488 [États gén, 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] pour les remises et pépinières plantées dans les champs. Art. 8. Que les seigneurs ne puissent s’emparer des communes et s’approprier ou aliéner à des particuliers des terrains dont la communauté a toujours joui, et que ceux dont ils se seraient emparés soient restitués dans leur état naturel. Art. 9. Qu’il ne soit plus levé d’imposition pour les corvées, et qu’il n’en soit exigé aucune, si ce n’est pour l’avantage des paroisses qui les feraient. Art. 10. Que le tirage de la milice, si ruineuse pour toutes les paroisses, soit absolument aboli. Art. 11. Que toutes les impositions soient communes à tous, sans distinction de rang ni d’état, et sans exemptions ni privilèges quelconques. Art. 12. Que la taille et tout impôt sur l’industrie soient abolis, et convertis en un seul impôt sur les terres. Art. 13. Que toute sorte de voiturier puisse prendre et conduire des voyageurs sur la route, sans être inquiété ni poursuivi par qui que ce soit. Art. 14. Que l’on s’occupe très-promptement de la diminution du pain, dont la cherté excessive désole tous les pauvres. Que le prix du blé dans les temps les plus chers ne passe jamais celui de 24 livres, et que, pour prévenir la disette, il ne soit jamais permis d’exportation chez l’étranger, sauf les modifications des Etats généraux, dont on demande la tenue tous les trois ans. Art. 15. Que, pour mettre un frein à l’avidité des gros fermiers, il ne leur soit pas permis de faire valoir plus de 300 arpents de terre, s’ils ne sont attachés à leur ferme. Art. 16. Que la sanctification des dimanches et fêtes soit observée, que les cabarets soient fermés pendant les offices divins et après le soleil couché. Art. 17. Qu’il soit fait un sort honnête, fixe et assuré pour les curés et vicaires, de manière qu’ils ne puissent plus recevoir aucun droit pour l’administration des sacrements, sépulture, et suppression de dîme pour iceux. Dans les lieux où, comme à Domont, il existe des bénéfices simples qui possèdent des biens considérables, il serait juste et raisonnable que les curés et vicaires tirassent leur subsistance de ces biens-fonds convenablement partagés, et que le produit de leur dîme fût employé à l’entretien de l’église, du presbytère, des maisons et subsistance des maître et maîtresse d’école. Art. 18. Qu’on supprime tout curé primitif, comme opposé au bon ordre, au bien temporel et spirituel des paroisses ; qu’il n’y ait dans chaque église qu’un curé et qu’un autel. Art. 19. Qu’il soit fait un règlement pour la reconstruction des églises ; qu’on ne laisse jamais aucune paroisse sans temple, comme est celle de Domont depuis le mois de novembre 1779, et sans espoir de la voir encore reconstruire de longtemps si les Etats généraux ne veulent bien s’en occuper. Art. 20. Que toutes les justices seigneuriales soient abolies comme étant contraires aux droits des citoyens, et favorisant souvent l’impunité des crimes ; qu’il soit établi à leur place des justices royales à distance de trois ou quatre lieues. Art. 21. Que, dans tout le royaume, il n’y ait qu’un seul poids et une seule mesure. Telles sont les pétitions et doléances que la communauté de Domont, assemblée aujourd’hui 14 avril 1789, a l’honneur d’adresser aux Etats généraux, les suppliant de vouloir bien l’écouter et lui faire droit. Signé Decorde, syndic ; M.-J. Thiphaine; Ferret; Noël Maudieu ; Faubert ; Boursier ; Leblond; P. Papillon ; Richard ; Renault, greffier. CAHIER Des doléances de la paroisse de Drancy (1). Montesquieu a dit : « Les républiques finissent ar le luxe, les monarchies par la ! pauvreté. » uelle triste perspective ; mais en même temps quelle idée consolante, pour nous particulièrement qui habitons la campagne, de voir un Roi, père de son peuple, sacrifier ses intérêts personnels pour le bonheur de ses sujets; et un ministre, aussi bienfaisant qu’éclairé, dont le souffle créateur va revivifier la France, donner, à cet effet, des soins et un zèle qu’aucune circonstance ne peut diminuer ! Nous pourrions nous plaindre de beaucoup d’abus qui blessent tels droits et font le malheur des hommes ; ce détail serait trop long, peut-être même inutile ; demandons seulement la réforme et suppression de ceux relatifs à notre état de cultivateurs et d’habitants de la campagne. CLASSEMENT DES TERRES. L’agriculture étant la principale richesse de la France, il est de l’intérêt du gouvernement de lui accorder une protection particulière. Il ne peut donc trop favoriser ceux qui sacrifient leur temps et leurs facultés à cultiver les mauvaises terres. La paroisse de Drancy est dans ce cas. Son territoire n’est, pour la plus grande partie, qu’un sable aride et frais ; l’on y sème très-peu de blé, et les seigles et orges que l’on y fait indemnisent bien rarement les laboureurs de leurs avances. L’on