[19 février 179 l.f (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 359 trois chefs» Descombiés, Froment et Folacher, de se rendre et se mettre sous la sauvegarde de l’assemblée électorale; ils s’y refusèrent; le public en fut indigné : les commissaires électeurs se retirèrent, et les rebelles rentrèrent dans leurs retranchements. Ces faits sont établis par les témoignages déjà rappelés ; ils le seront encore par ceux de M. Cha-baud, vice-président du département; de M. de Jonquier du Saint-Esprit, et M. Le Grand, qui étaient les commissaires du corps électoral. Le feu commua de part et d’autre; le canon tira; les rebelles abandonnèrent les tours et les remparts, ils prirent la fuite; certains furent se réfugier à la maison des Jacobins, d’autres à celle du collège, attenant aux remparts; les assiégeants les poursuivirent; 4 ou 5 furent tués; Pierre Froment fut du nombre; la maison de Froment livrée au pillage ; on soupçonna les Jacobins d’avoir favorisé l’entrée dans leurs tours; des dégâts sont commis à leur maison; mais l'église est respectée, ainsi que celle du collège; cela résulte des mêmes preuves rapportées ci-devant, et des certificats imprimés, donnés par ces deux maisons religieuses. Le lendemain mardi, le sieur Vidal, procureur de la commune, travesti en soldat, et Lau-rens, officier municipal, carhés depuis le dimanche dans la maison de Gas, cantinier des gens à pouf rouge, furent trouvés cachés dans une autre maison inhabitée; on voulait les conduire à la lanterne : le sieur Ribot, non catholique et capitaine d’une compagnie, les sauva, en les conduisant au palais, pour les mettre sous la sauvegarde du corps électoral, qui les reçut ; mais dans la nuit ils disparurent, et depuis lors le sieur Vidal est réfugié dans le Vivarais. Ces faits notoires sont établis par la procédure, notamment par la déposition du cent vingt-quatrième témoin. Ce même jour, le sieur Vignes, capitaine à pouf rouge, était avec des gens armés sur le chemin d’Arles, se disant commandant de poste; il arrêta un valet de ville envoyé par la municipalité d’Arles, chargé d’une lettre pour le club des amis de la Constitution; il le força de se rendre au château de La Coste,dit Bellevue, intercepta la lettre, empêcha le message de se rendre à Nîmes, le tit rétrograder, ayant fait la minute d’une lettre remise dans la procédure, conçue en ces termes : « Ce 15 juin 1790... Monsieur, dans la « situation où se trouve la ville de Nîmes, j’ai « eu ordre d’intercepter toute correspondance, « et de prendre connaissance de tout événement; « en conséquence votre lettre a été ouverte... » La lettre fut déchirée, et la partie qui contient ces mots remise par M. de Lu Baulme,cent quinzième témoin de l’information; il a déposé avec étendue sur tous les détails, desquels il résulte que le sieur Vignes était sur le chemin comme chef d’une troupe; ce qui est encore établi par le rapport du valet de ville d’Arles et qui doit l’être par les témoignages du curé de Bouillargues et du vicaire de Bellegarde, indiqués par le sieur de La Baulme. Après cette expédition, le sieur Vignes, à la tête de sa troupe armée, se porta dans plusieurs campagnes voisines, et faisait forcer les personnes qui y étaient de se réunir à la troupe. Cela est prouvé par L s témoins déjà indiqués sur les faits les concernant, du lundi matin. Le même jour, 15 juin, le corps électoral s’occupa de rendre la tranquillité dans la ville. Le lendemain 16, la paix fut publiée ; les circonstances qui ont précédé et suivi, sont rendues en détail dans un récit adressé par les commissaires du roi à l’Assemblée nationale. La paix était ramenée dans la ville , tandis qu’au dehors il se commettait de nouveaux crimes. Un verbal des commandant et officiers de Ja garde nationale de Roquemaure a donné le détail de ce qui s’est passé à Remoulin, Lafoux, Saint-Bonnet etBezousse ; on y remarque que des Cebets à pouf rouge de la ville de Nîmes et un capucin, excitaient la rage des soldats catholiques contre les protestants ; et il résulte des interrogatoires des nommés Ri bières frères, fugitifs de Nîmes, décrétés de prise de corps, que le curé de Saint-Bonnet donna la bénédiction aux soldats nationaux, en les exhortant de se rendre à Nîmes. Une procédure particulière, faite à la requête du sieur Maigre, établit avec évidence que le shur Maigre, son père, âgé de 80 ans, et son frère aîné furent assassinés sur le terroir dudit lieu de Saint-Bonnet, et jetés dans la rivière du Gardon ; ils étaient protestants. Le 17, le procureur du roi et le lieutenant criminel s’étant transportés dans le couvent des capucins pour en constater l’état, ils y trouvèrent une quantité considérable de brochures incendiaires, relatives à la Révolution. Cela est établi par le procès-verbal joint à l'information. Ce procès-verbal dément tous les récits faits par les officiers municipaux sur les prétendus désordres commis dans l’église. SEPTIÈME ANNEXE. Nouvelle adresse de la municipalité de nimes présentée à l’Assemblée nationale par M. de Marguerittes, député du département du Gard et maire de Nîmes, et par M. Boyer, substitut du procureur de la commune de la même ville; en réponse à 1 adresse du directoire du département du Gard du 25 septembre dernier, et d’un avertissement signé pur MM. Chambon, Voulland, Soustelle, Rabaut et Meynier. Messieurs, les officiers municipaux de Nîmes, calomnieusement inculpés aux yeux de la France entière, ont cru devoir user avec courage du droit de publier leur justification. On leur oppose des procédures consommées à la hâte, une information dirigée par les membres du club et dans laquelle le procureur du roi n’a voulu faire entendre aucun des nombreux témoins qui devaient constater les assassinats commis, avec autant de sang-froid que d’atrocité, sur plus de 200 pères de famille, dont 153 sont connus. Mais une adresse publiée à Paris au no n des officiers municipaux, dont M. Boyer, substitut du procureur de la commune, avait les pouvoirs, et réimprimée à Nîmes au nom de tous, a démontré la partialité de ces procédures et la nécessité d’ordonner, conformément aux décrets, rendus pour Montauban le 26 juillet et pour Schelestadt le 14 août, que l’information commencée devant les juges de Nîmes, relativement aux troubles quiont eu lieu dans cette ville pendant les mois de mai et de juin, demeurera comme non-avenue et qu’il sera informé de va »l les juges de Montpellier, ou autres étrangers au département du Gard et à la diligence de la parlie publique, de tous les évé- 360 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. nements arrivés à Nîmes, les 2, 3, 4 mai, 13, 14, 15, 16, 17 juin, ainsi que de tous ceux qui y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs