343 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mars.] lieu, ni en partage de pères de famille, ni en démission de biens en faveur de leurs enfants, ni en fait de transactions et échanges. 11 est de l’honneur du gouvernement de le supprimer en succession collatérale. Cet impôt, imaginé par Domitien, fut proscrit par Nerva et par Trajan, comme indigne de subsister sous un bon prince. La manière dont Pline le jeune en a parlé aurait du l’ensevelir pour jamais dans l’oubli. Art. 3. Le contrôle devrait être très-modique en fait de transactions qui tendent à pacifier les parties. Art. 4. Il devrait également être très-modique en matière d’échange, et n’être perçu plus fort que suivant le montant de la soulte, ainsi que le centième denier. Art. 5. Egalement, en matière d’échange, les lods et ventes ne devraient être perceptibles qu’en raison de la soulte ; et les gens de mainmorte devraient être capables des échanges faits but à but ou à peu près, pourvu qu’il fût fait une estimation respective par-devant le juge des lieux. Ces sortes d’actes sont précieux à la tranquillité publique. Art. 6. Il se perçoit, au nom du Roi, un droit sur le vin des gens de la campagne, appelé le gros manquant ou le trop bu. • Il est palpable que cette perception est injuste. Les droits dus pour le cas de vente ne peuvent être étendus au cas où l’on n’a pas vendu, mais bu son vin. Nulle loi n’autorise ni de fixer au propriétaire ce qu’il pourra boire, ni supposer une vente de ce qu’il a bu au delà ; lorsque le vin n’est pas de débit, c’est un malheur pour le vigneron. S’il le boit, c’est afin qu’il ne soit pas perdu entièrement. Est-il permis d’aggraver son malheur en y ajoutant encore un impôt ? Il est donc de l’humanité du Roi de faire cesser une perception aussi inconcevable que contraire à ses intentions. Art 7, Il y a lieu de croire que les Etats généraux s’occuperont des milices, à l’occasion desquelles il s’introduit des désordres à réprimer, et qui troublent la tranquillité publique. Art. 8. La suppression de cette, foule de petits spectacles, qui n’ont pour but que de corrompre les mœurs du peuple de Paris, d’où le débordement se répand dans les campagnes, ne sera pas indigne de l’attention de l’assemblée nationale. L’éducation de la jeunesse la mérite encore davantage. Il serait à propos que les Etats généraux nommassent des commissaires pour s’occuper de ce dernier point, et y surveiller intermédiaire-ment en leur nom, de l’agrément du Roi. Fait et rédigé en l’assemblée desdits habitants de la paroisse et bailliage de Ballainvilliers, composant le tiers-état ou ordre commun de ladite paroisse et baronnie, le mardi 15 avril 1789, ainsi qu’il est porté au procès-verbal de ce jour, contenant nomination de députés pour porter le présent cahier : lequel, à cet effet, a été signé par ceux desdits habitants qui savent signer, et par nous, Jean-Joseph Morizot, ancien avocat au parlement, bailli dudit bailliage, prié et requis de présider ladite assemblée, assisté de maître Marie-Michel Meteyer, commis-greffier, ainsi qu’il est porté audit procès-verbal, lequel commis greffier a pareillement signé avec nous, après que, de notre main, le présent cahier a été coté par première et dernière pages, et paraphé au bas d’icelles ne varietur , observant que Vincent Robin et Louis Redon sont. d’avis que l’exportation ne soit pas permise. Signé Jacques Ledoux, marchand; Bellière; Jean-François Perrot ; Joseph Papin ; Roullon ; Michel Danest, syndic; André Perrot; Guillaume Baillion; Louis Redon ; H. Gossonnet; Antoine Nion; Etienne-Gilles Gillet; Antoine Robin; Jean-Louis Ghaimbault; Nicolas Lambert; Jacques Rous'seau; Vincent Robin; Morizot, et Meteyer. CAHIER Des doléances, plaintes et remontrances par les habitants de la paroisse de Bazemont (1). L’an 1789, le mercredi 14 avril de relevée, après l’assemblée convoquée au son de la cloche, en la manière accoutumée, nous, habitants de la paroisse de Bazemont, dépendante du Châtelet de Paris, tous nés Français, compris au rôle des impositions de ladite paroisse, étant tous assemblés dans la chambre à ce destinée, pour obéir aux ordres de Sa Majesté, portés en ses lettres données à Versailles, le 24 janvier dernier, pour la convocation et tenue des Etats généraux du royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant civil au Châtelet de Paris, dont du tout nous avons une pleine et entière connaissance par les lecture et publication qui en ont été faites, le 12 du présent mois, tant au prône de la messe paroissiale, qu’issue de ladite messe, au devant de la principale porte de l’église de Bazemont : ladite assemblée convoquée en exécution desdits ordres, règlement et ordonnance, à l’effet de rédiger le cahier des doléances, plaintes et remontrances de cette paroisse, ainsi que pour délibérer sur le choix des députés que nous sommes tenus de nommer entre nous; nous étant occupés de la rédaction dudit cahier, avons arrêté nos doléances, plaintes et remontrances ainsi qu’il suit : Bien public. Art. 1er. Les habitants de la paroisse de Bazemont, s’en référent à ce qui sera délibéré dans l’assemblée générale du Châtelet, sur ce qui concerne les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, et la prospérité générale du royaume. Les grands objets sont au-dessus de leur intelligence. Intérêts particuliers de la paroisse. Art. 2. Les susdits habitants demandent très-humblement au Roi qu’il plaise à Sa Majesté supprimer la capitainerie de Saint-Germain en Laye, et établir une règle fixe et constante, en vertu de laquelle on puisse obtenir les dédommagements convenables, en cas de délit occasionné par le gibier. Sans doute, que, parmi les personnes dont cette capitainerie blesse les intérêts, il se trouvera des hommes éloquents, qui exposeront avec force le tort de toute espèce que fait le gibier, le lapin surtout, et notamment le lièvre et la perdrix, qui sont plus multipliés qu’on ne saurait dire ; la dureté, et quelquefois l’injustice de ceux qui le conservent; les procédés tyranniques qu’autorisent ceux qui les commandent; le trafic honteux des cantons de chasse, qui en entraîne quelquefois un plus honteux encore, qui est celui de vendre le gibier, source malheureusement trop féconde du gibier le plus destructeur; les sommes considérables que font sortir des paroisses les amendes auxquelles on condamne, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. « 344 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {Paris hors les murs.] suivant une forme de procédure qui expose à regarder comme vrais des rapports infidèles ; et par-dessus tout, l’inutilité absolue de ce droit de capitainerie pour le bien de Sa Majesté. Ils assimilent les demandes qu’ils ont à faire de la destruction des pigeons, à celle qu’ils ont faite pour les perdrix. On pourrait demander la suppression entière du droit de chasse, au moins qu elle soit restreinte, pour les seuls seigneurs en personne, à la liberté de chasse au fusil; et que chaque particulier puisse, dans son champ, tendre des filets et autres engins pour la destruction du gibier. Art. 3. Lesdits habitants demandent la suppression de la taille et de la dîme. Ils espèrent que leur fardeau sera moins pesant, si on établit une imposition territoriale, qui s’étende, sans distinction, sans exception, sur toutes les terres et domaines qui composent le territoire de leur paroisse. Au surplus, ils s’en réfèrent, quant à ladite suppression de taille et dîmes, et conversion de ces deux objets à un impôt territorial, à ce que proposera l’assemblée générale à ce sujet. Art. 4. Lesdits habitants représentent que leur territoire est environné de tous côtés, tant de forêts, de bois, que de bruyères, qui sont peuplés d’une multitude innombrable de gibier de toute espèce, qui cause un dégât considérable, depuis le moment de l’ensemencement jusqu’à l’enlèvement de leur récolte; ce qui ôte une grande partie du produit du cultivateur, et, par conséquent, le met souvent hors d’état de payer ses impositions; et qu’il descend un égout de la forêt, qui, dans des temps d’orage, entraîne une partie de leur meilleur terrain, et par conséquent ruine la culture qui s’y trouve. Art. 5. Lesdits habitants demandent la suppression de tous les droits d’aides, et par conséquent du gros manquant ou trop bu, impôt dont Je nom seul a toujours paru révoltant, qui se paye quelquefois un, deux ou trois ans après la récolte. 