SÉANCE DU 3 FRIMAIRE AN III (23 NOVEMBRE 1794) - N° 1 69 Législateurs, Votre décret sur la police des sociétés populaires est un hommage rendu à la déclaration des Droits. C’est ainsi qu’en les rappellant aux principes, vous les rétablissez dans toute la plénitude de leurs droits et de leurs devoirs. C’est devant cette mesure aussi sage en politique que forte en principe, que s’agittent l’ambition de quelques uns, la haine ou la rage coupable de quelques autres ; mais, que peuvent devant la loi protectrice et garantie par l’assentiment des vingt cinq millions d’hommes quelques passions exaltées de la puissance du peuple ou de son honneur lorsqu’un coup d’œil de ses représentants peut seul les anéantir? Ne savent-ils pas ceux-là qui sont plus qu’égarés, que la volonté est une comme la République, et que les droits de l’homme et du citoyen sont impérissables. Ne savent-ils pas qu’il est écrit article 2 = Brutus frappe le tiran ? Législateurs, la liberté étoit encore dans son berceau, un voile épais le dérobait aux regards du peuple, pour aller à elle, il falloit traverser un tunnel, lorsque attirés par un rayon d’espérance, nous réunimes nos efforts communs pour la défendre, contre son ennemi naturel. Dès lors un sentiment profond la gravoit dans nos cœurs, il fut tout entier pour la liberté, nous nous réunimes en société paisible et nos efforts communs depuis cinq ans tendirent toujours à l’instruction de nos concitoyens, nous leur inspirâmes par la force de l’exemple, l’ôbeyssance aux loix et un attachement inviolable à la représentation nationalle; cet attachement est plus fort que jamais. Vous venér d’arracher des mains de l’intrigue la boussole qui désormais dirrigera l’oppinion publique vers un seul et même centre; vous avés par cet acte de souveraineté nationale affermi plus que jamais les sociétés populaires sur leurs bases. Ce n’est pas là une des moindres circonstances où l’aristocratie, encore trompée sur vos véritables intentions, ait été forcée de battre en retraitte ; elle croyait déjà les sociétés anéanties et dans sa marche triomphante, c’est aux avant postes de la Convention qu’elle les a rencontrées et où elle a succombé pour la dernière fois. L’intrigue et la malveillance n’ont pas manqué aussi de se donnér le signal, et le peuple toujours crédule s’est encore une fois laissé trompé ; il a cru un instant ses assemblées dissoutes et ses droits méconnus. C’étoit le fruit de l’erreur, ouvrage de ses ennemis toujours actifs et méchands... où étoient alors les sociéttées si gratuitement inculpées et sy fortement batues par les tempette des opinions? Si nous devons les juger par nous-mêmes, elles étoient à leur poste, la loi à la main, forte de leur puissance, elles détruissoient l’erreur et calmoient les inquiettudes, applaudissoient à votre décret, s’y soumettaient avec transport, et dans le délire d’une joye parfaitte, elles pardonnoient à leurs détracteurs de bonne foye, lors même qu’elles juroient une guerre à mort aux tirans et aux factions. Mourir pour défendre nos droits sacrés, pour appuyér et deffendre la représentation nationale, n’est-ce pas se sacriffier pour la même cause? Non jamais elle ne portera une main parricide sur le contrat social, cette Convention qui abatit les tirans et dont l’attitude frère et majestueuse, fait seule trembler tous les trônes de l’Europpe. Perdéz donc espoir, traites et conspirateurs, Jean-Jacques est au Panthéon, Mirabeau dans la boue, Robespierre aux enfers; quelle plus forte preuve donneroit elle au peuple que cette main si puissente, si bienfaisante pour les bôns, si terrible pour les méchans, bien loin de détruire son ouvrage, frappera de mort, quiconque devroit y toucher. Lesgislateurs, gardéz votre poste jusqu’à l’entière extirpation de nos ennemis ; soyés inexorables envers les conspirateurs ; que l’intrigue soit punie, que le règne de la justice protège l’innon-cence, et que le crime disparoisse sous la hache de la loi. Conservér jusqu’à la paix le gouvernement sauveur de la liberté, et vous avéz bien mérité de vos concitoyens. Nous applaudissons à votre adresse au peuple, elle est digne de luy et de vous : nous vous jurons en particulier un attachement sans borne, vous serez toujours notre centre de ralliement, et comme au temps du fédéralisme, ny les menaces, ny la persécution de quelle part qu’elle nous vienne, si vous tourner vos regards vers Coutras, cette commune fidelle ne cessera jamais de tour-nér les siens vers vous, et vous les rancontretér en tout temps, attachés vers la Convention nationalle, objet de ses vœux et des nôtres. Suivent 73 signatures. P [Adresse à la Convention nationale, par les citoyens du district de Lons-le-Saunier, convoqués en assemblée générale par les représentants du peuple Besson, Sevestre, Foucher du Cher et Pelletier, Lons-le-Saunier, le 8 vendémiaire Van trois de la République française une et indivisible, prononcée par le citoyen Bouillier, chef de légion ] (20) Citoyens représentans, Recevez les témoignages publics de la recon-noissance des citoyens de Lons-le-Saunier, vous leur avez rendu le bonheur, ils vous offrent en échange leur amour et leur gratitude, trop faible récompense des bienfaits que vous avez laissés sur cette commune, assez longtemps. Malheureusement, si elle parut un moment démérité la confiance de la Convention, ce fut un moment d’erreur qu’ont assez expié son long repentir et les vexations nombreuses auxquelles elle a été livrée. Si elle eut le malheur de voir naître dans son sein quelques scélérats trop fameux, que de patriotes vertueux ne renferme t-elle pas, quelle part n’a telle pas fournie dans les nombreuses batailles que le Jura compte sur la frontière pour y combattre, triompher ou mourir pour la cause de la liberté. (20) C 328 (2), pi. 1454, p. 3. 