auxdites époques, circonstances et dépendan-ees. La justice de cette pétition du corps municipal tient à des développements et à des détails affligeants, dont l’innispensable révélation ne doit épouvanter que ceux qui ont commis les crimes ou qui les ont conseillés. Dans une adresse que le directoire du département du Gard vient de publier, il a cru que cette révélation n’était propre « qu’à réveiller les haines et qu’à exciter la fermentation des esprits ; qu’à contrarier ses bonnes intentions et qu’à traverser ses mesures. Ces intentions et ces mesures, manifestées dans une précédente adresse des directoires réunis du département et du district, sont de jeter un voile sur les atrocités commises, d’en solliciter le pardon et d’empêcher, par là, qu’on en fasse la preuve et qu’on en dévoile les véritables auteurs» Le directoire du département aurait pu considérer d’abord que l’adresse de la municipalité, publiée à Paris le 15 août, ne pouvait pas avoir pour objet de contrarier une adresse publiée à Nîmes, le 25 septembre suivant. Il aurait pu considérer ensuite qu’il est grand sans doute d’user de clémence; que ce vœu doit réjouir les coupables; que c’est à eux de bénir les bouches qui proposent l’oubli du passé; mais que si la grâce est offerte à des citoyens opprimés et sans reproches, ce n’est alors qu’une atrocité de plus. Il n’en est aucun qui ne rejette avec fierté un pardon qui serait une flétrissure (1) : ce ne sera qu’après la conviction, que ce pardon pourra être un acte de bienfaisance. (1) L’adresse que le sieur Folacher, avocat et élecj teur de Nîmes, a envoyée à l’Assemblée nationale, ne laisse aucun doute sur cette vérité. « Monsieur le Président, « C’est du fond d’un cachot que j’ai l’honneur de vous écrire, non pour demander grâce, l’innocent n’en a pas besoin , mais pour m’opposer de toutes mes forces à une amnistie vivement sollicitée par les directoires du département du Gard et du district de Nîmes, sans la participation ni l’aveu des accusés ; amnistie qui n’a d’autre but que de soustraire les vrais coupables à la vengeance et à la sévérité des lois. « Tranquille sur le témoignage de ma conscience, je proteste à la face de la France et de l'Europe entière, que jamais je n’accepterai d’amnistie, et que tant qu’il me restera un souffle de vie je l’emploierai, avec tout le courage que donne le sentiment de l’innocence, à réclamer un jugement qui prononce sur l’accusation intentée contre moi et sur les réparations que j’ai droit de prétendre. « Daignez, monsieur le Président, recevoir ces protestations et les mettre sous les yeux de l’auguste Sénat qui préside au destin des Français. Puissent-elles accélérer la décision que nos contrées attendent de la sagesse avec la plus vive impatience! Puissent surtout les peuples voisins de Nîmes, plus indignés qu’alarmés de la tyrannie qui opprime cette ville, voir bientôt émaner de l’Assemblée nationale un décret qui, en accueillant la demande en renvoi formée par la municipalité, ordonne que l’instruction de cette horrible affaire sera recommencée devant des juges libres et exempts de prévention! Ainsi la eontiance que l’Empire français doit aux nouvelles lois se maintiendra dans des contrées dont l’opinion peut influer beaucoup sur leur durée. Ainsi les ennemis du bien public perdront un prétexte dont ils pourraient peut-être profiter, si le décret qui va être rendu pouvait tromper les espérances d’un peuple juste et désabusé. « Daignez donc , monsieur le Président , recevoir encore et mettre sous les yeux de nos augustes re-[19 février 1791.] Le directoire pense que les désordres de Nîmes sont « le crime des ennemis de la Constitution ; que la preuve de ces attentats est suffisamment acquise; que la cause du patriotisme est justifiée. » Il est trop instruit pour croire qu’une preuve soit suffisamment acquise par de simples informations surtout lorsque dans ses information s l’esprit de parti, pour ne rien dire de plus, a dirigé la plupart des témoins, membres ou affidés du club; surtout lorsque le procureur du roi, sommé à diverses reprises, a refusé constamment, pendant cinq mois, de faire entendre les témoins indiqués par l’assemblée des représentants de la commune; surtout lorsqu’il a inhumainement rejeté les plaintes de plus de 60 veuves ou orphelins qui voulaient constater les assassinats commis en la personne de leurs maris et de leurs pères , surtout, lorsque les dégâts et les dévastations faits à main armée, et qui montent à plus de 700,000 livres ont été faits sous les yeux de 15,000 gardes nationales étrangers ou de la ville qui ne s’y sont point opposés et dont plusieurs y ont parti-ticipé. Les officiers municipaux ont rétabli les faits dans leur adresse ; ils ont publié un tableau qui dévoile des crimes affreux et d< s complots depuis longtemps ourdis, dont ils offrent et feront la preuve quand des juges impartiaux ne refuseront pas d’entendre les témoins des uns en admettant ceux des autres. Il est certain que ces faits contrarient ceux qui ont été rapportés dans plusieurs relations, où tout est dénaturé et où les plus grandes atrocités sont palliées et passées sous silence. Le directoire adopte l’une d’elles, et soutient que « tous les faits qui y sont consignés furent scrupuleusement examinés, et que chaque phrase et chaque mot furent sévèrement discutés ». Cette relation n’étant pas signée, il a été permis de la contredire et de la ranger parmi les libelles répandus contre la municipalité ; et puisqu’il y est dit qu’elle ne jouit pas de la confiance publique , le directoire n’a pas pu exiger que ce ré* ii fût regardé comme une pièce probante, d’autant qu’il renferme plusieurs faits controuvés, tels que celui des coups de fusil tirés du couveut des Capucins dans lequel on n’a pu découvrir ni armes, ni munitions, ni légionnaires. Cette légère contradiction a néanmoins excité son animadversion, et a été traitée d 'audace; ses membres ont déclaré qu’ils « n’avaient pas voulu user des moyens que les lois leur confient pour rappeler à leur devoir des magistrats qui s’en sont si étrangement écartés. » Heureusement, nous vivons sous des lois qui ne permettent rien d’arbitraire; et bientôt l’intérêt commun élèvera des digues contre la licence, contre l’anarchie, et posera des bornes que l’oppression ne pourra point franchir. Les officiers municipaux n’ont éprouvé que présentants l’adhésion que je fais à ja demande en renvoi formée par la municipalité de Nîmes. « Je suis avec un profond respect, etc. « Signé : Folacher. « Des prisons de Villeneuvede-Berg, ce 13 octobre 1790. » Voilà pourtant le langage de celui que MM. Voul-land, Soustelle, Rabaut, Chambon et Meynier appellent un scélérat. (Voir Réponse aux prétendus faux-fuyants de la municipalité.) 