Séance du 1er Prairial An II (Mardi 20 Mai 1794) Présidence de CARNOT Un membre de la commission des dépêches ouvre la séance par la lecture des lettres et adresses dont l’extrait suit. 1 La Société républicaine de Bienavisat, ci-devant le Bourg (Le Bourg-de-Visa) (1), celle de la Rochelle, celles de Rebais (2), de Terras-son, département de la Dordogne; d’Amfreville (3), celles de Bagnères-de-Luchon (4), celle de La Caune, département du Tarn; le conseil-général de la commune de Rouen; les administrateurs du district de Quingey, département du Doubs; le Comité de correspondance de la Société populaire de Tournus, le conseil-général de la comumne d’Autun (5), le conseil-général de la commune de Tartas (6), s’accordent dans l’expression de leur indignation contre les conspirateurs et contre le système d’athéisme, devenu, dans leurs mains, un moyen de contre-révolution : toutes ces adresses rendent hommage à l’énergie de la Convention nationale, et l’invitent à demeurer à son poste (7). a [La Sté popul. de Bienavisat, à la Conv.; 21 flor. II] ( 8). « Citoyens représentans, Nous voyons tous les jours par les papiers publics que les têtes des conspirateurs tombent sous le glaive de la loi, et nous le voïons avec un doux enthousiasme, parce que c’est le ciment de la liberté; nous la devons à votre énergie et aux sages et fortes mesures que vous avés sçû prendre pour découvrir les infâmes complots, et les trames éxécrables qui (1) Départ, du Lot, aujourd’hui Tarn-et-Garonne. (2) Seine-et-Mame. (3) Seine-Inférieure. (4) Haute-Garonne. (5) Saône-et-Loire. (6) Landes. (7) P.V., XXXVIII, 1. Bin, 3 prair. et 3 prair. (2e suppl1). (8) C 306, pl. 1153, p. 14. s’étaient ourdies. Nous vous félicitons d’avoir écrasé les serpens qui nourrissaient dans votre sein; nous admirons vos sublimes travaux, et nous vous prions de rester à votre poste jusqu’à ce que les droits sacrés de l’homme, la sainte liberté, et la douce égalité soient à l’abri de toute insulte. » Nogueres (présid.), Vitalis (secret.), Murat (secret.), Bousquet (secrét.), Darles. b [La Sté popul. de La Rochelle, à la Conv.; 5 flor. II] (1). « Citoyens représentans, Lorqu’une grande révolution s’opère chez un grand peuple, lorsqu’elle a pour objet de préparer et d’affermir les élémens du bonheur national, il ne suffit pas, sans doute, d’une simple mutation dans les choses, de régénération seulement dans le mode du gouvernement; il faut encore, il faut surtout, pour que cette révolution salutaire parvienne à son but véritable, pour qu’elle se trouve assise sur des bases indestructibles, que le même mouvement épurateur imprimé à l’administration, se fasse sentir dans la morale publique, et qu’il nationalise, pour ainsi dire, les vertus et la justice. Avec le régime politique, doivent donc changer les habitudes du peuple qui s’est mis en révolution pour assurer sa félicité. Ce n’est pas assez pour lui de s’être démonarchisé, de s’être proclamé républicain, il faut se répu-blicaniser irrévocablement par les mœurs qui consolident et éternisent la République. La justice et la vertu sont à Vordre du jour chez le peuple français; Telle est, citoyens représentans, l’annonce précieuse, la proclamation sublime que vous deviez à la nation qui vous a commis, que vous venez de lui donner, et que vous avez fait entendre à l’univers entier du haut de la Montagne. La France toute entière a recueilli cet axiome sorti du sanctuaire de la loi. Tous les points de la République en ont retenti. La bouche des français patriotes en a été l’écho, et leur cœur en doit être l’éternel dépositaire. Consolateur pour les répu-(1) C 306, pl. 1153, p. 1; J. Sablier, n° 1331. Séance du 1er Prairial An II (Mardi 20 Mai 1794) Présidence de CARNOT Un membre de la commission des dépêches ouvre la séance par la lecture des lettres et adresses dont l’extrait suit. 1 La Société républicaine de Bienavisat, ci-devant le Bourg (Le Bourg-de-Visa) (1), celle de la Rochelle, celles de Rebais (2), de Terras-son, département de la Dordogne; d’Amfreville (3), celles de Bagnères-de-Luchon (4), celle de La Caune, département du Tarn; le conseil-général de la commune de Rouen; les administrateurs du district de Quingey, département du Doubs; le Comité de correspondance de la Société populaire de Tournus, le conseil-général de la comumne d’Autun (5), le conseil-général de la commune de Tartas (6), s’accordent dans