ne peut concevoir comment M. l’intendant de Paris, dans le cadastre qu’il a fait des terres de sa généralité, divisées en vingt classes, a pu mettre la paroisse de Drancy dans la neuvième, lorsque réellement, n’étant qu’une terre très-médiocre, si même l’on n’ose dire mauvaise, elle ne devait être mise que dans la seizième ou dix-septième classe. D’ailleurs les prés, indistinctement, dans ce même cadastre, étant taxés deux tiers en sus des terres, il se trouve une infinité de pays où les prés, taxés à 60 et 80 livres l’arpent, ne valent réellement que 6 et 8 livres. Arrêté que le Roi sera supplié de vouloir bien rectifier les erreurs faites dans ce cadastre de M. l’intendant, afin de mettre les habitants de la paroisse de Drancy plus à portée de payer leurs impositions en leur accordant un soulagement qui leur est du. CAPITAINERIES. Le terroir de Drancy fait partie de la capitainerie de Vincennes, quoique à trois lieues de cette ville. M. le duc d’Orléans en est le capitaine. La manière noble et désintéressée dont ce prince s’est expliqué dans ses instructions sur les capitaineries, en consentant à leur suppression, nous engage à nous étendre un peu sur ce sujet. La suppression des capitaineries est un vœu général. L’on en distingue de deux sortes : 1° Les capitaineries des maisons royales, qui sont établies autour des maisons que le Roi habite ou peut habiter quand il veut; 2° Les capitaineries simples. (1) Nous publions ce cahier, d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. 489 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] C’est surtout contre ces dernières que le cri public s'élève. Le tort que fait à l’agriculture la quantité énorme de gibier de tout genre dont regorgent les capitaineries, est inappréciable sur l’étendue de 1,800,000 arpents de terre qui y sont enclavées, et les entraves que les ordonnances de ces mêmes capitaineries mettent à la culture des terres, achèvent la misère et la ruine du malheureux laboureur, que sa mauvaise étoile a fait naître et placé dans ce pays d’inquisition. Nous en citerons seulement quelques articles. Suivant les ordonnances des 25 juin 1624, 2 avril 1658 et 9 août 1666, il est défendu à tous propriétaires ou fermiers de faire enclore leurs terres de haies vives ou sèches, d’y faire aucuns fossés, rayons d’asperges ou fosses de vigne sans permission. L’ordonnance du 7 décembre 1660 défend ex-- pressément à tous propriétaires, vignerons ou autres, de laisser aucun échalas dans les vignes après la vendange, sous peine de confiscation et d’amende. Les ordonnances des 2 avril 1658, 6 mai 1665 et 9 août 1666, défendent à tous propriétaires ou fermiers qui auront semé des orges et scourgeons, de les couper ou faire couper en vert avant la Saint-Jean, sous prétexte même du besoin des chevaux ou autrement. Il leur est pareillement défendu d’aller dans leurs blés, seigles, orge, avoine, sainfoin, luzerne, vigne et légumes, cueillir et arracher des chardons ou herbes pendant la ponte des perdrix, sous peine d’amende, et d’y aller travailler depuis le 1er avril, qui est le temps desdites pontes des perdrix. Les ordonnances et règlements des 2 juillet 1666, 20 avril 1671, 18 mai 1673 et 7 janvier 1712, ordonnent à tous propriétaires ou fermiers de faire épiner leurs terres incontinent après la récolte de chaque année, à mesure qu’ils feront enlever leurs grains, bourgogne ou luzerne, d’y faire piquer au moins cinq épines par chaque arpent, même dans les avoines et orges, en attendant la récolte, y entretenir pendant toute l’année lesdites épines, à peine d’amende arbitraire et d’emprisonnement de leurs personnes en cas de désobéissance. D’autres arrêts de règlements des 7 août 1638, 12 mai 1640, 18 juin 1659, et une sentence du 2 janvier 1714, défendent à tous bergers ou vachers, de mener ou conduire leurs troupeaux et bestiaux en tel temps et saison que ce soit sur les terres où il y aura des vignes, groseilles, légumes, sainfoiu, bourgogne, luzerne, et autres héritages qui servent de retraite au gibier, sous peine de fouet et de 100 écus d’amende. Enfin, pour combler la mesure de cette longue suite de règlements destructeurs de l’agriculture, n’avons-nous pas vu, à la honte de notre siècle, le parlement de Paris rendre, le 18 août 1760, en faveur des seigneurs des fiefs, un arrêt en forme de règlement, qui prive les habitants de la campagne du droit sacré de la propriété, en les obligeant de souffrir les visites que les seigneurs voudront faire ou faire faire par leurs gardes-chasse, pour la conservation du gibier, dans les parcs, clos et jardins en censives ou rotures, permet auxdits seigneurs de chasser dans lesdits parcs, clos et jardins, quand bon leur semblera, et fait défense aux propriétaires desdits parcs, clos et jardins, sous les peines portées par les règlements, de s’y