[Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790.} 247 cupation. Il n’y a personne qui, s’il se donne la peine de réfléchir, n’aperçoive qu’en dotant le curé moitié en biens-fonds, il en sera plus sédentaire, il en veillera plus exactement a ses intérêts ; il trouvera de quoi payer les gages des serviteurs qu’il sera obligé d’entretenir. Quelques précautions que vous preniez, les biens ne pourront jamais être mieux mis en valeur que par les curés. Personne ne connaît mieux qu eux l’agriculture; la Société d’agriculture n’a jamais reçu de meilleurs mémoires que ceux rédigés par les curés. M. d’André. Si vous adoptez l’article qui vous est proposé, vous laisserez entre les mains des ecclésiastique pour plu's de 400 millions de biens-fonds. Il est impossible que les curés puissent suivre l’exploitation; ce travail demande des soins continuels et journaliers qui distrairaient nécessairement les pasteurs de leurs fonctions. De deux choses l’une, lorsqu’on voudrait chercher un curé travaillant à la campagne, pour aller voir un malade, ou il faudrait qu’il abandonnât son champ, ou qu’il abandonnât son malade. S’ils ont envie de s’occuper, ils le peuvent de mille manières. Je pense qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur les deux articles proposés par le comité. M. Trellhard. J’appuie la question préalable . demandée par M. d’André. Dans l’état actuel des choses, il y a un grand nombre de curés qui ne sont pas dotés en biens-fonds, et ce ne sont pas les moins respectables. L’estimation que l’on serait obligé de faire donnerait lieu à une� foule de prévarications ; lorsqu’une municipalité voudrait favoriser un curé1, on lui donnerait pour 300 livres ce qui produirait 4, 5 et même 600 livres. Les fonds que vous seriez obligés de fournir seraient ceux dont il vous serait le plus facile de vous défaire. Vous seriez obligés de donner au moins le tiers de toutes les possessions actuelles du clergé : vous n’auriez plus de quoi faire face à vos assignats. Je conclus à ce que vous adoptiez la question préalable sur les deux articles. (La discussion est fermée.— La question préalable sur les deux articles est mise aux voix. — Deux épreuves successives paraissent douteuses : on réclame l’appel nominal.) M. de Liancourt. Avant de délibérer, l’Assemblée veut sans doute être conséquente; elle a décidé que le clergé ne pouvait être possesseur de biens-fonds. (On insiste sur l’appel nominal.) M . le Président observe qu’il y a une séance du soir, et que l’heure est avancée. L’Assemblée remet au lendemain l’appel nominal sur la question préalable. La séance est levée à trois heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BRIOIS DE BEAUMETZ, EX-PRÉSIDENT. Séance du jeudi 17 juin 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. Briois de Beaumetz, ex-président, occupe le fauteuil à la place de M. l’abbé Sieyès, président en fonctions, qui est absent M. Prieur, secrétaire , fait lecture des adresses ainsi qu’il suit : 1° Adresse delà garde nationale de la ville de Tarascon, qui exprime à l’Assemblée sa vive reconnaissance sur ce quelle a daigné approuver son zèle pour rétablir l’ordre et la subordination chez les dragons de Lorraine. 2° Adresse de la garde nationale de Cette, qui fait une description de la cérémonie de confédération qu’elle vient de contracter avec le régiment deMédoc, en garnison dans cette ville, contre les ennemis de la Constitution. 3° De la ville de Florac, qui s’élève avec force contre les citoyens catholiques de la ville de Nîmes. 4° De la ville de Féverac-le-Château, qui im-prouve la déclaration d’une partie de l’Assemblée nationale. 5° De la communauté de Connozouls, département de l’Aude ; elle se plaint d’une injuste inégalité dans la répartition de ses impôts. 6° Des curés et vicaires composant la congrégation ecclésiastique du Grandvaux, dans le département du Jura, qui prêtent, entre les mains de l’Assemblée, le serment civique. 7° D’une société de citoyens de la ville deSaint-Pol, en Artois. 8° De la ville de Bergerac, qui demande l’établissement d’un tribunal pour connaître des matières de commerce. Elle annonce que l’universalité des habitants vient de créer une banque où les assignats seront reçus et échangés de quelle somme qu’ils soient. f*9° Des habitants de la ville de Sancerre, qui ont solennellement prêté le serment civique. 10° Des officiers municipaux et de la garde nationale de la communauté d’Allement, département de 1a, Marne. 11° De la communauté de Berzieux, département de Châlons-sur-Marne. Elle a fait le don patriotique de la somme de 840 livres. 