l’expression de leur indignation contre les conspirateurs et contre le système d’athéisme, devenu, dans leurs mains, un moyen de contre-révolution : toutes ces adresses rendent hommage à l’énergie de la Convention nationale, et l’invitent à demeurer à son poste (7). a [La Sté popul. de Bienavisat, à la Conv.; 21 flor. II] ( 8). « Citoyens représentans, Nous voyons tous les jours par les papiers publics que les têtes des conspirateurs tombent sous le glaive de la loi, et nous le voïons avec un doux enthousiasme, parce que c’est le ciment de la liberté; nous la devons à votre énergie et aux sages et fortes mesures que vous avés sçû prendre pour découvrir les infâmes complots, et les trames éxécrables qui (1) Départ, du Lot, aujourd’hui Tarn-et-Garonne. (2) Seine-et-Mame. (3) Seine-Inférieure. (4) Haute-Garonne. (5) Saône-et-Loire. (6) Landes. (7) P.V., XXXVIII, 1. Bin, 3 prair. et 3 prair. (2e suppl1). (8) C 306, pl. 1153, p. 14. s’étaient ourdies. Nous vous félicitons d’avoir écrasé les serpens qui nourrissaient dans votre sein; nous admirons vos sublimes travaux, et nous vous prions de rester à votre poste jusqu’à ce que les droits sacrés de l’homme, la sainte liberté, et la douce égalité soient à l’abri de toute insulte. » Nogueres (présid.), Vitalis (secret.), Murat (secret.), Bousquet (secrét.), Darles. b [La Sté popul. de La Rochelle, à la Conv.; 5 flor. II] (1). « Citoyens représentans, Lorqu’une grande révolution s’opère chez un grand peuple, lorsqu’elle a pour objet de préparer et d’affermir les élémens du bonheur national, il ne suffit pas, sans doute, d’une simple mutation dans les choses, de régénération seulement dans le mode du gouvernement; il faut encore, il faut surtout, pour que cette révolution salutaire parvienne à son but véritable, pour qu’elle se trouve assise sur des bases indestructibles, que le même mouvement épurateur imprimé à l’administration, se fasse sentir dans la morale publique, et qu’il nationalise, pour ainsi dire, les vertus et la justice. Avec le régime politique, doivent donc changer les habitudes du peuple qui s’est mis en révolution pour assurer sa félicité. Ce n’est pas assez pour lui de s’être démonarchisé, de s’être proclamé républicain, il faut se répu-blicaniser irrévocablement par les mœurs qui consolident et éternisent la République. La justice et la vertu sont à Vordre du jour chez le peuple français; Telle est, citoyens représentans, l’annonce précieuse, la proclamation sublime que vous deviez à la nation qui vous a commis, que vous venez de lui donner, et que vous avez fait entendre à l’univers entier du haut de la Montagne. La France toute entière a recueilli cet axiome sorti du sanctuaire de la loi. Tous les points de la République en ont retenti. La bouche des français patriotes en a été l’écho, et leur cœur en doit être l’éternel dépositaire. Consolateur pour les répu-(1) C 306, pl. 1153, p. 1; J. Sablier, n° 1331. SÉANCE DU 1er PRAIRIAL AN II (20 MAI 1794) - N° 1 471 blicains, qu’il est terrible, cet ordre du jour, pour les tyrans ! Us ont résonné, ces mots de justice et de vertu, dans l’âme des traîtres; ils y ont porté l’effroi. Le conseil des tyrans conspirateurs les a entendus, et il en a pâli; il y a vu la perte certaine de ses dernières espérances; il y a vu un nouveau rayon de lumière pour les nations esclaves. Fatigués de ne pouvoir triompher par la force des armes, fatigués de l’insuccès du genre de trahisons qu’ils avoient jusqu’alors salariées, les rois ont cru vaincre enfin le peuple français par le peuple français lui-même, pouvoir tourner contre lui ses propres vertus en les défigurant, ils ont compté assassiner la République en dénaturant par l’exagération ses principes et notre moralité. C’est ainsi que les agents perfides de ces assassins moraux vouloient des ténèbres et de l’intolérance de la superstition, nous conduire aux ténèbres et à l’intolérance de l’athéisme, afin que, dans la confusion de toutes nos pensées, dans l’oubli des vrais et seuls principes conservateurs de la morale et de la République, le vaisseau de l’Etat ne se trouvât plus qu’un vaisseau sans boussole, et que les vents promènent au gré de leurs caprices. Mais la justice et la vertu mises à l’ordre du jour , voilà, citoyens représentans, votre boussole et la nôtre. Qu’ils tremblent maintenant les traîtres, tous les républicains imposteurs, les charlatans en patriotisme, les