250' [Assemblée nationale.} aux peuples sous les formes les plus révoltantes. Si ces conjectures sont vaines, si ce n’est pas là le fil qui lie toutes les opérations du département, il faudra bien convenir qu’elles sont inexplicables, et qu’on ne peut les considérer que comme les effets sinistres d’une cause aveugle et malfaisante. Quoi qu’il en soit, Messieurs, le département de Corse a donné de grands scandales, en violant de tant de manières une Constitution faite pour honorer et consoler l’espèce humaine. Le conseil général de la commune de Bastia use de son droit, remplit son devoir, donne preuve de son zèle en le dénonçant. Le département est coupable, ou il est gravement calomnié. Dans l’un ou l’autre cas, l’importance des choses appelle et commande un jugement du Corps législatif. Le conseil général delà commune le sollicite et l’invoque, et il fonde sur la Constitution ou même 3a confiance où il est que la troupe soldée du département sera supprimée; que le sieur Arena sera remis à la place que lui assignent les lois ; que la conduite du département sera improuvée et redressée dans tous les points où il s’est écarté de vos décrets; et qu’enfin, dans une affaire qui intéresse le maintien de la Constitution et le bonheur d’une nation entière, vous ferez un exemple nécessaire. Paris, le 8 juin 1791. Signé : Joseph-Marie BelgodÈRE. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DAUCHY. Séance du mercredi 15 juin 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires fait part à l’Assemblée d’une adresse de plusieurs citoyens , gardes nationaux de la ville de Vienne , département de l'Isère , qui, sur la nouvelle pétition venue de Strasbourg, d’un secours de gardes nationales de l’intérieur, offrent de se rendre à la destination qui leur sera indiquée, sous la conduite du sieur Guillermain, commandant de la garde nationale. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal.) Un membre fait lecture d’une lettre du département de Rhône-et-Loire ainsi conçue : « Messieurs, « Il s’est répandu à Lyon un imprimé ayant pour titre : Opinion de M. Imbert de Montbrison, le 11 décembre 1790. Dès que nous en avons eu connaissance, nous avons pris l’arrêté dont nous avons l’honneur de vous adresser un exemplaire, et qui a précédé toute espèce de démarche. 11 contient l’expression sincère de nos sentiments; et, comme dans la position cruelle où nous jette l’opinion d’un homme qui était notre collègue, on pourrait faire naître des doutes sur notre patriotisme, nous osons vous prier d’engager l’auguste Assemblée que vous présidez, d’entendre la lecture d’une partie de la ciéli-[15 juin 1791. J bération prise par la municipalité, et même, s’il est possible, de demander qu’il soit fait mention de cette lettre dans son procès-verbal. C’est le seul moyen d’apprendre à l’Empire entier, qu’il n’est aucun des membres de notre administration qui ne désavoue hautement l’opinion absurde imprimée sous le nom de M. Imbert, que nous plaignons comme notre collègue, mais dont nous condamnons la conduite, s’il est l’auteur de cet écrit : la nôtre aura toujours pour objet le maintien de notre Constitution, de notre liberté, l’exécution de vos décrets et le soin de vous offrir l’hommage de la reconnaissance que vous doivent tous les Français. « Nous sommes, etc... « Ce 11 juin 1791, avant midi. » (. Suivent les signatures.) (L’arrêté est joint à la lettre.) M. ©dandine. Voici une adresse que je suis chargé de présentera l’Assemblée; elle est faite au nom de cent trente mille citoyens réunis dans les municipalités de Saint-Etienne , Saint-Cha-moncl , Rive-de-Gier, Saint-Paul , Samt-Genist-Ter-renoire, Saint-Mar tin-la-Plaine, Roche-la-Mollière, et autres municipalités situées dans le département de Rhône-et-Loire. « A l’Assemblée nationale, « Tu fais le bonheur des vrais Français, et tu viens d’assurer le nôtre. Chez nous, la terre était esclave jusque dans sa profondeur; tu l’as voulu; elle est affranchie. D'avides étrangers étaient venus nous ravir et nos héritages et la richesse de nos mines; tu as parlé, ils vont disparaître. Des hommes libres sillonnent la surface de n s monts ; des hommes libres fouillent leur intérieur. De toutes parts, dans nos sombres vallées, sur nos coteaux arides, dans les sinuosités ténébreuses de notre sol, on bénit tes décrets, on fait serment de les défendre. Nos cris de joie ont retenti, nos imprécations contre nos oppresseurs se sont élevées jusqu’auxnuts ; ils ont percé jusque dans les abîmes de la terre. « Continue tes immortels travaux, Assemblée courageuse et juste ;tu ne fais grâce à aucun abus. Venge 20 siècles d’avilissement et d’erreur, en apprenant aux hommes de toutes les contrées ce qu’ils doivent être. Pour nous, rustiques habitants de ces forêts, de ces montagnes, notre reconnaissance pour toi est aussi franche qu’elle sera durable. Ce symbole de notre gratitude, ce bloc brut et simple que l’art à peine a dégrossi, ce bloc arraché avec effort de notre territoire te prouvera que jamais on u’arrachera de nos cœurs le souvenir de ton bienfait. Fils de la servitude, nous venons de renaître enfants de la liberté. « Si la liberté était persécutée dans cet Empire, elle se réfugierait parmi nous; oui, chez nous, dans nos villes, on fabrique sans cesse des armes pour la défendre. Et si ta tyrannie parvenait à imprimer ses pas sur la surface de notre terre, elle verrait bientôt, en pâlissant, ses entrailles s’ouvrir, elle verrait des hommes forts, armés de la flamme et de fer, sachant braver tous les périls, en sortir en foule pour punir ses attentats, venger l’oubli de tes travaux, venger ta gloire ou mourir. » (Suivent les signatures.) M. ©dandine. Je demande qu’il soit fait mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.