|gg [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 septembre 1789.] répartition de ces impositions qu’ils ne payeront pas, soit à la direction des travaux publics qui ne s’exercent point sur les héritages dont ils sont dénués, soit à la garde des propriétés que leurs parents ne leur ont point transmises et qu’ils n’ont pu encore acquérir. L’homme de cette classe doit être libre et heureux; il est prêta tout dans la société; il y peut parvenir à tout par le travail, par l’économie, parles bonnes mœurs ; mais il n’y est pas encore quelque chose; la société est faite pour lui, il n’est pas encore fait pour elle; et son propre intérêt demande que ce soient ceux qui ont à perdre, qui s’occupent de conserver, et ceux qui ont eu le loisir et les moyens d’acquérir le plus d’instruction, que l’on charge de la répandre. Je pourrais aller plus loin, Messieurs, et promenant vos regards sur l’année 1791, que vous commencerez avec un excédant de plus de quarante millions dans les finances, après avoir diminué de près de quatre-vingt millions les impositions et les droits dont le peuple a le plus souffert, je pourrais suivre l’emploi des secours de la banque, soutenus par cinq milliards de capital, qui vous resteront encore, tant des biens ecclésiastiques et des dîmes, que des domaines ; montrer l’amélioration de ceux-ci, par les soins des assemblées principales des cercles, des assemblées de département, et des assemblées municipales; suivre les effets de l’aliénation des biens-fonds et du rachat des dîmes ; développer ceux de la diminution progressive des intérêts à la charge de l’Etat et de celle de l’intérêt de l’argent en général pour les succès de l’agriculture, des manufactures et du commerce ; trouver, dans les nouveaux revenus qui se libéreront, la possibilité de supprimer la partie fiscale des droits de contrôle des actes; et marquant l’époque de remboursement total des dettes publiques, peindre l’Etat avec encore plus de deux milliards de capitaux libres, diminuant les charges d’une main, prodiguant de l’autre les avances pour la fertilisation du territoire, pour les plantations, pour les canaux, pour les chemins, pour les ports de mer, pour l’instruction en tous les genres, pour l’encouragement de tous les travaux utiles, élever l’empire français à un degré de prospérité dont l’imagination même est étonnée. Léguons à nos successeurs ces hautes entreprises que nous aurons nécessitées par nos premiers pas. Il nous suffit d’avoir exposé ce qui est à faire, et ce qui peut être fait, ce qui doit l’être par vous, Messieurs, pendant le temps que vous composerez la législature. 11 nous suffit d’avoir montré, qu’à quelque degré de malheur et de désordre qu’on l’ait conduite, une nation spirituelle, honnête et courageuse, qui réunit 27 à 28 millions d’âmes, sur un territoire de 27,000 lieues carrées, ne peut jamais être perdue; qu’il n’y aurait que l’ignorance, l’incapacité, la faiblesse, qui pussent désespérer de ses affaires, et que vous laisserez la France autant au-dessus de ce qu’elle a jamais été, que vous l’avez trouvée au-dessous. Nousnous devions à nous-mêmes, nous devions aux citoyens qu’on effraye, aux créanciers qu’on décourage, aux ennemis intérieurs et extérieurs de notre patrie, qui déjà croyaient planer sur son cadavre, et s’en disputer les lambeaux, de manifester combien nous avons encore de vie, quelle nation nous sommes, de quelles immenses ressources nous sommes entourés, et que, dans les dangers qui nous assiègent, il ne peut y avoir à trembler que pour ceux qui voudraient les accroître, pour les vampires, pour les serpents et pour les léopards. Intimement convaincu de ce fait important, je vous demande pardon, Messieurs, d’avoir employé un si long espace de votre temps à vous en détailler les preuves. Sans doute elles vous étaient superflues ; mais elles peuvent ne l’être pas pour le crédit national, pour la confiance publique, pour le respect que, même en vos jours de détresse, vous devez inspirer à l’étranger. On demande l’impression et la distribution du discours de M. Dupont de Nemours. — L’une et l’autre sont ordonnées. Plusieurs projets d’arrêtés ont été présentés sur le plan d’opérations de M. Necker. Par une motion incidente, un des membres a demandé que le mémoire du premier ministre des finances fut renvoyé à l’examen du comité des Douze, qui en ferait son rapport incessamment, et que le décret sur les impositions, dont l’Assemblée s’occupe depuis quelque temps, fut terminé avant de lever la séance. M. Bureaux de Pnasy a proposé d’adjoindre quatre membres, pris dans l’Assemblée, au comité particulier de douze personnes précédemment établi pour les plans et opérations de finance. Enfin, la question préalable a été réclamée sur la dernière de ces propositions , et l’Assemblée a décidé qu’il n’y avait pas lieu à délibérer. On est revenu ensuite sur la précédente motion ; elle a été divisée ; et par le résultat de la délibération sur la première partie , il a été statué que le mémoire du premier ministre des finances serait renvoyé au comité des Douze, pour être par lui examiné et rapporté à la séance du samedi matin. Sur la seconde partie de la même motion, la délibération relative au décret sur les impositions a été renvoyée à la séance de ce soir. M. le Président a proposé de prononcer avant la levée de la séance, sur l’affaire de Yernon. L’Assemblée délibérant sur le projet d’arrêté qui lui a été soumis par le comité des rapports, et sur différents amendements qui y ont été joints, a confirmé son décret du 10 août dernier, concernant le rétablissement de la tranquillité publique, et ceux des 29 août et 18 septembre présent mois, relatifs à la libre circulation des grains et farines. En conséquence elle a déclaré qu’elle désapprouve la conduite qui a été tenue par le comité provisoire qui s’est établi dans la ville de Vernon ; et qu’elle prend et met sous sa sauvegarde tous et chacun des citoyens dont la tranquillité avait pu ou pourrait être compromise depuis l’origine des troubles qui se sont élevés, soit à raison de la formation dudit comité, soit à raison de l’approvisionnement de ladite ville. Au surplus, l’Assemblée renvoie à Sa Majesté la connaissance des contestations survenues entre les habitants de Vernon. M. le Président, après avoir annoncé la convocation de différents comités, a indiqué la séance de ce soir à sept heures.