SÉANCE DU 28 VENDÉMIAIRE AN III (19 OCTOBRE 1794) - N° 26 275 Liberté Unité Egalité Représentans, Un coeur profondément corrompu, une ame féroce peuvent seuls ne pas ressentir les émotions que nous éprouvons journellement avec de nouveaux délices à la lecture des principes de justice et de vertu que vous avez donné pour le signal constant de ralliement à tous les fran-çois républicains. Vous avez raffermi l’opinion publique soulevée par les agitateurs, ébranlée par la variété des tableaux sur la situation du gouvernement, la plupart infidèles, créés d’après les différentes affections de leurs auteurs. Vous avez détrompé les esprits faux et inquiets, terrassé les passions turbulentes, assuré à l’innocence ou à l’erreur la protection de la loy, livré le crime et le brigandage à l’impossibilité de son glaive ; vous avez tout fait enfin pour rendre le peuple fran-çois puissant, paisible, et vertueux; vous avez rempli les devoirs de la sagesse et de l’humanité. Nous ferons germer vos principes nés dans le coeur des administrés de ce district agricole, et si des méchants cherchoient à les y étouffer pour prolonger les calamités qui ont trop long-tems suivi le char de la Révolution, nous ne nous réduirons pas à en favoriser le développement, nous dénomerons ces monstres avec courage comme dignes de l’exécration publique. Le plan de justice et de vertu offert à notre espoir par la Convention nationale nous a rendu plus odieuse la scélératesse de l’assassin du représentant Tallien. Qu’il reste ainsi que vous dans ce sanctuaire épuré, où pour avoir eu le courage d’attaquer le monstre de l’oppression il a monté le premier degré du Panthéon en aimantant les poignards de la tirrannie. Restés y jusqu’à ce que la vertu universellement pratiquée par les françois, la liberté im-pertubablement consolidée par les moeurs, la Patrie soit devenue réellement heureuse et respectable sous tous les rapports pour l’univers entier. Salut, dévouement et vive la République. Cherat, président, Bachod, agent national et onze autres signatures. 26 La société populaire de Villeneuve-de-Berg se plaint de ce que le département de l’Ardèche a été peint sous des couleurs peu favorables. Quel pays, dit-elle, aima plus la révolution et fut mieux placé pour l’aimer? Quel département l’a plus fidel-lement servie? Elle rend compte de la conduite de ce département depuis le commencement de la révolution. Soyez convaincus, dit-elle, que vous n’avez pas de meilleurs amis que nous. Mention honorable, insertion au bulletin (46). \La société populaire de Villeneuve-de-Berg, département de l’Ardèche, à la Convention nationale, s. d.] (47) Liberté Egalité Fraternité ou la Mort Citoyens représentants, Toutes les sections d’un département sont solidaires et la portion de louange ou de blâme assignée à sa totalité est aussitôt réversible sur chaque district, chaque canton, chaque commune qui la compose; quand la patrie est attaquée, tous doivent la déffendre. Le département de l’Ardèche vous est présenté depuis quelque temps sous des couleurs peu favorables, sous des couleurs fausses, osons le dire ; des enfants peuvent verser leurs plaintes dans le sein de leur père. Quel est donc le motif de ces suggestions perfides qui tendent à inculper une contrée inébranlable dans ses principes et fidèle dans sa conduite? Barère, en énumérant, le 9 messidor, les crimes de l’an 1793, dit : L’Ardèche en révolte. Couthon en faisant le rapport de l’affaire de Vincent Malignon, nous désigne sous le nom incertain, injurieux d’une section de la république, encore appelée le département de l’Ardèche ; Ingrand, le 3 vendémiaire ( Journal de Perlet du 3 vendémiaire, n° 730), assure que l’Ardèche est en état de contre-révolution. Législateurs, le civisme de Barère a été évidemment surpris, et ce représentant est trop juste, trop éclairé pour ne pas convenir que tandis qu’il croyait l’Ardèche en révolte, l’Ardèche toute entière courrait éteindre la révolte de Charrier dans la Lozère ; et que les braves volontaires, sans se reposer un instant, volaient delà, au nombre de quinze mille, pour étouffer la rébellion de Commune Affranchie. Leurs faits d’armes sont connus : car la gloire les a publiés par la bouche même des vaincus ; et le drapeau que nous leur avons enlevé et qui est déposé en trophée, dans la salle de nos séances, atteste la bravoure et les succès des lions de l’Ardèche. Nous ne nous arretterons pas longtemps au dire de Couthon ; soit que ce conspirateur voulut éteindre le nom du département de l’Ardèche dans le sang de ses habitants, soit qu’il prétendit le métamorphoser en royaume, apanage se son impotente majesté ; ses inculpations sont aussi impures que ses actions et son supplice nous a justifié. Le blâme d’un tyran est l’éloge d’un pays libre; que la phrase de Couthon reste à jamais pour notre gloire ! L’assertion du représentant Ingrand nous surprend avec plus de raison ; et quelques fausses notions suggérées sans doute par les (46) P.-V., XLVII, 259. (47) C 322, pl. 1355, p. 28.