modérés qui s’imaginent que la vertu aujourd’hui proclamée n’est que son masque dont ils se couvrent, qu’ils tremblent, en un mot, tous ceux qui ne se sentent ni justes, ni vertueux ! La justice veut la mort des méchans; la vertu doit être le cachet du patriotisme, et le complément des qualités républicaines. Sans justice, la révolution n’est qu’un mot; sans vertu, point de République. Le trône royal est tombé; sur ses débris doit s’élever le trône des vertus. Les vertus sont souveraines chez les peuples libres. Le français qui a conquis son indépendance, ne doit plus reconnoître maintenant d’autres puissances que la liberté, l’égalité, la justice et l’Eternel dont elles émanent. » Armand Desbois (présid.), J. Fournial (secrét.). c La Sté républicaine de Rebais, département de Seine-et-Marne, demande que le décret qui ordonne aux représentans du peuple de rendre compte de leur conduite politique, soit étendu à tous les membres des administrations. C’est parce que la probité, dit cette Société, est à l’ordre du jour, qu’il faut connaître et punir les fripons qui se trouvent enrichis aux dépens de la République (1) . d La Société populaire de Terrasson rend hommage à l’énergie de la Convention (2) . (1) Bin, 3 prair. (2) J. Matin, n° 699. e [La Sté popul. d’Amfrevïlle, à la Conv.; 26 flor. Il ] d). « Citoyens représentans, Si les sentimens d’admiration et de reconnaissance que nous éprouvons pour la Convention nationale n’étaient pas portés à leur plus haut période, ses derniers décrets eussent bientôt fait naître en nous ce saint enthousiasme qu’accompagne toujours l’idée d’un Etre suprême de la liberté. En reconnaissant l’immortalité de l’âme, Législateurs, vous vous êtes rendu justice à vous mêmes; vous l’avez rendu à la France entière et comment, témoins de vos travaux, n’eussions nous pas reconnu cette immortalité sans laquelle la vertu et le vice ne seraient que des mots imaginaires ? L’âme du vrai républicain est immortelle comme le Dieu qui la forma; celle du méchant est éternelle aussi, et c’est pour son malheur. Continuez, Législateurs, vos glorieux travaux. Le temps n’est plus où l’on pouvait craindre de ne pas trouver le peuple à la hauteur de ses représentans. Vous êtes dignes de la France et nous sommes dignes de vous. Vive la République ! Vive la Convention nationale ! Vive la Montagne ! » Guillaume Fiquet (présid.), François Louis Sou-ry, André A. Broboc, Jacques Pascal Tetisse, Jean Baptiste Durand, vrai montagnard, Jean Nicolas Saillant, François Soury, P. Guichard, Prévost, Jean Perier, Nicolas Rault, Jaques Enault, Romain Sicaubé, Jean Jacques Durand, Marie-Nicolas Lhuillier fils, Charles Huë, Romain Duval, François Roye, Querray, Lapille, Jean Jacques Duval, Antoine Delà ville (secrét.), Jean Huë frère. f [La Sté popul. de Bagnères-de-Luchon, à la Conv.; s.d.] (2) . «Et nous aussi, représentants, nous admirons avec un enthousiasme républicain vos travaux sublimes, dont les effets assurent le bonheur aux français et font trembler les despotes sur leurs trônes ébranlés. Une nouvelle conspiration ourdie dans les cavernes sourdes de l’astutieuse aristocratie, vient d’être déjouée par votre surveillance... Des scélérats osent encore tenter de nouveaux efforts pour miner la liberté dans ses fondements : mais un rocher formidable s’est détaché de la montaigne sainte, et les a écrasés dans sa chûte. Achevés votre ouvrage, représentants, restés à votre poste, jusqu’au moment où, du haut du mont sacré vous puissiés contempler le grand spectacle des français libres, et des thyrans de l’humanité anéantis. » Gazave (secrét.). (1) C 306, pl. 1153, p. 4. (2) C 306, pl. 1153, p. 14. SÉANCE DU 1er PRAIRIAL AN II (20 MAI 1794) - N° 1 471 blicains, qu’il est terrible, cet ordre du jour, pour les tyrans ! Us ont résonné, ces mots de justice et de vertu, dans l’âme des traîtres; ils y ont porté l’effroi. Le conseil des tyrans conspirateurs les a entendus, et il en a pâli; il y a vu la perte certaine de ses dernières espérances; il y a vu un nouveau rayon de lumière pour les nations esclaves. Fatigués de ne pouvoir triompher par la force des armes, fatigués de l’insuccès du genre de trahisons qu’ils avoient jusqu’alors salariées, les rois ont cru vaincre enfin le peuple français par le peuple français lui-même, pouvoir tourner contre lui ses propres vertus en les défigurant, ils ont compté assassiner la République