314 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. JJ « Représentants, « Nous vous envoyons les dépouilles du roya¬ lisme et de T aristocratie. Bientôt nous mettrons à votre disposition celles de la superstition et du fanatisme. Nos ci-devant prêtres s’empressent de renoncer à leur charlatanisme et nous aban¬ donnent les instruments précieux dont ils se servaient pour tromper le peuple. Nous atten¬ drons, citoyens, vos ordres, pour disposer de ce dépôt qui sera bientôt réuni dans la maison commune. » (Suivent 21 signatures.) « Du 11 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. » Les citoyens de la commune de Justine, dé¬ partement des Ardennes, annoncent à la Con¬ vention nationale qu’ils ont, à l’unanimité, con¬ sacré leur église sous le nom de temple de la Raison, pour y prêcher la morale pure et sim¬ ple; ils sont redevables de ce bon esprit au ci¬ toyen Garnier, leur ci-devant curé, qui a remis ses lettres de prêtrise; ils ofïrent leur argenterie à la République; ils font part que le citoyen Mil-lard a déposé 100 livres dans le sein de leur so¬ ciété, pour les indigents, et autant dans la com¬ mune d’Herbigny qu’il habite; ils joignent à leur adresse l’état de leur argenterie, et invitent la Convention nationale à rester à son poste. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre des citoyens de la commune de Justine (2). « Citoyens législateurs, « Les citoyens de la commune de Justine, réunis en Société populaire, ressentant l’impul¬ sion de la philosophie et de la raison, viennent d’arrêter, hier dix frimaire, aux acclamations des citoyens et citoyennes de cette commune, présents à la séance, que leur ci-devant église serait consacrée pour y prêcher la morale pure et saine, et qu’elle serait désormais appelée le Temple de la Raison. « Citoyens législateurs, vous serez peut-être étonnés d’apprendre quel est celui à qui nous devons ces progrès de lumière. Eh bien ! c’est au citoyen Grenier, notre ci-devant curé, fonda¬ teur et président de notre Société républicaine ; c’est à lui à qui nous sommes redevables de ce bon esprit qui a toujours animé notre com¬ mune, cet amour sacré de la liberté et de Léga¬ lité, cette haine des rois et des tyrans de toute espèce, qui doit toujours être dans le cœur des vrais républicains. « Pour abdiquer son état de prêtre, notre ci-devant curé n’a point attendu votre décret qui accorde des pensions aux prêtres, qui ont renoncé, ou qui renonceront à leurs fonctions; l’intérêt particulier ne l’a jamais guidé. Le trente brumaire dernier il a remis, entre les mains de la municipalité, ses lettres de prêtrise et ses institutions de curé dont il a fait un auto¬ dafé au pied de l’arbre de la fraternité, aux cris répétés par tous les citoyens de Vive la Répu¬ blique une et indivisible, et a déclaré ne vouloir prêcher dorénavant que la saine morale, et ne reconnaître d’autre culte que oelui de la liberté et de l’égalité. Si les prêtres sont proscrits dans l’opinion publique, notre ci-devant curé doit en être excepté nous ne vous disons point, comme plusieurs communes, nous ne voulons plus de notre curé, mais nous vous disons en bons sans-culottes : Nous offrons à la Répu¬ blique l’argenterie de notre ci-devant église, mais nous conservons notre ci-devant curé pour profiter de ses lumières, et nous guider dans la carrière des vrais principes de morale qu’il nous a prêchés depuis la Révolution. « L’adoration de l’Etre suprême, la justice, l’humanité, la bienfaisance dans toutes les occa¬ sions, l’amour sacré de la patrie, de la liberté et de l’égalité, en un mot la République une et indivisible, voilà la religion des républicains de la commune de Justine. « Souffrez, citoyens législateurs, que nous vous retracions ici un acte de bienfaisance. Le citoyen Millart, président de la commune d’Her¬ bigny, voisine de la nôtre, vient de déposer dans le sein de notre Société une somme de cent livres pour être distribuée aux plus indigents de cette commune; il en a fait autant dans la commune qu’il habite, nous avons cru que ce trait de bienfaisance méritait d’être connu des pères du peuple. « Citoyens législateurs, nous n’avons plus qu’un mot à vous dire. Restez à votre poste pour achever le sublime ouvrage que vous avez commencé. La République attend de vous son salut. Les espérances ne seront point vaines, vous en avez fait le serment, comme nous avons fait celui de vivre libres ou de mourir. « Nous joignons ici l’état de l’argenterie que nous avons déposée à notre district, laquelle argenterie provenait de notre ci-devant église dont le reçu est ci -joint : « Je soussigné, reconnais que la municipalité de Justine a déposé au bureau de V Administration du district, neuf marcs, une once, six gros, d'argen¬ terie de leur église. « A Rethel, ce quatre frimaire Van second de la République française une et indivisible . « Monnot, secrétaire .» « A Justine, ce onze frimaire l’an second de la République française une et indivisible. » ( Suivent 28 signatures.) Le tribunal régénéré du district de Verdun, département de la Meuse, invite la Convention nationale à rester à son poste; il annonce qu’il a remplacé par le bonnet de la liberté le chapeau qui ne pouvait que rappeler au peuple le sou¬ venir des rois qu’il déteste, et il espère que ces motifs lui mériteront l’approbation de la Con¬ vention; il ajoute qu’il a versé son offrande dans la masse que recueille la Société populaire régé¬ nérée. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1) (T) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 112. (2) Archives nationales, carton G 284, dossier 814. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 112,