414 [Convention nationale. J ARCHIVES i*ARLKMEM AIRES. ) �novembre 17931 Art. 13. « Tous les marins, en quelque qualité qu’ils soient employés sur les vaisseaux de l’ État, sont exhortés à remplir fidèlement leurs devoirs dans le poste que la patrie leur a confié, à respecter la discipline, et à mériter par leur civisme et par leur conduite les récompenses que la justice nationale promet à tous ; ils sont invités les uns envers les autres, et relativement aux propor¬ tions de leurs grades, de maintenir l’obéissance aux lois, de noter, de dénoncer et même de punir les traîtres ou les lâches qui entraveraient le service, qui répandraient le découragement parmi les équipages, ou qui, de toute autre ma¬ nière, nuiraient au salut de la chose publique. Art. 14. « Le rapport fait aux représentants du peu¬ ple, le présent arrêté, et les pièces justificatives seront imprimés, envoyés à la Convention na¬ tionale, au comité de Salut public, au conseil exécutif, et distribués sur tous les vaisseaux. » Signé : Bréard, Jean -Bon-Saint-André; Duras, secrétaire de la Commission. Copie d'une lettre écrite au comité de Salut public. * Représentants, Au moment où les ennemis de la liberté se coalisent partout et font tous leurs efforts pour allumer ici la guerre civile, le danger de la pa¬ trie nous fait un devoir sacré de nous adresser à vous pour vous prévenir des menées ourdies par des riches égoïstes, des accapareurs, des né¬ gociants, La plupart promus, à force d’intrigues, à des autorités qu’ils compromettent. « Les événements des 31 mai et suivants, que tout bon Français doit bénir, ont été ici le mo¬ ment d’éclat contre la Convention, les ministres et toute la ville de Paris; l’air de Brest n’a re¬ tenti depuis que des invectives les plus atroces, des calomnies les plus noires contre tout ce qui émane de cette capitale. Les factieux ont tout entrepris, tout employé pour présenter aux sans-culottes du pays la Convention sous le point de vue le plus hideux, la taxant de triumvirat, de tyrannie, et les Parisiens, de brigands san¬ guinaires et d’assassins. L’Acte constitutionnel, chef-d’œuvre de vos lumières, gage précieux qu’adorera la postérité, a été vilipendé et pres¬ que proscrit ; discours, libelles, placards, ont été mis en usage pour en provoquer le refus du souverain. « Plusieurs de nos frères, livrés à la satire et .aux risées les plus humiliantes, un de nos ca¬ marades vexé et traduit à la municipalité, pour avoir, par excès de zèle, fait arracher un placard imprimé, portant en titre : Egalité, plus de Mon¬ tagne, venu du comité central établi à Rennes, prêchant l’anarchie, le refus de la Constitution et la guerre civile; les meilleurs républicains, pour avoir dévoilé l’horreur de ces faits, honnis, insultés, traités publiquement de factieux sol¬ dés par Marat, la Montagne, etc., etc. ; tels sont les efforts et la conduite de la horde aristocrate our nous replonger dans l’esclavage le plus onteux. .. Depuis la malheureuse reddition des villes de Condé et Valenciennes, ces tigres altérés de sang lèvent une tête audacieuse ; ils osent même nous montrer au doigt dans la rue, prêcher pu¬ bliquement et hautement une sainte insurrec¬ tion; et contre qui? contre nous qui avons tou¬ jours reconnu la souveraineté du peuple dans la majorité de ses représentants; contre nous qui avons applaudi à l’insurrection du 31 mai; contre nous qui avons éclairé udb grande partie du peuple sur la Constitution, et même beaucoup contribué à son acceptation; contre nous qui avons blâmé, désavoué le fédéralisme, contre nous qui voulons que les lois décrétées par la Convention soient proclamées et exécutées.; contre nous qui demandons que le châtiment des coupables puisse intimider tous les traîtres ; contre nous enfin, qui jurons de mourir pour soutenir l’unité et l'indivisibilité de la Répu¬ blique. « Tels sont, représentants, les sentiments qui nous ont animés depuis le commencement do la Révolution; c’est cette conduite qui nous a mérité une sorte de proscription et des vexa¬ tions raffinées de la part des agents et suppôts de la ligue anti-constitutionnelle. Nous croyons devoir vous faire cette déclaration, tant pour détruire les calomnies dont nous pouvons être assaillis, ainsi que beaucoup de nos camarades, que pour vous prévenir des dangers que courent même nos personnes. Et nos cœurs et nos bras