordres évidemment surpris à Sa Majesté, soient poursuivis par les tribunaux, et condamnés à des réparations exemplaires. Que la procédure criminelle soit publique, qu’elle s’instruise par le concours des juges ordinaires de l’accusé, et de douze de ses pairs assermentés, de manière que ces derniers prononcent uniquement et exclusivement sur le fait, et que les cours de justice n’aient plus à prononcer que sur le droit, et qu'à appliquer la peine, textuellement articulée par la loi, sur le délit, textuellement défini par cette même loi. Que l’accusé ait constamment le secours d’un conseil, et que toutes les preuves justificatives soient admises depuis le commencement jusqu’à la fin de la procédure. Que le fait ou les faits dont l’accusé sera chargé soient positivement articulés et définis dans la plainte qui fera la base du procès; qu’ils y soient exprimés, et que nul autre ne puisse l’être dans la sentence de condamnation. Que les pairs assermentés prononcent, en portant la mam sur l’Evangile, par ces mots : coupable , non coupable; qu’ils se retirent ensuite, et que les cours de justice prononcent l’absolution ou la peine. Que l’unanimité entière des pairs assermentés soit nécessaire pour opérer la conviction qui doit soumettre un accusé à la peine de mort. Que les mêmes délits soient punis par le même enre de supplice, quel que soit le rang et l’état u coupable. Que la peine de mort soit infiniment plus rare; qu’elle ne soit exécutée que d’une seule manière, la moins douloureuse ; et que tous ces supplices, stérilement barbares, qui répugnent aux mœurs d’une nation douce, et qui offensent la religion autant que l’humanité, en dévouant à la rage les derniers moments du condamné, soient à jamais proscrits. Que tout juge qui, après un arrêt de condamnation porté, oserait étendre la peine arbitrairement et faire subir à l’accusé un genre de supplice et d’opprobre auquel l’arrêt ne l’aurait pas condamné, soit déclaré coupable de lèse-humanité , dégradé, déchu de son emploi, et incapable d’en exercer aucun à l’avenir. Que les Etats généraux puissent seuls connaître du crime de forfaiture des cours, et que l’on puisse se pourvoir par-devant eux contre l’injustice de ces mêmes cours. Que tous les tribunaux d’exception, autres que ceux dénommés ci-dessus, soient détruits, en avisant aux meilleurs moyens d’en dédommager les titulaires. POLICE. Que les capitaineries, qui sont une infraction manifeste des droits de propriété, soient généralement détruites ; mais qu’il soit fait hommage au Roi de l’étendue de chasse nécessaire à ses plaisirs, en dédommageant les propriétaires qui souffriraient de ce régime. Que les droits de chasse ordinaires soient également conservés comme propriété ; mais qu’il soit fait estimation, à dire d’experts, des dégâts causés par la trop grande quantité de gibier, et que les dédommagements puissent être exigés à la rigueur. Qu’il soit pourvu aux inconvénients qui résultent de la multiplicité des pigeons, en remettant en vigueur les règlements faits à cet égard. Que les dépôts de mendicité, tout à la fois coûteux, inutiles et destructeurs, soient détruits et remplacés par des travaux publics, qui puissent offrir des ressources à la misère, en les faisant en même temps servir à l’utilité publique, et que les vagabonds et gens sans aveu soient employés aux travaux réglés par les administrations provinciales, auxquelles ces sages mesures doivent être confiées. Que les Etats généraux qui se sont occupés plusieurs fois, mais toujours inutilement, de l’uniformité des poids et mesures pour tout le royaume, s’attachent à établir ce point intéressant pour la facilité et l’activité du commerce. Que les règlements faits pour le maintien de la religion et des mœurs soient rétablis dans toute leur vigueur; qu’il en soit fait de nouveaux pour opérer s’il se peut leur restauration si désirable. Que les magistrats chargés de l’inspection des prisons soient tenus d’y faire de fréquentes visites, de veiller à la salubrité de l’air, à la propreté, à la santé des prisonniers, de leur proposer et de leur fournir même des livres de morale. [FINANCES. La