Séance du 24 vendémiaire an III (mercredi 15 octobre 1794) Présidence de CAMBACÉRÈS 1 La séance s’ouvre à onze heures, et commence par la lecture des adresses à la Convention nationale. La société populaire de Wassy, district de Saint-Dizier, félicite la Convention nationale d’avoir terrassé la tyrannie; elle promet d’être toujours ralliée à ses principes. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [La société populaire et républicaine de Wassy, Haute-Marne, à la Convention nationale, s. d .] (2) Citoyens représentans, Vous avez terrassé l’hydre qui menaçoit la liberté. Nous avons applaudi à votre énergie et à votre courage ; nous n’avons eu qu’un seul regret, celui de ne pas avoir été à portée de partager vos périls. Vainement des factieux s’agitent dans toutes les parties de la République, nous sommes loin de partager leurs crimes. Nous n’aimons que la justice et l’ordre et nos regards se tournent vers vous. C’est à vous seuls, citoyens représentans, qu’il appartient de régler les destinées de l’empire. Nous ne reconnoissons que vous. La société populaire de Wassy fera toujours consister sa gloire à se ranger sous les bannières de la Convention. Demongeot, ex-président, Basirer, ex-secrétaire, Humbert, secrétaire. (1) P. V., XLVII, 174. (2) C 322, pl. 1354, p. 10, reçue le 14 vendémiaire. 2 La commune de Curnier, district de Nyons [Drôme], en applaudissant à l’énergie de la Convention nationale, lui exprime les mêmes sentimens. Mention honorable, insertion au bulletin (3). [La municipalité de Curnier à la Convention nationale, du 4 vendémiaire an HT] (4) Citoyens représentants, Dans votre séance du 1er floréal vous avez déclaré qu’appuyée sur les vertus du Peuple français, la Convention fera triompher la République démocratique, et qu’elle punira ses ennemis. Vous avez rempli cette grande obligation en écrasant l’infernale conspiration de l’hypocrite Robespierre et de ses infâmes complices. La nation française vous doit son salut. Les vrais amis de la liberté et de l’égalité, dans quelle région du globe qu’ils habitent, applaudissent à votre énergie et à vos immortels travaux. Libérateurs du Peuple français! ô vous, que l’univers étonne, contemple avec admiration! vous qui lutés depuis deux ans contre la rage impuissante des despotes de l’Europe; contre toutes les conspirations des nombreux ennemis de la plus généreuse de toutes les nations ! Vous, génies rares et étonnans, qui par votre courage et votre sagesse, avez si souvent sauvé la liberté de votre pays! vous que l’humanité révère comme ses sauveurs et que la méchanceté redoute comme le rocher où iront échouer tous ses complots; continuez vos sublimes travaux et votre carrière glorieuse — vingt-cinq milbons d’hommes vous ont confié leurs destinées : de votre constance dépend leur bonheur. Ah! quelle immensité de félicité ap-percevons-nous à travers les orages de la révo-(3) P. V., XLVII, 174. (4) C 321, pl. 1347, p. 6. 156 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE lution! que de bénédictions vous attendent lorsque vous les aurez conjurés tous ces orages politiques, et que vous aurez posé la dernière pierre de votre grand et majestueux édifice! Mais, citoyens représentants, quand verrons-nous cet âge d’or? quand jouirons-nous paisiblement du bonheur que vos veilles et vos sages loix nous préparent? quand est-ce que nous cultiverons les champs de nos pères, dans la sécurité qu’un gouvernement libre peut seul amener? quand est-ce que nous jouirons du plaisir indicible de voir solidement établie la liberté française? Nous ne jouirons de tous ces grands biens qu’après l’anéantissement absolu de tous nos ennemis. Continuez donc, citoyens législateurs, à demeurer inébranlablement attachés à votre poste. De quelques périls que l’aristocratie délirante vous entoure ne regardez jamais derrière vous. Que la poudre nationale soit toujours prête à pulvériser ces êtres immoraux et incorrigibles pour qui la patrie n’est qu’un vain nom, et le crime un objet chéri de complaisance. Purgez notre patrie de toute espèce de tyrans ; nous leur jurons une haine immortelle : ceux qui abrutissaient notre raison en tyrannisant nos consciences n’ont jamais rien fait pour le bonheur du peuple, et ne doivent point trouver grâce auprès du sénat français : ces hypocrites! n’est-ce pas par leurs infâmes manoeuvres que l’affreuse guerre de la Vendée avait existé? n’est-ce pas eux qui ont fait des maux incalculables à la République? n’est-ce pas eux qui voudraient nous redonner des tyrans? Mais, citoyens représentants, quoique nous ne soyons que des cultivateurs, et que nous ne puissions lire avec méditation vos bienfaisantes loix, nous savons néanmoins par coeur l’article 27 des droits de l’homme et du citoyen ; et nous renouvelions ici le serment de mourir plutôt que d’y laisser porter atteinte. Vive la République victorieuse ! vive la Convention nationale. Le sauveur de la liberté française! vivent les déffenseurs de la patrie! vivent tous les hommes libres et vertueux! et périssent les usurpateurs des droits sacrés des peuples. Salut, respect et fraternité. Brusset, maire, Gielley, off. municipal, Bres, secrét. -greffier. P. S. Vivent les héros de Paris qui ont si souvent concouru à la défense de la Convention nationale ! 3 Le conseil d’administration du quatrième bataillon des Basses-Alpes, au nom de ses frères-d'armes, témoigne à la Convention nationale toute sa reconnois-sance de ce qu’elle a sauvé la patrie en anéantissant une des conspirations les plus dangereuses qui avoient été tramées contre la liberté. 11 annonce que le bataillon a fait le sacrifice de trente-deux quintaux quarante-six livres de viande, en faveur des pères, mères, veuves et enfans indigens de ses frères-d’armes morts au service de la patrie. Mention honorable, insertion au bulletin (5). [Le conseil d’administration du quatrième bataillon des Basses-Alpes à la Convention nationale, s. c?.] (6) Egalité Fraternité Liberté ou la mort Citoyens représentants, Depuis longtemps vos frères d’armes du 4ème bataillon des Basses-Alpes, n’ont pû choisir pour le moins des éloges qu’ils donnoient à vos glorieux travaux, que les échos des montagnes du Piémont. Ils cèdent aujourd’huy aux impulsions de leur coeur; elles les portent à manifester à vos yeux les sentiments que vous leur avez inspiré. Vous pourriez douter de leur sincérité s’ils employoient pour les exprimer des termes ampoulés, le langage le plus simple, le plus naturel, celuy de l’amitié et de la fraternité est le seul que doivent adopter des militaires. Nous vous disons que nous avons été saisis d’admiration, que notre reconnoissance a atteint son plus haut période lorsque nous avons appris qu’arrachant le voile de l’imposture, vous êtes parvenus par la surveillance la plus active, la vigilance la plus exacte à découvrir une nouvelle conspiration et à la déjouer au moment même qu’elle étoit prête à éclater ; les chefs conspirateurs ont cessé d’exister, là chute fabuleuse des mauvais anges dont le tableau nous a été laissé par un fameux artiste s’est presque réalisé envers eux. Le seul désir qui puisse rester à des républicains, c’est de voir briser jusqu’au plus petit chainon de cette conspiration et souffrir mille tortures à ceux qui en seront reconnus complices; il faudroit inventer de nouveaux supplices pour les punir de leur scélératesse ; continuez, dignes représentans, à être l’effroy de ces hommes pervers qui par leur jactance et par leur faux extérieur voudroient se montrer dignes du nom de citoyen et se ranger parmi les républicains tandis que par de sourdes manoeuvres ils se rendent les assassins de leur patrie et préparent l’anéantissement d’un gouvernement qui promet des félicités sans fin à tous ceux qui l’adopteront. Tant que les vertus et l’amour de la patrie resteront dans les coeurs de la majeure partie des français, tant que nos représentants établiront leurs loix sur de sages maximes, leurs efforts seront impuissants. Oui il n’en faut pas douter l’union et la concorde vont reprendre leur empire parmi nous, nous ne formerons qu’un seul faisceau qui sera pur (5) P.-V., XLVTI, 175. Bull. , 1er brum. (suppl.). (6) C 321, pl. 1342, p. 15, reçue le 14 vendémiaire.