206 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 janvier 1790.) ours, il est temps qu’ils n’existent plus que jour nous: mais malheur aux ennemis de notre iberté ! Nul coin de la France ne peut les récéler en sûreté. De toutes parts inspectés par l’œil surveillant des vrais patriotes, ils ne déroberont jamais leur complot à l’activité de nos recherches, et leurs têtes sacrifiées à notre félicité forceront leurs complices, ou à devenir citoyens par besoin, ou à fuir une terre qui n’est pas faite pour être l’asile des scélérats : alors, sur les débris de nos tyrans, nous verrons le patriotisme élever un temple à la vertu, où tous les Français, redevenus ce qu’ils étaient dans des temps plus heureux, s’empresseront d’offrir le tribut de leurs talents et de leurs facultés à la patrie, et de lire sur l’autel les noms des députés immortels à qui ils seront redevables de leur génération et de leur bonheur. Nous sommes, etc. Délibération de la ville de Rodez, capitale du Rouergue, ainsi conçue : Les habitants de la ville de Rodez, extraordinairement assemblés, considérant l’immensité des travaux auxquels se livrent sans relâche les représentants de la nation française, leur courage et leur constance à surmonter les obstacles de, tout genre, qui s’opposent à leur marche, l’intrépidité qu’ils ont montrée au milieu des dangers inouis dont ils se sont vus menacés : l’héroïsme avec lequel ils sacrifient tous les jours au salut de l’ État les biens les plus chers à l’homme repos, fortune, santé et les plus douces affections de la nature Considérant que, par de si glorieux travaux et de si généreux efforts, l’Assemblée nationale a posé les bases et avancé l’édifice d’une Constitution qui nous rendra la liberté, l’égalité, ces droits imprescriptibles de l’homme ; d’une Constitution qui établira l’empire de la justice et de la raison sur les ruines du despotisme; d’une Constitution qui relèvera le caractère national, dégradé par les restes honteux de la féodalité ; d’une Constitution, enfin, qui, par la destruction de la servitude des personnes et des biens, régénérera tout à la fois nos mœurs et nos propriétés ; Considérant que les décrets de l’Assemblée nationale vont ramener la tranquillité dans les rovinces, par une sage organisation des assem-lées municipales et do département ; assurer la subsistance des pauvres par la disposition des biens que la piété et l’humanité ont destinés à remplir ce devoir sacré; faire fleurir la religion par le retour de ses ministres aux vrais principes de leur état; donner une nouvelle vie à l’agriculture et au commerce, par la suppression des entraves qui les font languir ; établir enfin l’abondance et le bonheur dans toutes les parties de ce royaume par l’abolition des impôts arbitraires et vexatoires, qui les ont jusqu’à présent, désolées et par la création d’impôts modérés, sagement et également répartis sur tous les individus; Considérant que tant de bienfaits sont autant au-dessus de nos espérances, que les vertus auxquelles nous les devrons, sont au-dessus de l'humanité; Déclarent que leur admiration, leur respect, leur amour et leur reconnaissance sont sans bornes; Que non seulement ils adhérent aux décrets de l’Assemblée nationale, mais qu’ils sont prêts à immoler leur vie pour assurer aux générations futures leur exécution et le succès delà régénération qu’ils vont opérer; Qu’ils acceptent surtout avec transport ce décret du 4 août, qui, par la suppression des privilèges des villes et des provinces, établit entre elles cette égalité de droits, cette unité d’intérêts sans lesquelles il n’y a pas de bonheur à espérér pour un grand empire ; Qu’ils s’empressent d’offrir, pour gage de leur soumission à cet important décret, rabandon de plusieurs privilèges, que les comtés de Rodez et les rois, leurs successeurs avaient accordés à cette ville en récompense de son zèle et de sa constante fidélité ; Que pour alléger, autant que leurs faibles moyens le leur permettent, le fardeau d’une dette consacrée par la loyauté française, ils arrêtent de remettre à la nation une créance sur l’État de 22,470 livres payée par la ville de Rodez, pour l’acquisition des offices municipaux, et d’en envoyer les titres constitutifs à M. le président de l’Assemblée nationale, avec la présente délibération ; Que, se faisant gloire et s’estimant heureux de pouvoir imiter en quelque chose la générosité des augustes représentants de