opposer? N’avons-nous pas vu de nos jours un prince solliciter un arrêt du parlement de Paris pour défendre aux laboureurs de faire faucher leurs grains, parce que sou gibier était trop à découvert dans les plaines, où le fer tranchant de la faux avait passé ? N’avons-nous pas vu ce même parlement rendre un arrêt de règlement qui défendait aux cultivateurs de se réunir pour faire des demandes en dommages et intérêts pour le tort que leur faisait la trop grande quantité de gibier, et leur enjoindre de ne faire leurs plaintes que chacun en droit soi? Nous ne nous permettons aucune réflexion sur des règlements aussi désastreux et si contraires à l’ordre, à la propriété et au bien public, règlements émanés d’une cour établie pour être le soutien et le protecteur du peuple. Arrêté que le Roi sera supplié de supprimer toutes les capitaineries dans lesquelles il ne chasse point, sauf à conserver de la manière la moins nuisible les plaisirs de Sa Majesté, toutefois en indemnisant ceux qui pourraient en souffrir. IMPOTS. C’est une portion des revenus que tous les citoyens doivent donner à l’Etat pour les besoins publics. Cette manière de contribuer aux charges de la société est légitime ; mais sa répartition est-elle juste? Ce ne fut que sous Charles VI que la taille par tête s’introduisit. Les guerres que Charles VII eut à soutenir lui donnèrent le moyen de perpétuer cet impôt; mais ce qu’il y a de plus malheureux, c’est qu’il existe encore avec tout l’arbitraire qui le rend destructeur, avec la même diversité de principes pour la répartition et tous les vices qui étaient inséparables d’un établissement fait à la hâte dans un temps de troubles et au milieu des désastres qui affligeaient la France et pour un secours urgent et momentané. Depuis ce temps, sous combien de dénominations différentes l’impôt s’est-il accru ? La taille réelle, la taille personnelle, la taille d’industrie, les vingtièmes, la capitation, les corvées, le logement des gens de guerre, la milice. L’on paye pour les haras, pour les canaux, les réparations des églises, des presbytères, etc. Si les habitants delà campagne étaient délivrés de ces impositions arbitraires, ils vivraient dans la même sécurité que les habitants des grandes villes. Beaucoup de propriétaires feraient valoir eux-mêmes leurs biens. On n’abandonnerait plus les champs; les richesses et la population s’y rétabliraient. Qu’on procure aux campagnes les mêmes avantages qu’aux villes ; bientôt elles se trouveront aussi peuplées en proportion que les villes ; on ne les abandonne que pour éviter les vexations auxquelles on y est exposé. Arrêté que l’impôt étant un objet indispensable, le Roi sera supplié de réunir en un seul, sous telle dénomination qu’il lui plaira, tous ceux dont la multitude et la diversité font gémir les habitants des campagnes, lequel une fois fixé sera invariable, et ne pourra, sous quelque prétexte que ce soit, être augmenté. PRIVILÉGIÉS. Si l’impôt est une charge juste et légitime de la société, personne n’en peut être affranchi, et toute immunité, toute exemption doivent être nulles et sont autant d’attentats à l’union sociale ; donc, destruction du progrès de ces exemptions. 490 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs. [ La chose publique la meilleure, dit Ànacharsis, est celle où tout étant égal entre les habitants, la prééminence se mesure à la vertu, et le rebut au vice. Celte prééminence est la seule qu’il convienne à la noblesse d’ètre jalouse. A Rome, personne n’était dispensé des tributs ; les terres même du prince y contribuaient. A Sparte, les rois, les magistrats, supportaient les charges publiques, en communauté avec tous les citoyens, et n’en étaient que plus respectés. Il en est de même à Denise. où les nobles et le doge même y sont sujets. Les obligations qu’avait anciennement la noblesse de mener des troupes à la guerre, de les nourrir, de les entretenir, ne subsistant plus, ce n’est point blesser leurs privilèges et leurs droits, que de leur demander à contribuer aux charges publiques comme les autres citoyens. Les prétentions du clergé seraient-elles mieux fondées? non, puisqu’il n’a pas même les avantages de la possession. Elles étaient méconnues avant 1711. En aucun temps antérieur, il n’a été dispensé des charges publiques ; il était même autrefois obligé de donner des citoyens à l’Etat. Si les ministres de l’ancien sacerdoce dont il réclame la parité ne contribuaient point aux charges, c’est qu’ils ne possédaient aucuns biens dans la société, et qu’ils ne vivaient que des aumônes qu’ils en recevaient sous le nom de dîme. Ceux du sacerdoce moderne voudraient-ils être réduits à la même condition ? Iis supportaient les impôts dans l’empire romain, et Constantin même ne les en dispensa point. En vain saint Grégoire de Aaziance dit à Julien, préposé pour régler les tributs de