[Convention nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES, j g 343 La commune offre 21 marcs d’argenterie qu’elle a remis à la messagerie le 12 de ce mois. Les femmes ont elles-mêmes brisé les voiles du fanatisme. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit le document des Archives nationales (2). Au citoyen Reverchon, en son domicile, rue Gre¬ nier-Saint-Lazare, Paris. « Le vieux curé de Meyssac, département de la Corrèze, ci-devant militaire, a renoncé aux cérémonies do Rome qui lui donnaient du pain, il compte sur la générosité de la nation, mais quoique sans ressources il n’en a pas moins cédé au cri de la raison. Et la commune offre 21 marcs d’argenterie; cet argent a été remis à la messa¬ gerie le 12 du courant, les femmes ont elles-mêmes brisé les voiles du fanatisme. Borie demande à la Convention l’insertion au Bul¬ letin. » A la Convention nationale. « Meyssac, département de la Corrèze, 12 fri¬ maire, 2e année républicaine. « Citoyens représentants, « Ce que dix-huit siècles d’erreurs avaient eu peine à former a été détruit en un instant; les Montagnards de Meyssac, département de la Corrèze, aidés de leurs compagnes ont, dans un moment, renversé l’antique édifice de la su¬ perstition. Les saints et leurs reliques ont dis¬ paru, et vingt et un marcs d’argenterie partent aujourd’hui pour l’autel de la patrie. « Vive la République ! « J. P. Chasseing, maire. » Les administrateurs du département de police de la commune de Paris font passer l’état des dé¬ tenus dans les différentes maisons d’arrêt, de jus¬ tice et de détention. Le nombre total s’élevait, le 20 de ce mois, à 4,295. Insertion au « Bulletin » (3). Suit la lettre des administrateurs du département de police (4). « Commune de Paris, le 21 frimaire, l’an II de la République, une et indivisible. « Président, « Les administrateurs du département de police te font passer le total des détenus dans les maisons de justice, d’arrêt et de détention du fl) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 131. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 814. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 131. (4) Archives nationales, carton C 284, dossier 824, département de Paris, à l’époque du 20 dudit. Parmi les individus qui y sont renfermés, il y en a qui sont prévenus de fabrication ou dis¬ tribution de faux assignats, assassinats, contre-révolution, délits de police municipale, correc¬ tionnelle, militaire; d’autres sont détenus pour délits légers; d’autres enfin sont arrêtés comme suspects. « Conciergerie .................... 537 « Grande Force ................... 616 « Petite Force .................... 273 « Sainte-Pélagie ................... 214 « Madelonnettes ................... 272 « Abbaye.. ....................... 133 « Bicêtre .......................... 730 « A la Salpétrière ................. 367 « Chambres d’arrêt, à la mairie ..... 100 « Luxembourg .................... 377 « Maison de suspicion, rue de la Bourbe ........ . .................... 245 « Les Capucins, faubourg Saint-An¬ toine ............................... » « Réfectoire de l’Abbaye. . . ........ 107 « Les Anglaises, rue Saint-Victor... 110 « Les Anglaises, rue de Louroine .... 57 « Les Carmes, rue de Vaugirard ..... » « Les Anglaises, faubourg Saint-An¬ toine. ...................... . ....... 21 « Écossais, rue des Fossés -Saint -Vic¬ tor ................................ 81 « Saint-Lazare, faubourg Saint-La¬ zare ............................... » « Maison Escourbiac, rue Saint-An¬ toine .................. ..... ..... ... 18 « Belhomme, rue Charonne, n° 70. . . 37 « Total général ......... .. 4,295 « Certifié conforme aux feuilles journalières à nous remises par les concierges des maisons de justice et d’arrêt du département de Paris. « Heussé; Cordas; N. Froidure. Dangé. » La Société populaire de Carcassonne fait hom¬ mage à la Convention d’un exemplaire d’un pro¬ jet d’instruction, dans lequel elle s’est attachée à faire connaître la force des principes, les avan¬ tages de la révolution et la sagesse des mesures adoptées par les représentants du peuple. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1) Suit le document (2). Projet d’instruction publique, présenté à la Société populaire de Carcassonne par les ci¬ toyens Dupré père, et Ferrier, membres de la Société . Citoyens, Par votre délibération du 12 brumaire, de l’an II de la République française, une at indi¬ visible, vous avez arrêté d’envoyer dans chaque (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27 p. 131. (2) Archives nationales , carton C 286, dossier 840. 344 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j J* JJ™*1”* “ “ canton du district, un citoyen, bon républicain, pour éclairer et instruire les habitants des campagnes, et vous avez chargé les citoyens Fermer et Dupré de vous présenter un précis d’instruction qui servît de guide politique et moral à chacun des apôtres de la liberté et de l’égalité. Nous vous offrons notre travail, ou plutôt le tableau des principes que vous profes¬ sez avec nous. Le patriotisme de chaque missionnaire suppléera à l’insuffisance d’un plan qui eût demandé de plus longues méditations, et de plus grands développements. Nous avons d’abord pensé que chacun de vos commissaires devait être muni de plusieurs exemplaires de la déclaration des droits de l’homme et de la constitution, comme les bases essentielles des instructions qu’ils doivent por¬ ter dans les campagnes; car du développement des vérités éternelles, consacrées dans cet évan¬ gile politique, doit résulter la régénération des âmes, et leur élévation à la hauteur de la révo¬ lution. La ressource de la lecture et des discussions des séances des sooiétés manque à la campagne; il est donc essentiel que chaque commissaire, en s’environnant des bons patriotes de chaque mu¬ nicipalité du canton, forme dans le chef -lieu une Société populaire à laquelle seront admis au scrutin les citoyens de toutes les municipalités, dont les principes et la moralité seront bien con¬ nus; et votre commissaire offrira à la société naissante un exemplaire de vos règlements qu’elle suivra provisoirement. Dès que la société sera formée, il invitera tous les oitoyens du canton à se rendre à midi à la première séance, et là, après avoir annoncé l’objet de sa mission et l’intention de la société de Carcassonne, d’entretenir avec toutes les sociétés du district une correspondance frater¬ nelle, il fera lecture de la déclaration des droits ; il en expliquera chaque article avec clarté et simplicité; il invitera chaque membre à lui proposer ses doutes et à lui demander des éclair¬ cissements; et surtout il devra faire sentir que la nature, dégradée par les anciennes institu¬ tions, avilie par le despotisme et l’esclavage, corrompue par la cupidité et le propre intérêt, est rendue tout entière à sa première dignité, par les principes d’égalité qui font la base du gouvernement républicain. Beaucoup d’hommes entendent sonner à leurs oreilles le mot République sans le comprendre; ils sont jaloux et fiers de porter le nom auguste de républicain, et ils n’en connaissent pas l’éty¬ mologie, ni le sens et l’étendue de sa significa¬ tion. Il faut que votre commissaire leur explique avec une telle exactitude et une telle simplicité ce qu’on entend par République et par républi¬ cain, que chacun soit pénétré et du mérite de cette forme de gouvernement, et des avantages infinis qui en résultent pour la masse entière des individus et pour chaque individu en par¬ ticulier; il retracera rapidement le vice des gou¬ vernements, soi-disant monarchiques, toujours despotiques et tyranniques; les injustices com¬ mises par les rois et par les grands qui, se croyant d’une autre espèce et d’une autre nature que le reste des hommes, les foulaient aux pieds comme des insectes, et en disposaient au gré de leur caprice et de leur barbarie; il rappellera aux habitants des campagnes, les vexations qu’ils ont éprouvées dans leurs personnes et leurs propriétés, la bizarrerie des institutions bar¬ bares qui les gouvernaient, l’injustice de la dîme, des corvées et droits féodaux. Il leur prouvera que le gouvernement répu¬ blicain était le seul qui pouvait faire disparaître toutes ces monstruosités ; car à côté d’un trône, la liberté et