sont dévoués à la protection des lois ; quels que soient les moyens de sévérité que vous ordon¬ niez contre les ennemis de la chose publique, nous nous ferons un devoir d’en seconder l’exé¬ cution, et nous protestons d’avance contre toutes menées et trames qui peuvent être our¬ dies pour en déconcerter les mesures. Unique¬ ment occupés du désir d’être utiles à notre pa¬ trie, vous trouverez en nous des amis sincères de la vérité et de francs militaires républicains ; autant de fois que vous voudrez les consulter, nous serons toujours prêts à avouer de bouche ce que notre main peut faire et tracer par écrit. « Représentants, c’est avec cette franchise que nous nous disons respectueusement vos con¬ citoyens, officiers des troupes de la marine. « Signé : Leclerc, sous -lieutenant ; Martin, lieutenant du 1er régiment ; Roclo, Gou-zier, sous -lieutenants ; Gautier, sous-lieutenant du 2e régiment ; Len otte, adju¬ dant-major. « P. S. On ne peut sans indignation et sans crainte remarquer que beaucoup d’individus qui ont manifesté hautement leurs opinions et leur refus sur l’Acte constitutionnel, continuent à s’en applaudir, à le décréditer de nouveau, et à menacer des hommes faibles de suites fâcheu¬ ses et de dangers dont ces intrigants creusent ouvertement l’abîme. « Si vous jugiez à propos de donner publicité à c.ette lettre, nous sommes persuadés de votre sagesse sur la considération des suites que nous causerait ici la vue de signatures individuelles. « Brest, le 14 août 1793, l’an II de la Répu¬ blique française. » Copie de la déposition du citoyen Bélval, sous-chef de l’administration de la marine, faite aux i. représentants du peuple près les côtes de Brest et de Lorient, le 27e jour du 1 er mois de l’an II de la JRépublique française, une et indivisible. Citoyens, Les lettres des députés Kervélégan, Blad et Gommaire avaient alarmé le Finistère sur le [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 1° brumaire an II 415. - 5 novembre 1793 destin de la Convention ; ils écrivaient sans cesse aux administrés de ce département, qu’ils n’é¬ taient pas libres et qu’ils délibéraient sous la hache des assassins; enfin, que peut-être ils n’existeraient plus lorsque leurs lettres arrive¬ raient à leur destination. Une inquiétude uni¬ verselle s’empara de tous les esprits, l’on crut la Convention en péril, et l’on résolut de mar¬ cher à son secours. La force départementale fut arrêtée, et elle se mit en marche avec l’ordre formel de se rendre aux ordres de la Conven¬ tion; et, pour signe de fraternité, elle emporta avec elle le drapeau qui lui fut donné par la section du Finistère de Paris, après la mémo¬ rable journée du 10 août. Les sections de Brest choisirent les citoyens les plus dignes; et il y aurait eu du danger et déshonneur à refuser sem¬ blable mission. Tandis que nos concitoyens mar¬ chaient vers Paris, un nommé Cail, du Calva¬ dos, vint répandre son influence pernicieuse sur les administrateurs du Finistère. On changea la marche de la force fiuistérienne, et Caen reçut dans son sein des hommes libres, destinés, dans le principe, à servir la cau-e de l’indivisibilité, et qui, sans le savoir, servaient une cause étran¬ gère à leurs cœurs. J’avais oublié de dire qu’à l’instant où il fut question de la force départe¬ mentale, Broussard. commandant un bataillon de Paris, fut le seul qui donna des assurances consolantes sur les destinées de la Convention, mais qui adhéra cependant à mes propositions, qui consistaient à se rendre à Paris pour fra¬ terniser avec les Parisiens, et à offrir à la Con¬ vention une égide contre les scélérats de tout masque. Les députés proscrits se mêlèrent, en quittant le Calvados, avec les Finistériens qui retournaient vers leurs foyers; quelques mécon¬ tentements éclatèrent en route, et Cavellier vou¬ lait s’opposer à ce qu’on les ramenât plus avant. L’administration supérieure, informée que ces hommes, frappés d’un décret, reportaient leurs pas vers nos asiles, députa deux de ses membres pour arrêter cette destination; ils venaient, à cette époque, de quitter les rangs de nos fédé¬ rés, et, accompagnés de Bouché, ils gagnaient les environs de Quimper. Les bruits répandus et les conversations particulières m’ont seuls informé de ces détails. Us arrivèrent enfin, et ce n’était point un mystère : on les regardait comme des hommes malheureux. Pas