cette ville : « Que le clergé et les moines n’avaient rien « pour César et que tout était pour Dieu. » Julien ne les imposa pas moins. Autant en fît Clotaire 1er, malgré l’audace d’In-jurius, évêque de Tours, qui osa lui dire : « Si vous « pensez, Sire, ôter à Dieu ce qui est à lui, Dieu « vous ôtera votre couronne. » Clotaire les obligea de payer à l’Etat, chaque année, le tiers des revenus des biens ecclésiastiques ; et Pierre de Blois, quoiqu’il soutînt avec violence « que « les princes ne doivent exiger des évêques et du « clergé que des prières continuelles pour eux, « et que s’ils voulaient rendre l’Eglise tributaire, « quiconque est fils de l’Eglise doit s’y opposer, « et mourir plutôt que de le souffrir, » ne pût empêcher que ses confrères et lui ne fussent soumis à la dîme saladine. Les biens de mainmorte sont une portion considérable des formes de la société ; il ne dépend pas des possesseurs de les y soustraire; en passant dans leurs mains, ils n’ont pas changé de nature, ils ne sont point à eux, ils appartiennent aux pauvres, conséquemment à l’Etat. Si ce corps prétend l’épuiser sans cesse, sans équivalent et sans aucune utilité pour lui, s’il trouve qu’il n’est pas de sa dignité d’en faire partie, de contribuer à ses charges, dans la proportion des biens qu’il y possède, et dans la même forme que les autres, qu’il ne trompe pas le vœu de ceux qui l’ont fait dépositaire de ces biens, qu’il n’en réserve que ce qu’il faut pour vivre dans la modestie et dans la frugalité, qu’il restitue tout le reste aux pauvres, et qu’il leur soit distribué, non pas pour subsister dans la paresse et dans les vices qu’elle engendre, mais our en obtenir leur subsistance par le travail. ue de familles, à charge à l’Etat, lui deviendraient utiles, et lui rendraient le tribut que les autres lui refusent! Arrêté que le Roi sera supplié de supprimer toutes les immunités et exemptions aux charges publiques, particulièrement les privilèges pécuniaires, et d’ordonner la répartition égale de l’impôt sans distinction de personnes et de rangs. DIMES. La dîme est une certaine portion des fruits de la terre, et autres, que le possesseur d’un héritage pave au décimateur, c’est-à-dire à celui qui a droit de dîme. Tous les auteurs s’accordent à dire que, dans les six premiers siècles de l’Eglise, les dîmes furent inconnues ; jusqu’à la dispersion des apôtres, les fidèles mettaient tous leurs biens en commun ; lorsque cette communauté de biens eût cessé, ils faisaient des oblations volontaires, dont le clergé tirait encore toute sa subsistance au troisième siècle, comme on le voit dans saint Cyprien. La charité des fidèles s’étant refroidie, les pères de l’Eglise les exhortèrent à donner la dîme, suivant ce qui se pratiquait dans l’Ancien Testament ; mais cela n’était proposé que pour exemple et non comme un précepte. G’est ce que dit saint Augustin ; il parle de la dîme comme d’une aumône volontaire, et dit que le commandement de la payer ne regardait que les juifs. C’est le sentiment de saint Jean Chrysostome : Ubi décima es £, ubi etiam elelmosina. Saint Thomas tient même que les dîmes ne sont point dues de nécessité expresse, et que, par la coutume, le droit de les payer doit être proscrit. En voilà assez pour prouver que la dîme n’est pas de droit divin, mais bien de droit positif. Le concile de Trente en avait décidé autrement, mais on sait qu’il ne fut pas reçu en France. Dumoulin décide en termes formels que ce sont les princes séculiers qui ont pourvu par les dîmes à la subsistance des ministres de l’Eglise, et qu’ils sont libres de subvenir d’une autre manière à leurs besoins. En France, ce fut Charlemagne qui établit les dîmes ecclésiastiques ; elles parurent si accablantes pour le peuple, qu’il eut besoin de toute son autorité pour vaincre la résistance que la nation lui opposa. Il fallut le concours des lois civiles et ecclésiastiques pour y parvenir encore la nation ne donna-t-elle son consentement à leur établissement qu’à condition qu’elle pourrait les racheter, condition remarquable et qui pourrait devenir un titre précieux pour le soulagement du peuple De decimis quas dure po pulus nôn vult , nisi quolibet modo ab eo redimantur ab episcopis prohi-bendum est ne fiat. (Capitulaire de Louis le Débonnaire à Vorms, en 829, c. vu.) Les dîmes n’étant point de droit divin ne s’étendent pas indistinctement sur l’universalité des fruits; l’usage seul détermine ceux qui y sont ou n’y sont pas assujettis, et comme cet usage est le seul titre de l’Eglise, elle est obligée de s’y conformer, elle est obligée de rester dans les bornes qu’elle lui prescrit. De là viennent les variations continuelles qu’on remarque dans la perception des dîmes, de là l’extension que les décimateurs donnent au droit de dîme, en voulant la percevoir sur les luzernes, trèfles, sainfoins, colzas, etc., culture