361 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (19 février 1791.) des vexations depuis qu’ils sont en place; s’ils devaient être encore exposés à de nouvelles vio-leDCPS de la part du club, ou des administrateurs du département et du district, membres de ce même club, ne devraient-ils pas se flatter d’obtenir une juste réparation en vertu de lois protectrices des droits de l'homme? Ils doutent qu'aucune loi donne aux directoires des départements le droit d’outrager impunément des magistrats, et d’anticiper sur le jugement qui sera rendu par des tribunaux compétents et impartiaux. Cependant le directoire du département dépeint, dans son adresse, les officiers municipaux se débattant sous la main de la loi ; il leur reproche d’avoir emprunté le masque trompeur du patriotisme; il emploie le terme de mépris; il y témoigne l’aversion qu’éprouvent « des corps administratifs d’avoir des rapports nécessaires et journaliers avec des magistrats qu’ils ne peuvent traiter comme coupables » (certes ils savent bien qu’ils ne le sont), « ni regarder comme innocents ». Avant le succès de leur adresse calomnieuse, n’étaient-ils pas forcés de leur rendre à cet égard la justice éclatante que 40,000 de leurs concitoyens ne cessent de leur rendre? Mais ce sont là des outrages gratuitement prodigués, dont il sera permis de tirer une vengeance éclatante; non cette vengeance que peuvent exercer, dans ces temps malheureux, et qu’exercent, dans toute l’étendue du royaume, c< ux qui ont à leur solde et à leur disposition des hordes de brigands, et qui savent diriger les poignards de la multitude, mais cette vengeance, tardive quelquefois et toujours injuste, que les lois promettent et assurent à tout honnête homme, à tout citoyen, à tout magistrat, odieusement inculpés et outragés. Les officiers municipaux sont moins prompts à accuser; ils n’anticipent pas sur l’avenir; mais i!s ont droit d’attendre que des procédures faites avec impartialité et dans une ville étrangère à tout esprit de parti, manifesteront de quel côté sont la justice et la vérité. Alors ceux qui redoutent cette accablante vérité, qui fuient à son approche et qui voudraient l’étouffer par une amnistie, se débattront à leur tour, sous la main de la loi; alors les masques tomberont et découvriront des âmes atroces; alors le terme de mépris sera trop doux, et celui d’exécration ne sera pas même assez fort; alors les coupables seront connus, et on saura dans quelles vins, sous quels prétextes, sur quelles réquisitions, des brigands fanatiques, attirés dans la cité, ont rempli leur sacrilège mission de massacrer des prêtres et des catholiques, de dévaster les couvents et les maison-, et d’exercer touies sortes d’atrocités ; alors on jugera sur qui doit retomber le poids des réparations de tant de désordres et des indemnités dues à tant de citoyens et à tant de veuves et d’orphelins. La manifestation de ces vérités sera terrible; mais elle est nécessaire. Les officiers municipaux la doivent à l’honneur de la cité et à la dignité des fonctions dont la confiance publique les a investis. Il leur tarde, sans doute, de déposer ces fonctions qui n’ont été pour eux qu’une source d’a-meriumes : inquiétés et poursuivis avec acharnement, accusés et calomniés avec au lace, enfin échappés comme par miracle au glaive des assassins, ils ont offert depuis longtemps la démission de ces fatales fonctions ; mais tant qu’ils en seront revêius ils les rempliront avec fermeté; ils n’ont que trop cédé à la violence; mais résolus de ne se laisser rebuter ni par les menaces, ni par la terreur, et prêts à faire s’il le faut le sacrifice de leur fortune et de leur vie, ils ne feront jamais celui de leur honneur. Le directoire prétend que la vérité est consignée dans le récit fait au nom des électeurs; mais il n’est pas un seul fait, de ce récit, sur lequel les électeurs n’aient été irompés et qui puisse soutenir une discussion sérieuse. Ils ont été trompés, comme on l’a déjà dit, sur les coups de fusil qu’on prétend être partis du cloître des Capucins; toute la contrée attestera le contraire. Ils ont été trompés sur le massacre de ces religieux, sur les honteuses atrocités exercées sur leurs cadavres, sur les sacrilèges et les profanations, et sur les dévastations, dont ils n’ont pas trouvé à propos de parler. Ils ont été trompés sur les coups de fusil qu’on dit être partis des arènes et de la maison de l’infortuné Gas, et sur le prétendu dépôt de poudre qu’elle recelait. Ils ont été trompés sur la capitulation qu’ils disent avoir été vainement offerte à 45 malheureux réfugiés dans les tours, et sur les conférences sans succès avec eux. Ils ont été trompés sur la violation du droit des gens envers ces malheureux, dont on ne ce-sa de foudroyer l’asile avec du canon, tandis qu’on les amusait par des paroles de paix. Ils ont été trompés enfin sur les coups de fusil qu’on dit savoir été tirés le mardi des fenêtres des maisons ; fausseté insigne, qui n’a été imaginée nue pour justifier les atrocités de cetie journée, où la rage unie au sang-froid outragèrent horriblement l’humanité. Faut-il rappeler que, après le désarmement général des catholiques qui ne s’étaient pas même mis en état de défense, une infinité de citoyens furent arrachés de leurs retraites et conduits comme d"S agneaux qu’on mène à la boucherie, à l’Esplanade, au Cours neuf, et dans d’autres places où ils furent fusillés, massacrés, pendus, où on les hachait vivants avec le sabre et la faux; où on leur coupait les pieds, le nez, les oreilles, le menton; où on leur ouvrait le ventre et on leur arrachait les entrailles pour leur en battre le visage (1); où l’on exerçait sur eux en un mot les hornmrs L s plus exécrables ? Et sur les plaintes réitérées faites par les veuves et les orphelins, aucune démarche de la part du procureur du roi; aucune information, aucun témoin entendu I Tandis qu’on a la perfide complaisance d’en administrer un grand nombre pour empoisonner les discours les plus simples et les plus indifférents. Et après une pareille conduite, après une partialité aussi révoltante, ose-t-on se flatter que l’Assemblée nationale aura deux poids et deux mesures (2), et qu’elle adoptera et souffrira (1) Que MM. Rabaut, Voulland et les autres signataires de l’avertissement ne prennent pas ces faits pour un roman ; le substitut du procureur de la commune est chargé d’en offrir la preuve au nom des veuves de Joseph Brun, Jean-Louis Gerin, Jean Vernet, André Boulanger, Pierre Marcellin et autres ; ainsi que de celle de François Gerin, l’un des témoins de l'information faite dans le mois de mai. (2) Ce ne sera pas sans doute parce que cinq dragon» protestants ont été tués en combattant à Montauban, tandis qu’à Mmes, plus de 200 catholiques ont été massacrés sans se défendre, et sans qu’on ait encore daigné faire aucune information à ce sujet, quoiqu’on ait déjà fait entendre plus de 500 témoins. 