[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 janvier 1790.) rarement dans le cas de voyager] les marchés, le commerce attirent les habitants des campagnes dans les villes. Il suffit qu’un seul habitant d’un village se rende au chef-lieu du district, pour qu’il y porte toutes les requêtes de ses voisins. Il sera très rare qu’on soit forcé d’aller au chef-lieu uniquement pour les affaires publiques; et les charges excessives qu’occasionneront les frais de l’administration et de la justice seront senties tous les jours. Que l’on ajoute à ces raisons le malheur d’avoir des juges qui n’auront ni assez d’expérience, ni assez de lumières, et l’on ne sera disposé à ne donner à chaque département qu’un petit nombre de districts. M. le Président met aux voix la création d’un huitième district. Elle est rejetée. Le décret suivant est ensuite rendu : « L’Assemblée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution : « 1° Que le département de l’Auxerrois en Bourgogne, dont Auxerre est le chef-lieu, est divisé en sept districts, dont les chefs-lieux sont Auxerre, Sens, Joignv, Saint-Fargeau, Avalon, Tonnerre et Saint-Florentin; « 2° Que l’assemblée des électeurs de département décidera dans laquelle des deux villes, de Villeneuve-le-Roi ou de Saint-Florentin, l’un des sept districts sera plus convenablement placé; « 3° Que les limites arrêtées entre les départements de l’Auxerrois, de Meaux, de Melun subsisteront; à l’effet de quoi Villeneuve-la-Guyard, et les paroisses environnantes réclamées par les députés de Melun, resteront unies au département d’Auxerre ; sauf, en faveur des villes de ce département, s’il y a lieu, le partage des établissements qui seront fixés par la constitution. » M. Gassin propose de diviser le département de Versailles en neuf districts. Il peint avec sentiment les motifs de bienfaisance qui avaient fait souhaiter au Roi d'avoir un district et un tribunal de justice à Rambouillet, pour réunir sous une même administration toutes ses possessions danscette partie; mais observait que, sur un rapport fait à Sa Majesté, Elle -Avait cru apercevoir à sa demande une sorte de contrariété avec le bien général, Elle s’était, par une délicatesse touchante, désistée de son vœu; le comité a conclu, avec le Roi, que Rambouillet aurait un siège de justice, mais qu’il ne serait pas chef-lieu de district, et que la ville de Dourdan jouirait de cet avantage. ( Cette déclaration est reçue avec en - thousiasme .) M. le bqrou de Menou. Je demande qu’il soit fait un district particulier pour Rambouillet, composé de territoires pris sur tous les districts environnants. Cette proposition est accueillie avec transport. M. de Roislandry dit qu’il est beaucoup plus simple que le district de Dourdan soit transporté à Ramnouillet et il en fait la motion, M. l’abbé Millet dit que l’Assemblée est pénétrée de trop de respect pour les sentiments de vertu qui ont dicté les démarches du Roi pour ne pas les sanctionner par son vote. Il demande la priorité pour le projet du comité. M. Lebrun propose de remercier le Roi des sacrifices qu’il fait au bonheur du peuple et demande la question préalable sur les amendements de M. le baron de Menou et de M. de Roislandry-La question préalable est adoptée-M. le Président prononce ensuite le décret suivant: « L’Assemhlée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution : « 1° Que le département de Versailles, dont Versailles est le chef-lieu, est divisé en neuf districts ; « 2° Que les chefs-lieux de ces districts sont provisoirement Versailles, Saint-Germain, Pontoise, Dourdan, Montfort, Etampes, Gorbeil, Gonesse, et que Rambouillet sera le siège de la juridiction du district de Dourdan ; « 3° Que les neuf maisons enfermées dans la ville de Pontoise, et dépendantes de la municipalité de la paroisse de Saint-Quen, séparées de la ville parla rivière d’Oise, appartiendront désormais à Pontoise ; « 4° Que la paroisse de Fugier appartiendra au district de Mantes ; « 5° Que les paroisses de ; Marly et du Port-Marly, le parc et la forêt de Marly, feront partie du district de Versailles, ainsi que les paroisses de Bailly et de Noisy, qui seront comprises dans ce même district. M. Le Coutewlx deCanteleu demande à interrompre l’ordre du jour et ayant obtenu cette autorisation, il dit: « Je n’ai pas cru devoir hier être présent à la discussion qui s’est continuée sur une question qui me concernait si particulièrement ; maisaussi-tôt que j’ai eu sous les yeux votre décret, j’ai dû saisir les principes, et ne pas rechercher s’il peut avoir ou non un effet rétroactif sur ma nomination. Je me suis empressé, Messieurs, de vous donner un témoignage de la déférence qu’en ma qualité de membre de cette Assemblée, je dois donner, non-seulement à l’expression littérale de ses décrets, mais à leur esprit, et même à votre intention connue, « J’ai donné ce matin, Messieurs, ma démission de la commission de trésorier-général de l’Extraordinaire, et je vous prie de croire que si j’ai mis quelque prix à cette place, c’est par le seul sentiment que j’avais d’être utile à ma patrie dans une institution qui présente à la nation les moyens d’un nouveau crédit, et la possibilité de créer successivement les ressources les plus intéressantes. » M. Haurissart. Je n’ai pu donner ma démission d’une place qui n’existait pas; mais je renonce aussi à l’intérêt qui m’avait été accordé dans l’entreprise des vivres et fourrages de l’armée, quoique cet intérêt ne tienne en aucune manière aux termes du décret de l’Assemblée. Je n’ai consulté en cette occasion que l’esprit du décret et l’intention de l’Assemblée nationale, que je me ferai toujours un devoir de prévenir, (On applaudit.) M. le marquis d’Ambly. Le dépouillement j généreux des préopinants est une raison puis-i santé qui doit nous conduire à les engager de | reprendre les places qu’ils viennent de quitter. | M. le vicomte de Mirabeau dit que la place \ de fournisseur des vivres a été fort à charge à | l’Etat, jusqu’à présent. Il importe qu’elle soit 1 confiée à des mains pures et on ne pourrait trouver dans un autre plus de probité que chez M. Naurissart. 