nouvelle qui n’avait jamais été assujettie à la dîme. De là enfin les difficultés que trouvent les juges pour asseoir leurs décisions. Arrêté que la nation n’ayant consenti à Téta*’ [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. blissement des dîmes qu’à condition qu’elle pourrait les racheter ; que les motifs qui ont donné lieu à l’établissement de cet impôt ne subsistant plus; que l’Eglise ayant des propriétés assez considérables, indépendamment des dîmes, pour subvenir à ses besoins, elles ne sont plus qu’une richesse ajoutée à une richesse, dont il faut décharger le peuple que cette richesse additionnelle appauvrit, le Roi sera supplié de permettre le remboursement des dîmes en argent, lequel sera versé dans le trésor royal, et dont le Roi leur assurera l'intérêt à 3 ou 3 1/2 p. 0/0. Et dans le cas où cette demande ne pourrait être accordée, de régler par une loi uniforme et constante les prétentions des décimateurs, afin d’arrêter les progrès d’une invasion qui deviendra générale en peu d’années, puisque, s’autorisant de l’exemple de leurs voisins, il a suffi de leur permettre de lever une fois et en un seul endroit ces dîmes, pour que de proche en proche tout le territoire de la France y fût assujetti. DROIT DE MINAGE. Le droit de minage appartient au Roi et aux seigneurs, sur les grains et denrées qui se vendent sur les halles et marchés, pour les indemniser des terrains qu’ils abandonnent aux laboureurs pour y exposer et vendre leurs grains, des mesures qu’ils leur fournissent à cet effet, des frais de construction et couverture de halles, pour les garantir des injures de l’air et pouvoir les laisser en sûreté lorsqu’ils n’ont point trouvé à les vendre, enfin des frais de police pour maintenir l’ordre dans les marchés. Rien de plus juste que ce droit quand tous ces objets se trouvent réunis ; mais combien existe-t-il de halles ou de marchés de cette nature ? Point ou presque aucuns. Voyez dans les environs de Paris, les marchés de Lagny, Tournan, Brie, Lisy, Montlhéry, Mon-tereau, Gonesse, Pont, Senlis, Melun et vingt autres pareils. Dans la plupart, les seigneurs ne fournissent qu’une place vague, étroite, d’un abord difficile, souvent mal pavée ; dans d’autres, ils ne fournissent rien, tel qu’à Pont, Senlis, Melun, où il n’y a ni halle ni marché, et où les grains se vendent dans des rues fort étroites. Il ne faut pas s’abuser sur la cause de la diminution considérable que l’on remarque depuis vingt ans dans la vente des grains sur les halles et marchés. On ne l’attribuera certainement point à la spéculation des laboureurs. Cette classe de citoyens, dont la vie et les mœurs tout aussi simples que le travail qui l’occupe toute l’année, n’a ni l’âme monopoleuse ni l’esprit de l’intérêt et de l’agiotage. Les droits seuls de minage, la manière dont les adjudicataires de ces droits les perçoivent, l’étude qu’ils mettent à les étendre, sont les seules et vraies causes de cette diminution. Si le droit de minage est une indemnité des frais et avances faits par les seigneurs, pourquoi a-t-il lieu dans les villes et villages ci-dessus désignés, où les seigneurs ne fournissent rien? De quel œil peut-on voir l’extension que donnent au droit de minage les adjudicataires de ce droit dans plusieurs villes et bourgs, en prétendant l’exercer dans les greniers des habitants, souvent même à deux lieues à la ronde, sous la dénomination de banlieue ? Arrêté que le Roi sera supplié de supprimer tout droit de minage dans des villes et villages [Paris hors les murs.] 491 dont les marchés se tiennent dans les rues ou dans les halles n’étant point couvertes. Le blé ne peut pas rester en sûreté et à l’abri des injures de l’air quand les laboureurs n’ont pas trouvé à le vendre. DROIT D’ÉTALONAGE. La juridiction et police sur l’étalonage des mesures à grains dans la ville, prévôté et vicomté de Paris s’exercent par MM. les prévôt des marchands et échevins de ladite ville. Un arrêt du 6aoùt 1763 maintient les jurés-mesureurs de sel dans le droit de visiter et étalonner les mesures de toute l’étendue de la vicomté de Paris, leur enjoint de demander chaque année au prévôt des marchands une commission à cet effet. Les jurés se transportent, il est vrai, dans les campagnes, mais uniquement pour voir si les mesures sont marquées à la lettre de l’année, et non, comme porte l’arrêt, pour les étalonner. Chaque laboureur est obligé d’envoyer tous les ans au bureau de la ville de Paris toutes les mesures pour y être marquées à la lettre de l’année. Pendant onze mois le bureau n’est ouvert qu’un jour de chaque semaine, et trois jours dans le mois de septembre seulement, ce qui occasionne le séjour des mesures à Paris, et oblige les laboureurs d’en avoir le double de ce qu’il leur faudrait. L’on prend au bureau 15 ou 18 sous pour la marque de chaque mesure, ce