362 [Assemblée nationale.] même qn’on lut mette sous les yeux l’inique information faite à Nîmes, tandis qu’elle a repousse, sans vouloir en entendre la lecture, celle qui fut faite à Montauban, en vertu d’ordres supérieurs? Et qu’on ne dise pas que les atrocités commises n’étaient pas connues; car eux-mêmes qui sont les plus intéressés à les nier sont forcés d’en convenir (1). Le récit des électeurs se tait sur tous ces faits, de même que sur les excès auxquels les officiers municipaux furent en butte; de même que sur les pillages et dévastations du collège , du séminaire, du couvent des Rêcollets, de celui des Jacobins, de \' Hôpital général, des maisons de M. Bra-gouse, curé-, deM. Cabanel, prêtre; de la mé tai-rie de MM. les abbés Paulian, et de tant d'autres; la maison de campagne de M. Desponchès, archidiacre, et de plus de 100 maisons de citoyens catholiques. Mais les électeurs ont encore été trompés sur cela, de même qu’un très grand nombre défaits qu’il serait trou Ions de rapporter. Le directoire conviendra que s’il n’est pas permis de contrarier un récit « où chaque phrase et chaque mot furent sévèrement discutés », il doit l’être de relever avec moins d’art et d’apprêt, si l’on veut, ce qu’il a sans doute mis à dessein. 11 s’est contenté de dire que « des maisons suspectes furent fouillées, et que les perquisitions que l’on fit devinrent pour quelques bandits une occasion de pillage ». Mais ces bandits avaient des listes, des guides, des chefs, et il est du devoir et de l’honneur du département, du district, de la municipalité et des magistrats de réunir leurs soins et leurs efforts pour parvenir à les connaître. Nous ne poussons pas plus loin cetie discussion ; ce serait engager une querelle de plume qui deviendrait inépuisable. La vérité ne peut être que d’un côté; pour terminer tons ces débats, il faut donc qu’une procédure faite devant des juges libres et impartiaux, composée de témoins catholiques et protestants, pris indistinctement dans tous les lieux de la contrée, fasse connaître de quel côté l’agression est partie, et surtout l’époque du rassemblement et du départ des troupes arrivées avec armes et bagages, dans un court intervalle, et presque à la même heure, d’une très grande distance; sur quelles réquisitions elles sont venues; quels sont les électeurs qui crurent pouvoir rester sans danger, et ceux qu’on réussit à disperser (2). Cette procédure doit porter non seule-(1) On lit dans l’adresse envoyée à l’Assemblée nationale par le club de Nîmes, le 28 septembre dernier : « Qui ne sait que dans une émeute horrible, qui a « duré quatre jours, on s’est livré aux plus criminels « excès? Quel homme oserait répondre de contenir et « de maîtriser une foule ignorante, qu’on a livrée au « désespoir? La raison, dans un pareil moment, peut-« elle se faire entendre de la multitude ? La munici-« palité nous annonce, par une note, le détail imprimé « do ces atrocités ; nous n’y apprendrons rien, que « l’histoire trop connue des passions des hommes. » (2) il résulte du proces-verbal de l’assemblée électorale, que le nombre des électeurs, qui était de 516 dans le principe, fut réduit à 205 le lundi 14, et ce n’est qu’après cet éloignement forcé que le tiers des administrateurs du département et tous les administrateurs du district ont été nommés. Cependant le récit, où chaque mot et chaque phrase furent sévèrement discutés, suivant l’adresse du directoire du département du Gard qui l’adopte, ainsi que les cinq députés du département du Gard qui l’ont fait imprimer à l’impri-(19 février 1791.} ment sur les troubles des mois de mai et de juin, mais encore sur les causes qui les ont produits, sur la conduite respective des protestants et des catholiques avant ces émeutes, depuis l’époque des délibérations, manifestant les mêmes vœux pour la réformation des abus de l’ancien régime, et prises de concert dans les mois de novembre et de décembre 1788, jusqu’à ces derniers temps; et elle doit embrasser le détail de ce qui s’est passé dans le conseil permanent, des manœuvres et des provocations de toute espèce qui ont aigri et divisé les citoyens, et amené les malheurs de Nîmes. C’est l’unique moyen de parvenir à la découverte de la vérité et à la conviction des vrais coupables qui, s’ils échappent au glaive des lois, ne doivent pas échapper à l’opprobre. Après cette conviction, il sera permis de parler d'amnistie, d’abolition et d’oubli du passé; mais ce n’est qu’alors qu’on pourra, comme les directoires du département et du district, solliciter la grâce des coupables. Une amnistie, quelque générale qu’elle puisse être, ne pouvant pas abolir les réclamations de ceux qui ont des indemnités à prétendre, et les directoires du département et du district ayant cru pouvoir les rejeter sur la ville, et même personnellement sur les officiers municipaux de l’un desquels on a fait saisir et déplacer les meubles, dont même on a annoncé la vente, il est de l’intérêt de la ville et de ces magistrats de constater, par des preuves, quels sont Jes véritables auteurs des maux de la patrie, afin que si les coupables ne payent pas de leur tète, ils soient forcés de payer de leur fortune les dévastations et les pillages dont ils seront prouvés les auteurs. Ou a beau présumer que la manifesiation delà vérité n’est propre qu’à réveiller les haines, et qu’à exciter Ja fermentation des esprits sur des événements dont ou voudrait anéantir jusqu’à la mémoire. Mais quoi de plus propre à aigrir les esprits que de masquer cominuellement la vérité, que de rejeter sur une ville opprimée et sur ses officiers municipaux , des pertes causées par des étrangers et par leurs conducteurs qu’il est essentiel de connaître et de rechercher? Quoi de plus propre à exciter l’indignation, que d’offrir un pardon à des opprimés qui ont droit aux vengeances de la loi? Quoi de plus propre à réveiller les ressentiments que d’imposer silence à la justice, après avoir voué à l’exécration publique des citoyens assassinés, et des magistrats intègres qu’on a maltraités et excédés de coups et qu’on n’a cessé de merie de l’Assemblée nationale et distribuer à domicile, dit : « L’assemblée électorale poursuit les scrutins avec courage, conservant plus des deux tiers de ses membres. »Et le procès-verbal des opérations de cette môme assemblée électorale, dit: «que le lundi 14, rassemblée n’était composée que de 105 votants; tandis que, suivant le même procès-verbal, le nombre des électeurs ôtait de 526. Est-ce que le directoire du département croirait par hasard que le nombre de 205 forme plus des deux tiers de celui de 526? Non, sans doute; mais fallait en imposer sur ce fait comme sur tant d’autres, pour légitimer l’élection illégale du quart des membres du département et de l’entier district de Nîmes. La municipalité se réserve le droit de relever, sans avoir besoin de « discuter sévèrement chaque mot et chaque phrase », quelques-unes des nombreuses faussetés qu’on rencontre à chaque page de la « réponse générale aux prétendus faux-fuyants de la municipalité de Nîmes ». ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 fétriôf lî9léf diffamer dans mille journaux vendus à l’iniquiié, et de soustraire à cette même exécration ceux ui, sous le voüe du patriotisme, se sont souillés e mille abominations préméditées et réfléchies, dont le tableau, si redouté et qu’on voudrait anéan-tir, effrayera l’Europe? Quoi de plus propre à entretenir les dissensions et les haines que de retenir dans les cachots des prisonniers qu’on a décrété avec aussi peu de justice que de raison, et de refuser constamment de les admettre à leurs faits justificatifs, malgré les actes de déni de justice qu’il faut donner (1)? Quoi de plus propre à armer le citoyen que de s’obstiner à vouloir traiter en criminels ceux qui ont toujours été opprimés et n’ont jamais été coupables? Vainement on s’est flatté d’anéantir des faits graves et d’en arrêter plus longtems la preuve (2). Croit-on en imposer, en avançant que « la municipalité oppose à la procédure juridique l’information qu’elle assure avoir faite elle-même, » tandis que toutes les demandes de cette même municipalité ne tendent depuis six mois qn’à faire informer par-devant tels juges qu’il plaira à l’Assemblée nationale d’indiquer? tandis que, depuis le 15 mai, le procureur du roi au présidial n’a voulu faire entendre que des membres du club et les témoins indiqués par des clubistes ; qu’il a constamment refusé d’administrer ceux qui lui ont été désignés par les représentants de la commune, et qu’il a eu la barbarie de repousser le grand nombre de veuves et d’orphelins qui portaient plaintes de l’assassinat de leurs maris et de leurs pères ; fait assez décisif pour que l’Assemblée nationale ordonne une nouvelle information. Croit-on en imposer par ce rassemblement affecté (3) de mots : citoyens, procureur du roi , juges, témoins, administrateur s, électeur s, commissaires du, roi, municipalités voisines, gardes nationales, tous sont les ennemis des officiers municipaux de Nîmes? Une simple observation sur chacun de ces mots en fera connaître la juste valeur. Et d’abord, citoyens ! N’y a-t-il donc à Nîmes que les membres a u club et leurs adhérents? ne sait-on pas que 40,000 habiiants de Nîmes sont justement indignés contre les calomniateurs de la municipalité? Ne sait-on pas qu’après avoir désarmé les catholiques (4), on a étouffé par la (1) Voyez dans les pièces justificatives ces actes et la réponse du juge, qui, d’après les faits avancés par le sieur-Descombiès, détenu en prison, déclare lui-même qu’il doit s’abstenir. (2) C’est dans cette vue que les directoires du département et du district s’opposent à une nouvelle information et s’en tiennent à celle faite sous leurs yeux, dont chaque déposition leur est connue, appert les notes insérées dans la réponse aux prétendus faux-fuyants de la municipalité, laquelle déclare n’avou' jamais pu obtenir la moindre connaissance de cette information. (3) Voyez la dernière page de l’avertissement mis â la tête de l’ouvrage cité dans la note ci-dessus. (4) Non seulement on a désarmé les 13 compagnies qui n’ont pris aucune part aux troubles des 13, 14, 15, 16 et 17 juin, fait avéré et constaté, mais on a donné leurs armes à des volontaires protestants étrangers qui les ont emportées chez eux, appert le procès-verbal des officiers municipaux d’Aubais ; mais on a supprimé toutes ces compagnies et l’on a refusé même d’en recevoir les volontaires dans les 24 compagnies conservées ; maison compte à peine dOOcatholiquesdansla légion, composée de 2,400 hommes, quoique les catholiques forment les quatre cinquièmes de la population. Tout décèle donc, dans les protestants, la fureur de dominer. Qu’on èn juge par l’empressement qu’ilâ mirent à 363 terreur leurs nombreuses réclamations, et qu’on a cherché même à détruire leur crédit et leur fortune (1). Procureur du roi! La conduite qu’il a tenue depuis le commencement de cette affaire sans égard pour les ordres du chef de la justice, dispense de toute réflexion. Juges! N’ont-ils pas été menacés? La vie du lieutenant criminel n’a-t-elle pas été en diriger pour avoir rendu la liberté au sieur Vigne, négociant et capitdne d’une compagnie catholique, contre lequel il n’y avait aucune preuve? Ce magistrat ne vient-il pas de déclarer qu’il s abstient et cesse d’être juge dans l’affaire du sieur Des-combiés au moment de l’admettre à ses faits justificatifs ? Témoins! Un grand nombre est membreduclub et a signé l’adresse du 4 mai; en sorte que ces Messieurs sont à la fois dénonciateurs et témoins. Administrateurs , électeurs , commissaires du roi! Ignere-t-on que les directoires du département et du district de Nîmes sont en grande partie formés de membres du club? Ignore-t-on que le c ub qu’on dit composé de catholiques et de protestants, sur 417 membres, compte seulement 63 catholiques? Ignore-t-on que les électeurs avaient été circonvenus à l’avance, et que les commissaires du roi se sont toujours concertés avec le club? Municipalités voisines! Ne devaient-elles pas s’opposer au départ de leurs gantes nationales, puisqu il n’existait aucune réquisition de la municipalité de Nîmes? Cet oubli de leur devoir ne les rend-elles pas parties dans cette affaire et, dès, lors, comment peut-on s’appuyer de leur témoignage? Gardes nationales! A l’exception de celle de Montpellier, qui s’est couverte de gloire en arrêtant, dès son arrivée, le massacre et les atrocités, désarmer les catholiques dès l’instant qu’ils furent les plus forts, au moyen de 15,000 étrangers, qu’ils avaient fait venir. Qu’on en juge par la manière dont ils composèrent, en contravention des décrets de l’Assemblée nationale, la légion nîmoise. Elle avait été formée, jusqu’au massacre du mois de juin, de 43 compagnies. Dès l’instant que cet exécrable projet eût été mis à exécution cl que les catholiques furent subjugués et en grand nombre assassinés, la légion fut réduite à 24 compagnies. Et ce qui prouve que l’unique but des protestants n’était que de s’emparer de tous les pouvoirs, c’est que sur 24 capitaines qu’ils élurent, ils en nommèrent 22 protestants ; et cela dans une ville où les protestants ne forment que le cinquième de la population. Ce fait est tiré d’un mémoire que la garde, se disant