l’égalité ne pouvaient pas régner; car le trône et le gouvernement d’un seul attirent toujours à eux l’arbitraire, le despotisme, les distinctions, les privilèges, l’injustice, et tous les malheurs qui affligent l’humanité, partout où il existe des rois et des tyrans. Il leur dira que le gouvernement d’un seul, celui d’un roi, fait une guerre continuelle aux peuples ; qu’il les attaque dans leurs lois, dans leurs biens,, dans leur honneur, et ne leur laisse que le sentiment profond de leur misère; aussi, ajoutera-t-il, le gouvernement s’est-il toujours aidé du fanatisme des religions, et leurs prêtres, qui partageaient l’autorité, exerçaient sur les âmes un tel empire, qu’ils en comprimaient les mouvements les plus légitimes et les plus natu¬ rels; ils commandaient aux peuples de souffrir l’esclavage et la tyrannie au nom de Dieu, et les renvoyaient à la vie éternelle pour y rece¬ voir l’indemnité de ce qu’ils avaient souffert dans celle-ci. Le gouvernement républicain est celui d’un peuple qui ne s’occupe que du bonheur et de la prospérité générale, qui fait son idole de la sou¬ veraineté, qui lui sacrifie ses passions et son existence; un gouvernement par lequel chaque citoyen reçoit le droit de remplir les fonctions publiques, suivant son mérite, ses vertus et ses . talents; un gouvernement, où la richesse n’est rien, où la vertu, la franchise, l’humanité, l’amour de la patrie sont tout; où les arts de luxe doivent être proscrits, où l’industrie doit être circonscrite dans les progrès de l’agricul¬ ture, à des arts utiles à toute la société, où l’utilité publique enfin est comptée pour tout : république enfin et chose publique sont syno¬ nymes. Le républicain est celui qui se dévoue tout entier à la chose publique. Les lois, dans une république, sont l’ouvrage du peuple, lui seul a le droit de les sanctionner, de les réformer, de les faire exécuter; aussi comme les lois sont l’expression de la volonté générale, leur observation est plus sacrée, leur infraction plus criminelle; de là la nécessité d’une surveillance active de chaque citoyen sur l’autre; de là, le droit de censure et dénon¬ ciation. Les commissaires feront sentir la bonté des lois fondamentales et de circonstances. Dans les premières, ils donneront le premier rang à celles qui ordonnent la libre circulation des subsistances, puisque de cette libre cir¬ culation naissent l’ abondance générale et l’échange d’une denrée locale contre celle d’une autre localité, et que l’intérêt de tous exige que chacun fournisse à tous la portion superflue de ses productions et de son industrie. De là, le crime de l’accaparement devient un crime capital et de lèze-nation, puisqu’il trouble l’ordre de la société, et peut porter la mort et le désespoir dans les différentes par¬ ties de la République; de là, la bonté de la loi qui fixe le prix de toutes les marchandises, parce qu’elle arrête les effets désastreux de l’égoïsme, de la malveillance et de la cupidité. Alors que chacun sera bien pénétré que la chose publique est celle à laquelle chaque citoyen doit attacher son intérêt particulier, il sera aisé de convaincre les habitants des campagnes, [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j “ SJb're 1793 345 que ce n’est qu’en approvisionnant les communes populeuses, qu’ils pourront réciproquement en recevoir les objets de première nécessité, qu’elles renferment; et qu’ alors, que par malveillance ou avarice, ils resserreraient leurs grains, leurs bestiaux, leurs fourrages, leurs bois, etc., les grandes communes usant de réciprocité, leur refuseront les étoffes, les vins, les chandelles, les huiles et tout ce que leur sol ne produit pas. Les commissaires présenteront l’image du désordre affreux qui régnerait dans la Répu-blique, si les citoyens, oubliant les devoirs de réciprocité, de fraternité, et de bienfaisance, calculaient, non pas le bien qu’ils peuvent faire à la chose publique, mais le mal qui pourrait résulter de leur sordide avarice. Beaucoup de citoyens paraissent affectés et chagrins de la loi sur les successions et les par¬ tages égaux, soit en ligne directe, soit en ligne collatérale : eh bien ! ces hommes sont hors de la nature; ils ne connaissent pas le mérite et les avantages de l’égalité. Que vous ont fait, pères dénaturés, vos derniers enfants, pour être réduits à mendier leur pain à la porte de leur usurpateur? Ne sont-ils pas sortis des mêmes entrailles? n’ont -ils pas le même droit à votre générosité, à votre bienfaisance? Et si votre cœur n’est sensible qu’à ce qui flatte votre vanité et votre orgueil, la loi qui ne flatte pas les passions, la loi qui veut rétablir les droits sacrés et imprescriptibles de la nature, vous dira : qu’alors que les propriétés territo¬ riales et les fruits de l’industrie s’accumulent dans une seule main, il existe dans le gouver¬ nement beaucoup de riches et le plus grand nombre de pauvres; que l’opulence et la ri¬ chesse tendent continuellement à détruire les mœurs particulières et à corrompre les mœurs publiques ; et qu’il est de l’intérêt d’un bon gou¬ vernement de faire disparaître les contrastes révoltants d’une grande opulence et d’une affreuse misère; que l’égalité des partages, en subdivisant les propriétés, attache beaucoup plus d’hommes à la société, à la chose publique; qu’une aisance honnête, une honnête médio¬ crité suffit à l’austérité des mœurs républicaines. Eh ! qu’on ne dise pas que la subdivision des héritages va circonscrire ou paralyser l’in¬ dustrie, puisqu’au contraire, elle l’encourage et la multiplie, en divisant les facultés et les moyens. Vos commissaires passeront aux assignats et à la loi du maximum, sur le prix des denrées et marchandises, ils rappelleront les dilapida¬ tions de finances, occasionnées par le luxe inso¬ lent de la cour, la dissolution des mœurs. Ces brigandages avaient à ce point épuisé les res¬ sources de la France, que malgré l’augmenta¬ tion excessive des impositions et le charlata¬ nisme de Necker, l’Etat était condamné à une infâme banqueroute, qui aurait entraîné la chute du commerce et do l’industrie. Alors, que le peuple de Paris sonna le pre¬ mier le tocsin de la révolution, les aristocrates, les ci-devant nobles, les agioteurs, les riches espérèrent opérer une contre-révolution, en res¬ serrant le numéraire. Il devint alors nécessaire de créer des assignats, pour déjouer les complots liberticides ; et ces assignats eurent pour hypo¬ thèques les biens immenses du clergé et des émigrés. Malgré leur solidité, la malveillance, la cupidité, toujours active, cherchèrent à les discréditer. Le peuple des campagnes mal instruit et égaré par des insinuations perfides, resserrait les denrées ou exigeait une perte énorme sur les assignats : les marchandises suivirent cette perte progressive; et cette cala¬ mité publique inquiétait, tourmentait le peuple, et faisait triompher nos ennemis. Il était digne, il était du devoir de la Conven¬ tion de rendre aux assignats leur première valeur, et de rétablir une confiance que l’aris¬ tocratie et la cupidocratie leur avaient enlevée. Toutes les Sociétés populaires de la République, toutes les sections du peuple sollicitèrent la fixation du prix de toutes les denrées et mar¬ chandises; la Convention l’a consacrée par une loi sage et répressive, et recommande aux bons citoyens la surveillance la plus active sur son exécution. A cette loi salutaire, tient le salut de la Répu¬ blique; puisqu’elle comprime la cupidité, et assure, à la masse du peuple, le bonheur et la prospérité. Pour que cette loi soit exécutée avec rigueur, le peuple, qu’elle sauve, doit sur¬ veiller toutes les ventes et tous les achats, et dénoncer avec courage les hommes pervers qui passeraient des transactions frauduleuses et chercheraient à tromper la bonne foi ou l’igno-cance des acheteurs; aussi vos commissaires devront-ils prendre plusieurs exemplaires des tarifs et les faire afficher dans les lieux les plus fréquentés des municipalités. Yos commissaires développeront les avantages de cette loi, et combien il est essentiel aux intérêts de la Répu¬ blique que les infractions soient rigoureusement punies. Ils expliqueront les motifs qui ont déterminé la levée et la formation d’une armée et d’un tribunal révolutionnaire qui, promenant toutes les parties de la République (sic), recherche¬ ront et puniront révolutionnairement les acca¬ pareurs des denrées ou marchandises, ceux qui font des marchés différents en assignats ou en numéraire métallique, ceux qui vendent au-dessus du maximum, ceux qui laissent dépérir les denrées pour contrarier et entraver la marche de la Révolution, ceux enfin qui achètent des denrées ou marchandises au delà de leurs besoins. Yos commissaires combattrons les faux rai¬ sonnements de ceux qui prétendent être ruinés par la loi du maximum; ils leur répondront que cette loi rétablit l’ordre et l’équilibre dans la République, et que la loi qui doit veiller sur le bonheur de tous, et la prospérité géné¬ rale, ne se laisse pas apitoyer par les larmes et les plaintes de l’avare et de l’ambitieux, qui se croient ou se disent ruinés, parce qu’ils perdent une partie de ce que leur monopole et leurs concussions leur avaient procuré de fortune et de richesse. Ils leur diront qu’alors, que la loi porte sur tous les objets de première nécessité et sur toutes les marchandises, il est évident que l’agricul¬ ture, vendant à plus bas prix, acquiert les den¬ rées et autres marchandises dans la même pro¬ portion. Que si avec trois cents livres on peut se procurer pour les fabriques la quantité des matières premières qui coûtaient mille ou douze cents livres, le fabricant ne perd rien. Que si avec la valeur d’un septier de blé, vendu à dix-huit livres, l’agriculteur peut se procurer la même marchandise qui lui coûtait soixante livres, il n’a rien perdu, puisque l’échange est le même. Le résultat de la diminution générale du prix de toutes choses, en favorisant les citoyens 346 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I ** a" » L J / 19. Hpfpmhrp 17Q9 indigents ou mal aisés, met en pratique les principes d’égalité, consacrés par la Constitu¬ tion ; et la Révolution ne finira, qu’alors que l’é¬ quilibre le plus juste sera rétabli entre le riche et le pauvre; lorsque le premier aura fait assez de sacrifices ; lorsqu’il paiera toutes les charges de la République; lorsqu’il ne regardera plus les jouissances du luxe comme des besoins réels; lorsqu’il sera convaincu que la nature et la loi ne font d’autre différence entre les hommes, que celle du mérite et des vertus. Vos commissaires s’attacheront à combattre et à détruire certains préjugés fanatiques, qui entretiennent l’ignorance ; t la superstition dans les campagnes, et arrêtent les progrès de l’es¬ prit public; ils démontreront que toutes les minutieuses pratiques d’honoraires, de messes, d’absoutes, etc., sont autant de charlataneries utiles à la cuisine des prêtres, et ne servent de rien pour la vertu et les moeurs; et cependant toutes les ruses de cupidité monacale sont sou¬ vent mises à la place de la véritable adoration d’un Dieu grand et magnifique, qui ne veut d’autre hommage de la part des hommes que celui de l’obéissance aux lois, celui de la fra¬ ternité et de l’union; ils dénonceront les prêtres qui, contre la volonté nationale, persévèrent dans l’habitude de conserver tout ou partie de leur costume; ils représenteront aux habitants des campagnes, l’utilité du mariages des prêtres, et l’avantage qui devra en résulter pour les mœurs et pour la patrie; car alors qu’un prêtre reste célibataire il s’isole en quelque sorte de la nature, pour en violer souvent les droits les plus sacrés; il se dérobe le sentiment délicieux de la paternité, qui attache les hommes à la Société par autant de liens qu’il a d’enfants. Le fanatisme crie au scandale lorsqu’on annonce le mariage d’un prêtre, mais la nature et la raison s’écrient : voilà un homme nouveau rendu à la patrie. Qu’il est estimable ce prêtre, qui, s’élevant au-dessus des préjugés, réclame ses droits sociaux, et veut partager, avec ses concitoyens, les avantages de la paternité; il sera, à coup sûr, bon mari, bon père, bon citoyen. Vos commissaires ordonneront la suppression de ces distinctions aristocratiques, accordées à la richesse et à la vanité dans la célébration des mariages, des baptêmes et des enterrements; ces sonneries inutiles, qui troublent le repos de tous pour l’amour propre d’un seul; ils