qui fait une somme assez considérable, vu la très-grande quantité qu’il y en a. Arrêté que le Roi sera supplié de rendre une ordonnance qui oblige les officiers-mesureurs de sel, lorsqu’ils feront leur tournée dans les campagnes, de marquer et étalonner eux-mêmes les mesures et de restreindre les 15 ou 18 sous que l’on paye pour chaque mesure au prix de 2 sous, qui, vu la très-grande quantité de mesures, indemnisera grandement ces officiers mesureurs de leur voyage, et leur y fera même trouver un bénéfice raisonnable. VENTE DU BLÉ AU POIDS. Suppression des mesures. Personne n’ignore qu’il y a autant de mesures différentes qu’il y a de villes, peut-être même de paroisses. Dans l’une le boisseau pèse 20 livres, dans l’autre 30 livres, dans celle-ci l’on mesure ras, dans celle-là le grain sur bord, plus loin comble. Les inconvénients de la vente à la mesure sont frappants. Elle est susceptible de fraude et occasionne très-souvent des difficultés entre le vendeur et l’acheteur. Il ne faut qu’une très-petite secousse à la mesure, ou la manière d’y verser le grain suffit pour faire une différence sensible. C’est une chose si averée que la vente à la mesure est susceptible de fraude, qu’à la halle de Paris, pour mettre fin aux contestations sans nombre qu’elle occasionnait tous les jours, dans la vente de la farine, l’on a été obligé d’en supprimer l’usage et d’y substituer celui du poids ; pourquoi la réforme faite dans la vente de la farine ne s’est-elle pas étendue en même temps sur le blé ? Pour quelle raison ne remplit-on pas l’intention de Charlemagne, qui avait réglé que le boisseau de bon blé-froment serait du poids de 20 livres, la livre réglée à 16 onces ? Un autre avantage de la vente du blé au poids, bien plus frappant et d’autant plus à désirer, que le bénéfice tournerait particulièrement au profit 492 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs. de la classe la plus nécessiteuse de l’Etat, serait la fixation bien plus juste du prix du pain. 11 est reconnu et de fait que 240 livres de bon blé doivent produire 180 livres de farine, lesquelles, absorbant deux tiers d’eau, rendent 240 livres de pain cuit. Ainsi le setier de blé à 24 livres met la livre de blé à 2 sous, conséquemment la livre de pain au môme prix de 2 sous, manière toute simple et bien plus juste pour MM. les officiers de police dans la taxation du pain. Arrêté que le Roi sera supplié de supprimer la vente du blé à la mesure, et d’y substituer l’usage du poids. PÉAGES. C’est un droit qui se paye au Roi ou à quelques personnes par permission 'du Roi, pour le passage des personnes, bestiaux, marchandises, sur un pont, chemin, rivière, ou à l’entrée de quelques villes, villages ou autres lieux. Les droits de péage ont été établis dans l’origine, pour l’entretien des ponts, ports, passages et chemins, et même pour y procurer aux marchands et voyageurs la sûreté de leur personne et effets. C’est pourquoi anciennement, lorsque quelqu’un était volé sur un chemin où le seigneur haut justifier avait droit de péage, ce seigneur était tenu de rembourser la perte. Cela fut ainsi jugé par arrêt donné à la Chandeleur en 1524, contre le sieur de Crèveeœur; en 1269, contre le seigneur de Viciton; en 1273, contre le comte de Bretagne, et en 1285, contre celui d’Artois. Cette garantie n’a plus lieu depuis que le Roi a établi des maréchaussées pour la sûreté des chemins ; l’entretien des routes n’est plus aux frais des seigneurs; cependant ils ont conservé leurs droits de péage. Le peuple paye les maréchaussées, il paye les corvées, et il est soumis aux droits de péage. Nous ne pouvons nous empêcher de citer ici ce que dit M. Linguet sur les abus et dangers des péages dans son discours aux Etats d’Artois en 1769. « Examinez ce canal de Briare creusé sous « Henri IV, celui de Languedoc sollicité par Col-« bert, regardez lecours de la Saône, de la Loire... « vous y verrez l’avidité étendre ses filets à cha-« que pont, à chaque écluse, à chaque masure « tolérée dans le voisinage. « Vous verrez l’industrie se débattre sous les « efforts d’une multitude d’oiseaux de proie, ap-« pelés buralistes, receveurs, péagers ...... elle n’é-« chappe de leurs serres qu’en y laissant une « partie de la dépouille, et comme à chaque pas « la même scène se renouvelle, elle arrive enfin « expirante au terme de son voyage. « Voilà le spectacle qu’offrent en France tous ces « beaux ouvrages tant célébrés par un tas d’écri-« vains qui arrondissent des phrases dans leur ca-« binet ! « N’élevez donc point, Messieurs, de ces guéri-« tes terribles où se loge bientôt malgré vous la « rapacité des traitants. Il vaut mieux ne point « ouvrir déroutés, que de les voir infectées par les « harpons meurtriers des péages. « 11 est moins dangereux de laisser le commer-« çant ramper sur la terre que de le réduire, dès « l’entrée