70 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Vertueux représentons, vous avez su distinguer l’erreur du crime, vous avez pardonné l’une et frappé l’autre d’une main, vous avez rendu à sa famille le père infortuné que la haine ou le caprice de quelques scélérats qui avoient usurpé la confiance publique, avoient arbitrairement plongé dans les ténèbres, et de l’autre, vous avez mis entre les mains de la loi, les fripons qui commençoient déjà à partager leur dépouille, et qui sourioient à la vue du butin dont il se réjouissoient d’accroître leur fortune injustement acquise, c’est à ces signes, c’est à cette conduite généreuse que nous avons reconnu les principes de la représentation nationale : enfin, la justice a remplacé la terreur ; l’assurance nous en est donné par vos représentons, il n’est plus d’échafaud pour l’homme innocent ; les derniers tirans ont expié leurs forfaits, les prisons rendent les victimes innocentes qui dévoient successivement alimenter la fureur sanguinaire des bourreaux du tribunal révolutionnaire. L’innocence respire, elle s’occupe déjà des moyens de servir la Répubbque ; tous goûtent le bonheur, à part le crime, et ce changement étonnant, c’est l’ouvrage de la représentation nationale. Peuple qui partagez tous ces bienfaits, gardez-vous donc de vous en rendre indigne ; rappelez-vous à jamais qu’il n’est qu’un bonheur pour les français : la liberté ; qu’il n’est qu’un centre commun, la représentation nationale ; qu’il n’est de patriote, que l’homme probe et vertueux; mais rappelez-vous surtout, que la patrie vous commande impérieusement l’oubli de toute haine particulière, l’abandon généreux de toute vengeance personnelle. Jurez de ne vivre que pour la liberté, pour le maintien de la République et le respect de la loi. Suivent 235 signatures. Q [Les citoyens de Thionville à la Convention nationale, s.l.n.d .] (21) Tu viens de décréter la fin des malheurs publics. Les citoyens de Thionville n’ont jamais été les derniers à t’exprimer leur reconnaissance. Juge du bonheur et de l’ivresse auxquels nos âmes peuvent à peine suffire; ah! que n’est-tu toute entière présente à nos transports, comme le juste, l’humain représentant Loysel, comme l’intrépide, le bienfaisant représentant Merlin [de Thionville] ; ils entendent nos cris de joie ; ils jouissent avec nous des fruits de la victoire ; ils voient le bonheur public. Nous te bénissons ensemble, ô toi qui viens de fermer le refuge du crime, l’antre de la discorde, et de le dernier asile de la terreur. La vertu triomphante n’a plus à redouter les efforts du crime abattu. Sauveurs de la patrie, pas plus de paix avec les assassins et le reste des conspirateurs de la (21) C 328 (2), pl. 1454, p. 15. Moniteur, XXII, 601. Bull., 3 frim. nuit du 9 thermidor qu’avec les rois ; ils se prêtaient un mutuel appui; nos enfants punissent les rois ; foudroient le crime ; et bientôt dans la paix et le bonheur nous jouirons du fruit de tant de travaux, nous jouirons de la liberté, notre unique divinité, et de la douce égalité. Suivent 2 pages de signatures (22). r [Les citoyens de la commune d’Ivry à la Convention nationale, Vernon (Eure), le 15 brumaire an 1II\ (23) Citoyens représentans du peuple, Les habitans de la commune d’Ivry, district d’Évreux séant à Vernon, département de l’Eure, viennent réunir leurs félicitations à celles qui vous arrivent de toutes les extrémités de la République. Jamais hommage ne fut moins équivoque et plus libre, puisqu’il vous est rendu dans un moment ou votre adresse aux Français remplit les âmes des idées les plus consolantes, dans un moment ou vous venés de paraliser ces conspirations fédératives et audacieuses, qui lutoient sans cesse pour envahir un pouvoir dont vous seuls êtes légitimement investis ; dans le moment enfin, ou vous avés affranchi l’homme de bien de la tirannie des ces prétendus patriotes, qui sur toute la surface de la République, ne cessoient de donner aux hommes paisibles les quahfications ignominieuses d’aristocrates et de modérés, pour se faire un prétexte d’envahir leurs propriétés et se gorger de leur sang. Hier! que fut devenu l’espoir si mince en France, si d’un bras vigoureux, vous n’eussiés terrassé ces féroces triumvirs dont les forfaits surpassent ce qu’ont jamais fait ceux de [ illisible ] romain. Hé nous aussi dans notre chétive commune nous avons eu nos Robespierre, ce sont eux qui ont immolé vos efforts tendant sans relâche à sauver l’État ; vous les sauverés, en maintenant à l’ordre du jour les principes qui, depuis le 9 thermidor, vous ont concilié l’attachement des vrais républicains, vous les sauverés en écartant avec mépris les vociférations des ces hommes, qui ne cessent de crier à la terreur, parce qu’avec un cœur altéré sang, ils feignent encore d’ignorer que c’est de tous les ressorts les plus vicieux. Mais citoyens législateurs, nous nous arrêtons pour ne pas vous distraire plus long-tems dans vos travaux ; pleinement assurés qu’on ne vous fera jamais dévier de vos principes, et que tous les mérites ajouteront à votre gloire ; nous allons nous borner à dire dans toute la plénitude de nos cœurs, hors la Convention point de salut. Puisse ce ralliement devenir celui de tous les Français. Vive à jamais la République, vive la représentation nationale. (22) Indiqué en bas de l’adresse, mais les pages de signatures n’existent pas dans la série C. (23) C 328 (2), pl. 1454, p. 5.