11 a occasionné, l’année dernière, contre plusieurs des plaignants, des frais considérables, des droits exorbitants pour la suite de la récolte de 1780, qui avait été si favorable à la régie, que jamais on n’eût dû exercer un pareil droit contre le vigneron pour cette année-là même, quand il ne présenterait d’ailleurs aucun sujet de réclamation. Au reste, les droits d’aide en général ont un fondement peu équitable. Le vin est le fruit du travail et de l’industrie. Il ne doit pas être l’objet de l’impôt. C’est le sol qui doit le supporter ;’ et encore, ne doit-il le supporter qu’en proportion de sa bonté, de sa fertilité. Le droit des aides détruit ce principe. Le vigneron paye pour des terres de la plus mince valeur, plus que le laboureur pour les meilleures terres de labour. Il faudra sans doute, si on supprime ces droits, établir un autre impôt qui produise au Roi un équivalent. Les habitants s’en réfèrent pour ce aux personnes également éclairées et justes qui composeront l’assemblée des Etats généraux. C’est à elle à conseiller ce qui doit former les revenus de Sa Majesté, avec ce qu’exige la justice pour le bien des citoyens en général et en particulier. Art. 6. Lesdits habitants demandent la suppression de la maîtrise des eaux et forêts de Saint-Germain en Laye. On exige d’un particulier un droit de 36 sous, sans les frais du voyage, pour avoir la permission d’abattre un arbre de 15 sous, et il n’en vient pas 1 sou au Roi. Art. 7. Lesdits habitants demandent que, pour modérer en leur faveur l’impôt de la corvée, on en fasse supporter une partie par les exempts et les privilégiés. Ils profitent comme eux de l’entretien des chemins; ils contribuent plus qu’eux à leur dégradation. Art. 8. Ils demandent la liberté de passer dans les chemins qui conduisent de leur paroisse à Ecquevilly, lieu où passe la grande route de Saint-Germain, et pour aller aussi de leur paroisse dans la plaine des Alleux-le-Roi, où est une partie de leur terrain, le tout avec des voitures; comme aussi pour aller de leur paroisse à Meulan, par Flins. Art. 9. Lesdits habitants demandent la suppression de la milice. Autrefois, l’assujettissement à ce droit était un motif qui déterminait les jeunes gens à s’établir. Il produit aujourd’hui un effet tout différent. Ceux qui tombent au sort diffèrent de se marier, parce que, pour obtenir des hommes de substitution, on exige d’eux une forte somme. 11 serait si naturel de recruter les régiments provinciaux par des engagements volontaires. Art. 10. Ils demandent la suppression des banalités de fours et de pressoirs, à quoi ils sont assujettis, et la liberté de construire des fours et des pressoirs chez eux, ou d’aller pressurer leurs fruits de toute espèce où bon leur semble. Art. 11. Ils demandent une diminution sur le prix du sel, qui est une chose de première nécessité. Art. 12 et dernier. Nous demandons que la justice soit déchargée des entraves que l’esprit de chicane et encore plus la cupidité des officiers subalternes y ont introduites. Fait et arrêté les jour et an susdits; et avons signé. Signe François Labbé; N. Allair; P. Legrand: Guignard; Louis Aubrun; Allair; Mahiel; Gabriel Labbé; Aubrun; Jean Gretté; Etienne Botty; Michel Massieu; Louis Artus; Golly ; Louis Legrand; Gourdet; L.-G. Baroche; Guillaume Cheval; Dufour; Guillaume Gretté; Jacques Yerry; Gerette; Charles Masson. Paraphé ne varietur, par nous, prévôt de Baze-mont, soussigné. Signé LEGUEY. CAHIER Des plaintes et remontrances des habitants de la paroisse de Bazoche, près Pontchartrain (1). Nous, habitants de la paroisse de Bazoche près Pontchartrain, assemblés eejourd’hui 15 avril, pour satisfaire aux lettres du Roi du 24 janvier dernier, pour la convocation des Etats généraux du royaume, et à l’ordonnance de M. le prévôt de Pans, ou M. son lieutenant civil, du 4 du présent mois, après avoir délibéré entre nous, sommes unanimement convenus de rédiger le présent cahier de nos plaintes et remontrances ainsi qu’il suit. Nous proposons à Messieurs du clergé et de la noblesse de partager également, avec le troisième ordre, en proportion de leurs biens, toutes les charges de l’Etat; et, dans ce cas, nous désirons que tous les privilèges d’honneur leur soient conservés. Cette renonciation à toute exemption pécuniaire, étant volontairement faite par les deux premiers ordres, nous croyons qu’il est de l’intérêt (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.