d’un canal, à reculer d'épouvante à l’as-« pect de ces retraites perfides où s’embusquent ces « ennemis dévorants qui l’attendent pour le su-« cer. Ecartez-en donc pour toujours ces pirates « privilégiés qui rançonnent les passants, sans « autres armes que des parchemins. » Arrêté que le Roi sera supplié de supprimer tous droits de péage, pontonage, barrage, passage, travers, etc., comme nuisibles au commerce et à l’agriculture. ENLÈVEMENT DES GAZONS SUR LES CHEMINS. La manie des jardins anglais a donné lieu à un. abus d’espèce nouvelle, très-préjudiciable aux cultivateurs des environs de Paris. Les entrepreneurs de ces jardins, pour éviter les frais d’acquisition de la graine de gazon , qu’il faut semer très-épaisse, parce que plus la plante est pressée, moins elle trouve de nourriture, et plus l’herbe en est fine, se sont ingérés de lever des gazons sur toutes les grandes routes et chemins vicinaux des environs de Paris. Cet enlèvement de gazons fait un tort considérable aux pâturages. Deux années suffisent à peine pour réparer le dommage qu’il a produit tant aux cultivateurs et bouchers de Paris, qui ont le privilège particulier de faire pâturer leurs moutons dans toute la banlieue, qu’à cette classe très-nombreuse de particuliers des environs de Paris, qui, sans un pouce de terre, ayant une ou deux vaches, n’ont d’autre moyen pour les nourrir les trois quarts de l’année, que de les mener pâturer dans les chemins et les voiries. Arrêté que le Roi sera supplié de rendre un règlement qui défende l’enlèvement des gazons sur les grandes routes et chemins vicinaux. BAUX DES ECCLÉSIASTIQUES. L’incertitude où sont continuellement les fermiers des abbés commendataires, et autres, d’être déplacés par la nomination d’un nouvel abbé à un bénéfice, nuit beaucoup à l’agriculture, par le droit qu’ont ces nouveaux bénéficiers de casser les baux faits par leurs prédécesseurs. Cette crainte habituelle, dont on voit malheureusement les effets se réaliser trop souvent, empêche le fermier de faire sur ses terres des dépenses qui doubleraient et le fonds et le revenu. Il ne faut que connaître l’effet naturel de l’habitude , pour sentir qu’une ferme devient chère à un laboureur, à proportion du temps qu’il en a joui et de ce qu’elle s’améliore entre ses mains; on s’attache à ses propres soins, à ses inquiétudes, aux dépenses qu’on a faites : tous ces motifs sont nuis pour les fermiers des ecclésiastiques. Arrêté que le Roi sera supplié d’obliger les abbés nouvellement pourvus de bénéfices de tenir les baux et engagements faits par leurs prédécesseurs, si mieux ils n’aiment, en en dépossédant leurs fermiers, les indemniser de trois années une, comme la loi J’ordonne pour les nouveaux acquéreurs des biens de campagne. DROITS D’ÉCHANGE. L’échange est un acte par lequel deux personnes se transportent réciproquement la propriété de quelque chose. Il est peu de coutumes qui assujettissent les mutations d’héritages par échange au payement des droits seigneuriaux. Mais, par les édits de mai 1645 et de février 1674, il a été ordonné que les droits seigneuriaux qu’établissent les coutumes relativement aux mutations qui ont lieu par contrat de vente, seraient aussi payés au Roi, à l’avenir, pour les mutations qui se feraient par contrat d’échange, soit qu’elle fussent d’héritages contre héritages ou d’héritages contre des droits, rentes et redevances de quelque nature qu’ils 493 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] Puissent être, etsoitqu’il y eût soulte ou non, sans aucune distinction, nonobstant toute coutume ou usage contraire. L’on voit, par ce que nous venons de dire, que les droits d’échange n’appartiennent au Roi qu’en vertu des édits de 1645 et 1674. Une déclaration du 13 mars 1696 ordonna la vente et aliénation des droits d’échange. Une autre déclaration du 11 août 1705 permit aux seigneurs de retirer les droits d’échange dans leurs üefs et seigneuries, sur les acquéreurs particuliers, à la charge de les rembourser dans trois mois, et de payer au Roi un doublement de finance. L’adjudication des droits d’échange qui restaient à aliéner fut ordonnée par la déclaration du 20 mars 1748. Différentes provinces ont acheté du Roi, moyennant une finance, les droits d’échange tels que le Languedoc pour 63,000 livres; la Champagne 80,000, la Rretagne 300,000; mais une singularité particulière dans cette province, c’est que les droits d’échange ayant été remis aux terres et fiefs des seigneurs particuliers, quoique l’acquisition en eût été payée des deniers de la province, il s’est suivi de cette opération que le tiers-état se trouve avoir financé pour avoir une charge de plus à supporter. Arrêté que le droit d’échange étant une imposition nouvelle, le Roi sera supplié de le supprimer, afin de faciliter aux propriétaires les moyens de réunir les parties éparses de