en dénaturant par l’exagération ses principes et notre moralité. C’est ainsi que les agents perfides de ces assassins moraux vouloient des ténèbres et de l’intolérance de la superstition, nous conduire aux ténèbres et à l’intolérance de l’athéisme, afin que, dans la confusion de toutes nos pensées, dans l’oubli des vrais et seuls principes conservateurs de la morale et de la République, le vaisseau de l’Etat ne se trouvât plus qu’un vaisseau sans boussole, et que les vents promènent au gré de leurs caprices. Mais la justice et la vertu mises à l’ordre du jour , voilà, citoyens représentans, votre boussole et la nôtre. Qu’ils tremblent maintenant les traîtres, tous les républicains imposteurs, les charlatans en patriotisme, les modérés qui s’imaginent que la vertu aujourd’hui proclamée n’est que son masque dont ils se couvrent, qu’ils tremblent, en un mot, tous ceux qui ne se sentent ni justes, ni vertueux ! La justice veut la mort des méchans; la vertu doit être le cachet du patriotisme, et le complément des qualités républicaines. Sans justice, la révolution n’est qu’un mot; sans vertu, point de République. Le trône royal est tombé; sur ses débris doit s’élever le trône des vertus. Les vertus sont souveraines chez les peuples libres. Le français qui a conquis son indépendance, ne doit plus reconnoître maintenant d’autres puissances que la liberté, l’égalité, la justice et l’Eternel dont elles émanent. » Armand Desbois (présid.), J. Fournial (secrét.). c La Sté républicaine de Rebais, département de Seine-et-Marne, demande que le décret qui ordonne aux représentans du peuple de rendre compte de leur conduite politique, soit étendu à tous les membres des administrations. C’est parce que la probité, dit cette Société, est à l’ordre du jour, qu’il faut connaître et punir les fripons qui se trouvent enrichis aux dépens de la République (1) . d La Société populaire de Terrasson rend hommage à l’énergie de la Convention (2) . (1) Bin, 3 prair. (2) J. Matin, n° 699. e [La Sté popul. d’Amfrevïlle, à la Conv.; 26 flor. Il ] d). « Citoyens représentans, Si les sentimens d’admiration et de reconnaissance que nous éprouvons pour la Convention nationale n’étaient pas portés à leur plus haut période, ses derniers décrets eussent bientôt fait naître en nous ce saint enthousiasme qu’accompagne toujours l’idée d’un Etre suprême de la liberté. En reconnaissant l’immortalité de l’âme, Législateurs, vous vous êtes rendu justice à vous mêmes; vous l’avez rendu à la France entière et comment, témoins de vos travaux, n’eussions nous pas reconnu cette immortalité sans laquelle la vertu et le vice ne seraient que des mots imaginaires ? L’âme du vrai républicain est immortelle comme le Dieu qui la forma; celle du méchant est éternelle aussi, et c’est pour son malheur. Continuez, Législateurs, vos glorieux travaux. Le temps n’est plus où l’on pouvait craindre de ne pas trouver le peuple à la hauteur de ses représentans. Vous êtes dignes de la France et nous sommes dignes de vous. Vive la République ! Vive la Convention nationale ! Vive la Montagne ! » Guillaume Fiquet (présid.), François Louis Sou-ry, André A. Broboc, Jacques Pascal Tetisse, Jean Baptiste Durand, vrai montagnard, Jean Nicolas Saillant, François Soury, P. Guichard, Prévost, Jean Perier, Nicolas Rault, Jaques Enault, Romain Sicaubé, Jean Jacques Durand, Marie-Nicolas Lhuillier fils, Charles Huë, Romain Duval, François Roye, Querray, Lapille, Jean Jacques Duval, Antoine Delà ville (secrét.), Jean Huë frère. f [La Sté popul. de Bagnères-de-Luchon, à la Conv.; s.d.] (2) . «Et nous aussi, représentants, nous admirons avec un enthousiasme républicain vos travaux sublimes, dont les effets assurent le bonheur aux français et font trembler les despotes sur leurs trônes ébranlés. Une nouvelle conspiration ourdie dans les cavernes sourdes de l’astutieuse aristocratie, vient d’être déjouée par votre surveillance... Des scélérats osent encore tenter de nouveaux efforts pour miner la liberté dans ses fondements : mais un rocher formidable s’est détaché de la montaigne sainte, et les a écrasés dans sa chûte. Achevés votre ouvrage, représentants, restés à votre poste, jusqu’au moment où, du haut du mont sacré vous puissiés contempler le grand spectacle des français libres, et des thyrans de l’humanité anéantis. » Gazave (secrét.). (1) C 306, pl. 1153, p. 4. (2) C 306, pl. 1153, p. 14.