un être n’avait eu le courage de porter la lumière dans l’esprit de ses concitoyens. Peu de temps après, je me rendis à Quimper pour affaires du service de la marine et de l’Administration, et j’appris qu’une grande partie des députés avait vidé le territoire, et qu’il n’en restait que quelques-uns, retenus pour cause de maladie. Les Mens de la société m’avaient donné des habitudes dans la maison de Kervélégan, qui était le dieu révolu¬ tionnaire des cantons circonvoisins et de Quim¬ per. Ce fut lui-même qui me donna ces rensei¬ gnements; je le croyais très patriote, et je lui fis des reproches même de n’avoir pas suivi la des¬ tinée des autres : il me dit ne point vouloir par¬ tir. Peu de jours après mon retour à Brest, Pou-Mquen me parla des moyens de sauver quelques députés restants, toujours considérés comme des hommes vertueux : la chose était facile, me dit-il ; j’ai un bâtiment; tu viendras avec nous, et nous les sauverons. Je sentais qu’il était bien important de déMvrer notre sol de la présence de ces députés; je craignais que les campagnes, souvent prêtes à se soulever, ne vinssent enfin à-s’apitoyer sur leur sort : un décret frappait le conseil général du Finistère, et atteignait en même temps tous ceux qui avaient agi d’après. sa volonté. Mes parents et plusieurs de ceux que j’estimais se trouvaient rangés dans cette classe malheureuse; et je ne me dissimulais pas. que si mon opinion venait à se réahser, le ter¬ ritoire du Finistère n’offrît bientôt que l’image d’une Vendée. A tous ces motifs se joignait la persuasion où j’étais que ces hommes n’avaient point adopté la marche nécessaire à notre ré¬ volution, et qu’ils avaient été coupables du manque d’énergie : pénétré de ce sentiment je restai tranquille jusqu’au moment où Pouliquen vint me dire : tout est prêt, demain il faut par¬ tir. J’étais malade, j’avais promis, je croyais, faire une belle action, je me mis en route. Nous prîmes un bateau de pêche pour nous rendre à Lanvau, de là nous fûmes à Quimper. PouM-quen les fit avertir, je crois, par le canal d’Ab-gral. Kervélégan, que je ne vis point, ne voulut point être du voyage. Nous nous mîmes de nou¬ veau en route, et les députés, que je n’avais jamais vus, et avec qui je n’avais point eu de relation, se trouvèrent sur la route, aux Heux qui avaient été désignés. L’un d’eux, qu’on dit être Pétion, me déplut infiniment, et je le dis à Pouliquen. On s’arrêta pour leur donner à manger, ils étaient accablés de fatigues et de craintes : nous arrivâmes à Lanvau, et nous prîmes un bateau de ce pays pour les conduire à bord du bâtiment qui devait les éloigner de nos côtes, n’ayant point trouvé sur la rive opposée à Brest un bateau de pêche qui devait nous y attendre, mais qui s’était trompé et avait man¬ qué au rendez-vous donné par PouHquen. Après avoir labouré la rade pendant uns partie de la nuit, nous vîmes, aux approches du jour, le convoi de Bordeaux faisant route pour sa des¬ tination; un seul bâtiment restait encore, nous fîmes route vers lui, c’était le navire indiqué, ils entrèrent, et je crus avoir fait une belle ac¬ tion; si j’avais su que ces hommes étaient cou¬ pables, la main qui les servit quelques heures les aurait tous arrêtés. Il est encore deux hom¬ mes qui sont venus dans le Finistère, et qui ont fait route pour Bordeaux; l’un s’appelait Ysarn-Valadi, et l’autre le cofiaborateur de Bris¬ sot. J’ai dû vous dire toute la vérité. Ma patrie est mon dieu, il ne me reste qu’un vœu à for¬ mer : c’est de réparer par quelques actions d’é¬ clat l’erreur où m’ont plongé des hommes char¬ gés de nous éclairer, et qui ont indignement rem-. pM les fonctions qui leur avaient été déléguées. Pour copie conforme : Signé : B EL val., Lettres écrites de Bordeaux, dont on a trouvé les copies remises par le citoyen Guermeur, commis¬ saire du conseil exécutif. "a Notre voyage, mon ami, a été on ne peut plus plus heureux; il devait l’être, car, comme nous l’avions prévu, il était sans autre danger que celui de la mer. Nous avons rencontré une corvette qui croise à la hauteur des Grlénans, la flotte nationale et la frégate stationnaire à. l’entrée de la rivière de Bordeaux. On ne nous a absolument rien dit. Comme nous faisions route le long des côtes, nous semblions toujours. être une barque de pêcheurs. Mais on a coupé les vivres aux habitants, et les sections ont pris .