234 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 juillet 1789.] arrivés aux environs de la Bastille ; l’inutilité des députations qui ont été envoyées par le comité au gouverneur de la Bastille, avec un tambour et un drapeau pour y porter des paroles de paix, et demander que le canon de la Bastille ne soit point dirigé contre les citoyens; la mort de plusieurs citoyens tués par le feu de la Bastille ; la demande faite par une multitude de citoyens assemblés, d’en faire le siège ; les massacres qui peuvent en être la suite ; et de supplier l’Assemblée nationale de vouloir bien peser dans sa sagesse, le plus promptement qu’il lui sera possible, le moyen d’éviter à la ville de Paris les horreurs de la guerre civile. « Enfin, d’exposer à l’Assemblée nationale que l’établissement de la milice bourgeoise, et les mesures prises hier, tant par l’Assemblée des électeurs que par le comité, ont procuré à la villle une nuit plus tranquille qu’elle n’avait pu l’espérer d’après le nombre considérable des particuliers qui s’étaient armés le dimanche et le lundi avant l’établissement de ladite milice ; que par le compte rendu par différents districts, il est constant que nombre de ces particuliers ont été désarmés et ramenés à l’ordre par la milice bourgeoise. Fait au comité le 14 juillet 1789. » « Signé]: de Flesselles, prévôt des marchands, et résident du comité; Moreau de Saint-Merry; ancal des Issarts; Rouen, échevin; Vergne, échevin; Ghignard; Fauchet, et Ganilh. » « Nous soussigné, électeur de Paris, membre du comité permanent, et député par ce comité, à l’Assemblée nationale, certifions la copie ci-dessus et de l’autre part, conforme au procès-verbal de la délibération dudit comité. A Versailles ce 14 juillet 1789. « Signé : Bancal des Issarts. » M. le marquis de Lafayette, vice-président, a répondu aux députés : Messieurs, l’Assemblée nationale, pénétrée des malheurs publics, n’a cessé de s’occuper jour et nuit du moyen de les prévenir ou de les arrêter. Dans ce moment même, son président, à la tête d’une députation nombreuse, est chez le Roi, et lui porte de notre part les instances les plus vives pour l’éloignement des troupes. Je vous invite, Messieurs, à rester i parmi nous, pour être témoins du rapport qui va nous être fait. Un vœu général s’est manifesté pour que, sans attendre le retour de la première députation, une seconde fût envoyée au Roi, l’instruisît des détails qu’on venait d’entendre, et lui portât l’arrêté qui avait été pris par le comité de l’Hôtel-de-Yille. M. le marquis de Mfiontesquiou observe qu’il est nécessaire, avant de faire partir la seconde députation, d’entendre la réponse qui aura été faite à la première. Un avis a été ouvert pour mander les ministres, et pour commencer à exécuter la déclaration par laquelle l’Assemblée les avait hier rendus responsables de tous les malheurs qui pouvaient arriver. La seconde députation a été nommée. Gomme elle se disposait à sortir, la première est rentrée. M. liefranc de l'omplgnan, président , a rendu compte, et la réponse écrite que le Roi lui avait remise a été lue ,à haute voix. Elle était ainsi conçue : « Je me suis sans cesse occupé de toutes les mesures propres à rétablir la tranquillité dans Paris. J’avais, en conséquence, donné ordre au prévôt des marchands et aux officiers municipaux de se rendre ici, pour concerter avec eux les dispositions nécessaires. Instruit depuis de la formation d’une garde bourgeoise, j’ai donné des ordres à des officiers généraux de se mettre à la tête de cette garde, afin de l’aider de leur expérience, et seconder le zèle des bons citoyens. J’ai également ordonné que les troupes qui sont au Champ-de-Mars s’écartent de Paris. Les inquiétudes que vous me témoignez sur les désordres de cette ville, doivent être dans tous les cœurs, et affectent vivement le mien. » 11 a été demandé de toutes parts que la seconde députation partît ; et elle s’est rendue auprès du Roi. Elle est revenue peu de temps après ayant eu une prompte audience de Sa Majesté. M. Leclerc de Juigné, archevêque de Paris, qui avait porté la parole, et qui, après avoir conjuré le Roi de se rendre aux vœux de l’Assemblée, lui avait lu en entier l’arrêté pris à l’Hôtel-de-Ville, a rendu compte de la réponse verbale de Sa Majesté, qui portait en substance : « Messieurs, vous déchirez mon cœur de plus en plus par le récit que vous me faites des malheurs de Paris : il n’est pas possible de croire que les ordres qui ont été donnés aux troupes en soient la cause. Vous savez la réponse que j’ai faite à votre précédente députation; je n’ai rien à y ajouter. » II a été proposé d’envoyer demain, dès huit heures du matin, une nouvelle députation à Sa Majesté. Différentes questions ont commencé à être agitées relativement à l’objet de cette nouvelle députation. M. le Président s’étant retiré, M. le vice-président, après avoir entendu quelques discussions, a observé que ce qui était le plus instant, était de renvoyer les députés de Paris munis d’une réponse de l’Assemblée nationale. L’Assemblée a fait aussitôt l’arrêté suivant, dont elle leur a remis une expédition. « L’Assemblée nationale, profondément affectée des malheurs qu’elle n’avait que trop prévus, n’a cessé de demander à Sa Majesté la retraite entière et absolue des troupes extraordinairement rassemblées dans la capitale et aux environs. Elle a encore envoyé dans ce jour deux députations au Roi sur cet objet, dont elle ne cesse de s’occuper nuit et jour. Elle, fait part aux électeurs des deux réponses qu’elle a reçues. Elle renouvellera demain les mêmes démarches ; elle les fera plus pressantes encore, s’il est possible : elle ne cessera de les répéter, et de tenter d e nouveaux efforts, jusqu’à ce qu’ils aient eu le succès qu’elle a droit d’attendre et de la justice de sa réclamation, et du cœur du Roi, lorsque des impressions étrangères n’en arrêteront plus les mouvements. » Attendu qu’il était près de deux heures du matin, la délibération a cessé ; mais M. le vice-président a annoncé que la séance tenait toujours, et qu’en cas de nécessité, les délibérations seraient reprises d’un instant à l’autre.