352 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 janvier 1790.] L’Assemblée ne statue rien sur ces deux motions laissant aux membres qui en sont l’objet le soin de juger de leur mérite. Un membre propse d’inscrire au procès-verbal les noms de MM. Le Gouteulx de Ganteleu et Naurissart, comme preuve de l’estime de l’Assemblée pour témoignage de patriotisme que donnent ces deux membres. M. Gossln reprend la suite de son rapport sur la division des départements du royaume et expose les motifs qui ont décidé le comité à diviser le département de Foix et de Couserans en trois districts. 11 ne s’élève pas de contestation sur la division proposée et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution : 1° « Que le département de Foix et de Couserans est divisé en trois districts; 2° « Que la première assemblée du département se tiendra à Foix ; et qu’en conséquence de l'arrêté des députés, il alternera provisoirement entre les villes de Foix, Saint-Girons et Pamiers; que les tribunaux de ces districts seront séants à Foix, Saint-Lisier et Pamiers ; et que les chefs-lieux de l’administration des trois districts seront Taras-con, Saint-Girons et Mirepoix. » M. Gossin présente un dernier décret relativement au département du Cotentin et au partage des districts: Après un léger débat entre les députés de la province, le décret suivant est mis aux voix et adopté. « L’Assemblée nationale, d’après l’avis du comité de constitution, décrète : 1® « Que la division convenue entre les députés du département du Cotentin, sera maintenue dans son inlrégrité, sauf à ne placer que provisoirement â Carentan les établissements qui lui sont destinés; à l’effet de quoi les habitants de ce district auront la faculté de demander d’autres chefs-lieux pour l’administration ou la juridiction, et même le partage du siège administratif et judiciaire, s’ils croient qu’il y a impossibilité, danger, ou même de notables inconvénients dans la disposition projetée ; sauf aussi le même partage entre les villes qui pourraient y avoir droit, des établissements qui seraient destinés par la constitution; 2° Que provisoirement la ville de Coutances sera chef-lieu de département, et que les électeurs assemblés détermineront si l’assemblée du département devra alterner, et si Coutances doit définitivement en demeurer chef-lieu, .» M. le Président rend compte à l’Assemblée des relevés des scrutins pour la nomination du comité des rapports. Les suffrages se sont réunis sur : MM. le vicomte de Beauharnais. Cochon de l’Apparent. l’abbé Grégoire. Coroller. Goupilleau. Couppé. Bergasse-Laziroule. Ricard (de Toulon.) Pougeard du Limbert. Boullé. Dillon, curé du Vieux Pouzauges. Brevet de Beaujour. le comte Mathieu de Montmorency. Prieur. de Lachèze. M. le Président annonce que M. Boileux de Beaulieu a adressé à M. le président du comité des Recherches, une lettre contre l’agiotage et qu’il a envoyé des exemplaires imprimés pour chacun de MM. les membres de l’Assemblée nationale. ( Voyez ce document annexé à la séance de ce jour). M. le Président lève la séance et indique celle de demain pour neuf heures du matin. ANNEXE a la séance de P Assemblée nationale du 27 janvier 1790 (1). Lettre à M. le président du comité des recherches à l’Assemblée nationale , contre l'agiotage, par Boileux de Baulieu. Monsieur, en qualité de citoyen, en rendant justice à vos talents, et plus encore à vos vertus patriotiques, c’est à vous, Monsieur, qu’il appartient de sauver Paris et la Frauce des maux dont ils sont menacés. Je puis m’être trompé (mais je ne le crois pas), j’ai toujours regardé, depuis l’ouverture des Etals-généraux, le ministre des finances comme le moteur de toutes les conspirations qui ont tenté de dissoudre ou de troubler les délibérations de l’Assemblée nationale. Le discours qu’il prononça à cette ouverture, le système de despotisme ministériel qu’il ne craignit point de développer dans cette séance, et qu’il développa avec plus d’énergie et plus de force dans la séance qu’il eut chez M. de Barentin (lors garde des sceaux), avec les commissaires conciliateurs des trois ordres, tout prouve que de tous les ministres, il avait été le plus effrayé de la teneur des cahiers dos différents bailliages, qui tous-tendaient à délruire l’abus du pouvoir ministériel, et à rendre nuis les ministres des finances en détruisant l’horrible système de la. tyrannie fiscale, dont le directeur général des finances est très-jaloux de conserver les agents qui sont les plus fiers appuis de l’esclavage public. Lisez ces moyens de couvrir le déficit, vous y découvrirez les replis de son âme : les moyens (qu’il a l’audace d’annoncer), que le Roi aurait pu prendre pour se dispenser de convoquer les Etats-généraux, sont plus horribles encore. Que doit-on attendre d’un homme qui, devant tout à une nation qui l’a tiré de la fange pour l’élever au faîte des grandeurs, se permet de l’insulter en face de ses représentants, et de vouloir en faire les complices de sa destruction totale? Lisez, Monsieur, lisez avec attention tous les discours que cet homme prononça dans votre auguste Assemblée, son rapport du 27 août et le mémoire des ministres, du 24 octobre ; vous y verrez que le directeur général des finances vous traite avec autant de mépris qu’un régent de collège traite ses écoliers qu’il menace du cuistre et de la férule; vous verrez dans les mémoires du 17 décembre, en réponse aux mémoires de M. de La Borde, (1) Ce document n'a pas été inséré au Moniteur.