nationale de Nîmes, vient de publier. Le style de ce nouveau libelle et les odieux mensonges qu’il renferme ne nous permettent pas de nous abaisser jusqu’à les réfuter. (1) Entre autres faits, voyez le procès-verbal dressé le 22 octobre dernier à la requête des sieurs Maigron, Yignal et compagnie, négociants catholiques de Nîmes, qui se plaignent « qu’on leur a suscité une avanie qui « leur coupa la vente un jour de marché, qui fit naître « la répugnance des pratiques qu’ils ont dans la con-« trée à continuer de s’approvisionner chez eux; qui « donna atteinte à leur crédit, par l’apparence de la « saisie de leurs effets et de l’arrestation de leurs « personnes » ; en faisant arrêter par la garde nationale le reste des marchandises que lesdits sieurs Maigron, Yignal et compagnie rapportaient de la foire d’Uzès ; et en faisant circuler dans le peuple ces assertions incendiaires : « La nation est trahie... on introduit des « armes, de la poudre, M. d’Artois, le sieur François « Froment... Ils sont dans les malles, on en est sûr, « on a été averti. » Les boutiques et magasins de ces négociants sont investis, etc. Le procès-verbal est joint aux pièces. 364 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. que de regrets doivent avoir la plupart des autres, témoins et tranquilles spectatrices des excès que leur devoir était d’empêcher; et combien de reproches ont à se faire celles qui, non contentes d’avoir coopéré au pillage, se sont encore enrichies des dépouilles des infortunées qu’elles devaient protéger et secourir? Les officiers municipaux, persistant dans leur adresse, supplient donc l’Assemblée nationale et tous les gens de bien de ne se décider ni sur des récits pleins d’erreurs, ni sur des informations dont la suspicion est sensible et a été démontrée; mais de suspendre leur jugement jusqu’au moment où le temps, la vérité, l’impartialité auront rassemblé et mis au jour toutes les preuves dans des informations dignes de foi. Ils supplient en outre l’Assemblée nationale de prononcer sur la démission qu’ils ne cessent d’offrir de leurs fonctions, et de ne pas perdre de vue que M. Viellard, rapporteur de l’affaire de Montauban, lui disait : « Eu remettant trop légè-« rement certains délits, il peut résulter de leur « impunité l’ébranlement de la Constitution. Il « est facile, sans doute, à des vainqueurs de « dire : Nous sommes en paix quand leurs enne-« mis chassés ne peuvent revenir chez eux que « pour y subir la loi qui leur est imposée ..... « Ce n’est pas dans une ville où l’esprit de parti « s’est si violemment manifesté qu’on peut se « flatter que les informations ont été faites avec «< impartialité ..... Dans ces circonstances, votre « comité des rapports a l’honneur de vous « proposer le décret suivant. (Ce décret fut « adopté.) » « L'Assemblée nationale, après avoir entendu « son comité des rapports, déclare que l’infor-« mation commencée devant les juges de Mon-« tauban relativement aux événements arrivés « dans cette ville le 10 mai, demeure comme « non-avenue ..... L’Assemblée nationale décrète « qu’il sera informé devant les officiers munici-« paux, juges ordinaires en matière criminelle, « à Toulouse, à la diligence de la partie pu-« bli iue, de tous les événements arrivés à Mou-« tauban, tant antérieurs que postérieurs à ladite « époque, circonstances et dépendances; à l’effet « de quoi les pièces déposées au comité des « rapports seront incessamment adressés à la « partie publique, etc. » Dans des circonstances semblables et d’après ces considérations, les soussignés ont l’honneur de représenter à l’Assemb!ée nationale que les officiers municipaux de Nîmes ont demandé, pour le plus grand nombre, leur démission à plusieurs reprises; qu’ils sont chaque jour inquiètes dans des fonctions qu’il est au-dessus de leurs forces de continuer; que plusieurs d’entre eux se trouvent absents par une suite des vexations qu’ils ont éprouvées, et que d’ailleurs le renouvellement d’une partie de la municipalité doit avoir lieu à l’époque présente; c’est pourquoi l’Assemblée nationale est suppliée de vouloir bien ordonner que, vu la démission d’une partie des officiers municipaux et l'absence des autres, la commune de Nîmes sera incessamment convoquée, et qu’il sera procédé à la nomination et renouvellement de la municipalité de Nîmes ; et comme il importe à ces magistrats de constaier par des preuves et une information juridique et impartiale, quels sont les véritables auteurs des assassinats, pillages et dévastations commises à Nîmes, ils supplient de nouveau l’Assemblée nationale d’ordonner, conformement aux décrets rendus pour Montauban le 26 juii-[19 février 1791.) let, et Schelestadt le 14 août dernier, « que l'information commencée devant les juges de Nîmes relativement aux troubles qui ont eu lieu dans cette ville, pendant les mois de mai et de juin, demeure comme non-avenue, et qu’ l sera informé devant les juges » de Montpellier ou autres, étrangers au département du Gard, et « à la diligence de la partie publique, de tous les événements arrivés à Nîmes » les 2, 3, 4 mai, 13, 14, 15, 16, 17 juin, « ainsi que tous ceux qut y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs » auxdites époques, et notamment de ceux contenus dans les « détails circonstanciés; à l’effet de quoi les pièces déposées au comité des recherches seront incessamment adressées à ladite partie publique ». Ils la supplient enfin de décréter que toutes les armes de la légion nîmoise, même celles des compagnies qui ont été désarmées, seront habituellement déposées dans la maison commune et dans une salle disposée à cet effet ; et sans s’arrêter aux changements survenus dans ladite légion, pendant et depuis les troubles, ordonner que les légionnaires , conformément aux décrets de l’Assemblée nationale, seront exclusivement pris parmi les citoyens actifs qui se sont faits inscrire, défendant à tous autres de se réunir en troupes armées et de porter l’uniforme national. Signés : Teissier-Marguerittes, maire ; Boyer, substitut du procureur de la commune. PIÈGES JUSTIFICATIVES. Acte de déni de justice, signifié au nom de M. Descombiés. L’an 1790 et le 20® jour du mois d’octobre, par moi Adrien-François Vimont , avocat du sieur Descombiés, détenu prisonnier, dans l’impossibilité d’exploiter lui-même, et nul huissier n'ayant osé lui prêter son ministère, assisté de Pierre Fournier et Jean Boissier, journaliers agriculteurs, tous trois habitants de la ville de Nîmes, soussignés, à la requête du sieur Jacques-François Descombiés, citoyen de Nîmes, capitaine de la légion nîmoise, notable et électeur du département du Gard, prisonnier ès prisons de la sénéchaussée de ladite ville, est exposé à M. le lieutenant-criminel en ladite