(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (21 janvier 1791.] 359 comité de remplacement des tribunaux, autorise le département du G ird à acheter la maison ou couvent des Augustins, pour remplir le service ordinaire de l’administration, en observant les formes prescrites pour l’aliénation des domaines nationaux; et approuvant ses vues pour l’entretien d’un monument précieux à conserver, lui permet de tenir ses séances clans la maison carrée, à la charge, ainsi qu’il l’offre, de l’entretenir d’une manière convenable, aux frais des administrés. » (Le projet de décret est adopté.) L’Assemblée ordonne l’impression de ce rapport. M. Raband-Saint-Ettenne, rapporteur du comité de Constitution (1). Messieurs, je viens vous demander, au nom de votre comité de Constitution, un décret que le respect dû aux lois et à leur majesté rend nécessaire, et que les circonstances rendent instant. Voici quel en est l’objet : Le théâtre de Monsieur a eu avec Mlle de *Mon-tensier, au Châtelet ..... (Murmures.) J’ai annoncé que c’était un objet qui intéressait le respect dû à la loi et à vos décrets; c’est en leur nom que je vous prie de m’entendre. L’objet du procès, Messieurs, c’était une redevance dont la demoiselle de Montensier demandait le payement. Cette redevance avait été imposée aux entrepreneurs du théâtre de Monsieur, en leur accordant le privilège. Il est dit dans l’acte que les entrepreneurs s’y soumettent, d’après la décision de Monsieur, et qu’ils la payeront tant que Monsieur leur conservera ce privilège. Le Châtelet vient de juger que cette cause était légitime, que les privilèges du théâtre n’avaient jamais cessé d’exister, ni dans le fait, ni dans le droit, et il a condamné les entrepreneurs à payer la redevance. Le comité n’a rien à vous dire sur le jugement du fond, et ce n’est pas de quoi je viens vous entretenir. C’est aux tribunaux que vous avez institués qu’il appartiendra de prononcer conformément à la lot ; mais le comité a dû vous porter la plainte qui lui a été adressée sur l’espèce de souveraineté que vient de s’arroger le Châtelet, et qui porte l’alarme dans l’esprit de ceux qui sont encore exposés pour quelques jours à ces procédés arbitraires. Les entrepreneurs ont interjeté appel de la sentence; mais où porter cet appel? Il n’y a point de tribunal en activité. Les entrepreneurs ont prétendu, aux termes de l’ordonnance de 1667, que cette ordonnance ne devait pas être exécutée nonobstant l’appel, ou au moins qu’elle ne devait l’être qu’en donnant caution. Ils ont, dans tous les cas, offert de déposer la somme à laquelle ils étaient condamnés jusqu’au jugement définitif. Cette prétention était fondée sur la jurisprudence passée; elle l’était aussi sur la jurisprudence actuelle, puisque vous avez établi deux degrés de juridiction, et qu’il n’est pas permis d’éluder cette disposition. Les entrepreneurs étaient donc fondés à dire qu’on ne peut être définitivement dépouillé que par un jugement définitif; mais on a joué sur le théâtre de Monsieur le procès de Socrate , et sans doute il est resté au Châtelet de profonds souvenirs de Méliius, de cette fameuse phrase... ( Interruptions , murmures et applaudissements.) (1) Nous empruntons cette discussion au Journal logographique, t. XX, p. 237 et suivantes. M. Martineau. Il n’est pas permis, dans une assemblée législative, d’inculper un tribunal. Plusieurs voix: L’ordre du jour! M. Ifcabaud-Saint-Etienne , rapporteur. Hier, M. Boucher d’Argis a prononcé en référé dans son cabinet que la sentence serait exécutée, nonobstant l’appel, sans que la partie prenante donnât caution. Il a rejeté enfin l’offre du dépôt; voilà, Messieurs, ce que je voulais vous soumettre. Je n’ai pas besoin de vous faire observer, Messieurs, que le Châtelet a abusé étrangement de l’inaction des tribunaux souverains, que cette forme rend la sentence du Châtelet souveraine, puisqu’elle la fait exécuter définitivement. Il a consommé cet acte de tyrannie arbitraire qui interdit aux appelants la faculté d’appeler. Cependant le Châtelet peut jouir encore quatre jours de cette dangereuse usurpation de droit. Quatre jours peuvent immoler plusieurs victimes (Murmures.) et si le Châtelet dirige cette pleine puissance judiciaire, contre les plaideurs dont il pourrait personnellement avoir à se plaindre, plusieurs citoyens doivent être les victimes de ce caprice. Ne dût-il y en avoir qu’un seul, vous lui devez votre protection; vous devez à la sainteté des lois d’en consacrer les principes lorsqu’ils sont publiquement violés. Il est juste que les citoyens, qui plaident au Châtelet en première instance, jouissent pleinement et sans détour de la faculté de l’appel. Il est juste que les tribunaux que vous avez créés ne deviennent pas pour les plaideurs une ressource illusoire ; il est juste qu’une sentence du Châtelet ne soit provisoirement exécutée qu’en donnant camion, afin que l’appelant ne soit pas exposé à se voir dépouillé avant la sentence définitive; il est juste qu’au moins le condamné, sur une demande qui ne serait pas fondée en titre authentique, et qui a interjeté appel, ait la faculté de déposer la somme à laquelle il a été condamné, pour qu’il sache où la retrouver si la sentence définitive le relève. Le comité de Constitution vous propose le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de Constitution, décrète que, jusqu’à l’installation des tribunaux de district de Paris, les sentences du Châtelet en matière civile ne seront exécutoires qu’eu donnant caution par ceux au profit de qui elles seront, sauf à l’appelant, dans le cas où la sentence ne serait pas fondée en titre authentique, à déposer la somme à laquelle il. aura été condamné. L’Assemblée nationale ordonne à son président de se retirer dans le jour par devers le roi pour donner sa sanction au présent décret. » M. Martineau. S’il était question de justifier la sentence du Châtelet, je demanderais que M. le rapporteur voulût bien nous rendre un compte détaillé de toute la procédure et des pièces ..... Plusieurs membres : Aux voix ! M. Martineau. On ne le peut pas sans discussion. Vous, jurisconsultes, venez prendre ma place. Je dis, Messieurs, que ma demande est dans les règles de la plus stricte justice, parce qu’il est de toute impossibilité de décider si un tribunal a bien ou mal jugé sans connaître les pièces ou les faits. On vient de vous annoncer que c’était un despotisme, une tyrannie. (Les termes ne sont