12° Adresses de la communauté de Saint-Reve-rieu en Nivernais, qui se soumet d’acquérir tous les biens dépendants de son prieuré ; de celle de Villers-Bretoneux, qui offre d’acquérir les domaines nationaux situés dans son territoire, évalués à 11,844 livres ; de celle de Saint-Martin, département du Calvados, qui fait une soumission de 30,000 livres ; de la ville de Briare, qui fait une soumission de 100,000 livres; enfin des bourgs de Frevent, de Rollepot et de Cercamp, réunis au département du Pas-de-Calais, qui offrent d’acquérir tous les biens dépendants de l’abbave de Cercamp. 13° De la communauté de Broyés, département '■ (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . 248 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790. de la Marne. Elle supplie l’Assemblée de ne pas #e séparer avant d’avoir terminé la Constitution. 14° De l’assemblée du district de Charleville, qui consacre ses premiers moments à offrir à l’Assemblée nationale l’hommage de sa reconnaissance pour ses pénibles travaux, et de son admiration pour le décret concernant le droit de la paix et de la guerre, et la déclaration que la nation française n’attentera à la propriété et à la liberté d’aucun peuple : « Il n’y a qu’un instant, disent ces administrateurs, que nous touchions au pays ennemi ; mais nous pouvons espérer que ces odieuses barrières, qui séparent les nations, tomberont un jour, et leur chute et le bonheur des humains seront votre ouvrage. » 15° Des officiers municipaux de la ville de Mon* tauban, contenant le procès-verbal dressé à l’occasion de la liberté rendue par le peuple aux prisonniers détenus depuis la malheureuse journée du 10 mai ; la garde nationale de cette ville a prêté entre leurs mains le serment civique : « Nos principes, dit cette garde dans son adresse, quoi qu’en disent nos ennemis, ne sont pas équivoques : n’en doutez pas, Nosseigneurs, il n’est aucun de nous qui ne sacrifiât sa vie pour défendre sa liberté et le succès d’une Révolution qui la lui assure. » 16° De la ville du Faouet, en Bretagne, qui sollicite un tribunal de district. 17° De la ville de Valognes, contenant le procès-verbal du serment civique de la garde nationale, auquel se sont réunis les étudiants du collège de cette ville. Elle s’élève avec force contre la délibération des citoyens catholiques de Nîmes, et la déclaration d’une partie de l’Assemblée. 18° Des communautés de Poizat, département de l’Ailier, d’Aubergenville, de Lignère-la-Ca-relles etd’Avrilly, département de Saône-et-Loire. Elles font le don patriotique du produit des impositions sur les ci-devant privilégiés. 19° De la communauté de Junas, du département du Gard. Elle supplie l’Assemblée de lui permettre de payer la dîme en argent. 20° Des officiers municipaux du bourg de Ru-migny, en Thiéraehe. 21° Des gardes nationales de la ville de Sept-Fonds et de celle de Brive. Cette dernière exprime son indignation contre la déclaration d’une partie de l’Assemblée. 22° De la municipalité de Jonchery-sur-Vesle, qui annonce que les gardes nationales de toutes les communautés voisines se sont réunies audit lieu, sur le bruit qu’une troupe de brigands ravageait les campagnes; que ce bruit se trouvant faux, elles ont profité de leur réunion pour faire un pacte fédératif contre les ennemis de la Constitution et les perturbateurs du repos public. 23° Des gardes nationales des départements du Puy-de-Dôme, du Cantal, de la Haute-Loire, de la ville de Limoges et du bataillon des chasseurs d’Auvergne, qui ont formé une confédération dans la ville de Clermont-Ferrand, le 15 du mois dernier, à l’instar de celles dont il a été rendu compte à l’Assemblée. 24* Adresse des gardes nationales fédérées au camp de Lyon, contenant vingt-deux pages de signatures des principaux officiers. 25° Adresses des assemblées primaires des cantons de Saint-Claud, en Angoumois, de Gisors, de Pouilly, département de la Nièvre, d’une des sections du canton de la ville de Cosne-sur-Loire. Des électeurs du district de Gusset, de celui de Nemours et de celui de Chaumont, en Bassigny. Toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leur existence à présenter à l'Assemblée l’hommage d’une adhésion absolue à tous ses décrets et d’ua dévouement sans bornes pour leur exécution. Les électeurs du district de Gusset annoncent qu’il s’était élevé des troubles considérables dans le département de l’Ailier; que les malheureux habitants des campagnes, séduits par des insinuations étrangères, croyaient obéir aux lois, alors même qu’ils les violaient : mais que l’ordre et la tranquillité ont été rétablis aussitôt qu’ils ont eu connaissance du décret du 27 mai, qui défend les taxes de grains; qu’ils ne cherchent plus qu’à réparer les violences exercées envers les propriétaires, et gémissent d’avoir affligé le cœur des représentants de la nation. 