sénéchaussée et à tous MM. les officiers de la cour présidiale, que le sieur requérant fut décrété de prise de corps le 9 du mois de juillet dernier à la suite de plusieurs plaintes successivement portées par M. le procureur du roi en la sénéchaussée ; que le 21 dudit mois et les trois jo *rs suivants il subit interrogatoire ; que le 12 du mois d’août il rendit public, par la voie de l’impression, tant ledit interrogatoire que les prétendues pièces de conviction qui lui furent alors représentées avec des extraits des dépositions ; qu’il résulte de l’ensemble que jamais décret ne fut plus injuste que celui dont il s’agit; que l’imprimé est terminé par l’exposition dus faits justificatifs dudit sieur accusé, pages 54, 55, 56, 57 et 58; qu’à suite de ceite exposition, il fil requête ledit jour à M. le sénéchal de Nîmes, ou son lieuienani général criminel, pour demander à être admis à la preuve desdits faits, tant par actes que par témoins produits 365 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791.J par lui accusé ou par M. le procureur du roi, à son choix, sans préjudice de la proposition des reprochas contre les témoins déjà entendus, et des moyens de nullité et cassation de la procédure; que cette requête signée, et par lui accusé et par M® Vimontsou conseil, ayant été présentée à M. Fajon , lieutenant criminel, ledit jour 12 août, et le sieur requérant ayant envoyé le 13 pour la réitérer avec l’ordonnance, ce magistrat répondit qu’il n’avait pas eu le temps de s’en occuper; que le 16, M. Vimont, avocat, y fut lui-même, et qu’il lui répondit qu’il avait écrit à Paris pour se faire décharger de cette procédure; que vainement son conseil représenta que la justification marchait d’un pas égal avec l’accusation ; que la raison, l’humanité et l’équité exigeaient le succès de cette requête, qu’il ne put rien obtenir; que le 17 dudit mois, M. Vimont fut à la chambre du conseil, et en présence des magistrats y assemblés, réitéra ses représentations, ses instances, ses prières, et ne pouvant rien obtenir, déclara qu’il en viendrait aux actes de déni de justice et que, s’il le fallait, il se ferait un honneur et un devoir de les exploiter lui-même pour et au nom de son malheureux client. Quelque temps après il fut encore à la salle ou palais où M. le lieutenant criminel prenait l’interrogatoire d’un coaccusé dudit sieur Descombies, pour le prier et supplier de répondre ladite requête de telle ordonnance qu’il lui planait ; qu’il ne put rien obtenir de ce magistrat, qui déclara que « personne n’ignorait que les juges dans cette affaire n’étaient pas libres ; qu’il savait ce qui avait suivi de l’élargissement » prononcé de M. Vignes, autre coaccusé, et l’assura de nouveau avoir écrit pour qu’un autre tribunal en eût la connaissance, et qu’il l’engagea à attendre la réponse; que jusqu’à ce jour, cette réponse n’est point arrivée, et que néanmoins la justice est suspendue précisément pour ce qui te id à justifier ledit sieur Descom-biés, tandis qu’elle a été si active pour le jeter dans les liens et l’exposer à des événements incroyables qu’il est inutile de narrer ici. C'est pourquoi en dénonçant tout ce dessus audit M. Fajon, lieutenant criminel, et à tous les autres magistrats exerçant successivement sou dévolu, ifs demeurent priés, et en tant que de besoin, par le présent acte de déni de justice, sommés et requis de par le jour, répondre ladite requête de telle ordonnance qu’il leur plaira et eu refus leur est déclaré que ledit sieur Des-combiés entend les rendre responsables de tous les événements fâcheux que leur refus ou autre délai peut lui faire éprouver, et de tous ses dommages et intérêts; et j’ai remis copie du présent et uq exemplaire timbré dudit imprimé, a la suite duquel est ladite requête auxdits magistrats, en parlant pour tous à l’épouse du sieur Auvelier, greffier-commis, trouvé en domicile en cette ville; en foi de ce, etc., le sieur requérant signé avec nous, de ce requis. Signé : Descombiés, Vimont, Fournier, Boissier. Contrôlé à Nîmes, le 20 octobre 1790. Reçu 12 s. 9 d. Signé ; Ghabaud. Procès-verbal de comparution au greffe , concernant la récusation de M. Fajon , lieutenant criminel. Cejourd’hui 21 octobre 1790, l’heure de neuf heures du matin, s’est présenté au greffe de la sénéchaussée et siège présidial de Nîmes, Monsieur Fajon, lieutenant général criminel aux dites cours supprimées, qui, en continuant ses fonctions, eu conformité des décrets de l’Assemblée nationale, jusqu’à ce que les juges élus seront en activité, qui a exposé, pour servir de réponse pour ce qui le concerne à l’acte que le sieur Descombiés fit signifier le jour d’hier par le ministère de M® Vimont avocat, tant à lui qu’aux autres magistrats exerçant successivement son dévolu, copie duquel acte lui a été communiquée par le sieur Auvelier, commis au greffe, à la femme duquel elle fut laissée par ledit sieur Vimont ; qu’il ne désavoue point que la requête mentionnée audit acte ne lui ait été présentée, ne se rappelant quel jour, qu alors il en avait une sur son bureau de M. le procureur du roi, portant qu’il avait beaucoup de témoins à faire entendre que ceux ouïs aux informations sur lesquelles étaient intervenus les décrets, et tendant à ce que la continuation d’enquis fût ordonnée; qu’il ne dissimula pas au sieur Vimont que par les mêmes raisons qui l’avaient fait différer de répondre la requête de M. le procureur du roi, il ne répondrait pas la sienne ; une de ces raisons était qu’d avait formé un vœu auprès de V Assemblée nationale, pour que la procédure fût � renvoyée a un autre tribunal qu’à celui de Nîmes. M. Vimont n’approuva ni ne désapprouva le refus. 11 est pourtant vrai que, par occasion, U a dit quelquefois à M. Fajon, que la requête de sou client devait être répondue; mais enfin il la lit retiier sans qu’elle le fût, soit qu’il cédât aux raisons données, soit par tout autre motif, celui qui vint la retirer l’ayant demandée sans explication aucune; qu’il y a à peu près un mois de ce retirement ; que depuis elle n’a pas été reproduite ; hier seulement, environ deux heures après-midi, mondit sieur Fajon, étant sur la porte d’entrée de sa maison, fut accosté parle sieur Seguin, qui lui dit que s il ne voulait pas signer la requête du sieur Descombiés, celui-ci était conseillé de faire signifier les actes de déni de justice et qu’il voudrait bien lui donner un ordre à un huissier pour les lui signifier; qu’il répouditque jamais il n’avait mis et ne mettra obstacle à ce que les parties, et surtout les accusés, croiraient convenir à leurs défenses; il ne crut pas devoir donner plus d’étendue à sa réponse vis-à-vis d’uu particulier auquel il ne connaissait aucun rapport avec les affaires du palais. Ce