sup¬ primeront ces bancs, ces chaises qui rappro¬ chent le riche de l’autel, lorsque son immora¬ lité l’éloigne si souvent de Dieu ; ils appren dront surtout à respecter tous les cultes par le silence. L’Etre suprême veut des autels dans nos âmes et non pas dans nos bouches; il veut le cœur de l’homme, et non pas des querelles religieuses; il veut que les hommes s’arment pour défendre la liberté, l’égalité et les lois, et non pas pour combattre pour des systèmes auxquels ils ne comprennent rien. Ils exhorteront les habitants de toutes les commune à réduire les cérémonies du culte aux trois décades de chaque mois, afin de donner plus de temps et de jours aux travaux de l’agri¬ culture et des arts. Le travail, l’amour de la patrie, l’obéissance aux lois sont une adoration continuelle, agréable au Créateur; et un trait d’humanité, un trait d’héroïsme, un acte de vertu honorent bien plus la divinité, que des prières insignifiantes que le peuple ne comprend pas, et qu’il chante ou prononce machinalement. Les commissaires passeront à la situation où se trouve dans ce moment la République; ils feront le tableau de la rage infernale des prêtres, qui ont voulu alarmer les consciences et diviser les hommes par la religion elle-même, qui de¬ vrait les réunir tous ; des exécrables manœuvres des aristocrates, qui ont cherché à les alarmer sur leur propriété et sur leur existence, pour leur faire haïr la nouvelle forme du gouverne¬ ment ; ils leur représenteront tous les tyrans de l’Europe armés contre nous, conspirant contre notre liberté, et tâchant de nous charger de nouveau des fers que nous avons brisés. Eh bien ! leur direz-vous, l’Eternel, l’Etre suprême, le père de l’égalité, nous a couvert de sa toute-puissance; il l’a mise dans nos mains, et sur tous les points de la République, nous sommes victorieux; partout nos ennemis sont terrassés; encore quelques efforts, encore quelques sacri¬ fices, et les esclaves des tyrans, étonnés de notre courageuse persévérance, de notre union inté¬ rieure, de notre attachement à la souveraineté nationale, à la Convention, à la Constitution, voudront être libres à leur tour. Montons tous sur la Montagne sacrée de nos représentants; et de là foudroyons nos ennemis, ou qu’ils viennent nous demander la paix, la fraternité, et les tables saintes de nos lois. Après avoir électrisé les âmes, les commis¬ saires provoqueront, de la part des riches culti¬ vateurs et manufacturiers, la dîme de leurs trou¬ peaux, de leurs vins, de leurs fourrages, et de leurs étoffes. Nos frères, nos enfants, nos concitoyens, sont en face de l’ennemi; ils souffrent la faim et le froid ; il faut les nourrir et les couvrir; et puisque nous leur devrons la liberté, dépouillons -nous, en leur faveur, de notre superflu, et qu’importe aujourd’hui le superflu, puisque le plus bel orne¬ ment, la plus belle propriété de l’homme, ce sont les vertus républicaines, la sans-culotterie, la bienfaisance et le triomphe de la liberté. La Société populaire de Carcassonne, après avoir adopté ce plan d’instruction, en a délibéré l’impression et l’envoi à la Convention nationale, à toutes les sociétés de la République, et à toutes les communes du département. Signé : Fermer, Dupré, commissaires rédac¬ teurs; Heirissoh, 'président; Marin, 'tout, Champagne, secrétaires. Le conseil général de la commune de Brassem-pay (Brassempouy), district de Saint-Sever, dé¬ partement des Landes, félicite la Convention sur son énergie; il l’invite de rester à son poste jus¬ qu’à la paix, et demande l’expulsion des Saurine, Cadroy et Lefranc, députés de ce département. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Le conseil général du district de Valance (Va¬ lence), département de Lot-et-Garonne, fait pas¬ ser l’extrait de son procès-verbal du 13 de ce mois duquel il résulte que le citoyen Antoine Durios, de la municipalité de Saint-Circes [St-CiricesJ, prêtre et vicaire de la paroisse de Saint-Pierre-d’Auvillars, s’est démis de ses fonctions ecclésiastiques et qu’il ne s’occupera désormais qu’à prêcher l’amour de la liberté et de l’éga-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 131.