leurs possessions, et par ce moyen leur faciliter la culture de leurs terres, comme il en a déjà été ordonné pour la province de Bourgogne par les édits des mois d’août 1770, 3 février 1771, déclarations des 2 décembre 1776 et 12 décembre 1779 pour les comtés de Maçonnais, Auxerrois et Bar-sur-Seine et les pays de Bresse, de Bugey et de Gex. CHAMP ART, CENS, SURCENS, LODS ET VENTES. Toute propriété est nuisible à la culture, c’est une maxime avouée par le raisonnement et l’expérience. La copropriété des seigneurs est représentée sous cent dénominations différentes, cens, surcens chef-cens, relief, rachat, lods et ventes, dîmes, champart, banalité, etc. Pour donner une idée de la misère où les institutions féodales ont réduit les laboureurs et les habitants des campagnes, il ne faut que considérer le nombre des copropriétaires qui viennent partager le fruit de leurs travaux. A peine ont-ils vendangé leurs vignes, ou moissonné leurs champs, que le bailleur, le seigneur de fief, le seigneur suzerain, le décimateur, le pasteur, etc., réclament leur partage dans la récolte. Viennent ensuite les collecteurs des droits royaux exiger la taille, l’industrie, la capitation, les vingtièmes, sans compter le tabac, la gabelle, les aides, etc. De toutes ces levées successives faites sur le produit des sueurs de l’infortuné cultivateur, il résulte que de 12 gerbes que son industrie a fait naître, il ne lui en reste qu’une pour sa subsistance. On aurait peine à le croire si l’on n’en trouvait la preuve consignée dans le procès-verbal de la haute Guyenne. « Nos premiers regards, dit le bureau des affaires extraordinaires et au bien public, se sont portés vers l’agriculture, fille éprouve des entraves nuisibles à tout le monde, sans être avantageuses à personne, et nous avons eu la satisfaction de trouver dans cette province les moyens d’y remédier. » M. le baron de la Guepie, membre de cette assemblée, et quelques autres seigneurs, persuadés depuis longtemps que les redevances qu’ils possédaient à titre de champart nuisaient infiniment à l’agriculture, se sont déterminés à les inféoder à leurs vassaux , moyennant une rente fixe et équivalente en grains. Depuis cette époque les terres ont été mieux cultivées, le revenu des seigneurs a été plus assuré, et le colon plus heureux. L’Etat a gagné par cet accroissement de richesses, et nous pensons, Messieurs, qu’il est de l’intérêt du Roi de favoriser les inféodations qui pourront être faites par les seigneurs qui sont dans le même cas. Il ne sera pas difficile, de faire sentir au gouvernement la légitimité de la grâce que nous lui demandons. Les terres soumises au droit de champart sont condamnées à la stérilité par la nature même de l’institution des champarts. Dans quelques-unes de cette espèce, sur douze gerbes le seigneur en retire trois, le décimateur une, les impositions en absorbent deux au moins; il faut distraire de celles qui restent deux pour la semence et trois pour les frais de culture. Il en reste donc une pour le propriétaire, dont les travaux ne peuvent augmenter le revenu que dans une proportion décourageante. Pouvons-nous douter, Messieurs, que le Roi ne favorise des opérations qui pourront diminuer l’influence de droits aussi nuisibles à l’agriculture? Il est important d’observer qu’il y a deux espèces de propriétaires des droits féo'daux, savoir : les propriétaires laïques et les propriétaires ecclésiastiques. Cette nature de propriété dans les mains des premiers est sans doute très-onéreuse au peuple et à l’agriculture, mais au moins ces propriétés sont commerçables ; elles appartiennent à des pères’de famille; elles contribuent aux charges de l’Etat. Dans les mains des seconds, ces propriétés non moins onéreuses ont encore le vice d’être inaliénables, d’appartenir à des usufruitiers, et de ne pas contribuer aux impôts publics, ou de n’y contribuer que dans une proportion inégale. La somme de tous les devoirs féodaux, perçue aujourd’hui par les ecclésiastiques, ne paye rien ou presque rien à l’Etat. Cette somme rentrée dans les mains du peuple contribuerait à l’impôt public, en raison des autres propriétés. Arreté que le Roi sera supplié de permettre l’affranchissement des droits féodaux des propriétaires laïques, aux conditions dont les parties conviendront entre elles, soit en argent, soit pour la cession d’une partie du fonds pour sauver le reste, à perpétuité de toute redevance féodale. Et quant à ceux appartenant aux ecclésiastiques, l’affranchissement ne pourra s’en faire qu’à deniers d’entrée seulement, lesquels seront versés au trésor royal, et dont le Roi leur assurera l’intérêt à 3 1/2 p . 0/0, intérêt qui composera l’ancien revenu. Signé Colleau; Parnie; Giroux; Gamu, procureur fiscal; C. Lemaire; Provost ; Lecointre; F. Cretté; Paris; Polsot; Charlemagne; Hurtaut; Gretté. Poutas, greffier.