fut sans doute peu à près que, sans que ladite requête fût apportée à M. Fajon, sans qu’on lui eût demandé aucun ordre pour l’huissier, pour le cas où ils aient refusé, M. Vimont remit la copie dudit acte à la fem ne dudit sieur Auvelier, qui l’apporta chez M. Fajon à sept heures du soir avec ladite requête; qu’au surplus, aux raisons qu’il avait eues de ne pas répondre dans le temps, et la requête de M. le procureur du roi eu continuation d’euquis, et celle dont s’agit du sieur Descombiés, se joignent les demandes pendantes à l’Assemblée nationale, soit de la part du directoire du département, soit au nom des accusés eux-mêmes ou d’autres, à ce que la procédure soit jugée ailleurs que dans Nîmes, et la certitude que donnent les papiers publics que l’Assemblée est au moment de prononcer, si elle ne l’a déjà fait ; que les raisons de suspension sont devenues.par ces raisons nouvelles et plusieurs autres, des motifs d’aostentiou ; qu’e.i conséquence, U déclare, pour ce qui le concerne et sans entendre influer sur l’opinion des magistrats dévolutaires, qu’il s’abs- 3$6 [Assemblée nationale.] tient et cesse d’être juge dans l’affaire dont s’agit, remettant la requête dudit sieur Descombiés, ensemble la copie dudit acte signifié par M. Vi-mont, protestant de nullité de toutes autres significations ; et a requis que nous, greffier en chef, en fassions donner connaissance audit sieur Des-combiés, et qu’il lui soit donné acte de ce que dessus, ce que lui avons octroyé ; et a signé avec nous. Signé ; Fajon, Gaujoüx, grelüer en chef. Nous, greffier en chef de la sénéchaussée et siège présidial de cette ville, nous sommes transporté dans les prisons où est détenu le sieur Descombiés pour lui donner connaissance du procès-verbal ci-derrière, dont nous lui avons fait lecture, et lui avons offert de lui en donner une copie s’il la lequérait; et ledit sieur Descombiés l’ayant requise, nous avons déclaré qu’il y serait travaillé de suite ; et nous sommes signé, ledit sieur Descombiés n’ayant voulu le faire, de ce requis, à cause de l’absence de son conseil. Signé : Gaujoüx, greffier en chef. Collationné : TüRlON. Extrait de la seconde adresse du sieur Folacher , avocat, électeur de la ville de Nîmes, à l'Assemblée nationale, sur l’amnistie des crimes commis à Nîmes dans le mois de juin dernier , sollicitée par le directoire du département du Gard. ........ Ah ! s’il eût existé quelque projet de porter atteinte à la Constiiutiun, comme les assassins ont voulu le faire croire, avec quelle afieotation, avec quels transports de joie, u’eus-sent-ils pas fait retentir la France et l’fîu ope entière au bruit des preuV' s qu’ils auraient rassemblées 1 Quel enchantement c’eût été po r eux de pouvoir confondre leur cause avec celle du patriotisme I Eh 1 qui les connaît assez mal, pour croire que dans ce cas ils eussent fait solliciter une amnistie. Heureusement, ce Dieu qu’on a tant outragé dans la ville de Nîmes préparait un triomphe à l'innocence, au mumeot même où il semblait l’abandonner aux effets de la calomnie. H n’a pas pouans que les lâches, qui dans leur pensée criminelle avaient prépare dès longtemps les malheurs de leur patrie, pu sent réussir à donner même les apparences de. la réalité à un complot qui n’exista jamais. Leurs soins à composer une preuve qui justifiât leurs brigandages ont été inutiles. Les meurtriers ne sont pius aujourd’hui des patriotes ; et leurs malheureuses victimes, des ennemis de la Constitution. En un m t, la vérité a repris son emp re, et cha tue jour elle le fait sentir à nos persécuteurs d’uue manière humiliante. P, r quelle fatalité le directoire du département du Garu veut-il dune flétrir la mémoire de ceux qui ont misérablement péri, et déshonorer ceux qui ont échappé au massacre, tandis que la France entière déploré leur sort et compatit à leur malheur? De quel droit d’ailleurs ont-ils imprimé que les uns et les autres étaient des factieux ? Sur quelle preuve ont-ils rendu pu-biiiue une accusât on aussi giave? Gomment enfin ont-ils pu oublier qu’uu accusé est piésumé innocent, jusqu à ce qu’un jugement l’ait déclaré coupable? Si leurs intentions sont pures, il n’eü est pas moins vrai qu’ils ont contribué, par l’im pression de leur adresse, à accréditer des calomnies dont lâO février i791.J j’éprouve, depuis plus de 4 mois, les funestes effeis. Pour moi, à qui l’honneur est plus cher que la vie, je proleste de nouveau que je n’accepterai jamais d’amnistie, et que je poursuivrai jusqu’à mon dernier soupir les réparations auxquelles j’ai droit de prétendre. Malheur à ceux qui ont intérêt à cacher la vérité si, en me justifiant, je puis contribuer à la faire paraître dans tout son éclat I Daignez, Monsieur le Président, recevoir mes protestations et les mettre sous les yeux de nos augustes représentants. Je suis avec le plus profond respect, etc... Des prisons de Villeneuve-de-Berg. ce 31 octobre 1790. Pour copie : Folacher ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DUPORT. Séance du dimanche 20 février 1791 (1). La séance est ouverte à onze heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires donne lecture des procès-verbaux des séances d’hier au matin et au soir, qui sont adoptés. M. Hernonx donne lecture d’une lettre du procureur général syndic du département de la Côte-d’Or, qui dénonce une lettre incendiaire du ci-devant évêque de Dijon, adressée aux électeurs dudit département, assemblés pour procéder à la nomination d’un autre évêque. (L’Assemblée, après avoir pris en considération cette dénonciation, en ordonne le renvoi au comité des rt cherches.) M. le Président. Le sieur Charles Delavaud, méde< in-i hirurgien, ancien chirurgien-major des armées navales, fait hommage à P Assemblé-d'un manuscrit ayant pour litre : « Mémoire instructif louchant les officiers de santé de la marine militaire, avec un plan nouveau pour la composition, l'organisation et le régime de ce corps ». (L’Assemblée ordonne le renvoi de cet ouvrage aux comités de mariue et de salubrité réunis.) L’ordre du jour est un rapport des comités militaire et des pensions réunis, sur les gouvernements militaires. M. Camus, rapporteur. Messieurs, je suis chargé de vous présenter un projet de décret relatif à la suppression des gouvernements militaires, suppression depuis longtemps prononcée par l’opinion publique, et qui est une conséquence indispensable de vos décrets. On sait ce que l’on entend en général par les gouvernements militaiies. Ce ne sont pus feulement des offices ou commissions de gouverneurs pour le coi, dans leS places et uans les ci-devant provinces ; ce sont aussi des offices ou commissions de lieutenants généraux, lieutenants de ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.