26°. Adresse du conseil général de la commune de Ruffec, contenant l’expression la plus énergique de sa reconnaissance pour les travaux de l’Assemblée, de l’adhésion la plus respectueuse à ses décrets, et de la plus vive indignation contre ceux qui ont osé se permettre des protestations contre le décret du 13 avril dernier. Les citoyens de Ruffec déclarent qu’ils les regardent comme des traîtres à la patrie, à la loi et au roi; et indignes du titre de citoyens. 27°. Délibération du conseil général de la commune de la ville de Lyon, du 9 juin, par laquelle le conseil général a arrêté que, fidèle au serment civique qu’il a prêté, il est et demeure inviolable-ment attaché à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et notamment à celui du 13 avril, qu’il reconnaît pour être le seul qu’il convient de pro-concer sur notre sainte religion catholique, apostolique et romaine, d’après les exemples de charité, de paix et de tolérance que nous a donnés son divin auteur; qu’engagé par son serment à défendre la Constitution dé tout son pouvoir, il voue à l’infamie, regarde comme parjures et traîtres à la patrie tous ceux qui protesteront eootre les décrets de l’Assemblée nationale ; invite les dépositaires du pouvoir exécutif à poursuivre comme perturbateurs du repos et de la félicité publics, et comme criminels de lèse-nation, tous ceux qui, affectant un zèle hypocrite pour la religion, abuseraient de la chaire de vérité et du saint ministère qui leur est confié pour égarer les âmes faibles, et les soulever contre les sages décrets des représentants de la nation ; arrête en outre que l’extrait du présent arrêté sera incessamment adressé à l’Assemblée nationale par Messieurs composant le bureau municipal. 28° Adresse de la commune du Havre, qui supplie l’Assemblée nationale de décréter que ses réclamations seront présentées à l’assemblée générale des électeurs du département de la Seine-Inférieure, comme celles des villes de Fécamp, Eu et Aumale. 29° Adresse du chapitre de Saint-Rambert-sur-Loire, qui s’empresse de rendre hommage aux décrets de l’Assemblée nationale, et notamment à celui du 13 avril dernier. 30° Adresse des citoyens actifs réunis à Saint-André-d’Echaufour, portant adhésion de reconnaissance; ils applaudissent à la déclaration des droits, aux lois sur les municipalités, aux décrets qui les ont affranchis de la féodalité, de la gabelle; ils supplient l’Assemblée de continuer ses travaux et de les achever. 31° Adresse de la ville d’Aix, par laquelle la municipalité loue la conduite du régiment de Lyonnais en garnison dans cette ville, et en particulier celle de M. de Fezensac, colonel de ce régiment. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790.] 249 32° Adresse des citoyens de la ville d’Aix réunis en cercle patriotique, et voués par leur établissement au maintien de la Constitution. 33° Adresse de Saint-Jean-lès-Orléans, département du Loir, qui contient adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale; on y lit ces expressions bien pratiotiques : « Vous applaudir, vous garder et vous défendre, c’est le premier de nos devoirs. » 34° Adresse du sieur de Lion du Jarry, qui supplie l’Assemblée nationale de vouloir bien mettre la manufacture de glaces , établie à Rouelle, sous la sauvegarde de la nation, de la loi, de la protéger, et Ipi faire une avance de 100,000 livres, en assurant que, si la restauration de cette manufacture n’avait pas lieu, faute dè secours, une branche de commerce si importante serait perdue, les bâtiments tomberaient, les ouvriers seraient sans ressource, et ils seraient forcés d’aller chercher des travaux chez l’étranger; au lieu que le sieur du Jarry les loge gratis à Rouelle avec leurs femmes� et leurs enfants, et qu’il a le plus grand intérêt de les y conserver. 35° Adresse des officiers municipaux de la ville de Sainte-Foi, du 6 juin, qui se félicitent d’être les organes de leurs concitoyens, pour offrir à l’Assemblée nationale le tribut de leurs hommages. Cette adresse contient aussi d’adhésion la plus formelle aux décrets de l’Assemblée nationale, notamment à celui du 13 avril, et une invitation pressante de continuer ses glorieux travaux. 