noblesse regarde comme infiniment utile et même nécessaire que la première déclaration des Etats généraux soit, que la nation ayant le droit de consentir les impôts, et n’en existant aucuns qui ne soient d’origine ou d’extention illégale, les Etats généraux les déclarent tous supprimés de droit; et cependant, à cause du temps nécessaire pour créer un ordre nouveau dans cette partie des affaires nationales, et aussi afin d’éviter les inconvénients qui résulteraient pour l’impôt futur d’une suppression absolue de tout rapport entre les contribuables et le fisc, les Etats généraux statuent provisoirement que tous les impôts actuels momentanément autorisés continueront à être payés, mais seulement pendant le cours de la présente tenue, voulant qu’il n’y ait point d’autres contributions que celles qui auront été établies par la présente assemblée avant la première séparation. Que les assemblées provinciales ne puissent jamais faire aucun emprunt, ni accorder aucuns subsides, quelque modique qu’ils fussent, et quand même ils ne devraient regarder qu’un seul village, les Etats généraux devant se réserver exclusivement le consentement de toute espèce d’imposition. Que les Etats généraux, après leur adresse de remercîment au Roi, après leur déclaration sur l’impôt, annoncent par une proclamation publiée sur-le-champ, ‘qu’aussitôt qu’ils auront établi la Constitution, ils reconnaîtront la dette royale, qui deviendrait dès l’instant la dette nationale, se réservant d’en vérifier l’étendue, et de pourvoir aux payements des intérêts, ainsi qu’au remboursement successif des capitaux ; en conséquence, que la reconnaissance de cette dette suive immédiatement la passation de l’acte constitutif. Que les sommes attribuées par la nation et jugées nécessaires à chaque département soienl fixées d’une manière invariable par les Etats généraux. Que les administrations provinciales élues par les provinces, et approuvées des Etats généraux, 2150 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Dourdan. soient chargées de surveiller la répartition et la perception de l’impôt décidé; que la levée en soit faite aux moindres frais possibles; et si , pour simplifier cette perception aujourd’hui très-onéreuse, il était nécessaire de faire des réformes considérables dans le département des finances, observez alors que l’élat et l’existence d’un grand nombre d’individus étant attachés sur la foi publique, il est de toute justice de laisser plutôt éteindre ces abus, que de s’attacher à les supprimer trop précipitamment. La noblesse pense aussi que c’est une précaution sage et très-importante de statuer que l’intitulé de tout mandement d’impôt, tarif de droits conservés ou établis, annonce en tête : « De par le Roi, impôts ou droits consentis par les Etats généraux jusqu'en ...... 17 ...... ». Elle croit aussi qu’il est infiniment utile que tous les Français aient sans cesse sous les yeux cette vérité fondamentale, que les impôts “ne peuvent être établis qu’avec le consentement de la nation. Que si la corvée ne peut être abolie et remplacée par les ateliers de charité, elle doit continuer d’être convertie en une prestation en argent et supportée indistinctement par tous les citoyens. Que la gabelle et les aides étant de toutes les impositions les plus vexatoires, ils doivent être convertis en d’autres genres d’impôts. Que le consentement des subsides doit être la dernière opération des Etat généraux. Elle supplie encore très-respectueusement Sa Majesté de faire rendre publique, par la voie de l’impressioù, la liste des dons, gratifications, pensions, offices, places accordées pendant chaque semestre, les noms des personnes qui les auront obtenus, les motifs qui les auront fait accorder, et tous les ans un compte également public de la recette et dépense de chaque département. Enfin, la noblesse déclare que, pour témoigner ses sentiments d’estime, d’équité naturelle et d’attachement pour ses concitoyens du tiers-état, elle veut supporter avec eux, en raison des biens et des possessions de tous les ordres, les impôts et contributions quelconques qui seront consentis par la nation, ne