la nation, ils font à la patrie le don de leurs boucles d’argent, en attendant l’exécution du décret relatif à la contribution patriotique, qu’ils promettent d’acquitter religieusement. Ainsi arrêté à l’unanimité des suffrages, et ont signé au registre, MM. les officiers municipaux avec les délibérants. Adresse du comité de Villeneuve d’Agenois à V auguste Assemblée nationale. Nosseigneurs, arrivés au terme de nos fonctions, nous croyons devoir rendre à l’auguste Assemblée un compte exact et fidèle de la manière dont nous nous en sommes acquittés, et de l’état où est la ville de Villeneuve, au moment d’en remettre l’administration à nos successeurs avec l’autorité municipale qui nous avait été confiée. En remplissant ce devoir, nous remplissons le vœu de nos concitoyens qui se livrent déjà avec effusion au bonheur de servir et d’aimer la patrie. La ville de Villeneuve se glorifie d’avoir une des premières fait entendre le cri de la liberté, réclamé les droits du peuple français et voté la convocation de l’Asssemblée nationale. Au moment de cette fermentation générale qui menaça le royaume d’une fatale anarchie; dans ce moment où la police, les lois, les tribunaux de justice furent en quelque sorte anéantis par l’opinion égarée du peuple ; dans cet instant où, seul vengeur de sa trop longue oppression, il enfantait des crimes ridicules qu’il punissait par des supplices atroces; dans le moment, enfin, où tant de villes furent le théâtre des plus sanglantes tragédies ; la nôtre, pure, et innocente non seulement de toute atrocité, mais de la moindre violation de la liberté et de la propriété, forma, sous les auspices de la justice et de la concorde, un comité nombreux qui, permanent et réuni à la municipalité, put empêcher le développement des germes de sédition et de licence qu’un souffle contagieux semait sur toute l’étendue du royaume. Un régiment national, créé dans le même temps, arma le comité d’une force redoutable qui a pu imposer par sa présence mais dont l’appui n’a jamais dû être invoqué. Aussi les fonctions du comité n’ont été pénibles que par la constance des soins et de la sollicitude, et notre ville n’a cessé un instant d’offrir, aux regards étonnés de nos voisins, le [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 janvier 1790.] 207 spectacle d’une famille patriotique dans laquelle l’union des cœurs et l’unanimité des opinions avaient effacé les humiliantes distinctions d’ordre, de condition, derang, avant même que l’Assemblée nationale eût retranché du corps social ces excroissances si contraires à une organisation saine et également avantageuse pour tous les membres qui le composent. Ainsi, Nosseigneurs, le comité a joui de la confiance du peuple, et le peuple a constamment goûté dans ces jours orageux la plus douce, la plus inaltérable paix. Les petits intérêts privés n’ont jamais nui à l’intérêt de la chose publique. Nos regards n’ont cessé de suivre, avec une filiale inquiétude, tous les mouvements de l’Assemblée; de cette assemblée sur la sagesse et le courage de laquelle reposent encore la sûreté de notre bon monarque, les espérances des Français et la prospérité de l’empire : prêts à partager tous les périls, nous ne sommes pas moins ardents à signaler par toutes sortes de sacrifices notre attachement inviolable à ses décrets régénérateurs. Quand, frappée du désordre des finances, et voulant détourner de dessus cet empire la honte d’une banqueroute, le plus grand des malheurs pour une nation juste et loyale, l’Assemblée eut décrété la prompte perception des impôts, le comité de Villeneuve se hâta d’en faire par lui-même la levée, et tous les citoyens se firent un devoir de justifier son attente. Lorsque, peu de jours après, un célèbre décret de l’auguste Assemblée nationale recommanda, pour ainsi dire, l’honneur français au patriotisme de chaque citoyen, nous vîmes tous les habitants de cette ville faire à l’envi l’offrande du quart de leurs revenus ; leurs déclarations sont déjà faites depuis plusieurs jours et loyalement faites. Le peuple, même le plus voué aux ressources incertaines de l’industrie, voulut parer d’un modique, mais précieux tribut, l’hôtel de la patrie. Avant cette époque, les objets de luxe lui avaient été voués en pur don. Nous joignons ici une lettre de change de la somme de 2,549 livres 14 sous, ui est le produit des boucles de nos jeunes gens, e l’argenterie de la chapelle de nos pénitents bleus, et de quelques bijoux de 'madame de Bourran. Tel est, Nosseigneurs, le tableau historique de la cité de Villeneuve, depuis le premier moment de la Révolution. C’est pour nous être pénétrés de vos principes, que nous avons marché sans écart et sans chute dans le sentier de la justice, de l’honneur et du vrai patriotisme. Nous remettrons pure et sans tache, à la nouvelle municipalité, une ville heureuse par la paix dont elle a joui, plus heureuse et plus honorée encore par la parfaite adhésion à toutes les lois émanées de l’auguste Assmbîée nationale. Qu’elle daigne recevoir l’irrévocable dévouement de tous les habitants à la garde de l’honneur français, à la défense de la liberté publique et au maintien de notre sacrée Constitution. Un aperçu rapide sur l’état présent des provinces et sur les troubles que l’intérêt particulier y suscite alarme les bons citoyens; et les prétentions particulières de plusieurs villes heurtent le principe de l’intérêt général. La commune de Villeneuve, qui, jusqu'ici, s’est conduite avec autant de modération que d’équité, s’empresse d’adopter d’avance, avec respect et satisfaction, les divisions de territoire et de pouvoir administratif qui seront décrétées par l’auguste Assemblée nationale. Un membre de l'Assémblée a présenté une adresse du bourg du Châtelet en Brie, qui annonce la ferme adhésion aux décrets de l’Assena-blée nationale, dont elle développe les effets infiniment avantageux pour tous les citoyens, et principalement pour la classe pauvre et souffrante répandue dans les campagnes, si longtemps fatiguée du joug accablant du fisc et de la milice. Ce bourg réclame de la justice de l’Assemblée nationale l’attribution d’un canton et l’établissement d’un juge de paix ; il observe qu’il est situé sur la grande route de Lyon, à 3 ou 4 lieues de Melun, de Montereau et des autres villes susceptibles de devenir centre de département ou de district, et qu’il est environné d’une vingtaine de villages dont il est le point central, et qui n’ont à leur proximité aucun autre bourg important, ni aucune route praticable. Enfin, il annonce que les plus pauvres manou-vriers se sont empressés de contribuer à la prestation du quart patriotique, et que cette contribution s’élève déjà à 1,200 livres. M. Ic comte de Sérent présente un don patriotique de la ville de Nevers consistant en 52 marcs 6 onces, 5 gros d’argenterie et 1,169 livres d’argent comptant. M. Bertrand, député de Saint-Flour, principale ville et capitale de la Haute-Auvergne, présente une adresse de cette ville contenant adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, et le don patriotique du montant des impositions mises sur les ci-devant privilégiés pendant les six derniers mois de l’année 1789. La municipalité de la paroisse de Crosne a pareillement fait hommage à la patrie d’une somme de 480 livres, dont la restitution lui avait été faite par les agents de l’intendance. La ville de Falaise a présenté en don patriotique 63 marcs cinq onces d’argenterie. L’Assemblée, satisfaite de ces marques de patriotisme, a accordé la séance aux députés de Falaise et de Cosne. M. Gallot, député | du Poitou, annonce que M.de Berge, ancien médecin de l’hôpital de laFère, actuellement médecin eu chef des épidémies de la généralité de Soissons, a fait remise du brevet d’une pension de 200 livres à lui accordée pour 40 années de services ; l’Assemblée nationale n’a pu qu’applaudir au désintéressement et au patriotisme de ce citoyen. Le sieur Deome, relieur de l’Université de Paris, et de la commune de cette ville, désirant contribuer, autant qu’il est en lui, à la conservation des travaux précieux de l’Assemblée, a fait l’offre de relier gratuitement et sans frais les procès-verbaux de la session actuelle, qui sont déposés aux archives nationales, et le recueil des ouvrages qui, pendant la même session, seront imprimés par les ordres de l'Assemblée; sa proposition a été acceptée, et le titre de relieur de l’Assemblée nationale lui a été donné. Le sieur Dijon, relieur de l’Académie des inscriptions, a fait ensuite les mêmes offres; l’Assemblée en a été très-satisfaite, mais elle n’a pas pu les accepter, attendu l’acceptation qu’elle venait de faire des offres du sieur Deome. M. le Président rend compte d’une adresse des députés envoyés des manufactures et du commerce, qui prient l’Asemblée nationale d’indiquer un jour fixe et prochain pour entendre le rapport