36° Adresse de la garde nationale de Maidière, département de la Meurthe, district de Pont-à-Mousson, qui contient adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et serment de les observer et de les faire observer aux dépens de leur vie. 37“ Adresse de la ville de Beaucaire, qui im-prouve formellement les principes développés dans les délibérations d’Uzès, Nîmes et Alais, réitérant son adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés ou acceptés par le roi, dévouant à l’exécration publique, et déclarant traîtres à la patrie, indignes du nom Français , tous ceux qui, par leurs écrits, leurs assemblées, leurs protestations et leurs actions, chercheraient à affaiblir la confiance due aux augustes représentants de la nation, et l’obéissance à leurs décrets. 38° Adresse de l’assemblée électorale du Ü1S” trict de Dijon, département de la Côte-d’Or, qui manifeste toute l’horreur que leur a inspirée la conduite de ceux qui ont protesté contre le décret qui, rendant lesbiens de l’Eglise à leur véritable destination, va faire disparaître ce déficit immense qui allait mettre le comble à la misère du peuple français. 39° Adresse des électeurs du département du Puy-de-Dôme, qui s’empressent de présenter a l’Assemblée l’hommage de leur reconnaissance et leur adhésion à ses décrets. M. le vicomte de Moailles, membre du comité militaire, propose au nom des comité militaire et de la marine réunis, une addition au décret rendu jpour la fédération nationale. Cette addition est lue et adoptée. L’Assemblée en ordonne la transcription dans son procès-verbal ainsi qu’il suit : 1° Les régiments en garnison dans les colonies françaises ne pouvant pas envoyer une députation directe, députeront pour chaque régiment le plus ancien officier, le plus ancien bas-officier et les deux plus anciens caporaux, grenadiers, chasseurs et soldats, présentement en France. 2° Le régiment d’artillerie des colonies députera comme les régiments d’artillerie en garnison en France. 3° Lé bataillon auxiliaire des colonies, en garnison à Lorient et au Port-Louis, députera de la manière prescrite pour tous les corps de l’armée. 4° Le port de Lorient députera comme ceux de Brest, Toulon et Rocbefort. 5° Les matelots députeront les deux plus anciens matelots par port de roi, et un pour chacun des autres ports. 6“ Les ingénieurs-géographes militaires députeront le plus ancien d’entre eux. 7° Les commissaires ordinaires et écrivains des colonies députeront dans la proportion des ports et arsenaux de marine. 8° Les lieutenants de roi, majors, aides-majors et sous-aides-majors de places députeront le plus ancien d’entre eux. '9° Enfin, les chirurgiens et aumôniers des corps députeront le plus ancien d’entre eux. Signé : Noailles; Rostaing, président du comité militaire; le marquis de Grillon; J. de Menou; Bureaux de Pusy; le marquis de Thiboutot; le marquis de Vaudreuil, président du comité de marine; Nompare de Champagny, secrétaire du comité de marine. Les surnuméraires dans les bureaux de la ferme, admis à la barre, présentent un mémoire où ils exposent les motifs qui les ont déterminés à apporter, devant le tribunal de la nation assemblée, leurs réclamations et leurs prières. L’Assemblée nationale renvoie le mémoire au comité des finances, et M. le président accorde la séance aux surnuméraires, en les assurant de l’esprit de justice qui anime et dirige les opérations de l’Assemblée nationale. M. Maillot donne lecture d’une sentence de police, rendue par les maire et officiers municipaux de Toul, le 9 juin, qui condamne à être lacéré et brûlé un libelle incendiaire, intitulé : Avis important à la véritable armée française ; ordonne un plus ample informé contre les personnes soupçonnées d’être les auteurs, imprimeurs ou distributeurs de cet écrit. (Ou applaudit au patriotisme des officiers municipaux de Toul.) M. Castellanet, député de Marseille , fait part à l’Assemblée que les assemblées primaires d’Au bagne ont pris, le 4 de ce mois, une délibération portant qu’ensuite de la réserve qui lui avait été laissée par un décret de l’Assemblée, d’opter entre le district d’Àix ou celui de Marseille, elle opte provisoirement pour le district de Marseille, sans préjudice de sa réclamation faite à l’Assemblée pour avoir une administration de district; il demande qu’il soit décrété que la ville d’Aubagne fasse provisoirement partie du district de Marseille, et renvoie le surplus à son comité de la division du royaume. (L’Assemblée naiionale décrète que la ville d’Aubague fera partie du district de Marseille, et renvoie le surplus de la délibération de l’Assemblée d’Aubagne à son comité de la division du royaume.) La municipalité d’Harlleur, admise à la barre, offre en don patriotique le remboursement de la finance des offices municipaux, les gages arriérés de ces offices et le montant du rôle de supplé-