prétendant se réserver que les droits sacrés de la propriété, les prérogatives du rang, d’honneur et de dignité qui doivent lui appartenir suivant les principes constitutionnels de la monarchie française. CLERGÉ. Sa Majesté est encore suppliée d’ordonner que les évêques et bénéficiers quelconques résident dans leurs bénéfices. Que la pluralité des bénéfices soit proscrite, comme la pluralité des charges. Qu’il y ait des canonicats et des bénéfices affectés pour la retraite des curés qui auraient rempli dignement leur ministère pendant vingt ans. Que l’administration des sacrements soit gratuite, et que la dotation des curés, plus fortes dans les villes que dans les campagnes, soit fixée pour ces derniers de 15 à 1,800 livres, et le traitement des vicaires de 700 livres à 1,000 livres. Sur la question qui a été présentée par un membre de la noblesse, et sur laquelle il a insisté avec le plus grand zèle, à savoir : Si , dans la supposition où l’on voudrait porter et discuter aux Etats généraux des matières sde religion , ils seraient tribunal compétent pour donner une décision, et si l’autorité des Etats s’étend jusqu’au spirituel, ou si elle est bornée au temporel, La chambre a déclaré qu'elle croyait les Etats généraux compétents pour la discipline, et non pour le dogme ; et sur la réquisition instante du membre de la noblesse qui avait proposé la question, a été arrêté qu’elle serait portée dans son cahier. NOBLESSE. La noblesse du bailliage de Dourdan déclare qu’elle ne reconnaît qu’un seul ordre de noblesse jouissant des mêmes droits. Elle demande que les charges purement vénales sans fonctions n’anoblissent plus. Que la noblesse soit le prix des seuls services distingués en tout genre. Que le commerce ni aucun emploi civil ne déroge plus, pourvu que cet emploi ne soit point servile. Fait en l’assemblée de la noblesse de Dourdan, arrêté et signé par les membres alors présents, le 29 mars 1789, ainsi signés : Le marquis de Saint-Germain d’Apchon; Pecou, marquis de Cherville; le comte Detilly ; le baron de Gauville ; Lienard du Colombier ; Defroys du Roure ; Pajot de Juvisi, sécrétaire de la noblesse ; Pajot fils, secrétaire adjoint de l’ordre de la noblesse; Broglie, prince de Revel, grand bailli d’épée du bailliage de Dourdan, président l’ordre de la noblesse. CAHIER Du tiers-état du bailliage de Dourdan , remis à MM. Lebrun et Buffy , députés aux Etats généraux (1). L’ordre du tiers-état de la ville, bailliage et comté de Dourdan, pénétré de la reconnaissance qu’excitent en lui les bontés paternelles du Roi, qui daigne lui rendre ses anciens droits et son ancienne constitution, oublie, en ce moment, ses malheurs et son impuissance pour n’écouter que son premier sentiment et son premier devoir, celui de tout sacrifier à la gloire de la patrie et au service de Sa Majesté. Il la supplie d’agréer les doléances, plaintes et remontrances qu’elle lui a permis de porter aux pieds du trône, et de n’y voir que l’expression de son zèle et l’hommage de son obéissance. Son vœu est : Art. 1er. Que ses sujets du tiers-état, égaux à tous les autres citoyens par cette qualité, se présentent devant le père commun sans autre distinction qui les avilisse. Art. 2. Que tous les ordres, déjà réunis par le devoir comme par le vœu commun de contribuer également aux besoins de l’Etat, délibèrent aussi en commun sur ses besoins. Art. 3. Qu'aucun citoyen ne puisse perdre sa liberté qu’en vertu des lois *, qu’en conséquence personne ne puisse être arrêté en vertu d’ordres particuliers, ou que si des circonstances impérieuses nécessitent ces ordres, le prisonnier soit remis, dans un délai de quarante-huit heures au plus tard, entre les mains de la justice ordinaire. Art. 4. Qu’aucunes lettres, aucuns écrits interceptés à la poste, ne puissent motiver la détention d’aucuns citoyens, ni être produits en justice contre lui, si ce n’est dans le cas d’une conjura-ion ou entreprise contre l’Etat. Art. 5. Que les propriétés de tous les citoyens soient inviolables, et qu’on ne puisse en exiger le (1) Nous publions ca document d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat.