PARIS (INTRA MUROS). CAHIER De doléances et remontrances du clergé de Paris intra muros , remis dans la séance du lundi 18 mai 1789, à monseigneur l'archevêque de Paris et à MM. de MONTESQUIOU, agent général du clergé de France; CHEVREUIL, chanoine et chancelier de l'église de Paris, vicaire général et official diocésain ; GROS, curé de Saint-Ni-colas-du-Chardonnet ; Dom CHEVREUX , général de la congrégation de Saint-Maur ; DüMOUCHEL, recteur de l'Université ; LEGROS, prévôt de Saint-Louis-du-Louvre ; de BONNEVAL, chanoine de l’église de Paris; VAYTARD, curé de Saint-Ger-vais,et de BARMONT, conseiller clerc au parlement, élus députés aux Etats généraux de 1789 (1). Le clergé de Paris, intra muros, pénétré de re-connnaissance envers le Roi, et empressé de concourir autant qu’il peut dépendre de lui aux. vues de justice et de bienfaisance qui ont déterminé Sa Majesté à s’environner de sa nation pour assurer le bonheur de ses peuples et la prospérité de son empire, charge ses députés aux Etats généraux de présenter au Roi ses très-respectueuses doléances. Son amour pour la personne sacrée de son souverain, et sa confiance en ses vertus, ne lui permettent pas de douter que Sa Majesté ne lui accorde le redressement des griefs qufil se fait un devoir d’exposer, et n’accueille favorablement les demandes qu’il adresse à sou cœur paternel et à sa sagesse. C’est dans ces sentiments d’amour et de confiance, qui établissent entre la nation et son Roi les rapports essentiels que la religion commande et que l’intérêt de l’Etat exige, que le clergé de Paris charge ses députés aux Etats généraux de demander : PREMIÈRE PARTIE. Religion et administration ecclésiastique. Art. 1er. Que la religion catholique, apostolique et romaine, la seule vraie, la seule religion de l’Etat, dont les principes sont si intimement liés au maintien de l’autorité et au bonheur du peuple, soit conservée dans toute son intégrité, et qu’à elle seule appartienne l’exercice du culte extérieur et public à l’exclusion de tout autre. Art. 2. Qu’en conséquence, Sa Majesté soit suppliée d’ordonner la révision de l’édit du mois de novembre 1787, concernant les non catholiques ; le clergé ne pouvant dissimuler les vives alarmes que cet édit lui inspire, et se croyant obligé de charger expressément ses députés aux Etats généraux d’employer tous leurs soins pour faire réussir cette demande. Art. 3. Que rien n’étant plus propre à affaiblir, dans l’esprit des peuples, le respect dû à la religion que le mépris public de ses préceptes et de (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire. ses plus saintes ordonnances, les lois concernant la sanctification des dimanches et fêtes, et la cessation des travaux, même publics, en ces saints jours, hors le cas d’une absolue nécessité, soient renouvelées et observées ; et que les officiers de police soient obligés, dans les permissions qu’ils donneront, s’il y a lieu, de viser celles accordées par le supérieur ecclésiastique. Art. 4. Qu’il soit pourvu au renouvellement et à l’exécution des ordonnances concernant la police intérieure des églises, et le respect dû aux ministres dans l’exercice de leurs fonctions, soit dans l’église, soit hors l’église. Art. 5. Que Sa Majesté veuille bien accorder aux vœux, si souvent exprimés par l’église de France, la convocation périodique et facile des conciles provinciaux, dont une trop longue désuétude est la cause principale des plaies multipliées faites à la discipline ecclésiastique, et qui sont, avec les synodes diocésains, le moyen le plus efficace de la rétablir et de l’entretenir. Art. 6. Que les lois canoniques et civiles qui prescrivent la résidence, soient exactement observées, et que les privilèges des commensaux soient restreints, comme préjudiciables au service divin dans les cathédrales et les collégiales. Art. 7. Que rien n’étant plus contraire à l’esprit de l’Eglise et à ses véritables intérêts, que de voir accumulés sur une même tête des bénéfices qui, sagement-répartis, serviraient à l’entretien de plusieurs ministres utiles, les anciennes règles, et spécialement celle du concile de Trente, concernant la pluralité des bénéfices, soient mises à exécution. Art. 8. Que les ordres religieux soient conservés et protégés comme utiles, non-seulement à la religion, mais encore à l’Etat ; que pour y maintenir la régularité, ou pour la rappeler dans les maisons qui pourraient s’en être écartées, il ne soit employé que des moyens conformes aux lois canoniques ; et que jamais, sous prétexte de réforme, il ne soit fait usage de ceux qui ne peuvent qu’anéantir l’esprit de subordination, dégoûter de leur état les religieux attachés à la règle, et enhardir les infracteurs en leur montrant la liberté et l’aisance comme le prix assuré de leur défection. Art. 9. Qu’en conséquence, aucun ordre religieux de l’un ou l’autre sexe, aucun corps ecclésiastique, aucune communauté séculière ou régulière légalement instituée, ne puisse être supprimée sans l’observation de toutes les formes canoniques et civiles, et qu’il soit à l’avenir nécessaire de prendre le consentement du concile provincial pour la suppression d’une maison particulière de son district : ou, s’il s’agit d’un ordre entier, que l’extinction n’en puisse avoir lieu sans le consentement de tous les conciles provinciaux dans le district desquels ledit corps ou ordre aurait des établissements. Art. 10. Que les ordres mendiants soient secourus de manière à faire cesser, s’il est possible, 264 [Paris, intra muros.] [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. leur mendicité; ou du moins qu’il leur soit permis de disposer, en se conformant aux lois ecclésiastiques et civiles, de'ceuxde leurs emplacements qui pourraient produire un revenu actuellement nécessaire, pour suppléer aux aumônes infiniment diminuées, et qui ne sont plus en proportion de leurs besoins. Art. 11. Que les lois canoniques au sujet des aliénations des biens ecclésiastiques soient rigoureusement observées, et qu’il ne puisse en être fait aucune sous quelque prétexte que ce soit, sans le consentement de l’évêque et avant l’intervention de son décret. Art. 12. Qu’il soit rendu compte à la chambre du clergé des Etats généraux de tous les biens des ordres supprimés, et de ceux des maisons particulières, qui sont dans le même cas, ou dont les revenus auraient été séquestrés en vertu d’arrêts du conseil. Art. 13. Que l’état où se trouve réduite la partie du clergé de Paris, employée au service pénible des paroisses, à l’administration des sacrements, à l’instruction des peuples, soit pris en considération, et que l’on s’en occupe promptement, essentiellement, efficacement. Que ces ministres si laborieux et si utiles ne soient plus exposés à manquer souvent des moyens de subsistance les plus nécessaires, d’encouragement dans leurs travaux, de ressources dans les maladies et la vieillesse. Que les premiers principes de la justice, la destination sacrée des biens du clergé, et l’honneur même du sacerdoce, réclamant hautement en leur faveur des secours indispensables, il y soit pourvu par l’union et application de telles menses abbatiales ou prieuriales opulentes qu’il appartiendra. Art. 14. Et notamment le clergé de Paris sollicite avec instance, comme le plus prompt et le plus sûr moyen de subvenir à ses besoins extrêmes, l’union de la mense abbatiale des Saint-Germain-des-Prés à la mense conventuelle (les revenus de ladite mense abbatiale préalablement estimés en grains), pour, par les religieux, fournir les prestations annuelles, aussi estimées en grains, qui auront été attribuées à chaque paroisse par M. l’archevêque, assisté d’un conseil, suivant le tableau des besoins de chaque paroisse qui aura été précédemment fourni par MM. les curés ; de sorte que chaque prêtre appliqué aux fonctions du saint ministère dans la ville de Paris ait au moins 1200 livres de revenu. Art. 15. Qu’il y ait dans les cathédrales et collégiales des prébendes affectées aux prêtres qui auront travaillé un certain nombre d’années dans le saint ministère, sans préjudice toutefois du droit des gradués. Art. 16. L’éducation publique ayant une influence si marquée sur le sort des empires par les sentiments qu’elle fait germer dans le coeur des citoyens, et les moeurs auxquelles elle les forme, le clergé a toujours mis au nombre de ses principaux devoirs l’obligation de s’en occuper essentiellement et de la surveiller. Les ressources qu’offre en ce genre à la capitale le corps si justement célèbre de l’Université, laisse à cet égard peu de voeux à former. Cependant le clergé de Paris ne peut voir sans la plus amère douleur les sources de la première éducation, pour ainsi dire taries, et la plupart des collèges des provinces, autrefois si florissants, manquer souvent de maîtres, dont les vertus, les talents et la stabilité puissent mériter la confiance. Art. 17. G’est pourquoi le clergé de Paris demande que l’éducation soit confiée dans toutes les provinces à différents ordres religieux, qu! s’empresseront, et dont plusieurs même ont généreusement offert de se consacrer a cet objet d’utilité publique ; ou qu’on y appelle des congrégations et communautés d’ecclésiastiques séculiers ou réguliers ; que dans l’un et l’autre cas, les collèges de province soient mis sous l’inspection et supériorité majeure de l’ordinaire; et que pour la réformation des abus qui auraient pu s’introduire dans les études publiques de Paris, et les améliorations dont elles seraient susceptibles, l’Université soit consultée et en tendue. Art. 18. Que toutes les maisons d’éducation dans Paris et les environs, qui ne sont sous l’inspection d’aucun supérieur ecclésiastique ou de l’université , soient supprimées ; une funeste expérience ayant appris que cette clandestinité ouvre la porte à une foule d’abus, et sert à propager les principes les plus pernicieux. Art. 19. Que, pour faire participer tous les citoyens aux bienfaits de l’éducation publique et gratuite dans cette capitale, quelques collèges de plein exercice soient transférés dans les quartiers les plus éloignés du centre de l’Université. Art. 20. Qu’il soit établi et fondé dans toutes les paroisses, en proportion de leur étendue, des écoles gratuites, mais distinctes et séparées pour l’un et l’autre sexe. Art. 21. Que tous les règlements qui tendent à conserver et fortifier la précieuse influence des curés sur l’éducation, et surtout sous le rapport de l’instruction chétienne, soient remis en vigueur. Art. 22. Qu’il soit pourvu à la conservation des mœurs de la jeunesse et de tous les citoyens, en interdisant tout ce qui tend directement à les corrompre, et spécialement les livres impies et obscènes ; l’exposition si connue aujourd’hui des statues, peintures, gravures indécentes, ces spectacles corrupteurs dont la capitale est remplie, et qui portent la contagion dans la classe même du peuple qui en était autrefois préservée ; en réprimant de la manière la plus sévère la licence effrénée de ces prostituées infâmes, dont le nombre croît tous les jours, et qui ne rougissant pas d’associer l’enfance elle-même à leurs honteuses sollicitations, insultent à toutes les heures et dans toutes les rues à la pudeur publique. Art. 23. Que la licence de la presse soit réprimée, et que, par de bons et sages réglements, on prévienne tous les abus qui peuvent porter atteinte à la religion, au gouvernement et aux mœurs. Art. 24. Que l’on prenne des moyens pour parvenir à la suppression de toutes les loteries, qui sont autant de pièges tendus à la cupidité, et dont l’effet est d’ôter au pauvre jusqu’à sa subsistance, et de bouleverser souvent les fortunes les mieux établies, et d’enhardir à violer la foi du dépôt, celui-là même qui en aurait eu horreur, s’il n’eût été séduit par l’appât trompeur qu’elles présen-. tent, et par la fureur du jeu qu’elles inspirent. Art. 25. Que l’on examine sévèrement cet établissement inconnu à nos pères, qui, sous le nom spécieux de Mont-de-Piété, vend chèrement au malheureux honnête un argent qu’il finit par payer de toute sa substance, et qui présente à l’infidélité un moyen sûr de cacher ses rapines, et d’en recueillir les fruits. Art. 26. Que, dans les Etats généraux, il soit rendu compte de toutes les sommes perçues pour les hôpitaux, et notammeut pour l’Hôtel-Dieu de Paris, afin qu’elles soient appliquées suivant leur [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intramnros.] 265 destination, et que, de concert avec la chambre ecclésiastique desdîts Etats, il soit remédié aux abus qui auraient pu se glisser, soit dans l’administration de l’intérieur, soit dans celle des biens de cet hôpital et des autres. Art. 27. Que dans l’administration des hôpitaux il y ait toujours un nombre suffisant de curés, comme étant liés plus particulièrement par leurs fonctions et leur zèle au sort et à l’intérêt des pauvres. Art. 28. Que l’on prenne en considération la surchage qu’éprouve la maison des enfants trouvés de cette capitale, et que, pour parer à tous les inconvénients qui en résultent, il soit formé dans les différentes provinces des établissements où ces malheureux enfants puissent être reçus et conservés à l’Etat. Art. 29. Que tous les droits, honneurs efprivi-léges autres que l’exemption pécuniaire dont le clergé de Paris a fait le sacrifice volonaire par sa délibération du 27 avril dernier, soient conservés et maintenus, attendu qu’ils appartiennent au clergé comme premier ordre de l’Etat, et qu’ils concourent à faire respecter la religion et ses ministres. Art. 30. Que la juridiction ecclésiastique soit conservée en son entier, conformément aux lois et aux canons reçus dans le royaume ; et que la jurisprudence des cours soit rappelée à des principes clairs et invariables. Art. 31. Que les appels comme d’abus soient contenus dans de justes bornes. Que les juges souverains soient astreints à marquer dans leurs arrêts en quoi consiste l’abus, et les parties obligées à remplir les formalités rappelées par l’édit de 1695. Art. 32. Que l’usage des monitoires soit aboli, si ce n’est dans des cas graves, comme crime d’Etat ou meurtre, et que le juge d’église ne puisse être pris à partie pour cause de refus. Art. 33. Que, vu les abus de l’administration des économats, la chambre du clergé s’occupe dans les Etats généraux de les remplacer en ce qu’ils peuvent avoir d’utile par rapport aux réparations des bénéfices, et que le Roi soit très-humblement supplié de pourvoir au plus tôt à la nomination des bénéfices dont il dispose, à mesure qu’ils vaqueront. Art. 34. Que les collations attribuées au Roi depuis dix ans, en vertu d’unions, soient rendues à l’ordinaire, et qu’il en soit usé de même à l’avenir. Art. 35. Qu’il ne soit plus doté de chapitre noble avec des revenus de fondations, qui n’avaient dans l’origine de destination exclusive en faveur de la noblesse. Art. 36. Que le droit de régale soit restreint dans les bornes prescrites parles ordonnances; qu’il soit enjoint aux juges qui en connaissent de se conformer à la lettre desdites ordonnances, sans aucun égard à la jurisprudence introduite par les arrêts ; et que la régale soit censée légalement fermée trois mois après l’enregistrement du serment de fidélité. Art. 37. Que la prévention en cour de Rome ne puisse être exercée qu’un mois après la mort du titulaire. Art. 38. Que le droit de déport soit supprimé dans toute l’étendue du royaume, en indemnisant ceux que la perte de ce droit priverait d’un revenu nécessaire au soutien de leur dignité. Art. 33. Qu’il soit pris des mesures les plus justes et les plus efficaces, pour qu’il n’y ait plus dans la même église un service paroissial et collégial ; sauf les droits des fondateurs, collateurs, titulaires et chapitres. Art. 40. Qu’il soit procédé à une nouvelle démarcation des [imites des paroisses ; que celles dont la trop vaste étendue nuirait à l’administration des secours spirituels soient démembrées, et que chaque arrondissement soit placé à portée de son église et de son pasteur. Art. 41. Que la déclaration de 1780, concernant les actes de baptême, soit modifiée et interprétée de manière à prévenir les fausses et calomnieuses déclarations de paternité. Art. 42. Que la Sainte-Chapelle de Paris, ce respectable monument de la piété de saint Louis, et si chère à la religion par les précieuses reliques qu’elle renferme, soit conservée ; mais que sa constitution soit réformée dans tous les points qui pourraient donner lieu à des divisions ou à des contestations fâcheuses. Art. 43. Que l’accomplissement des devoirs de religion, et la dignité du culte public, souffrant un préjudice notable de la lenteur avec laquelle sont conduites les constructions ou reconstructions de plusieurs églises paroissiales de celte ville , il soit pris les moyens convenables pour accélérer des travaux si utiles, et suspendus depuis si longtemps. SECONDE PARTIE. Constitution et administration civiles. Le clergé de la ville de Paris vient de mettre sous les yeux du Roi et de la nation assemblée les grands intérêts de la religion, dont le précieux dépôt lui est spécialement confié, et les objets d’administration qu’elle consacre en quelque manière par les rapports qu’ils ont avec le culte divin, les mœurs, le soin des pauvres et la discipline ecclésiastique. Les ministres des autels sont en même temps citoyens, et leur zèle patriotique, animé, perfectionné même par la religion qu’ils professent, ne leur permet pas de se montrer indifférents sur le sort de l’Etat dont ils ont le bonheur de faire partie. Mais avant de reprendre la suite de ses doléances, et d’étendre ses vues sur l’administration politique et civile, le clergé de Paris, inviolable-ment attaché à la doctrine constante de l’Eglise de France, ainsi qu'aux anciens principes de la constitution française, et justement alarmé de l’espèce de révolution que des opinions dangereuses et étrangères ont fait dans les esprits, s’empresse de déclarer : 1° Que le gouvernement français est un gouvernement purement monarchique ; que la puissance souveraine et législative réside en la personne seule du Roi ; mais que, dans l’exercice de son autorité, le monarque est lié par des lois fondamentales et constitutionnelles, et qu’il existe des formes qui doivent nécessairement précéder et préparer l’exécution de ces lois ; 2° Qu’il regarde comme appartenant essentiellement à la constitution : Le droit qu’a la nation française de ne payer d’autres impôts ou subsides que* ceux qu’elle aurait librement consentis et déterminés, quant à la forme, la quotité et la durée; Le droit inviolable qu’ont tous les ordres, tous les corps, tous les particuliers, d’être conservés et maintenus dans toutes leurs propriétés : Le droit qu’a tout individu de ne pouvoir être privé de sa liberté personnelle, hors les cas prévus et en la forme déterminée par la loi ; 266 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] L’existence, la distinction et l’indépendance réciproque des trois ordres ; indépendance telle u’aucun des ordres ne peut être privé du droit ’opiner séparément, ni obligé par la délibération des deux autres. Le clergé de la ville de Paris enjoint très-expressément à ses députés aux Etats généraux de ne jamais consentir à l’altération de ses principes, et les charge de demander : Art. 1er. Qu’il plaise à Sa Majestéassurerlaperpé' tuitédu bienfait qu’elle a si libéralement accordé à ses peuples en ordonnant la convocation des Etats généraux après une trop longue interruption ; et qu’elle daigne mettre le comble à ses bontés et à la justice, en consentant qu’ils soient périodiquement convoqués à des époques fixes et rapprochées. Art. 2. Que Sa Majesté daigne ausssi recevoir favorablement les réclamations et protestations du clergé de la ville de Paris, contre la forme de convocation aux Etats généraux dernièrement employée; et que dans lesdits Etats généraux il soit réglé une autre forme telle que les différents corps, classes et ordres, soient représentés dans une proportion relativement suffisante. Art. 3. Que la colonie de Saint-Domingue soit admise, appelée même aux prochains Etats généraux, à l’effet d’y discuter le droit qu’elle réclame d’y avoir des représentants chargés de défendre ses intérêts. Art. 4. Qu’aucun citoyen ne puisse être arrêté en vertu de lettres de cachet, si ce n’est dans le cas et aux conditions qui auront été fixées et déterminées dans les Etats généraux. Art. 5. Que l’acte d’humanité et de justice, dont notre auguste monarque a solennellement donné l’exemple, soit imité dans toute la France, et qu’on en fasse disparaître les derniers vestiges de la servitude personnelle, sauf à indemniser les seigneurs lorsqu’il y aura lieu. Que la traite des nègres soit elle-même totalement supprimée, s’il est possible, ou que du moins on assure, par de bonnes lois, à tous les noirs de nos colonies, un traitement doux et modéré, et tous les secours de la religion et de l’humanité. Art. 6. Qu’il soit accordé à toutes les provinces du royaume des Etats ou assemblées, dont la constitution soit régulière, convenue dans les Etats généraux, et où trois ordres, séparés et distincts, votent et soient représentés de la même manière et en la même proportion qui doivent être observées aux Etats généraux. Qu’à ces Etats provinciaux , ou assemblées, appartienne la vérification des propriétés, l’assiette, répartition et perception des subsides, ainsi que le versement d’iceux dans les caisses à ce destinées, afin que l’impôt soit supporté dans la plus juste proportion par tous les contribuables, et qu’il soit perçu de la manière la moins onéreuse pour tous, et la moins dispendieuse. Art. 7. Que dans la perception de l’impôt, de quelque manière qu’elle soit opérée, le pauvre de la ville et de la campagne soit toujours traité avec ménagement ; et que jamais, sous prétexte de retard, on ne le dépouille des meubles, ustensiles et outils qui lui sont nécessaires pour gagner sa vie et faire subsister sa famille. Art. 8. Que Sa Majesté soit très-humblement suppliée de faire connaître aux prochains Etats généraux la véritable situation des finances, l’état exact de la dette publique et du déficit actuel, à l’effet de constater et consolider la dette publique, de prendre les mesures nécessaires pour combler le déficit , en évitant autant qu’il sera possible de nouveaux impôts, et pour rétablir l’équilibre en tre les dépenses justes et nécessaires, et la recette. Au moyen de quoi, et pour concourir autant qu’il est en lui au rétablissement de l’ordre dans toutes ses parties, le clergé de la ville de Paris a délibéré et arrêté unanimement , en son assemblée du 27 avril dernier , de concourir , dans la juste proportion de ses revenus , a l'acquittement des charges publiques librement consenties par les trois ordres dans les Etats généraux : l'assemblée ne se permettant pas de douter que , le clergé de France n’ayant contracté ses dettes que pour le service de l'Etat , la nation ne les reconnaisse comme faisant partie de la dette publique. Art. 9 . Que tous ministres, ordonnateurs et autres, chacun dans leur département, soient responsables et comptables à la nation de l’emploi des deniers publics; et que le compte des dépenses et des recettes de chaque département soit imprimé et publié tous les ans. Art. 10. Que les acquits de comptant soient réduits à une quantité fixe et déterminée dans les Etats généraux. Art. 11. Que toutes les pensions ou traitements quelconques sur le trésor royal, ou sur les différents départements, caisses publiques, etc., soient soumises à l’examen le plus sévère pour connaître le motif qui les a fait accorder, la quotité de ces différentes pensions, si plusieurs sont accumulées sur une même personne; que la liste de ces pensions soit imprimée et rendue publique, et qu’il y ait dans les différents départements une somme fixée et déterminée, que les-dites pensions ne pourront jamais excéder. Art. 12. Que les droits d1 aides et gabelles, cet impôt véritablement désastreux, soient perçus avec modération jusqu’au moment désiré par la nation et promis par le Roi, où ils seront totalement supprimés. Art. 13. Que les droits de contrôle soient clairement déterminés et publiés, et qu’ils soient modérés en ce qu’ils ont de trop onéreux. Art. 14. Que l’entière connaissance des droits domaniaux soit attribuée aux cours souveraines, afin de soustraire tous les citoyens, et spécialement les ecclésiastiques, aux vexations de toute espèce que l’administration actuelle des domaines leur fait éprouver. Qu’en particulier le Roi soit supplié de retirer l’arrêt du conseil du 5 septembre 1785, qui oblige les ecclésiastiques à passer à l’enchère, et en présence du subdélégué de l’intendant, les premiers baux des constructions ou reconstructions. Qu’enfin, il ne soit plus exigé un nouveau droit d’amortissement pour raison desdites constructions et reconstructions, ou pour cause d’échange de fonds amortis entre gens de mainmorte. Art. 15. Que l’administration actuelle des eaux et forêts étant très-préjudiciable au clergé, il soit affranchi des entraves auxquelles le régime des maîtrises l’assujettit, et des droits excessifs (ju’il lui fait supporter : sauf à prévenir par des règlements sages les abus qui résulteraient peut-être de cette liberté. Art. 16. Que le Roi soit supplié de supprimer les capitaineries ; et que dans celles que Sa Majesté jugerait à propos de conserver pour son usage, la rigueur des règlements soit adoucie en faveur des cultivateurs. Que les ordonnances des chasses soient modifiées en ce qu’elles ont de trop dur et de contraire aux intérêts de l’agriculture. Art. 17. Que les codes civil et criminel soient examinés et discutés dans leurs différents ar- 267 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] ticles, et qu’ils soient réformés en plusieurs points : notamment le code criminel, en ce qu’il exige le serment de l'accusé, auquel il sera donné un défenseur juridique dès le commencement du procès criminel ; et que tout accusé soit interrogé en la même forme et de la même manière, quelles que soient les conclusions du ministère public. Art. 18. Qu’on prenne des moyens pour abréger les procédures, et pour faire cesser les abus des directions, saisies réelles et ordres, qui consu-sument en frais les créanciers dont elles auraient dû conserver le gage. Art. 19. Qu’il soit fait une loi précise pour régler l’usage légitime des arrêts de défense, dont tant de plaideurs de mauvaise foi abusent tous les jours, et qu’il soit exactement pourvu à son exécution. Art. 20. Que les prisons, où gémit trop souvent l’innocence à côté du coupable, cessent d’être, contre l’intention de la loi, un séjour d’horreur et d’infection -, que les malheureux qui y sont détenus jouissent au moins, d’un air salubre, d’une nourriture saine et suffisante; que les infirmeries de ces prisons soient aérées et tellement disposées, qu’on y puisse faire le service des malades, et que jamais ils ne réclament inutilement les consolations de la religion, si nécessaires à leur état. Art. 21. Que toujours et dans tous les cas il soit loisible aux curés de visiter leurs paroissiens détenus en prison. Art. 22. Que le sort des galériens malades et alités soit pris en considération. Que cette vie que la loi leur conserve soit respectée, et que leurs chaînes tombent au moment où, n’étant plus nécessaires pour le maintien de l’ordre, elles deviennent un supplice insupportable et meurtrier. Art. 23. Que la matière des évocations, commissions, surséances, soit sérieusement examinée, et que l’on fixe par une loi expresse les cas où ces voies extraordinaires, mais quelquefois utiles, pourront être légitimement employées. Art. 24. Qu’il ne soit plus donné d’arrêts du propre mouvement pour les affaires des particuliers ou des corps, à moins qu’ils ne soient susceptibles d’opposition. Art. 25. Que les Etats généraux s’occupent promptement et utilement des objets de consommation, de manière à prévenir la disette, et empêcher dans tous les temps la trop grande cherté des grains. Art. 26. Que les Etals généraux absent aux moyens d’attacher tellement la classe des pauvres à leur pays natal, que des familles entières et très-nombreuses n’aient aucun intérêt à venir chercher à Paris un sort incertain, et augmenter le nombre infini des malheureux pour lesquels il n’y a pas de secours suffisants. Art. 27. Que la mendicité soit extirpée, comme étant le fléau des villes et plus encore celui des campagnes ; que, pour y parvenir, on établisse des ateliers de charité, qu’on prenne d’autres moyens qu’une administration sage et éclairée est plus à portée de connaître ; mais jamais celui d’enfermer les mendiants dans d’affreuses maisons de dépôt, où les traitements qu’ils éprouvent révoltent l’humanité. Art. 28. Que l’agiotage soit réprimé, et, s’il est possible, entièrement détruit, comme tarissant la source des véritables richesses que la France pourrait tirer de la culture des terres et du commerce. Art. 29. Qu’il soit pourvu par les moyens les plus efficaces à tous les approvisionnements de farine, viande, etc. pour la ville de Paris , afin ue ces denrées de première nécessité n’excè-ent jamais un prix raisonnable et qui soit à la portée du pauvre. Art. 30. Que tous les octrois sur le bois, charbon, etc., qui se sont accrus depuis quelque temps à un point excessif, soient examinés ; qu’on en recherche l’origine, le motif qui les a fait accorder, l’époque où ils devaient ou doivent finir, afin de les supprimer ou modérer s’il y a lieu. Art. 31. Que tout changement relatif aux embellissements de la ville de Paris ne puisse être effectué que lorsqu’il y aura un plan publié, contre lequel les personnes intéressées auront pu réclamer une discussion en présence du ministère public et des magistrats; et que ces changements une fois déterminés, les dédommagements soient arbitrés par les mêmes magistrats, et payés avant qu'on procède à la destruction des maisons, etc. Telles sont les doléances du clergé de Paris, telles sont ses demandes. Il les confie à la fidélité de ses député aux Etats généraux. Elles attesteront à la nation assemblée ses véritables sentiments. Puissent-ils être auprès d’elle le témoignage public de son zèle inaltérable pour la religion, de son dévouement au bien de l’Etat, et de sa respectueuse confiance en son Roi ! Et a, ledit clergé, donné à ses députés tous pouvoirs de proposer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et chacun les sujets de Sa Majesté, s’en rapportant à leur honneur et à leur conscience; n’entendant limiter autrement leurs pouvoirs, lesquels sont expressément énoncés par l’acte même de nomination desdits députés aux Etats généraux, lequel acte fait partie du procès-verbal du clergé de Paris intra muros. Fait et arrêté en l’assemblée générale du clergé de la ville de Paris, le 18 mai 1789. Le présent, certifié en tout conforme à la minute dûment signée de MM. les commissaires , et déposé au secrétariat de l’archevêché, ce 19 mai 1789. Signé f Antoine E.-L., arch. de Paris. Signé Benière, curé de Saint-Pierre de Chaillot, secrétaire de l’assemblée. Signé Dumouchel, recteur de l’Université, secrétaire de l’assemblée. Signé D. Prescheur, bénédictin, procureur général de la congrégation de Saint-Vannes, secrétaire de l’assemblée. CAHIER Du chapitre de P Eglise de Paris , pour servir d’instructions à ses députés aux assemblées des trois Etats qui doivent précéder la tenue des Etats généraux fixés par le Roi , au 27 avril 1789 (1). RELIGION. Conservation du culte public. 1° Nous entendons conserver dans son intégrité le précieux dépôt de la religion, qui nous est spécialement confié en qualité de ses ministres, et (1) Nous publions ce document d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 267 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] ticles, et qu’ils soient réformés en plusieurs points : notamment le code criminel, en ce qu’il exige le serment de l'accusé, auquel il sera donné un défenseur juridique dès le commencement du procès criminel ; et que tout accusé soit interrogé en la même forme et de la même manière, quelles que soient les conclusions du ministère public. Art. 18. Qu’on prenne des moyens pour abréger les procédures, et pour faire cesser les abus des directions, saisies réelles et ordres, qui consu-sument en frais les créanciers dont elles auraient dû conserver le gage. Art. 19. Qu’il soit fait une loi précise pour régler l’usage légitime des arrêts de défense, dont tant de plaideurs de mauvaise foi abusent tous les jours, et qu’il soit exactement pourvu à son exécution. Art. 20. Que les prisons, où gémit trop souvent l’innocence à côté du coupable, cessent d’être, contre l’intention de la loi, un séjour d’horreur et d’infection -, que les malheureux qui y sont détenus jouissent au moins, d’un air salubre, d’une nourriture saine et suffisante; que les infirmeries de ces prisons soient aérées et tellement disposées, qu’on y puisse faire le service des malades, et que jamais ils ne réclament inutilement les consolations de la religion, si nécessaires à leur état. Art. 21. Que toujours et dans tous les cas il soit loisible aux curés de visiter leurs paroissiens détenus en prison. Art. 22. Que le sort des galériens malades et alités soit pris en considération. Que cette vie que la loi leur conserve soit respectée, et que leurs chaînes tombent au moment où, n’étant plus nécessaires pour le maintien de l’ordre, elles deviennent un supplice insupportable et meurtrier. Art. 23. Que la matière des évocations, commissions, surséances, soit sérieusement examinée, et que l’on fixe par une loi expresse les cas où ces voies extraordinaires, mais quelquefois utiles, pourront être légitimement employées. Art. 24. Qu’il ne soit plus donné d’arrêts du propre mouvement pour les affaires des particuliers ou des corps, à moins qu’ils ne soient susceptibles d’opposition. Art. 25. Que les Etats généraux s’occupent promptement et utilement des objets de consommation, de manière à prévenir la disette, et empêcher dans tous les temps la trop grande cherté des grains. Art. 26. Que les Etals généraux absent aux moyens d’attacher tellement la classe des pauvres à leur pays natal, que des familles entières et très-nombreuses n’aient aucun intérêt à venir chercher à Paris un sort incertain, et augmenter le nombre infini des malheureux pour lesquels il n’y a pas de secours suffisants. Art. 27. Que la mendicité soit extirpée, comme étant le fléau des villes et plus encore celui des campagnes ; que, pour y parvenir, on établisse des ateliers de charité, qu’on prenne d’autres moyens qu’une administration sage et éclairée est plus à portée de connaître ; mais jamais celui d’enfermer les mendiants dans d’affreuses maisons de dépôt, où les traitements qu’ils éprouvent révoltent l’humanité. Art. 28. Que l’agiotage soit réprimé, et, s’il est possible, entièrement détruit, comme tarissant la source des véritables richesses que la France pourrait tirer de la culture des terres et du commerce. Art. 29. Qu’il soit pourvu par les moyens les plus efficaces à tous les approvisionnements de farine, viande, etc. pour la ville de Paris , afin ue ces denrées de première nécessité n’excè-ent jamais un prix raisonnable et qui soit à la portée du pauvre. Art. 30. Que tous les octrois sur le bois, charbon, etc., qui se sont accrus depuis quelque temps à un point excessif, soient examinés ; qu’on en recherche l’origine, le motif qui les a fait accorder, l’époque où ils devaient ou doivent finir, afin de les supprimer ou modérer s’il y a lieu. Art. 31. Que tout changement relatif aux embellissements de la ville de Paris ne puisse être effectué que lorsqu’il y aura un plan publié, contre lequel les personnes intéressées auront pu réclamer une discussion en présence du ministère public et des magistrats; et que ces changements une fois déterminés, les dédommagements soient arbitrés par les mêmes magistrats, et payés avant qu'on procède à la destruction des maisons, etc. Telles sont les doléances du clergé de Paris, telles sont ses demandes. Il les confie à la fidélité de ses député aux Etats généraux. Elles attesteront à la nation assemblée ses véritables sentiments. Puissent-ils être auprès d’elle le témoignage public de son zèle inaltérable pour la religion, de son dévouement au bien de l’Etat, et de sa respectueuse confiance en son Roi ! Et a, ledit clergé, donné à ses députés tous pouvoirs de proposer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et chacun les sujets de Sa Majesté, s’en rapportant à leur honneur et à leur conscience; n’entendant limiter autrement leurs pouvoirs, lesquels sont expressément énoncés par l’acte même de nomination desdits députés aux Etats généraux, lequel acte fait partie du procès-verbal du clergé de Paris intra muros. Fait et arrêté en l’assemblée générale du clergé de la ville de Paris, le 18 mai 1789. Le présent, certifié en tout conforme à la minute dûment signée de MM. les commissaires , et déposé au secrétariat de l’archevêché, ce 19 mai 1789. Signé f Antoine E.-L., arch. de Paris. Signé Benière, curé de Saint-Pierre de Chaillot, secrétaire de l’assemblée. Signé Dumouchel, recteur de l’Université, secrétaire de l’assemblée. Signé D. Prescheur, bénédictin, procureur général de la congrégation de Saint-Vannes, secrétaire de l’assemblée. CAHIER Du chapitre de P Eglise de Paris , pour servir d’instructions à ses députés aux assemblées des trois Etats qui doivent précéder la tenue des Etats généraux fixés par le Roi , au 27 avril 1789 (1). RELIGION. Conservation du culte public. 1° Nous entendons conserver dans son intégrité le précieux dépôt de la religion, qui nous est spécialement confié en qualité de ses ministres, et (1) Nous publions ce document d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 268 (Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intramuros.] rejeter tout ce qui pourrait y porter atteinte, ainsi qu’à la solennité et à la décence du culte public, qui doit être exclusivement réservé, dans toute l’étendue de ce royaume, à la religion catholique, apostolique et romaine. Conciles provinciaux. 2° Nous supplions le Roi très-humblement d’accorder à l’Eglise de France la tenue des conciles provinciaux, à l’effet de rétablir et d’entretenir dans toute sa vigueur la discipline ecclésiastique, de manière que la convocation desdits conciles puisse se faire sans long délai, sur la demande, et suivant les besoins de chaque métropole. Maintien du droit public ecclésiastique. 3° Nous supplions pareillement Sa Majesté de maintenir l’exécution de toutes les lois et ordonnances reçues dans le royaume, qui en forment le droit public ecclésiastique et canonique, et que les rois, ses augustes prédécesseurs, ont marqué du sceau de leur autorité. Progrès de l’irréligion et du vice, causé par la licence de la presse. 4° Pénétrés d’une douleur profonde à la vue du dépérissement affreux de la religion et des mœurs dans tout le royaume, et surtout dans cette capitale, nous adressons à Sa Majesté les plus vives et les plus humbles représentations sur la cause funeste et trop connue de ce renversement déplorable de tous les principes. Il provient de la multitude scandaleuse des ouvrages où règne l'esprit de libertinage, de l’incrédulité et de l’indépendance, où l’on attaque, avec une égale audace, la foi, la pudeur, la raison, le trône, l’autel ; livres impies et corrupteurs répandus de toutes parts avec la profusion et la licence les plus révoltantes, auxquels on ne saurait opposer trop promptement les digues les plus fortes. Rétablissement de l’éducation publique. 5° Les maux dont nous sommes les témoins, et qui menaçent encore plus les générations futures, nous portent à demander avec instance, à Sa Majesté, de prendre des mesures efficaces pour rendre à l’éducation publique l’éclat et l’utilité dont elle est déchue. Plusieurs de ses principaux établissements n’existent plus. Ces sources les plus précieuse se sont presque taries de nos jours, et n’ont été remplacées, dans la plupart des villes où elles procuraient tant d’avantages à la religion et aux lettres, que par des institutions obscures et privées, faibles, éphémères et suspectes. Les archevêques et évêques ne sauraient trop être maintenus dans le droit de supériorité et de surveillance sur les collèges, et nous nous faisons un devoir de demander que M. l’archevêque de Paris n’en soit pas privé sur celui de Louis-le-Grand. Protection en faveur des odres religieux. 6° Nous osons solliciter, de la bonté et de la piété du Roi, une protection particulière pour les ordres religieux de l’un et de l’autre sexe qui subsistent dans le royaume. Sous les heureux auspices de sa faveur et de son autorité, nous espérons voir fleurir et se vivifier de plus en lus ces saints instituts utiles à la religion, au ien de l’Etat, aux familles indigentes, à la subsistance surtout des pauvres de la campagne. CONSTITUTION. Eloignement de tout ce qui altérerait la monarchie. 1° Le gouvernement monarchique étant la constitution inébranlable de la nation, la plus propre à sa tranquillité intérieure et à sa sûreté au dehors, la plus convenable à l’étendue de ses provinces, la plus conforme au caractère de ses peuples, qui, dans tous les temps, se sont distingués par leur amour et leur attachement pour leurs souverains, le chapitre ne pourra jamais se prêter à rien de ce qui tendrait à altérer la forme de ce gouvernement. Il y est inviolablement attaché par les devoirs les plus sacrés de l’obéissance, par les liens du serment et de la fidélité, par l’amour et par le respect pour ses maîtres, par le bonheur de leur être soumis. Opinion par ordre et non par tête. 2° Le chapitre de l’Eglise de Paris réclame la conservation de l’opinion par ordre, dans les délibérations des Etats généraux, comme conforme aux antiques usages de cette monarchie, comme étant la seule vraiment constitutionnelle, la sauvegarde la plus sûre de l’autorité royale, de la dignité de la couronne et de l’ordre public. Elle est rigoureusement conforme à la justice, en ce que le parfait équilibre qu’elle établit entre les ordres leur ôte tous moyens de prévaloir les uns sur les autres; que la lenteur même qu’elle entraîne dans les délibérations prévient les inconvénients qui résulteraient des résolutions souvent peu réfléchies, auxquelles exposerait l’opinion par tête, et qu’elle écarte enfin les différents moyens de séduction ou de surprise qui peuvent facilement se glisser dans les grandes assemblées, si souvent tumultueuses et agitées. Précautions pour une représentation suffisante de l’ordre épiscopal. 3° Nous regardons comme entièrement conforme aux principes religieux et constitutionnels du corps ecclésiastique que, dans les Etats généraux, le premier ordre du clergé ait une représentation qui réponde à l’autorité épiscopale et à l’éminence de son caractère, sans dépouiller cependant le second ordre du clergé de sa représentation propre et nécessaire par ses députés. Nous regardons, en conséquence, comme digne de la justice de Sa Majesté, de convoquer auxaits Etats plusieurs évêques de chaque métropole, si la représentation suffisante du premier ordre du clergé ne pouvait être autrement assurée. CONSERVATION DES PROPRIÉTÉS. Observations particulières sur un arrêt du conseil, du 5 septembre 1785, et sur un édit du Roi , du mois de septembre 1786. 4° Nous supplions Sa Majesté de maintenir les propriétés de tous les ordres, de tous les corps, de tous et chacun des particuliers dans leur intégrité, telles et en semblable état qu’elles ont été jusqu’à nos jours; de révoquer le privilège exorbitant dont jouit l’ordre de Malte; de prescrire contre tous les propriétaires, soit ecclésiastiques, soit laïcs, sans qu’on puisse lui opposer une possession même centenaire, la réciprocité paraissant fondée sur les premiers principes de la justice ; de prendre en considération les entraves mises aux propriétés des gens de mainmorte, par le droit de nouvel acquêt que le domaine répète contre eux, lors des reconstructions qu’ils sont nécessités à faire en tout ou en partie, et des échanges que le bien public et l’avantage réciproque des parties échangeantes exigent quelquefois, même entre gens de mainmorte, comme aussi, par un arrêt du conseil, que l’administra- [Paris, inlra muros.J [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 269 tion des domaines a obtenu depuis trois ans, et qui oblige les ecclésiastiques à passer à l’enchère, en présence du subdélégué de l’intendant, les premiers baux des nouvelles constructions ou reconstructions. L’édit du Roi du mois de septembre 1786, concernant les embellissements de Paris, porte la plus grande atteinte aux droits de propriété. Le corps de ville est dispensé, par cet édit, de payer aux seigneurs, sur la directe desquels sont assis les édifices qui doivent être détruits pour les embellissements de la ville, les droits de lods et vente et d’indemnité. Le chapitre de l’Eglise de Paris a particulièrement à se plaindre des dispositions de cet édit, ainsi que de l’arbitraire qui règne dans la taxation des droits de voirie auxquels on donne tous les jours une nouvelle extension. Libre exercice des différents tribunaux. 5° Il sera fait à Sa Majesté de très-humbles supplications de maintenir les différents tribunaux ecclésiastiques et civils, souverains et subalternes, dans le libre cours et exercice de leurs pouvoirs et juridiction, trop souvent interrompus par des commissions, évocations ou attributions particulières; comme aussi d’abréger les longueurs des procédures, et d’en diminuer les frais. Réformations relatives aux abus et à la législation. 6° Sa Majesté sera pareillement très-humblement suppliée d’accueillir favorablement les plaintes et doléances qui lui seront adressées par les gens des trois Etats de son royaume pour le redressement des griefs qui lui seront exposés, et de même d’accorder les changements dans les différentes parties de la législation, que les temps et les circonstances auraient pu rendre nécessaires, et dont la demande pourrait lui être formée. ADMINISTRATION. Article unique Nous demandons que Sa Majesté fasse connaître aux représentants de la nation assemblée en Etats généraux la véritable situation de ses finances, l’état fidèle de la dette publique et du déficit actuel, à l’effet de prendre les mesures nécessaires pour assurer la dette publique, combler le déficit, et établir l’équilibre entre la dépense et la recette, par tous les moyens que pourront fournir un bon système d’administration dans les finances, de perception des impôts, de retranchement, d’économie et de distribution dans les dépenses, et une parfaite exactitude dans la comptabilité. Au moyen de l’ordre stable qui sera établi dans toutes cés parties de l’administration, sans lequel tous les efforts de la nation seraient vains et inutiles, nous nous porterons, avec le plus grand zèle, à tous ceux qui peuvent dépendre de nous, pour assurer par des contributions volontaires, justes, raisonnables et proportionnelles, la gloire et la prospérité de l’Etat, l’b onneur et la splendeur de la couronne, et la satisfaction personnelle de Sa Majesté, dont le bonheur sera toujours le vœu le plus ardent de ses peuples. Tels sont nos intentions et nos vœux : nous chargeons nos députés à l’assemblée du bailliage de ............. de les faire valoir lors de la rédaction des cahiers de la chambre ecclésiastique dudit bailliage, afin de servir d’instruction à ceux des membres de ladite chambre qui seront députés aux Etats généraux. Nous laissons d’ailleurs a nosdits députés la faculté de requérir ce qu’en outre du contenu ci-dessus, ils jugeront, suivant leurs lumières et conscience, être bon, utile et nécessaire pour la gloire de la religion, les véritables intérêts de la nation, l’honneur de l’ordre ecclésiastique, le service du Roi et la prospérité publique. PROCÈS-VERBAL De l'assemblée du clergé de la paroisse royale Saint-Paul , tenue en la salle presbytérale , le 21 avril 1789 (1). L’an 1789, le mardi 21 avril, conformément à l’ordonnance de M. le lieutenant civil, le clergé de la paroisse royale Saint-Paul s’est assemblé dans la salle presbytérale de ladite paroisse, où, après avoir nommé un secrétaire et deux vérificateurs, l’on a fait appel de tous les assistants, dont le nombre s’est trouvé monter à 32. Alors M. le curé de Saint-Paul a déclaré que le nombre des électeurs devait être de deux, en en choisissant un sur vingt, d’après le règlement du Roi et la susdite ordonnance. Ensuite il a ajouté qu’il était important, avant de nommer les électeurs mandataires de l’assemblée, de procéder à la nomination d’une commission, chargée de rédiger leur mandat; en conséquence, ont été unanimement élus commissaires rédacteurs : MM. l’abbé Balestrier de Ganilhac, prêtre de la communauté. Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar, censeur royal. De Menardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne. Gappeau, prêtre de la communauté. Thomas, prêtre de la communauté. Grosnier, prêtre de la communauté. La nomination des commissaires rédacteurs faite, on procéda à l’élection des députés électeurs, et ceux qui furent nommés sont : MM. Dieulouard, licencié en droit de la Faculté de Paris et vicaire de la paroisse. Guyot, vicaire général de Cambrai, prédicateur ordinaire du Roi et censeur royal. On procède aussitôt après à la rédaction des articles du cahier, comme il suit : CAHIER Du clergé résidant sur la paroisse royale Saint-Paul, assemblé par mandement du Roi , les 22 et 23 avril 2789, en la salle presbytérale de ladite paroisse. Au moment d’une régénération générale dans l’Etat, tous les cœurs s’ouvrent à des espérances flatteuses; on croit toucher à des jours aussi heureux pour les sujets, que glorieux pour le monarque, et l’Europe entière admire déjà le chef d une nation libre, qui se montre l’ami de la saine raison et de la vérité, avec cette circonstance rare qui triomphe des plus fortes contradictions. Le clergé de Saint-Paul, faisant profession d’un patriotisme épuré, par cette charité qui embrasse les intérêts de tous les hommes, et semble s’oublier elle-même, désire que les Etats généraux s’occupent particulièrement des bases sur lesquelles doit porter l’édifice d’une constitution sage. Il aurait pu leur présenter un plan de constitution pour les paroisses de la capitale, (1) Nous publions ce document d'après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. [Paris, inlra muros.J [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 269 tion des domaines a obtenu depuis trois ans, et qui oblige les ecclésiastiques à passer à l’enchère, en présence du subdélégué de l’intendant, les premiers baux des nouvelles constructions ou reconstructions. L’édit du Roi du mois de septembre 1786, concernant les embellissements de Paris, porte la plus grande atteinte aux droits de propriété. Le corps de ville est dispensé, par cet édit, de payer aux seigneurs, sur la directe desquels sont assis les édifices qui doivent être détruits pour les embellissements de la ville, les droits de lods et vente et d’indemnité. Le chapitre de l’Eglise de Paris a particulièrement à se plaindre des dispositions de cet édit, ainsi que de l’arbitraire qui règne dans la taxation des droits de voirie auxquels on donne tous les jours une nouvelle extension. Libre exercice des différents tribunaux. 5° Il sera fait à Sa Majesté de très-humbles supplications de maintenir les différents tribunaux ecclésiastiques et civils, souverains et subalternes, dans le libre cours et exercice de leurs pouvoirs et juridiction, trop souvent interrompus par des commissions, évocations ou attributions particulières; comme aussi d’abréger les longueurs des procédures, et d’en diminuer les frais. Réformations relatives aux abus et à la législation. 6° Sa Majesté sera pareillement très-humblement suppliée d’accueillir favorablement les plaintes et doléances qui lui seront adressées par les gens des trois Etats de son royaume pour le redressement des griefs qui lui seront exposés, et de même d’accorder les changements dans les différentes parties de la législation, que les temps et les circonstances auraient pu rendre nécessaires, et dont la demande pourrait lui être formée. ADMINISTRATION. Article unique Nous demandons que Sa Majesté fasse connaître aux représentants de la nation assemblée en Etats généraux la véritable situation de ses finances, l’état fidèle de la dette publique et du déficit actuel, à l’effet de prendre les mesures nécessaires pour assurer la dette publique, combler le déficit, et établir l’équilibre entre la dépense et la recette, par tous les moyens que pourront fournir un bon système d’administration dans les finances, de perception des impôts, de retranchement, d’économie et de distribution dans les dépenses, et une parfaite exactitude dans la comptabilité. Au moyen de l’ordre stable qui sera établi dans toutes cés parties de l’administration, sans lequel tous les efforts de la nation seraient vains et inutiles, nous nous porterons, avec le plus grand zèle, à tous ceux qui peuvent dépendre de nous, pour assurer par des contributions volontaires, justes, raisonnables et proportionnelles, la gloire et la prospérité de l’Etat, l’b onneur et la splendeur de la couronne, et la satisfaction personnelle de Sa Majesté, dont le bonheur sera toujours le vœu le plus ardent de ses peuples. Tels sont nos intentions et nos vœux : nous chargeons nos députés à l’assemblée du bailliage de ............. de les faire valoir lors de la rédaction des cahiers de la chambre ecclésiastique dudit bailliage, afin de servir d’instruction à ceux des membres de ladite chambre qui seront députés aux Etats généraux. Nous laissons d’ailleurs a nosdits députés la faculté de requérir ce qu’en outre du contenu ci-dessus, ils jugeront, suivant leurs lumières et conscience, être bon, utile et nécessaire pour la gloire de la religion, les véritables intérêts de la nation, l’honneur de l’ordre ecclésiastique, le service du Roi et la prospérité publique. PROCÈS-VERBAL De l'assemblée du clergé de la paroisse royale Saint-Paul , tenue en la salle presbytérale , le 21 avril 1789 (1). L’an 1789, le mardi 21 avril, conformément à l’ordonnance de M. le lieutenant civil, le clergé de la paroisse royale Saint-Paul s’est assemblé dans la salle presbytérale de ladite paroisse, où, après avoir nommé un secrétaire et deux vérificateurs, l’on a fait appel de tous les assistants, dont le nombre s’est trouvé monter à 32. Alors M. le curé de Saint-Paul a déclaré que le nombre des électeurs devait être de deux, en en choisissant un sur vingt, d’après le règlement du Roi et la susdite ordonnance. Ensuite il a ajouté qu’il était important, avant de nommer les électeurs mandataires de l’assemblée, de procéder à la nomination d’une commission, chargée de rédiger leur mandat; en conséquence, ont été unanimement élus commissaires rédacteurs : MM. l’abbé Balestrier de Ganilhac, prêtre de la communauté. Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar, censeur royal. De Menardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne. Gappeau, prêtre de la communauté. Thomas, prêtre de la communauté. Grosnier, prêtre de la communauté. La nomination des commissaires rédacteurs faite, on procéda à l’élection des députés électeurs, et ceux qui furent nommés sont : MM. Dieulouard, licencié en droit de la Faculté de Paris et vicaire de la paroisse. Guyot, vicaire général de Cambrai, prédicateur ordinaire du Roi et censeur royal. On procède aussitôt après à la rédaction des articles du cahier, comme il suit : CAHIER Du clergé résidant sur la paroisse royale Saint-Paul, assemblé par mandement du Roi , les 22 et 23 avril 2789, en la salle presbytérale de ladite paroisse. Au moment d’une régénération générale dans l’Etat, tous les cœurs s’ouvrent à des espérances flatteuses; on croit toucher à des jours aussi heureux pour les sujets, que glorieux pour le monarque, et l’Europe entière admire déjà le chef d une nation libre, qui se montre l’ami de la saine raison et de la vérité, avec cette circonstance rare qui triomphe des plus fortes contradictions. Le clergé de Saint-Paul, faisant profession d’un patriotisme épuré, par cette charité qui embrasse les intérêts de tous les hommes, et semble s’oublier elle-même, désire que les Etats généraux s’occupent particulièrement des bases sur lesquelles doit porter l’édifice d’une constitution sage. Il aurait pu leur présenter un plan de constitution pour les paroisses de la capitale, (1) Nous publions ce document d'après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 270 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] objet qui l’intéresse particulièrement, mais il pense que les Etats généraux feront assez pour cet objet, s’ils veulent bien nommer une commission sagement .composée de deux ou de plusieurs membres de chacune des parties intéressées. En attendant, il charge ses députés électeurs de solliciter l’admission des articles suivants dans le cahier général du clergé de Paris, ou dans ceux des trois ordres. Objets relatifs à la religion et au bien du clergé. Art. 1er. Le vœu de l’assemblée est que l’on maintienne la religion catholique, apostolique et romaine, à l’exclusion de tout autre culte. Art. 2. Que l’état civil des non catholiques soit favorisé; avec cette restriction néanmoins que, dans aucun cas, ils ne puissent être admis dans les administrations municipales et de judicature, ni concourir que médiatement à la confection des lois qui intéressent les trois ordres, et qu’à cet effet ils soient électeurs et non éligibles aux Etats généraux. Art. 3. Que la police, relative à la sanctification des dimanches et fêtes, soit rigoureusement exercée. Art. 4. Que les synodes diocésains et les conciles provinciaux soient rétablis. . Art. 5. Que dans les assemblées générales et particulières du clergé, les curés et les autres prêtres travaillant dans le saint ministère, aient droit délire leurs représentants dans une proportion convenable. Art. 6. Qu’on supprime les économats, ou qu’on fasse des règlements qui rappellent les fonds de cette administration à leur destination primitive. Art. 7. Que le clergé contribue aux charges de l’iitat, dans la proportion et selon la même forme que les deux autres ordres, du moment où les Etatslgénéraux auront pourvu à la liquidation de ses dettes. Art. 8. Qu’en attendant, les curés et le corps des prêtres employés dans les paroisses aient dans la chambre syndicale des représentants, pris parmi eux, et nommés par eux, dans la proportion convenable, et que l’état des contributions et des contribuables soit public. Art. 9. Qu’il soit établi un conseil de conscience pour la distribution des bénéfices et grâces ecclésiastiques. Art. 10. Que les canons relatifs à la résidence des évêques soient mis en vigueur, ainsi que ceux relatifs à la pluralité des bénéfices dont le revenu est suffisant à l’entretien d’un prêtre. Art. 11. Qu’il soit procédé à une meilleure répartition des revenus ecclésiastiques. Art. 12. Qu’il soit assigné des fonds pour les prêtres attachés au service des paroisses, et pour ceux qui deviennent infirmes. ' Art. 13. Que les portions congrues soient fixées en denrées et non en argent. Art. 14. Que les bénéfices à titre de prieuré simple ne soient possédés que par des prêtres. Art. 15. Que le tiers des canonicats et prébendes des cathédrales et collégiales soit affecté pour retraite à des curés et des prêtres travaillant dans le saint ministère. Art. 16. Que les preuves de noblesse dans tous les chapitres, et pour toutes les places et dignités ecclésiastiques, autres que dans le très-petit nombre de chapitres nobles d’origine, soient supprimées. Art. 17. Qu’il ne soit fait aucun vicaire général qu’il n’ait travaillé six aps dans le saint ministère, et aucun évêque qui ne l’ait suffisamment exercé, ou après six ans de grand vicariat. Art. 18. Que les baux des bénéficiers ne soient point résiliés à leur mort, si l’on ne prouve lésion de plus d’un tiers, et que le bail ait été passé sans enchère. Objets relatifs au bien des trois ordres. Art. 1er. Le vœu de l’assemblée est qu’il appartienne essentiellement à la nation de statuer sur la constitution, d’en arrêter les bases, et de faire elle-même ses lois avec l’attache du souverain. Art. 2. Que le pouvoir exécutif réside essentiellement et uniquement dans la personne du monarque. Art. 3. Que la liberté de la presse soit accordée et sagement, tempérée par la responsabilité de l’auteur de l’ouvrage et de l’imprimenr. Art. 4. Que les ministres et tous administrateurs soient responsables de leur administration aux Etats généraux. Art. 5. Que toutes les propriétés fondées sur des titres réels soient respectées. Art. 6. Que les Etals généraux soient convoqués à des époques déterminées. Art. 7. Qu’aucun citoyen ne puisse être arrêté en vertu d’une lettre de cachet, ou de quelque ordre que ce soit, sans être remis dans les vingt-quatre heures entre les mains de ses juges naturels, et mis en liberté sous caution suffisante, si ce n’est dans les délits soumis à la peine afflictive. Art. 8. Qu’acun impôt ne soit établi, qu’aucun emprunt ne soit censé légitime qu’il n’ait été consenti par les Etats généraux. Art. 9. Qu’on opine par tête aux prochains Etats pour la confection des articles qui doivent établir la constitution, et qu’ensuite la constitution établie, on délibère par ordre : le premier moyen étant plus propre à constater la volonté générale, et le second à conserver les intérêts communs et respectifs. Art. 10. Que les Etats généraux soient parfaitement indépendants, et qu’à eux seuls appartienne leur police intérieure. Art. 11. Qu’on surveille de plus près l’administration des prisons. Art. 12. Qu’on supprime les lettres d’Etat, les arrêts de surséance, les évocations, les privilèges locaux, les commissions et lettres de commitlimus. Art. 13. Qu’on supprime les lettres de noblesse pour les charges de judicature et pour toutes les places éminentes, et que, pour entrer au service, il suffise, selon l’ancien usage, de présenter un certificat de noblesse, signé de quatre gentilshommes du pays, ou une attestation des Etats de la province. Art. 14. Que les peines portées par les lois soient les mêmes pour tous les ordres de l’Etat. Art. 15. Qu’on flétrisse par quelque signe distinctif les banqueroutiers jugés frauduleux. Art. 16. Qu’on abolisse les formes humiliantes auxquelles les gens et députés du tiers-état étaient assujettis, nul homme ne devant être aux genoux d’un autre homme, Art. 17. Qu’aucune charge ou commission, surtout celles qui ont finance, ne puissent conférer la noblesse héréditaire. Art. 18. Que la dérogeance ne soit encourue que par forfaiture jugée; la noblesse étant une propriété transmissible par voie de substitution. Art. 19. Que les droits de franc-fief soient supprimés. 271 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, inlra muros.J Art. 20. Qu’on établisse une nouvelle forme de lever la milice, celle qui existe étant vexatoire pour les campagnes. Art. 2i. Qu’on proscrive l’agiotage et les loteries comme contraires aux bonnes mœurs, en ce qu’elles ruinent lepeuple et commandent le crime. Art. 22. Qu’on supprime au moins les petits spectacles de. la capitale, source féconde de toute sorte de corruption. Art. 23. Qu’on supprime les privilèges exclusifs, contraires à l’industrie et au commerce. Art. 24. Qu’il soit formé une commission qui s’occupe promptement du grand objet d’une éducation nationale, seule capable de rétablir les moeurs et les vertus civiles. Art. 25. Qu’on fasse remarquer le vice et l’immoralité des rentes viagères. Art. 26. Qu’il soit pourvu au moyen de conserver l’inviolabilité des lettres confiées à la poste. Tous lesquels articles rédigés par nous, commissaires nommés à cet effet, et soussignés, ont été généralement et unanimement arrrêtés et approuvés par l’assemblée. Signés L’abbé de Balestrier de Canilhac ; Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar ; l’abbé deMenardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne ; Gappeau , prêtre ; Grosnier , prêtre Thomas, prêtre. Et par une suite de l’esprit d’union et de charité fraternelle que ledit clergé désire maintenir parmi tous les ordres de l’Etat, MM. Guyot, vicaire général de Cambrai, député électeur de l’assemblée ; de Menardeau ; Pignol de Saint-Amant ; de Balestrier de Canilhac et Gappeau ont été chargés de se transporter, l’assemblée tenant, en celle de Messieurs de la noblesse, formée sur la même paroisse, cloître Saint-Louis, et en celle de Messieurs dutiers, en l’église Saint-Gervais, à l’effet de solliciter leur avis et une discussion plus utile sur les articles ci-dessus, par la réunion des lumières et la conciliation des intérêts respectifs. Lesquelles deux assemblées ayant successivement entendu la lecture, et pris communication desdits articles, les ont unanimement et respectivement adoptés dans tout leur contenu, avec acclamation et mandat spécial à leurs députés électeurs d’en solliciter et acquérir l’admission de tous et chacun, dans les cahiers généraux et particuliers des trois ordres de la ville de Paris. Et incontinent ont été députés, de la part delà noblesse, MM. le comte Dussis, le comte de Saint-Marc, Meunier de Pleignes, de Vouges, Chapentier de Foefelles et de Monthelon; et de la part du tiers, MM. Denis, Petit de la Motte, Legendre et Bellon, à l’effet de notifier à l’assemblée au clergé de la paroisse de Saint-Paul ladite détermination, et aussi de donner communication de leurs cahiers et arrêtés particuliers, lesquels ont obtenu le suffrage général. Le clergé de la paroisse Saint-Louis en l’Ile a aussi député MM. de La Roque, vicaire général de Perpignan ; Pétrement, licencié en théologie de la faculté de Paris ; de Gassius, licencié en théologie, et vicaire de la paroisse, à Saint-Louis en l’Ile, tous trois commissaires rédacteurs des cahiers de leur paroisse, pour communiquer à l’assemblée les articles formant le vœu dudit clergé ; lesquels elle a entendu avec applaudissement, et à l’effet de témoigner la même confiance, et de former un accord des mêmes sentiments , MM. Gappeau , Merle, archiprêtre de Tours, et Le Tellier de Bro-thonne, ont été nommés pour porter au clergé de Saint-Louis lesremercîmenls et les vœux de l’assemblée. Fait et arrêté les jour et an que dessus, avec toutes protestations de droit, tant sur l’illégalité et l’insuffisance de ladite convocation, que sur celles de la représentation à l’assemblée générale des trois ordres. Bossu, curé de Saint-Paul, prédicateur du Roi, censeur royal, et président de l’assemblée. Par mandement de l'assemblée : Dieulouard, vicaire de la paroisse Saint-Paul, secrétaire de l’Assemblée, et député électeur. CAHIER Des citoyens nobles de la ville de Paris (1). Députés. Le comte de Clermont-Tonnerre. Duc de la Rochefoucauld. Comte de Lally-Tollendal. Comte de Rocnechouart. Comte de Lusignhem. Dionis Du Séjour. Duc d’Orléans. Duport. De Saint-Fargeau. Premier président de Nicolaï. M. de Nicolaï et M. le duc d'Orléans n'ayant pas pu accepter , ont été remplacés par M. le comte de Alirepoix et M. le marquis de Montesquiou-Fezensac. L’assemblée des électeurs représentant tous les citoyens nobles de Paris, avant de procéder à la nomination des députés qu’elle doit envoyer aux Etats généraux , et avant de s’occuper de ce qu’elle doit leur prescrire, a arrêté que les pouvoirs de ces députés ne dureraient qu’une année. Le vœu des citoyens nobles de Paris est que l'on opine par ordre aux Etats généraux ; que sur cette question même, les Etats ne délibèrent que par ordre; et si une décision contraire à ce vœu prévalait dans l’ordre de la noblesse, les députés demanderont acte de ce qu’ils sont restés dans la minorité : et cependant les Etats généraux aviseront dans leur sagesse aux moyens d’empêcher que le veto d’un des ordres ne puisse s’opposer à la confection des lois qui intéresseront lebonheur général de la nation. L’assemblée, après avoir lu, extrait et comparé tous les cahiers fournis par les vingt départements de la noblesse, a cru devoir diviser en deux parties celui qu’elle doit remettre aux députés. Dans la première, elle comprendra , sous le ti tre de cahier général , les demandes qui intéres sent toute la nation, et parmi ces demandes elle distinguera les articles impératifs d’avec ceux de pure instruction. Dans la seconde, qui sera intitulée cahier particulier, elle s’occupera de ce qui intéresse spécialement la ville de Paris. CAHIER GÉNÉRAL. ARTICLES IMPÉRATIFS. Constitution. Les députés demanderont avant tout qu’il soit fait une déclaration explicite des droits qui appartiennent à tous les hommes, et qu’elle constate leur liberté, leur propriété, leur sûreté. Immédiatement après celte déclaration, ils demanderont qu’il demeure reconnu comme pre-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé delà Bibliothèque d u, Corps législatif . 271 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, inlra muros.J Art. 20. Qu’on établisse une nouvelle forme de lever la milice, celle qui existe étant vexatoire pour les campagnes. Art. 2i. Qu’on proscrive l’agiotage et les loteries comme contraires aux bonnes mœurs, en ce qu’elles ruinent lepeuple et commandent le crime. Art. 22. Qu’on supprime au moins les petits spectacles de. la capitale, source féconde de toute sorte de corruption. Art. 23. Qu’on supprime les privilèges exclusifs, contraires à l’industrie et au commerce. Art. 24. Qu’il soit formé une commission qui s’occupe promptement du grand objet d’une éducation nationale, seule capable de rétablir les moeurs et les vertus civiles. Art. 25. Qu’on fasse remarquer le vice et l’immoralité des rentes viagères. Art. 26. Qu’il soit pourvu au moyen de conserver l’inviolabilité des lettres confiées à la poste. Tous lesquels articles rédigés par nous, commissaires nommés à cet effet, et soussignés, ont été généralement et unanimement arrrêtés et approuvés par l’assemblée. Signés L’abbé de Balestrier de Canilhac ; Pignol de Saint-Amant, vicaire général de Lescar ; l’abbé deMenardeau, ancien avocat général du parlement de Bretagne ; Gappeau , prêtre ; Grosnier , prêtre Thomas, prêtre. Et par une suite de l’esprit d’union et de charité fraternelle que ledit clergé désire maintenir parmi tous les ordres de l’Etat, MM. Guyot, vicaire général de Cambrai, député électeur de l’assemblée ; de Menardeau ; Pignol de Saint-Amant ; de Balestrier de Canilhac et Gappeau ont été chargés de se transporter, l’assemblée tenant, en celle de Messieurs de la noblesse, formée sur la même paroisse, cloître Saint-Louis, et en celle de Messieurs dutiers, en l’église Saint-Gervais, à l’effet de solliciter leur avis et une discussion plus utile sur les articles ci-dessus, par la réunion des lumières et la conciliation des intérêts respectifs. Lesquelles deux assemblées ayant successivement entendu la lecture, et pris communication desdits articles, les ont unanimement et respectivement adoptés dans tout leur contenu, avec acclamation et mandat spécial à leurs députés électeurs d’en solliciter et acquérir l’admission de tous et chacun, dans les cahiers généraux et particuliers des trois ordres de la ville de Paris. Et incontinent ont été députés, de la part delà noblesse, MM. le comte Dussis, le comte de Saint-Marc, Meunier de Pleignes, de Vouges, Chapentier de Foefelles et de Monthelon; et de la part du tiers, MM. Denis, Petit de la Motte, Legendre et Bellon, à l’effet de notifier à l’assemblée au clergé de la paroisse de Saint-Paul ladite détermination, et aussi de donner communication de leurs cahiers et arrêtés particuliers, lesquels ont obtenu le suffrage général. Le clergé de la paroisse Saint-Louis en l’Ile a aussi député MM. de La Roque, vicaire général de Perpignan ; Pétrement, licencié en théologie de la faculté de Paris ; de Gassius, licencié en théologie, et vicaire de la paroisse, à Saint-Louis en l’Ile, tous trois commissaires rédacteurs des cahiers de leur paroisse, pour communiquer à l’assemblée les articles formant le vœu dudit clergé ; lesquels elle a entendu avec applaudissement, et à l’effet de témoigner la même confiance, et de former un accord des mêmes sentiments , MM. Gappeau , Merle, archiprêtre de Tours, et Le Tellier de Bro-thonne, ont été nommés pour porter au clergé de Saint-Louis lesremercîmenls et les vœux de l’assemblée. Fait et arrêté les jour et an que dessus, avec toutes protestations de droit, tant sur l’illégalité et l’insuffisance de ladite convocation, que sur celles de la représentation à l’assemblée générale des trois ordres. Bossu, curé de Saint-Paul, prédicateur du Roi, censeur royal, et président de l’assemblée. Par mandement de l'assemblée : Dieulouard, vicaire de la paroisse Saint-Paul, secrétaire de l’Assemblée, et député électeur. CAHIER Des citoyens nobles de la ville de Paris (1). Députés. Le comte de Clermont-Tonnerre. Duc de la Rochefoucauld. Comte de Lally-Tollendal. Comte de Rocnechouart. Comte de Lusignhem. Dionis Du Séjour. Duc d’Orléans. Duport. De Saint-Fargeau. Premier président de Nicolaï. M. de Nicolaï et M. le duc d'Orléans n'ayant pas pu accepter , ont été remplacés par M. le comte de Alirepoix et M. le marquis de Montesquiou-Fezensac. L’assemblée des électeurs représentant tous les citoyens nobles de Paris, avant de procéder à la nomination des députés qu’elle doit envoyer aux Etats généraux , et avant de s’occuper de ce qu’elle doit leur prescrire, a arrêté que les pouvoirs de ces députés ne dureraient qu’une année. Le vœu des citoyens nobles de Paris est que l'on opine par ordre aux Etats généraux ; que sur cette question même, les Etats ne délibèrent que par ordre; et si une décision contraire à ce vœu prévalait dans l’ordre de la noblesse, les députés demanderont acte de ce qu’ils sont restés dans la minorité : et cependant les Etats généraux aviseront dans leur sagesse aux moyens d’empêcher que le veto d’un des ordres ne puisse s’opposer à la confection des lois qui intéresseront lebonheur général de la nation. L’assemblée, après avoir lu, extrait et comparé tous les cahiers fournis par les vingt départements de la noblesse, a cru devoir diviser en deux parties celui qu’elle doit remettre aux députés. Dans la première, elle comprendra , sous le ti tre de cahier général , les demandes qui intéres sent toute la nation, et parmi ces demandes elle distinguera les articles impératifs d’avec ceux de pure instruction. Dans la seconde, qui sera intitulée cahier particulier, elle s’occupera de ce qui intéresse spécialement la ville de Paris. CAHIER GÉNÉRAL. ARTICLES IMPÉRATIFS. Constitution. Les députés demanderont avant tout qu’il soit fait une déclaration explicite des droits qui appartiennent à tous les hommes, et qu’elle constate leur liberté, leur propriété, leur sûreté. Immédiatement après celte déclaration, ils demanderont qu’il demeure reconnu comme pre-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé delà Bibliothèque d u, Corps législatif . [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 272 mier principe de la constitution, que le trône est héréditaire dans l’auguste maison régnante, de mâle en mâle, suivant l’ordre de primogéni-ture, et à l’exclusion des femmes et de la ligne féminine. (Les Etats généraux décideront la manière de déférer la régence dans les cas où elle devra avoir lieu.) Ils demanderont ensuite qu’il soit statué : Que les lois ne pourront être faites que par le concours des Etats généraux et du Roi. Que le pouvoir exécutif appartient tout entier au Roi seul. Que la liberté individuelle sera assurée par une loi contre toutes les atteintes arbitraires. Que la presse sera libre, et qu’une loi particulière définira clairement et avec précision quels seront les délits en pareille matière, et par quelles peines ils seront réprimés et punis. Que la propriété sera sacrée ; qu’aucune portion ne pourra en être détachée que pour l’utilité publique, et ce, moyennant une indemnité complète, fixée contradictoirement, et préalablement acquittée. Que les Etats généraux seuls pourront accorder les subsides, en déterminer la nature, la modicité, la durée; qu’aucun emprunt ne sera ni ouvert ni étendu ; qu’aucune création d’offices, aucune levée de deniers ne sera faite sans leur consentement. Que les subsides accordés sont répartis dans une égalité entière et proportionnelle, dans la môme forme, et sous la même dénomination entre les citoyens de tous les ordres et de toutes les classes, la noblesse ne se réservant que ses privilèges honorifiques. Qu’il ne sera fait aucun changement dans les monnaies sans le consentement des Etats généraux. Que les Etats généraux seront périodiques, et convoqués tous les trois ans au plus tard, et que jamais les subsides ne pourront être accordés que pour le temps qui s’écoulera d’une tenue d’Etats à l’autre. Que la responsabilité des ministres et de tous les dépositaires de pouvoirs sera établie par une loi constitutionnelle, qui fixera d’une manière invariable le cas et le mode légal de cette responsabilité. Que les juges seront de nouveau déclarés inamovibles; qu’aucun citoyen ne pourra jamais être soustrait sous aucun prétexte à ses juges naturels, soit en matière civile, soit en matière criminelle, et que le cours de la justice ne sera jamais interrompu. Qu’il sera établi, dans les provinces qui n’ont pas d’Etats particuliers, des Etats provinciaux formés de membres librement élus et pour un temps limité, lesquels, sans aucun pouvoir ni pour le consentement des impôts, seront chargés uniquement et exclusivement d’asseoir, lever, verser tous les subsides, ainsi que toutes les parties d’administration de leurs provinces, et ne pourront jamais être ni l’élément ni le supplément des Etats généraux, auxquels iis seront subordonnés. Que dans aucun temps les représentants de la nation ne pourront être soumis, pour raison de ce qu’ils auront dit ou écrit aux Etats généraux, qu’à la police intérieure qui aura été établie par les Etats eux-mêmes; et que pendant le temps de la tenue de ces Etats, la personne des représentants sera inviolable dans les cas et suivant le mode qui seront fixés par les Etats généraux. Que toutes les lois qui auront été faites pen-[Paris, intra muros.] dant une tenue d’Etats, seront promulguées, publiées et déposées, les Etats tenant. Tels sont les droits sacrés dont les députés n’abandonneront jamais la défense ; et jusqu’à ce que ces droits aient été reconnus et confirmés par des lois positives, telles que l’assemblée nationale voudra les régler, ils ne pourront consentir aucuns subsides ni aucun emprunt. INSTRUCTIONS. Les citoyens nobles de la ville de Paris désirent : Subsides , dettes. — Que les Etats généraux ayant toujours dû être seuls compétents pour octroyer les subsides, déclarent tous ceux qui existent aujourd’hui supprimés de droit ; que néanmoins ils les rétablissent à l’instant pour le temps de leur tenue seulement, alin qu’aucune dépense nécessaire ne reste suspendue, et que, passé cette époque, il soit enjoint aux tribunaux de poursuivre comme concussionnaire quiconque percevrait des subsides non consentis par les Etats généraux. Que les Etats généraux, au moment de leur ouverture, annoncent, par une proclamation qui sera publiée sur-le-champ, qu’il va être procédé incontinent à recevoir Ta déclaration de la dette publique, à la vérifier, à en constater le montant, et qu’aussitôt que les lois constitutionnelles se-rout établies et promulguées, ils reconnaîtront cette dette, la constitueront dette nationale, et pourvoiront, tant au payement des arrérages qu’aux remboursements successifs des capitaux. Que la dette une fois vérifiée et reconnue, il soit affecté pour son acquittement un subside qui durera autant que la dette, qui diminuera graduellement et s’éteindra entièrement avec elle. Que la destination de ce subside ne puisse jamais être changée ni dénaturée, et que les fonds qui en proviendront soient versés directement dans une ou plusieurs caisses nationales, dont l’administration restera entre les mains de ceux que les Etats généraux auront commis à cet effet. Que les sommes qui doivent être allouées à chaque département soient arrêtées et fixées en raison des besoins qui auront été examinés et reconnus. Que, quant aux dépenses de la maison du Roi, Sa Majesté soit suppliée de les régler elle seule, avec l’économie nécessaire et la dignité convenable. Que les subsides qui seront affectés à ces départements respectifs ne puissent, en aucune circonstance, être distraits de leur destination ; qu’ils soient soumis pour la durée et pour l’étendue à la limitation fixée par les Etats généraux, et qu’ils soient versés directement au trésor royal. Que les Etats généraux s’occupent d’accélérer la comptabilité, et d’en assurer et simplifier les règles. Que les états et les comptes des différents départements, ainsi que ceux de la caisse ou des caisses nationales, soient rendus publics, tous les ans, par la voie de l’impression. Que tout ordonnateur soit comptable aux Etats généraux, et qu’aucun acquit comptant ne soit admis dans les comptes. Qu’indépendamment de la publication des comptes de chaque département, entre lesquels les diverses gratifications et pensions accordées dans l’année se trouveront séparément énoncées, il soit également rendu public, par la voie de l’impression, et tous les ans, un état général et nominatif de toutes ces pensions réunies, de ceux qui les auront obtenues, et des motifs qui les auront fait accorder. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J 273 Que l’état nominatif de toutes les pensions actuelles soit imprimé et publié. Que tous les emplois civils et militaires , jugés inutiles, soient supprimés ; que les remboursements compris dans la dette nationale soient acquittés de préférence , et que les traitements des emplois conservés soient fixés à un taux convenable. Que l’on cherche le moyen de faire supporter aux capitalistes une imposition proportionnelle. Que le droit de franc-fief soit supprimé. Que les loteries françaises et le bureaux de loteries étrangères soient supprimés. Qu’enfin l’assemblée de la nation s’occupe de supprimer cette foule d’impôts désastreux, tels que les aides, la gabelle, le droit de contrôle des actes, le droit d’échange et autres qui, soit par eux-mêmes, soit par le mode de leur perception, écrasent le contribuable, et qu’ils soient remplacés par des subsides justes, faciles à percevoir, moins onéreux et plus productifs. Qu’avant cette conversion et ce nouvel ordre de choses, les Etats généraux constatent le déficit actuel, qu’ils remontent à sa source, qu’ils en examinent les causes, qu’ils permettent, et même qu’ils enjoignent à tous ceux à qui on l’impute particulièrement, et à tous autres administrateurs dont la conduite leur paraîtrait intéressante à examiner, de venir rendre compte. Administration. — Que des commissaires nommés par les Etats généraux soient autorisés à faire une visite exacte de tous les lieux de détention, pour connaître toutes les victimes du pouvoir arbitraire qui pourraient encore y être renfermées. Que le Roi soit supplié de vouloir bien ordonner la démolition de la Bastille. Que l’administration secrète de la poste soit supprimée, et que l’inviolabilité des lettres soit assurée par tous les moyens possibles. Que toutes les fonctions d’administration , confiées jusqu’ici aux intendants, soient attribuées désormais exclusivement aux Etats provinciaux, formés d’après la circonscription qui sera réglée par les Etats généraux. Que dans chaque circonscription il soit établi des assemblées de district , formées sur les mômes principes que les Etats provinciaux, et qui leur seront subordonnées. Qu’enlin sous des assemblées de district, se forment des assemblées des communautés, qui correspondent aux asssemblées de district, et qui soient librement élues comme elles. Que les Etats généraux s’occupent des moyens d’affecter aux dépenses de chaque province les sommes provenantes de ses subsides, et que la seule partie de subsides qui excédera ces dépenses, sorte de la province. Que l’administration des villes soit confiée à des officiers municipaux qu’elles auront librement élus. Que le domaine soit déclaré inaliénable ; que tout autre domaine que les forêts puisse être vendu quand il aura été porté à sa juste valeur ; que les forêts soient encore conservées, et que la vente des uns et l’administration de tous soient confiées aux Etats provinciaux. Que les principes soient fixés sur le commerce des grains. Que les biens des maisons religieuses qui sont ou seraient supprimées, ceux des prieurés ou des menses d’abbayes commendataires, au moment de leur vacance, soient appliqués, sauf les droits des fondateurs, à la dotation des hôpitaux, à l'entretien des collèges, aux constructions et réparais Série, T. V. tions des églises et presbytères et autres fondations pieuses, pour remplacer les impôts et octrois qui sont aujourd’hui consacrés à les soutenir. Que les Etats généraux examinent la question des annates et des droits de dispense en cour de Rome. Que les Etats provinciaux cherchent tous les moyens d’éteindre la mendicité, et de laprévenir en procurant du travail. Qu’en conséquence, et pour que tant de jours ne soient pas enlevés au travail, le nombre des fêtes soit réduit le plus qu’il sera possible. Que toute distinction qui pourrait donner à quelques familles des droits ou un rang que n’aurait pas la noblesse française , soit anéantie, les citoyens nobles de la ville de Paris ne reconnaissant à aucune famille le droit de prince étranger. Que le Roi soit supplié de prendre en grandecou-sidération l’abus des survivances. Que les Etats généraux fixent leur attention et leur intérêt sur la noblesse pauvre, qui a si peu de moyens et de ressources pour subsister et pour élever et placer ses enfants. Qu’aucun emploi, qu’aucune profession n’emporte la dérogeance, sauf les exceptions que pourront faire les Etats généraux. Que la noblesse ne s’acquierre plus à prix d’argent; que les anoblissements ne soient désormais que la récompense ou de services importants ou de vertus éclatantes, et que le Roi fasse proclamer, dans les Etats généraux, les noms de ceux auxquels il aura conféré la noblesse. Que les Etats généraux prennent en considération l’édit de novembre 1787 concernant les non catholiques, et s’occupent de la porter à toute la perfection dont il est susceptible. Que la régie établie sous le nom de régie des biens de religionnaires fugitifs soit supprimée; que ces biens soient restitués à leurs vrais propriétaires, et que le compte de cette régie qui n’a jamais été rendu à personne le soit aux Etats généraux. Que les Etats généraux s’occupent de la question des mariages mixtes. Qu’ils abolissent entièrement la signature du formulaire, qui a produit près de cent mille lettres de cachet. Qu’ils prennent en considération le sort des juifs. Que le rétablissement des mœurs publiques soit un des objets de leur attention. Que l’éducation publique soit perfectionnée ; qu’elle soit étendue à toutes les classes de citoyens; qu’il soit rédigé pour tout le royaume unlivre élémentaire, contenant sommairement les points principaux de la constitution ; qu’il serve partout à l’éducation de la jeunesse, à la première instruction de l’enfance, et que les Français apprennent, en naissant, à connaître, à respecter et à chérir leurs lois. Qu’il soit institué une fête nationale, pour perpétuer à jamais le souvenir du jour où sera signée la charte sur laquelle vont être fondés, hors de toute atteinte, les droits, le bonheur et la confiance réciproques du monarque et de la nation. Justice. — Que les Etats généraux forment une commission pour s’occuper, sous leur inspection, de réformer les lois civiles, criminelles et de police. Que la justice civile soit moins dispendieuse et plus prompte. Que surtout la publicité de la procédure criminelle soit établie, et que dès cet intant, un juge seul, quel qu’il soit, ne puisse placer ni lancer un décret, ni recevoir une déposition. 18 374 (États gén. 1789. Cahiers. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra mures.] Qu’en laissant à l’accusateur tous les moyens de conviction, on assure à l’accusé tous les moyens de défense, et à l’innocent tous les moyens de réparation, et que, dès cet instant, il soit donné un conseil à tout accusé. Que la caution soit admise dans tous les cas où elle sera jugée possible, et que ces cas soient déterminés par une loi. Que les prisons, qui renferment quelquefois l’innocent avec le coupable, et qui renferment toujours des hommes, ne soient pas un supplice anticipé par leur construction, leur insalubrité et leur régime vexatoire ; qu’il n’y ait pas un seul cachot. Que tous les juges, même les cours souveraines, soient tenus de motiver leurs arrêts en matière criminelle. Que la confiscation des biens, qui punit toute une famille pour le crime d’un seul, ne soit plus prononcé. Que la peine de mort soit rendue plus rare; qu’elle se borne uniquement à la privation de la vie, et que tous ces supplices, stérilement barbares, qui répugnent aux mœurs d’une nation si douce, et qui ont. la funeste conséquence de détourner l’horreur du crime par la pitié qu’inspire le coupable, soient à jamais proscrits. Que l’effet des lettres d’abolition accordées au chevalier d’Etalonde soit étendu jusqu’à la mémoire du chevalier de La Bare. Que tous les tribunaux d’exception soient abolis. Que les capitaineries soient supprimées, comme attentatoires à la propriété, et nuisibles à l’agriculture; qu’il soit fait au code des chasses tous les changements nécessaires pour rendre ses dispositions compatibles avec le respect dû aux propriétés et à la sûreté des citoyens, et que la connaissance des délits y relatifs soit portée par-devan t les juges ordinaires. A griculture; commerce. — Que tous les arrêts de surséance, lettres d’Etat, sauf-conduits, etc., soient supprimés. Que l’agriculture et te commerce soient libres ; que l’on supprime toute entrave mise à l’industrie et au libre exercice que tout homme doit avoir de ses facultés. Que toutes les traites soient abolies dans l’intérieur du royaume. Qu’on s’occupe des moyens de parvenir à l’uniformité de poids et de mesures. Que le prêt à terme portant intérêt soit autorisé par la loi. Armée. — Qu’il soit donné à l’armée une constitution digne de l’esprit national. Que les coups de plat de sabre soient supprimés. Que les Etats généraux délibèrent sur les moyens de concilier les devoirs du service militaire avec les devoirs de citoyen, et la nécessité et la subordination avec les droits de la liberté. Que l’honneur et l’état des militaires soient à l’abri des atteintes arbraires. Que M. le comte de Moreton-Ghabrîllant obtienne un jugement qu’il réclame depuis si longtemps; qu’il soit aussi donné des juges à M. le chevalier de La Devèze. CAHIER PARTICULIER. L’assemblée générale des électeurs, représentant tous les citoyens nobles de la ville de Paris, tant au nom de leurs commettants qu’en leur propre et privé nom, proteste solennellement contre le règlement et les ordonnances en vertu desquelles s’est faite la convocation intérieure de Paris. Elle déclare que si elle n’eût pas regardé comme Une espèce de crime public de retarder les Etats généraux, elle n’aurait pu consentir à exécuter ce règlement, et qu’elle ne cessera jamais de réclamer : 1° Pour le droit de la commune anéanti par la séparation des trois ordres ; 2° Pour le droit de la noblesse, qui, dès qu’on l’assemblait séparément, ne devait pas subir plus de réduction que les nobles de toutes les autres parties du royaume, mais surtout devait, comme eux, transmettre immédiatement ses vœux et envoyer directement ses députés à rassemblée de la'nation ; 3° Pour la liberté d’élections, altérée par les formes du règlement, qui ont soumis ces premières élections à des circonscriptions arbitraires. L’assemblée charge expressément ses députés de porter cette protestation aux Etats généraux. Elle les charge non moins expressément d’y porter le vœu unanime qu’elle a déjà manifesté, mais qu’elle se plaît à répéter, pour la suppression des impôts distinctifs, et leur conversion en subsides communs, répartis également, proportionnellement, dans la même forme et sous la même dénomination, entre les citoyens de tous les ordres et de toutes les classes. L’assemblée a examiné, avec une attention scrupuleuse, les demandes, les mémoires, les objets gui intéressaient particulièrement la ville de Paris. En comparant l’immensité de ces objets avec le peu d’instants qu’elle aurait pour s’en occuper, elle a reconnu qu’elle ne pourrait jamais obtenir du travail le plus forcé qu’un résultat extrêmement incomplet qui ne devant pas être acheté par le délai de la nomination de ses députés aux Etats généraux déjà ouverts, et qu’il nuirait à la chose même; que c’était compromettre les intérêts de la ville de Paris, que de ne pas les défendre comme ils doivent être défendus ; et qu’il valait mieux ne pas parler d’un détail, quelque important qu'il fût, que de risquer d’en omettre un autre peut-être plus important encore. L’assemblée a trouvé dans les diverses instructions fournies par les départements un plan qui lui a présenté une grande idée , qui n’entraîne aucun détail pour l’instant, qui les comprend tous pour l’avenir, et qui est le remède le plus efficace, peut-être le seul, à l’impuissance forcée où elle se trouve de s’occuper, comme elle le voudrait, d’intérêts si chers et si dignes de son attention. En conséquence, elle charge ses députés aux Etats généraux de demander : 1° Que les quarante députés qui vont y être envoyés par la ville de Paris soient autorisés à s’assembler entre eux, dans l’intervalle des séances successives des Etats, pour dresser les cahiers de la1 ville. 2° Que lesdits quarante députés, constamment réunis à cet effet, soient impérativement chargés de se procurer tous les renseignements nécessaires à la formation d’un corps municipal vraiment constitutionnel et librement élu dans toutes les classes de citoyens, auquel puissent être restituées toutes les parties de l’administration qui n’auraient jamais dû en être séparées, notamment la généralité des fonctions administratives de la police, fonctions également importantes parle nombre des avantages qu’elles procurent et des abus qu’elles entraînent. 3° Que l’assemblé nationale, quand elle aura réglé les grands intérêts du royaume, statue sur le rapport qui* lui sera fait par les quarante dé- [États'gén. 1789. Cahiers.] pUtés, et que la villê de Paris, où se concentre la trentième partie de la population totale du royaume, et peut-être la sixième partie de sa richesse et de sa puissance, ait enfin une municipalité digne d’elle, une représentation constitutionnelle, d’où résulteront nécessairement et la reconnaissance exacte et la réforme complète des innombrables abus dont elle a lieu de se plaindre. Plusieurs membres de cette assemblée, ayant remis à MM. les commissaires des mémoires aussi remarquables par le patriotisme que par l’étendue de connaissances qui les caractérissent, et dont ils ont regretté que le temps ne leur permit pas de faire usage , l’assemblée à ordonné, sur leur rapport, que ces mémoires seraient, joints au cahier comme instruction ; elle a autorisé ses députés à les présenter aux Etats généraux, et a demandé même que leurs auteurs fussent admis à les discuter en présence des Etats. L’assemblée, en terminant son travail, a été ramenée à former encore quelques vœux qui intéressent la prospérité générale du royaume, et à en exprimer un, dicté par l’intérêt de l’humanité, et autorisé par l’exemple de plusieurs grandes nations. Elle désire : Que les Etats actuels règlent la convocation, la composition et l’organisation future des assemblées nationales. Que les délibérations des Etats généraux soient publiques, et qu’il en soit dressé un journal authentique, qui sera imprimé et publié chaque jour. Que les colonies françaises soient réputées désormais provinces de France, soustraites au pouvoir arbitraire du département de la marine, assimilées aux autres provinces, et participantes comme elles à tous les avanîanges qu’elles doivent attendre de lois constitutionnelles. Que ces nouvelles provinces soient convenablement représentées aux Etats généraux. Que quand leurs députés y seront admis, et non avant, les Etats généraux s’occupent des moyens d’améliorer le sort des noirs. Enfin, les citoyens nobles de Paris, après avoir arrêté impérativement les bases sur lesquelles ils désirent que soit établie la constitution; après avoir rassemblé dans leurs instructions les demandes les plus importantes qu’ils croient devoir soumettre à l’assemblée nationale; sûrs de la fidélité de leurs députés, et n’ayant rien à leur rappeler à cet égard* leur recommandent seulement de modérer leur zèle pour le rendre fructueux, et ne pas compromettre le bien en voulant le faire trop précipitamment. Qu’ils respectent tous lés principes ; qu’ils concilient tous les devoirs ; qu’ils songent que les vues les plus pures ont besoin d’être secondées par des mesures sages; et que le désir séduisant de réparer de longs désordres et de créer la félicité générale, ne les entraîne pas à vouloir trop de changements à la fois, et à ébranler l’édifice social, sans être encore assurés, ni des moyens, ni de l’opinion générale, nécessaires au succès de toutes leurs opérations. Arrêté dans l’assemblée des citoyens nobles de la ville de Paris, tenue à l’arclievêclié, le dimanche 10 mai 1789. Commissaires : Signé Le duc de La Rochefoucauld ; Huguet de Semonville ; le marquis de Condorcet ; le marquis de Lusignhem ; de Laclos ; le comte de Roche-chouart; Ferrant; le comte d’Espinchal; le marquis de Montesquiou-Fezensac ; Nicolaï, premier président de la chambre des comptes ; Du Port; fe comte de Riccé. 275 Stanislas, comte de Clermont-Tonnerre, président. Duval d’Esprémesnil, premier secrétaire. Le comte de Lally-Tollendal, second secrétaire. CAHIER ET INSTRUCTIONS De .Messieurs de la noblesse du premier département séant au Châtelet , remis à MM. les représentants dudit département , en la personne de M. le marquis DE BOULAINVILLIERS. ASSEMBLÉE PARTIELLE DE LA NOBLESSE DU PREMIER DÉPARTEMENT, RÉUNIE AU CHATELET (1). M. le comte de Cbabrillant, représentant Monsieur, pour le fief du Luxembourg. M. le comte de Bourbon-Busset, représentant Monseigneur comte d’Artois, pour le fief de la Pépinière. M. le marquis de Champigny, pour le fief de la TrémôUille. M. Du Tremblay de Rubelle, pour le fief de la Grosse, dit Saint-Yon. ÉLECTEURS. MM. le marquis de Boullainvilliers, président. Duval d’Espreménil, conseiller au parlement. Perrot, président de la chambre des comptes. Boucher d’Argis, conseiller au châtelet. L’Héritier, conseiller à la cour des aides. Marchais, auditeur des comptes. le marquis Turgot, officier aux gardes françaises. le comte de Coubert. Hémant, maître des comptes. d’Avesne de Fontaine, correcteur des comptes. Du Tremblay de Saint-Yon, auditeur des comptes. de Vins de Fontenay, conseiller au parlement. Boulât de Colombiers, conseiller au parlement. Fagnier deMardeuil, conseiller au parlement. le chevalier Aubert du Petit-Thouars. Perrot, président de la cour des aides. Gallois, auditeur des comptes. de Hémant père, maître des comptes. Daniel, chevalier de Boisdenemets, lieutenant des vaisseaux du Roi. le chevalier Montret de Régnât. Chassepot de Beaumont. Silvy. de Leris. Marchais père, correcteur des comptes. de Santeuil, greffier des dépôts du parlement. Gosseron, avocat au parlement. Martin, trésorier de France. Gailliet de Bonfret, président de la cour des monnaies. Touvenot de Caillois. Marchais de Villeneuve, avocat au parlement. Huart-üuparc. de Ruël de Belle-Isle, capitaine de cavalerie. Baudin de la Ghesnaye. Mercier de la Rivière. Colin, secrétaire du Roi. . Moreau d’Esclainvilliers. Gillet, avocat au parlement. Le chevalier de Gillon de Millevoye. Desprez, secrétaire du Roi. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la bibliothèque du corps législatif. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] [États'gén. 1789. Cahiers.] pUtés, et que la villê de Paris, où se concentre la trentième partie de la population totale du royaume, et peut-être la sixième partie de sa richesse et de sa puissance, ait enfin une municipalité digne d’elle, une représentation constitutionnelle, d’où résulteront nécessairement et la reconnaissance exacte et la réforme complète des innombrables abus dont elle a lieu de se plaindre. Plusieurs membres de cette assemblée, ayant remis à MM. les commissaires des mémoires aussi remarquables par le patriotisme que par l’étendue de connaissances qui les caractérissent, et dont ils ont regretté que le temps ne leur permit pas de faire usage , l’assemblée à ordonné, sur leur rapport, que ces mémoires seraient, joints au cahier comme instruction ; elle a autorisé ses députés à les présenter aux Etats généraux, et a demandé même que leurs auteurs fussent admis à les discuter en présence des Etats. L’assemblée, en terminant son travail, a été ramenée à former encore quelques vœux qui intéressent la prospérité générale du royaume, et à en exprimer un, dicté par l’intérêt de l’humanité, et autorisé par l’exemple de plusieurs grandes nations. Elle désire : Que les Etats actuels règlent la convocation, la composition et l’organisation future des assemblées nationales. Que les délibérations des Etats généraux soient publiques, et qu’il en soit dressé un journal authentique, qui sera imprimé et publié chaque jour. Que les colonies françaises soient réputées désormais provinces de France, soustraites au pouvoir arbitraire du département de la marine, assimilées aux autres provinces, et participantes comme elles à tous les avanîanges qu’elles doivent attendre de lois constitutionnelles. Que ces nouvelles provinces soient convenablement représentées aux Etats généraux. Que quand leurs députés y seront admis, et non avant, les Etats généraux s’occupent des moyens d’améliorer le sort des noirs. Enfin, les citoyens nobles de Paris, après avoir arrêté impérativement les bases sur lesquelles ils désirent que soit établie la constitution; après avoir rassemblé dans leurs instructions les demandes les plus importantes qu’ils croient devoir soumettre à l’assemblée nationale; sûrs de la fidélité de leurs députés, et n’ayant rien à leur rappeler à cet égard* leur recommandent seulement de modérer leur zèle pour le rendre fructueux, et ne pas compromettre le bien en voulant le faire trop précipitamment. Qu’ils respectent tous lés principes ; qu’ils concilient tous les devoirs ; qu’ils songent que les vues les plus pures ont besoin d’être secondées par des mesures sages; et que le désir séduisant de réparer de longs désordres et de créer la félicité générale, ne les entraîne pas à vouloir trop de changements à la fois, et à ébranler l’édifice social, sans être encore assurés, ni des moyens, ni de l’opinion générale, nécessaires au succès de toutes leurs opérations. Arrêté dans l’assemblée des citoyens nobles de la ville de Paris, tenue à l’arclievêclié, le dimanche 10 mai 1789. Commissaires : Signé Le duc de La Rochefoucauld ; Huguet de Semonville ; le marquis de Condorcet ; le marquis de Lusignhem ; de Laclos ; le comte de Roche-chouart; Ferrant; le comte d’Espinchal; le marquis de Montesquiou-Fezensac ; Nicolaï, premier président de la chambre des comptes ; Du Port; fe comte de Riccé. 275 Stanislas, comte de Clermont-Tonnerre, président. Duval d’Esprémesnil, premier secrétaire. Le comte de Lally-Tollendal, second secrétaire. CAHIER ET INSTRUCTIONS De .Messieurs de la noblesse du premier département séant au Châtelet , remis à MM. les représentants dudit département , en la personne de M. le marquis DE BOULAINVILLIERS. ASSEMBLÉE PARTIELLE DE LA NOBLESSE DU PREMIER DÉPARTEMENT, RÉUNIE AU CHATELET (1). M. le comte de Cbabrillant, représentant Monsieur, pour le fief du Luxembourg. M. le comte de Bourbon-Busset, représentant Monseigneur comte d’Artois, pour le fief de la Pépinière. M. le marquis de Champigny, pour le fief de la TrémôUille. M. Du Tremblay de Rubelle, pour le fief de la Grosse, dit Saint-Yon. ÉLECTEURS. MM. le marquis de Boullainvilliers, président. Duval d’Espreménil, conseiller au parlement. Perrot, président de la chambre des comptes. Boucher d’Argis, conseiller au châtelet. L’Héritier, conseiller à la cour des aides. Marchais, auditeur des comptes. le marquis Turgot, officier aux gardes françaises. le comte de Coubert. Hémant, maître des comptes. d’Avesne de Fontaine, correcteur des comptes. Du Tremblay de Saint-Yon, auditeur des comptes. de Vins de Fontenay, conseiller au parlement. Boulât de Colombiers, conseiller au parlement. Fagnier deMardeuil, conseiller au parlement. le chevalier Aubert du Petit-Thouars. Perrot, président de la cour des aides. Gallois, auditeur des comptes. de Hémant père, maître des comptes. Daniel, chevalier de Boisdenemets, lieutenant des vaisseaux du Roi. le chevalier Montret de Régnât. Chassepot de Beaumont. Silvy. de Leris. Marchais père, correcteur des comptes. de Santeuil, greffier des dépôts du parlement. Gosseron, avocat au parlement. Martin, trésorier de France. Gailliet de Bonfret, président de la cour des monnaies. Touvenot de Caillois. Marchais de Villeneuve, avocat au parlement. Huart-üuparc. de Ruël de Belle-Isle, capitaine de cavalerie. Baudin de la Ghesnaye. Mercier de la Rivière. Colin, secrétaire du Roi. . Moreau d’Esclainvilliers. Gillet, avocat au parlement. Le chevalier de Gillon de Millevoye. Desprez, secrétaire du Roi. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la bibliothèque du corps législatif. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 276 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intramuros.] MM. Le Bas, chevalier de Girangy. Rouaillé, chevalier de Boisgelon. de L’Atre. de Volandry. le chevalier de Saint-Legur. de La Presle. de Boismilon. Lambert, trésorier de France. Dütremblay de Rubelle, secrétaire. Commissaires à la rédaction des cahiers. MM. Duval d’Espreménil, conseiller en parlement. Boucher d'Argis, conseiller au châtelet. le président Perrot, de la chambre des comptes. Marchais, auditeur des comptes. Daniel, chevalier de Boisdenemets, lieutenant des vaisseaux du Roi. L’Héritier, conseiller de la cour des aides. Dütremblay de Rubelle, maître des comptes, secrétaire. Electeurs du droit comme propriétaires de fiefs intra mur os. Monsieur, frère du Roi, représenté par M. le marquis de Cbabriilant. Monseigneur comte d’ARTOis, représenté par M. le comte de Bourbon-Busset. M. le marquis de Champigny. M. Dütremblay de Rubelle, maître des comptes. Electeurs envertu du scrutin de rassemblée. MM. le marquis de Boulainvilliers, prévôt deParis. Duval d’Espreménil, conseiller au parlement. le président Perrot , de la chambre des comptes. Boucher d’Argis, conseiller au châtelet. L’Héritier, conseiller en la cour des aides. Marchais, auditeur des comptes. le comte de Coubert. Hémant fils, maître des comptes. le marquis de Turgot. d’Avesne de Fontaine, correcteur des comptes. Dütremblay de Saint-Yon , auditeur des comptes. Dütremblay de Rubelle, secrétaire. Les citoyens nobles, assemblés au grand châtelet, à l’occasion de la prochaine tenue des Etats généraux, Considérant que les règlements des 28 mars dernier et 13 avril présent mois, blessent leurs droits, et comme bourgeois de Paris et comme nobles : Comme bourgeois, par l’abolition effective de la commune dont tous les habitants de Paris ont fait partie jusqu’à présent sans distinction d’état ni de naissance; comme nobles, par la réduction : Comme bourgeois et nobles en même temps, par l’obligation imposée à chaque assemblée d’élire les représentants dans son sein ou dans son quartier, et par le droit exclusivement attribué à ces mêmes représentants, une fois élus, de former les cahiers des trois ordres et de nommer les députés de la noblesse, pour être par ceux-ci procédé avec les députés des autres ordres et le corps municipal à la confection des cahiers de la ville; Frappés de ces inconvénients, mais animés du désir de n’apporter aucun obstacle à la convocation des Etats généraux, Déclarent qu’ils protestent contre les règlements, et notamment contre l’abolition effective de la commune, la séparation de la noblesse, sa réduction, et contre les droits exclusivement attribués, tant aux représentants qu’aux députés ; u’au reste, ils n’entendent se départir ni du droit ’élire les représentants hors de leur quartier, ni de celui de procéder directement à la formation de leurs cahiers. En conséquence, les citoyens nobles du premier département ont arrêté qu’ils allaient s’occuper de l’élection des représentants, et qu’ils imposaient d’avance aux députés qui seront choisis en leur nom par les représentants, la condition impérative de ne point délibérer sur les subsides, ni sur d’autres matières, sans avoir assuré par une loi précise : La liberté individuelle des citoyens ; La sûreté des propriétés ; La liberté légitime de la presse ; Le retour périodique des Etats généraux ; La durée de leurs pouvoirs, qui ne pourront en aucun cas se prolonger au delà de trois ans ; Leur droit de faire les lois avec la sanction du Roi ; Leur droit d’accorder les subsides, qui seront déterminés quant à la somme, et limités pour le temps, sans pouvoir excéder le terme de deux années; Enfin la responsabilité de tous ministres, ordonnateurs et officiers publics, qui, par leurs signatures, leurs conseils ou leurs délibérations, porteraient quelque atteinte à ces principes fondamentaux de toute bonne constitution, à ces droits essentiels de toute nation libre. Ges bases une fois établies, les députés de la noblesse aux Etats généraux s’occuperont : De la dette publique, pour la vérifier et la consolider; Des subsides, pour en offrir au Roi la continuation provisoire pendant deux ans ; Des finances de l’Etat, pour fixer les dépenses de chaque département, corriger les vices de la perception, rétablir les règles de la comptabilité, proscrire les anticipations et les acquits comptants ; Des pensions existantes, pour en connaître le montant et les titres, et régler la somme annuelle applicable à cet objet; Des aides, de la gabelle, des traites intérieures, et du droit de contrôle pour les modifier, en attendant qu’on puisse les remplacer; Des impôts distinctifs, pour opérer leur conversion en subsides communs également répartis; Des monnaies, pour en prévenir les refontes arbitraires; Des anoblissements, pour obtenir qu’ils ne soient plus que le prix du mérite et des ser-vices * Des privilèges exclusifs, pour ne les accorder qu’aux inventeurs ; Du code criminel, pour modifier les lois pénales, et rassurer l’innocence par l’instruction; Du procès commencé contre d’anciens ministres, pour qu’il soit repris et continué jusqu’à jugement définitif; Des commissions en matière criminelle, pour qu’elles soient proscrites sans exception; Des commissions en matière civile, pour qu’elles soient bornées à celles que toutes les parties intéressées demanderaient; Des lois civiles, pour simplifier la procédure et rendre l’administration de la justice plus prompte et moins dispendieuse; De la religion, pour la maintenir; Des non catholiques, pour assurer leur état dans tout le royaume; 277 fÉtats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J Des mariages mixtes, pour les permettre et les régler; Des armâtes et du droit de dispenses en cour de Rome,*pour les examiner; De la discipline ecclésiastique, pour la rétablir; de la signature du formulaire, pour l’abolir; Des officiers de justice, pour assurer de nouveau leur inamovibilité par le vœu national; Des officiers militaires, pour préserver leur honneur et leur état des entreprises du pouvoir arbitraire ; De l’armée en général, pour concilier les devoirs de citoyen et de soldat; Du tribunal des maréchaux de France, pour .circonscrire son pouvoir très-précieux dans ses limites naturelles ; Des capitaineries, pour en effectuer l’abolition; De la servitude personnelle, pour en effacer jusqu’au moindre vestige dans le royaume; De la nouvelle clôture de Paris, ]Dour détruire et rétablir les barrières à leur ancienne place; Des pauvres, pour en assurer la subsistance; Des loteries et de la mendicité, pour en procurer l’extinction; Du commerce, pour l’encourager et le permettre, sans restriction, à la noblesse ; Du commerce des grains, pour fixer les principes sur cette matière ; De l’éducation publique , pour la rendre nationale; Enfin, des Etats généraux eux-mêmes, pour en régler la convocation, la composition et l’organisation par des lois constitutionnelles qui préviennent les troubles, et fondent à jamais la force et la prospérité publique sur l’union des citoyens, l’harmonie de tous les ordres. Tels sont les objets sur lesquels les citoyens nobles du premier département indiquent leurs principes aux députés de la noblesse, s’en rappor-tantàleurs lumières, àleursagesse,àleur courage, sur les objets non prévus dans le présent cahier. Au surplus, ils déclarent qu’ils ne cesseront pas de réclamer la réunion légale de la noblesse et le rétablissement de la commune; ils chargent expressément leurs représentants et leurs députés de faire valoir cette réclamation, tant à l’assemblée générale de la convocation, qu’aux Etats généraux; ils les chargent également de faire consigner, dans le cahier commun, leurs protestations contre les règlements. Enfin, ils déclarent que leur vœu unanime est de renoncer aux exemptions pécuniaires ; Arrêté, en outre, que le procès-verbal de nos séances, qui contiendra le présent cahier, sera déposé au greffe du parlement, du Châtelet, delà ville, et sera imprimé. Le marquis de Boulainvilliers , président. Du Tremblay de Rubelle, secrétaire. CAHIER D’instructions de rassemblée partielle de la noblesse du neuvième département de la ville de Paris, séante à Saint-Louis, rue Saint-Antoine (1), remis à MM. de Faronville, Pinon, de Vaugues, de Chanteclair, Drouyn de Vaudeuil-Lavoisier, Musnier de Pleignes, Geoffroy de Charnois, et BlNEAU , tous électeurs choisis librement au scrutin pour la représenter à l’assemblée générale indiquée à V Archevêché pour le 23 avril 1789. L’assemblée de la noblesse du neuvième départi) Nous publions ce cahier, d’aprèsun imprimé delà ' Bibliothèque impériale. tement, réunie à Saint-Louis, rue Saint-Antoine, pénétrée de zèle et de dévouement pour la patrie, d’amour et de respect pour le Roi, considérant qu’elle ne peut, en aucune manière, abandonner son influence directe sur la rédaction des cahiers, parce que l’exercice de ce droit importe à la chose publique, et que les électeurs qu'elle va choisir seront ses mandataires à l’assemblée générale, leur donne mission de requérir: 1° Le maintien de la religion catholique, apostolique et romaine, et le respect dû à son culte ; 2° De déclarer l’hérédité du trône dans la ligne masculine, suivant l’ordre de primogéniture, et l’indivisibilité de la monarchie, lois fondamentales du royaume ; 3° D’établir qu’à la nation librement assemblée, légalement et suffisamment représentée, appartient le pouvoir législatif, avec le concours de la sanction royale ; 4° Que le Roi seul doit avoir en tout temps la puissance exécutive; 5° Que la liberté des citoyens de tous les ordres et de toutes les classes sera sacrée et inviolable; 6° Que toute espèce de propriété sera respectée’; 7° Que la liberté de la presse sera accordée avec des modifications convenables ; 8° Que les ministres seront responsables à la nation assemblée de leur gestion, et principalement de l’emploi des fonds qui leur seront confiés dans leurs départements respectifs ; 9° Qu’il sera statué sur le retour périodique des Etats généraux et que si, dans cet intervalle, une fois fixé, il survenait un changement de règne, ou de régence, les Etats généraux seront convoqués six semaines après cet événement, et que dans le cas où ils ne le seraient pas, ils s’assembleraient d’office à Paris par les représentants existants delà dernière tenue; 10° Qu’il sera établi, dans les circonscriptions fixées par les Etats généraux, des Etats provinciaux, dont les membres seront librement élus par tous les ordres ; lesquels Etats provinciaux seront responsables à la nation assemblée de l’exécution de l’article précédent; 11° Qu’attendu que les magistrats sont dépositaires et conservateurs des lois delà nation, à laquelle ils en sont responsables, ils demeureront in-namovibles dans leurs offices, et qu’ils ne pourront en être destitués que pour forfaiture préalablement jugée ; 12° Que les Etats généraux seront invités de s’occuper à donner au militaire français une constitution stable, permanente et digne de l’esprit national; 13° Qu’il ne sera levé ni prorogé aucun impôt, ni ouvert aucun emprunt sans le consentement des Etats généraux. 14* Que tout impôt existant lors de l’ouverture des Etats généraux sera supprimé, et la perception rétablie provisoirement à titre de subside, pour la durée de leur session, ou jusqu’à ce qu’ils en aient autrement ordonné; 15° Que la dette publique sera sanctionnée et consolidée aussitôt que l’étendue du déficit sera constaté sur des preuves précises et évidentes; 16°' Que les députés de la ville de Paris ne pourront voter aucun impôt, ni consentir aucun emprunt, que préalablement les lois constitutionnelles ci-dessus énoncées n’aient été reconnues, accordées et arrêtées; 17° Que les forêts du domaine de la couronne seront inaliénables; qu’à l’égard des autres domaines, ils ne pourront être aliénés, vendus ou échan- 277 fÉtats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J Des mariages mixtes, pour les permettre et les régler; Des armâtes et du droit de dispenses en cour de Rome,*pour les examiner; De la discipline ecclésiastique, pour la rétablir; de la signature du formulaire, pour l’abolir; Des officiers de justice, pour assurer de nouveau leur inamovibilité par le vœu national; Des officiers militaires, pour préserver leur honneur et leur état des entreprises du pouvoir arbitraire ; De l’armée en général, pour concilier les devoirs de citoyen et de soldat; Du tribunal des maréchaux de France, pour .circonscrire son pouvoir très-précieux dans ses limites naturelles ; Des capitaineries, pour en effectuer l’abolition; De la servitude personnelle, pour en effacer jusqu’au moindre vestige dans le royaume; De la nouvelle clôture de Paris, ]Dour détruire et rétablir les barrières à leur ancienne place; Des pauvres, pour en assurer la subsistance; Des loteries et de la mendicité, pour en procurer l’extinction; Du commerce, pour l’encourager et le permettre, sans restriction, à la noblesse ; Du commerce des grains, pour fixer les principes sur cette matière ; De l’éducation publique , pour la rendre nationale; Enfin, des Etats généraux eux-mêmes, pour en régler la convocation, la composition et l’organisation par des lois constitutionnelles qui préviennent les troubles, et fondent à jamais la force et la prospérité publique sur l’union des citoyens, l’harmonie de tous les ordres. Tels sont les objets sur lesquels les citoyens nobles du premier département indiquent leurs principes aux députés de la noblesse, s’en rappor-tantàleurs lumières, àleursagesse,àleur courage, sur les objets non prévus dans le présent cahier. Au surplus, ils déclarent qu’ils ne cesseront pas de réclamer la réunion légale de la noblesse et le rétablissement de la commune; ils chargent expressément leurs représentants et leurs députés de faire valoir cette réclamation, tant à l’assemblée générale de la convocation, qu’aux Etats généraux; ils les chargent également de faire consigner, dans le cahier commun, leurs protestations contre les règlements. Enfin, ils déclarent que leur vœu unanime est de renoncer aux exemptions pécuniaires ; Arrêté, en outre, que le procès-verbal de nos séances, qui contiendra le présent cahier, sera déposé au greffe du parlement, du Châtelet, delà ville, et sera imprimé. Le marquis de Boulainvilliers , président. Du Tremblay de Rubelle, secrétaire. CAHIER D’instructions de rassemblée partielle de la noblesse du neuvième département de la ville de Paris, séante à Saint-Louis, rue Saint-Antoine (1), remis à MM. de Faronville, Pinon, de Vaugues, de Chanteclair, Drouyn de Vaudeuil-Lavoisier, Musnier de Pleignes, Geoffroy de Charnois, et BlNEAU , tous électeurs choisis librement au scrutin pour la représenter à l’assemblée générale indiquée à V Archevêché pour le 23 avril 1789. L’assemblée de la noblesse du neuvième départi) Nous publions ce cahier, d’aprèsun imprimé delà ' Bibliothèque impériale. tement, réunie à Saint-Louis, rue Saint-Antoine, pénétrée de zèle et de dévouement pour la patrie, d’amour et de respect pour le Roi, considérant qu’elle ne peut, en aucune manière, abandonner son influence directe sur la rédaction des cahiers, parce que l’exercice de ce droit importe à la chose publique, et que les électeurs qu'elle va choisir seront ses mandataires à l’assemblée générale, leur donne mission de requérir: 1° Le maintien de la religion catholique, apostolique et romaine, et le respect dû à son culte ; 2° De déclarer l’hérédité du trône dans la ligne masculine, suivant l’ordre de primogéniture, et l’indivisibilité de la monarchie, lois fondamentales du royaume ; 3° D’établir qu’à la nation librement assemblée, légalement et suffisamment représentée, appartient le pouvoir législatif, avec le concours de la sanction royale ; 4° Que le Roi seul doit avoir en tout temps la puissance exécutive; 5° Que la liberté des citoyens de tous les ordres et de toutes les classes sera sacrée et inviolable; 6° Que toute espèce de propriété sera respectée’; 7° Que la liberté de la presse sera accordée avec des modifications convenables ; 8° Que les ministres seront responsables à la nation assemblée de leur gestion, et principalement de l’emploi des fonds qui leur seront confiés dans leurs départements respectifs ; 9° Qu’il sera statué sur le retour périodique des Etats généraux et que si, dans cet intervalle, une fois fixé, il survenait un changement de règne, ou de régence, les Etats généraux seront convoqués six semaines après cet événement, et que dans le cas où ils ne le seraient pas, ils s’assembleraient d’office à Paris par les représentants existants delà dernière tenue; 10° Qu’il sera établi, dans les circonscriptions fixées par les Etats généraux, des Etats provinciaux, dont les membres seront librement élus par tous les ordres ; lesquels Etats provinciaux seront responsables à la nation assemblée de l’exécution de l’article précédent; 11° Qu’attendu que les magistrats sont dépositaires et conservateurs des lois delà nation, à laquelle ils en sont responsables, ils demeureront in-namovibles dans leurs offices, et qu’ils ne pourront en être destitués que pour forfaiture préalablement jugée ; 12° Que les Etats généraux seront invités de s’occuper à donner au militaire français une constitution stable, permanente et digne de l’esprit national; 13° Qu’il ne sera levé ni prorogé aucun impôt, ni ouvert aucun emprunt sans le consentement des Etats généraux. 14* Que tout impôt existant lors de l’ouverture des Etats généraux sera supprimé, et la perception rétablie provisoirement à titre de subside, pour la durée de leur session, ou jusqu’à ce qu’ils en aient autrement ordonné; 15° Que la dette publique sera sanctionnée et consolidée aussitôt que l’étendue du déficit sera constaté sur des preuves précises et évidentes; 16°' Que les députés de la ville de Paris ne pourront voter aucun impôt, ni consentir aucun emprunt, que préalablement les lois constitutionnelles ci-dessus énoncées n’aient été reconnues, accordées et arrêtées; 17° Que les forêts du domaine de la couronne seront inaliénables; qu’à l’égard des autres domaines, ils ne pourront être aliénés, vendus ou échan- 278 [Élats gén. 1789. Cahiers.l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] gés, que du consentement des Etats généraux, et après que lesdits domaines auront été préalablement portés à leur juste valeur, par l’administration des Etats provinciaux, laquelle aura également et perpétuellement la mutation des forêts et bois, tant taillis que hautes futaies appartenant au Roi; 18° Que la justice sera administrée promptement et gratuitement, et que l’usage des commissions � extraordinaires et des évocations sera entièrement aboli, à moins qu’elles ne soient demandées par toutes les parties ; 19° Qu’il soit nommé un conseil national pour s’occuper, sous l’inspection des Etats généraux, de la réforme des lois civiles et criminelles ; 20° Que toutes les lettres, missives et écrits de confiance soient déclarés sacrés et inviolables; 21° Que les capitaineries soient supprimées, en trouvant les moyens de concilier les plaisirs du prince avec le respect dû aux propriétés de ses sujets ; 22? Qu’il soit formé un bureau, composé de quelques-uns des membres des Etats généraux, pour recevoir journellement les plaintes et les griefs de tous citoyens, et procurer une prompte justice. 23° Que la constitution de la plus grande partie des municipalités du royaume, et particulièrement celle de la ville de" Paris, soit changée de manière qu’il y ait dans les élections des membres qui les composent une liberté réelle et non illusoire ; 24° Que les Etats généraux ne se séparent pas avant d’avoir rédigé, de la manière la plus claire et la plus précise, la déclaration des droits de la nation, laquelle sera publiée et inscrite dans tous les registres publics ; qu’en reconnaissance de l’obtention de cette charte nationale, il soit établi un jour de fête, et que lecture de cette charte soit faite ce jour même dans toutes les paroisses de l’étendue du royaume. Telles sont les demandes que forme Rassemblée partielle de la noblesse du neuvième département et les lois qu’elle regarde comme essentielles à obtenir. Elle exige impérativement, pour la partie constitutive, que les électeurs à l’assemblée des trois ordres les fassentinsérer,oudumoinsfassent tout ce qu’elle a le droit d’attendre de leur zèle pour qu’ils entrent en substance dans le cahier de la ville de Paris. Ses électeurs sont de plus -chargés de déclarer à ladite assemblée qu’elle a formé le vœu d’adhérer au sacrifice que le reste de la noblesse du royaume a fait de ses exemptions pécuniaires; comme aussi de réitérer les protestations qu’elle a faites au comipencement de ses séances, sur l’irrégularité des règlements des 28 mtirs et 13 avril, qui ont aboli la commune, en partageant les ordres, et détruit le privilège de la noblesse en la divisant par assemblées partielles; lesquelles protestations seront insérées dans le cahier général porté aux Etats généraux parles députés de la ville de Paris, qui réclameront l’ancien droit de commune dont elle a toujours joui. Fait et arrêté en l’assemblée générale de la noblesse, séante à Saint-Louis, le 22 avril 1789. Ge cahier ayant été clos ledit jour, à deux heures et demie, il a été convenu que si quelques-uns des membres de l’assemblée avaient quelques articles à y ajouter, ils seraient remis particulièrement aux électeurs. Signé Charpentier de Foissel; Héron; Drouyn de vaudreuil; de Vougus de Passy; Courtin d’Ussy; Du Tillet de Lunay; Geoffroy dp Chinois; de Vougues; S'aint-Mart; Paris deTreffond; Musnier de Pleignes; Poan de Monthelon; Pelletier de Vallières; Moraud; Hullin de Bois; Chevallier; Bizeau; Carpentier; Hebert de Vougues; de Chanteclair; Macault de la Cosne; Lesco; de Verviile; Geoffroy deMontjay; d’Olias; Pinon; Fredy de Coubertiu; Chanteclair, Jourdain de Saint-Sauveur , de Sainte-Marie ; Musnier des Clozeaux; Monsures; Dupont; Philippe de Fa-ronville ; Rouhette, président de l’assemblée; Lavoisier, secrétaire de l’assemblée. ACTE DE NOMINATION DES ÉLECTEURS DE LA NOBLESSE DU NEUVIÈME DÉPARTEMENT. L’an 1789, le vingt-deuxième jour d’avril, les membres composant l’ordre de la noblesse du neuvième département, légalement assemblés, par suite et par continuation des opérations qu’ils avaient entamées, en vertu des lettres de conva-cation du Roi, données à Versailles le 28 mars dernier, et des règlements des 24 janvier, 28 mars et 13 avril présent mois, comparant par les personnes de : MM. Jean-Balthazar-Hector-Amédée de Bonardy. Nicoias-Iiugues Bizeau. Augustin-Jacques Carpentier. René-Jean Charpentier de Foissel. Antoine-Pierre Courtin d’Ussy. Pierre-Jean-Charles Drouyn de Vaureuil. Clément-Nicolas-Léon Philippe de Faron-ville. François-Louis Fredi de Caubertin. François Fossoyeux. Félix-Pierre Geoffroy de Chamois. Jean-Baptiste-Louis-Charles Hébert. François-Jean-Marie Héron. Louis-Joseph Hullin de Bois-Chevalier. Antoine-Laurent Lavoisier. François-Isidore Jourdain de Saint-Sauveur. Louis-Charles Lescot de Verviile. Jean-Baptiste-Jacques Macault de la Cosne. Antoine de Sainte-Marie. Marie-Jean-Eugénie de Saint-Mart. Pierre-Louis Moreau. François d’Olive. Prosper-Maurice Musnier de Pleignes. Augustin-Charles-Marie-Maurice Musnier des Clozeaux. Claude-Gilbert Geoffroy de Montjay. Léonard Chrétien de Monsures. ...... Paris deTreffond. Achille-Marie Pelletier de Vallières. Nicolas-Louis de Pinon, Jean-Baptiste Poan de Monthelon. Pierre-Samuel Du Pont. Louis-Ernest Prondre de Ravenel. François-Théodore Rouette. Antoine-Charles-Pierre Du Tillet de Lunay. André de Vouges. Antoine-François de Vouges de Chanteclair. Simon-Casimir de Vouges de Passy. Claude-Narcisse de Vouges de Chanteclair, Tous nobles, et domiciliés dans l’arrondissement fixé pour le neuvième département; Lesquels croyant avoir suffisamment maintenu le droit dont la noblesse a toujours joui, de concourir directement à la nomination de ses députés aux Etats généraux, par leurs protestations des jours d’hier et d’avant-hier qu’ils renouvellent, en tant que de besoin, de la manière la plus formelle, et par la nomination qu’ils ont faite de tous et un chacun des membres de Rassemblée pour électeurs ; Ne voulant pas cependant donner k cette ré$p- $79 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Paris, intra muros.] lutiom une suite qui pourrait retarder la réunion de l’assemblée nationale, si nécessaire à la restauration de la chose publique, et si désirée par tous les ordres de citoyens ; animés par des principes de paix et de conciliation, persuadés d’ailleurs que les Etats généraux fixeront d’une manière invariable pour l’avenir la forme de convocation de la commune de Paris, et que cette infraction faite aux droits de la noblesse sera la seule et la dernière; ont arrêté que, sans tirer à conséquence et d’après le désistement libre et volontaire des électeurs qu’ils s’étaient choisis, ils consentent à la réduction ordonnée par le règlement du 13 avril. Mais considérant en même temps que l’intention du Roi, manifestée par les lettres de convocation et par le règlement du 28 mars, est que la représentation de la noblesse de Paris fût au moins de cent cinquante; dans la confiance que l’assemblée générale des électeurs ne demeurera pas au-dessous de ce nombre, et désirant s’arrêter à un parti qui puisse se concilier avec les dispositions, telles qu’elles soient, qui pourraient avoir été faites par les autres assemblées partielles, ils se sont déterminés à ajouter à la députation de leur assemblée un. nombre de représentants égal à celui indiqué par le règlement du 13 avril ; ce qui la portera à un électeur sur cinq, c’est-à-dire à huit en totalité; lesquels huit électeurs ou représentants seront admis à l’assemblée générale de la noblesse, du 23, dans l’ordre indiqué par leur élection, jusqu’au nombre nécessaire pour la compléter; sans que, dans aucun cas, la représentation de la présente assemblée puisse être proportionnellement moindre que celle d’aucun autre département; et ayant en conséquence procédé, par la voie du scrutin, à la nomination des susdits huit électeurs, le choix est tombé sur les personnes de : MM. Clément-Nicolas-Léon-Philippe de Faronville; Nicolas-Louis Pinon; André de Vouges de Chanteclair; Pierre-Jean-Charles Drouyn de Vaudreuil ; Antoine-Laurent Lavoisier; Prosper-Maurice Musnier de Pleignes; Félix-Pierre Geoffroy de Chamois; Nicolas-Hugues Bizeaux. Auxquels électeurs ils donnent pouvoir de les représenter à rassemblée générale des trois ordres indiquée pour demain, et d’y élire pour eux et en leur nom, des députés aux Etats généraux, promettant d’approuver ce qu’ils auront fait, délibéré et signé en ladite assemblée, ainsi et de la même manière que si chacun des membres y eut assisté en personne; leur enjoignant d’appuyer de leur vœu et de tous les efforts de leur zèle les articles insérés dans le cahier d’instruction ci-annexé. De laquelle nomination et pouvoir a été dressé acte. Fait double lesdits jour et an que dessus. Signé Musnier des Glozaux; Du Pont; Courtin d’Ussy; de Vouges de Passy ; Paris de Treffond ; Geoffroy de Chamois; Drouyn de Vaudreuil; Moreau; Pelletier de Vallières ; de Vouges de Ghan-teclair; Philippe de Faronville ; Paon de Monthe-lon; de Vouges; Charpentier de Foissel: de Saint-Mart; Musnier de Pleignes; Héron; Du Tillet de Launay; Hébert; Hullin de Bois-Chevalier; Macault de la Cosne, Carpentier; Lescot de Ver-ville ; Chanteclair; de Sainte-Marie; Pinon d’Olive; Geoffroy de Montjay; Monsures; Bizeau; Fredi de Goubertin; Jourdain de Saint-Sauveur; Rouhette, président de Rassemblée ; Lavoisier, secrétaire de rassemblée. CAHIER Des demandes de rassemblée de la noblesse du quatorzième département , convoquée en la maison de Sorbonne ( 1). Les membres de l’assemblée de la noblesse du quatorzième département, considérant les atteintes portées par le règlement du 13 avril dernier au droit inhérent à l’ordre de la noblesse, de nommer directement des représentants aux Etats généraux, sans être soumis à aucune réduction, à la liberté des électeurs, en empêchant les citoyens de choisir leurs représentants non-seulement dans la ville, mais même dans la rue qu’ils habitent; Ont en conséquence arrêté de protester contre les violations ci-dessus énoncées, et cependant déclarent que dans la vue de ne porter aucun obstacle ni retardement aux Etats généraux, ils se conformeront au règlement pour cette fois seulement; en outre, en vertu du droit incontestable qu’ils ont de coopérer individuellement aux pouvoirs et cahiers donnés à leurs représentants, ils ont résolu d’exprimer ainsi les principaux articles à insérer dans le cahier général : POINTS CONSTITUTIONNELS. Art. 1er. Que les Etats généraux, à l’avenir, soient fréquents et périodiques, et qu’ils fixent eux-mêmes leur retour, la forme de leur convocation et la manière d’opiner. Art. 2. Que les Etats généraux soient la seule puissance compétente pour faire les lois avec la sanction royale. Art. 3. Que la liberté individuelle soit inviola-blement conservée à tout citoyen. Art. 4. Que la liberté de la presse soit établie, sauf les restrictions et modifications que les Etats généraux croiront devoir y mettre. Art. 5. Qu’en toute occasion le secret des lettres confiées à la poste soit rigoureusement observé. Art. 6. Que tout droit de propriété soit inviolable ; que tout individu n’en puisse être privé que pour la seule raison de l’intérêt public, et qu’a-lors il en soit dédommagé sans délai et d’après la forme qui sera réglée par les Etats généraux. Art. 7. Qu’aucun subside ne soit établi, levé ni prorogé, comme aussi qu’aucuns emprunts ne soient ouverts sans le consentement des Etats généraux. Art. 8. Que les ministres et administrateurs de la chose publique soient responsables envers la nation. Art. 9. Que tout impôt existant lors de l’ouverture des Etats généraux soit supprimé, et sa perception néanmoins rétablie provisoirement à titre de subside jusqu’à ce qu’ils en aient autrement ordonné. Art. 10. Que les Etats généraux statuent sur une composition d’Etats provinciaux, et sur ceux de la ville de Paris, dans la forme qu’ils jugeront la plus propre à la bonne administration, en respectant et combinant avec le bien général les traités, capitulations et conventions faites avec les provinces, et que la répartition, assiette et levée des impôts ne se fasse que par les Etats provinciaux, aussi légalement établis. Art. 11. Que la régence soit déférée par les Etats généraux, et que, dans ce cas, les Etats soient convoqués de droit, et l’administration provisoire déférée par intérim au plus proche parent mâle (1) Nous publions ce cahier d’apns un imprimé do la Bibliothèque du Sénat. $79 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Paris, intra muros.] lutiom une suite qui pourrait retarder la réunion de l’assemblée nationale, si nécessaire à la restauration de la chose publique, et si désirée par tous les ordres de citoyens ; animés par des principes de paix et de conciliation, persuadés d’ailleurs que les Etats généraux fixeront d’une manière invariable pour l’avenir la forme de convocation de la commune de Paris, et que cette infraction faite aux droits de la noblesse sera la seule et la dernière; ont arrêté que, sans tirer à conséquence et d’après le désistement libre et volontaire des électeurs qu’ils s’étaient choisis, ils consentent à la réduction ordonnée par le règlement du 13 avril. Mais considérant en même temps que l’intention du Roi, manifestée par les lettres de convocation et par le règlement du 28 mars, est que la représentation de la noblesse de Paris fût au moins de cent cinquante; dans la confiance que l’assemblée générale des électeurs ne demeurera pas au-dessous de ce nombre, et désirant s’arrêter à un parti qui puisse se concilier avec les dispositions, telles qu’elles soient, qui pourraient avoir été faites par les autres assemblées partielles, ils se sont déterminés à ajouter à la députation de leur assemblée un. nombre de représentants égal à celui indiqué par le règlement du 13 avril ; ce qui la portera à un électeur sur cinq, c’est-à-dire à huit en totalité; lesquels huit électeurs ou représentants seront admis à l’assemblée générale de la noblesse, du 23, dans l’ordre indiqué par leur élection, jusqu’au nombre nécessaire pour la compléter; sans que, dans aucun cas, la représentation de la présente assemblée puisse être proportionnellement moindre que celle d’aucun autre département; et ayant en conséquence procédé, par la voie du scrutin, à la nomination des susdits huit électeurs, le choix est tombé sur les personnes de : MM. Clément-Nicolas-Léon-Philippe de Faronville; Nicolas-Louis Pinon; André de Vouges de Chanteclair; Pierre-Jean-Charles Drouyn de Vaudreuil ; Antoine-Laurent Lavoisier; Prosper-Maurice Musnier de Pleignes; Félix-Pierre Geoffroy de Chamois; Nicolas-Hugues Bizeaux. Auxquels électeurs ils donnent pouvoir de les représenter à rassemblée générale des trois ordres indiquée pour demain, et d’y élire pour eux et en leur nom, des députés aux Etats généraux, promettant d’approuver ce qu’ils auront fait, délibéré et signé en ladite assemblée, ainsi et de la même manière que si chacun des membres y eut assisté en personne; leur enjoignant d’appuyer de leur vœu et de tous les efforts de leur zèle les articles insérés dans le cahier d’instruction ci-annexé. De laquelle nomination et pouvoir a été dressé acte. Fait double lesdits jour et an que dessus. Signé Musnier des Glozaux; Du Pont; Courtin d’Ussy; de Vouges de Passy ; Paris de Treffond ; Geoffroy de Chamois; Drouyn de Vaudreuil; Moreau; Pelletier de Vallières ; de Vouges de Ghan-teclair; Philippe de Faronville ; Paon de Monthe-lon; de Vouges; Charpentier de Foissel: de Saint-Mart; Musnier de Pleignes; Héron; Du Tillet de Launay; Hébert; Hullin de Bois-Chevalier; Macault de la Cosne, Carpentier; Lescot de Ver-ville ; Chanteclair; de Sainte-Marie; Pinon d’Olive; Geoffroy de Montjay; Monsures; Bizeau; Fredi de Goubertin; Jourdain de Saint-Sauveur; Rouhette, président de Rassemblée ; Lavoisier, secrétaire de rassemblée. CAHIER Des demandes de rassemblée de la noblesse du quatorzième département , convoquée en la maison de Sorbonne ( 1). Les membres de l’assemblée de la noblesse du quatorzième département, considérant les atteintes portées par le règlement du 13 avril dernier au droit inhérent à l’ordre de la noblesse, de nommer directement des représentants aux Etats généraux, sans être soumis à aucune réduction, à la liberté des électeurs, en empêchant les citoyens de choisir leurs représentants non-seulement dans la ville, mais même dans la rue qu’ils habitent; Ont en conséquence arrêté de protester contre les violations ci-dessus énoncées, et cependant déclarent que dans la vue de ne porter aucun obstacle ni retardement aux Etats généraux, ils se conformeront au règlement pour cette fois seulement; en outre, en vertu du droit incontestable qu’ils ont de coopérer individuellement aux pouvoirs et cahiers donnés à leurs représentants, ils ont résolu d’exprimer ainsi les principaux articles à insérer dans le cahier général : POINTS CONSTITUTIONNELS. Art. 1er. Que les Etats généraux, à l’avenir, soient fréquents et périodiques, et qu’ils fixent eux-mêmes leur retour, la forme de leur convocation et la manière d’opiner. Art. 2. Que les Etats généraux soient la seule puissance compétente pour faire les lois avec la sanction royale. Art. 3. Que la liberté individuelle soit inviola-blement conservée à tout citoyen. Art. 4. Que la liberté de la presse soit établie, sauf les restrictions et modifications que les Etats généraux croiront devoir y mettre. Art. 5. Qu’en toute occasion le secret des lettres confiées à la poste soit rigoureusement observé. Art. 6. Que tout droit de propriété soit inviolable ; que tout individu n’en puisse être privé que pour la seule raison de l’intérêt public, et qu’a-lors il en soit dédommagé sans délai et d’après la forme qui sera réglée par les Etats généraux. Art. 7. Qu’aucun subside ne soit établi, levé ni prorogé, comme aussi qu’aucuns emprunts ne soient ouverts sans le consentement des Etats généraux. Art. 8. Que les ministres et administrateurs de la chose publique soient responsables envers la nation. Art. 9. Que tout impôt existant lors de l’ouverture des Etats généraux soit supprimé, et sa perception néanmoins rétablie provisoirement à titre de subside jusqu’à ce qu’ils en aient autrement ordonné. Art. 10. Que les Etats généraux statuent sur une composition d’Etats provinciaux, et sur ceux de la ville de Paris, dans la forme qu’ils jugeront la plus propre à la bonne administration, en respectant et combinant avec le bien général les traités, capitulations et conventions faites avec les provinces, et que la répartition, assiette et levée des impôts ne se fasse que par les Etats provinciaux, aussi légalement établis. Art. 11. Que la régence soit déférée par les Etats généraux, et que, dans ce cas, les Etats soient convoqués de droit, et l’administration provisoire déférée par intérim au plus proche parent mâle (1) Nous publions ce cahier d’apns un imprimé do la Bibliothèque du Sénat. 280 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] et majeur du Roi, et la loi dite salique, qui exclut les femmes du trône, confirmée. Art. 12. Que telle sera la base de la Charte nationale et la déclaration des droits du peuple français, laquelle, signée par le Roi et par les membres des Etats généraux, sera publiée et enregistrée dans toutes les cours supérieures et autres, ainsi que dans toutes les municipalités, et lue tous les ans au prône des paroisses à un jour fixe; et pour perpétuer la mémoire du bienfait de Sa Majesté, en convoquant la nation, et de la juste reconnaissance qu’elle en doit conserver, il sera fait à toujours, dans toutes les paroisses du royaume, un des dimanches du mois de mai (mois où Sa Majesté est montée sur le trône), une procession, tant pour la conservation de ses jours, que pour la prospérité du royaume, et pour être un éternel témoignage de notre reconnaissance, Art. 13. Qu’il soit imprimé jour par jour un précis de ce qui se sera passé aux Etats généraux. Art. 14. Qu’aux Etats généraux on délibère plusieurs fois sur le même objet, avant de rien statuer définitivement, et que la motion précédant la première délibération à faire sur chaque objet nouveau, soit annoncée huit jours d’avance dans les papiers publics, avec invitation à tout citoyen de faire parvenir à l’assemblée des Etats ses observations. FINANCES ET DETTE PUBLIQUE. Art. 1er. Que les députés à l’assemblée de la nation prennent communication des états de recette et dépense, avant toute délibération sur les impositions. Art. 2. Que la dette publique ne puisse être vérifiée, constatée et consolidée qu’aprôs l’établissement des bases constitutives ci-déssus énoncées et qu’après la communication des pièces justificatives de la situation des finances. Art. 3. Qu’il soit établi une caisse nationale dans laquelle les trésoriers des Etats provinciaux verseront directement l’excédant des fonds levés et non employés dans les provinces; que tout versement et transport d’argent inutile soit évité, et que les frais de perception soient diminués et Simplifiés. Art. 4. Que les dépenses des départements soient fixées, et que Sa Majesté soit suppliée de déclarer les revenus convenables pour soutenir avec gloire la dignité du trône et celle d’un monarque chéri de la nation. Art. 5. Qu’on imprime une liste des pensions que l’Etat paye à chaque citoyen, et qu’on ajoute à l’article qui le concerne, le montant du produit des gouvernements, commandements et autres grâces qu’il peut avoir, pour qu’on réduise ce qui sera excessif, et qu’on puisse récompenser les militaires pauvres qui ont bien mérité de la patrie. Art. 6. Qu’on imprime chaque année la liste des pensions qui auront été accordées et le nom des personnes qui les auront obtenues. RELIGION, CLERGÉ ET HUMANITÉ. Art. 1er. Que la religion catholique, apostolique et romaine sera toujours la religion dominante dans le royaume. Art. 2. Qu’il soit remédié aux abus de la pluralité des bénéfices. Art. 3. Que la résidence de tous les archevêques et évêques dans leur diocèse, et de tous les titulaires de bénéfices à charge d’âmes dans leurs bénéfices, soit ordonnée. Art. 4. Que les gros décimateurs soient tenus de contribuer chaque année au soulagement des pauvres des paroisses où ils ont la dîme, et de verser une somme fixée dans la caisse de charité qui sera établie dans chaque paroisse. Art. 5. Qu’il soit pourvu à l’amélioration de l’éducation publique. Art. 6. Qu i! soit établi dans toutes les paroisses de campagne de cent feux et au-dessus un maître ou une maîtresse d’école, enseignant à lire et à écrire, et apprenant aux enfants des deux sexes, séparément, les principes de la religion, et que les fonds desdits établissements soient fixés par les Etals généraux. Art. 7. Qu’il soit établi, dans un arrondissement convenable, un bureau de charité, administré par les seigneurs, les curés et les notables du lieu, ainsi qu’un chirurgien et une sage-femme, dont les honoraires seront payés par ledit bureau, afin qu’ils soint tenus de servir les pauvres gratuitement. JUSTICE. Art. 1er. Qu’il soit procédé à la réforme du code civil et criminel. Art. 2. Que les tribunaux ordinaires ne puissent être dépouillés de leurs fonctions, par aucune commission particulière, ni par évocation, et que l’exercice de la justice ne soit jamais suspendu par aucun acte de pouvoir arbitraire, ni par quelque autorité que ce soit. Art. 3. Que les frais de justice soient diminués. Art. 4. Qu’on s’occupe de l’amélioration des études de droit. Art. 5. Que les abus des directions, des consignations et des saisies réelles, dont beaucoup de familles ont été les victimes, soient réformées. Art. 6. Qu’il soit demandé une diminution de ressort et une nouvelle circonscription plus commode pour les tribunaux trop éloignés de leurs justiciables. Art. 7. Que l’abus des lettres de surséance soit supprimé. POLICE ET ABUS A RÉFORMER. Art. 1er. Que les endroits privilégiés qui servent d’asile aux banqueroutiers soient abolis; et que les lois portées contre les banqueroutes frauduleuses soient strictement exécutées. Art. 2. Que les loteries soient supprimées; que l’agiotage soit réprimé, et qu’on veille à la conservation des mœurs dont la corruption entraîne la décadence des Etats. Art. 3. Qu’à l’avenir, aucune charge ne confère la noblesse, et qu’elle ne soit plus accordée que par lettres du Roi, obtenues d’après les suffrages des Etats provinciaux, et enregistrées dans les cours souveraines. Art. 4. Que Sa Majesté soit suppliée de n’accorder la croix de Saint-Louis qu’à des services purement militaires. Art. 5. Que l’assemblée des Etats généraux soit suppliée de prononcer sur l’abus des titres et sur la nécessité de dresser le catalogue général de la noblesse, divisée par bailliages; et enfin, de prendre en considération la noblesse indigent� Art. 6. Que Sa Majesté soit suppliée, quand eure jugera à propos de faire des changements, soit dans la discipline, soit dans la formation ou évolutions de ses troupes, d’appeler à la rédaction des ordonnances militaires des officiers de différentes armes, de différents grades, et de différentes divisions ; qui puissent juger sainement de l’utilité de ce$ changements, et de la façon de les introduire, de manière à occasionner le moins [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 504 possible de retraites d’anciens officiers, et de désertions dans les troupes. Par là, l’émulation sera conservée à la noblesse, ainsi que les moyens d’avancer, et le soldat sera délivré des punitions qui lui navrent et humilient l’âme, notamment des coups de plat de sabre ; et toute ordonnance ainsi concertée serait plus promptement et plus uniformément exécutée. Art. 7. Que Sa Majesté soit aussi suppliée de ne priver de leur état les officiers de ses troupes que par jugement d’un conseil de guerre, et de permettre à ceux qui ont été privés de leur emploi par ordre du ministère, de se représenter, s’ils le jugent à propos, devant un tribunal de révision que Sa Majesté sera suppliée de leur accorder, notamment à M. le comte de Moreton-Chabrillant et à M. le chevalier de La Deveze, ci-devant commandant des troupes du Sénégal, membre de notre assemblée ; et que Sa Majesté veuille bien rendre l'état et le rang aux officiers sortis de leurs corps, pour les dernières affaires publiques relatives à l’établissement des grands bailliages. Art. 8. Que Sa Majesté soit aussi suppliée de supprimer les capitaineries où elle ne chasse pas personnellement ; de consentir à la réduction de celles qu’elle jugera à propos de conserver; d’empêcher l’abus funeste de la vente faite par les capitaineries des chasses, de cantons à divers particuliers ; de rendre la chasse aux propriétaires des fiefs enclavés dans les terrains qu’elle conservera pour ses plaisirs ; de revoir le code des chasses, d’en corriger les articles d’une rigueur excessive ou attentatoires à la liberté et à la propriété ; de restituer aux cours supérieures l’attribution des cas résultant de faits de chasse, et de permettre à chaque seigneur, dans ses domaines, la chasse aux bêtes fauves. Art. 9. Que les maréchaussées soient augmentées. Art. 10. Que les Etats généraux prennent en considération le dernier traité de commerce fait avec l’Angleterre, ainsi que l’établissement de la nouvelle Compagnie des Indes, et la suppression des privilèges exclusifs, notamment celui des messageries. Art. 11. Que, pour prévenir les accaparements et monopole des grains, il soit établi dans la capitale un magasin qui puisse suffire à ses besoins pendant six mois au moins. Art. 12. Enfin, la noblesse du quatorzième département de Paris croit ne pouvoir mieux terminer les articles de son cahier qu’en déclarant qu’elle renonce à toutes exemptions pécuniaires en matière d’impôt, et qu’elle consent qu’ils soient supportés par toutes les propriétés, sans distinction de la qualité des propriétaires, et ne se réservant que les droits inviolables de la propriété, et les prérogatives, honneurs et prééminences qui sont inhérents à son ordre. Fait et arrêté à Paris, en la salle des actes de la maison de Sorbonne, par nous, membres de la noblesse composant le quatorzième département; et avons signé. Ainsi signé : Du Pré de Saint-Maur, président , avec paraphe ; Basly ; le comte de Waroquier ; ' comte Leblond ; de Favanne ; Robert de Prie ; le vicomte de La Grange ; Le Bègue, avec paraphe; Renaudière; Taupinart de Tillières, avec paraphe ; Boscheron ; Boulard, avec paraphe ; Nau; Chaucbat; Gissey; le comte de Malestroit de Pont-calleck; le chevalier de La Devèze ; Henin ; Chau-chat de Benneville ; le vicomte de Matinel-Saint-Germain, et Gherin, secrétaire. Les pièces originales ci-dessus sont demeurées ès mains de M. Du Pré de Saint-Maur, président. CAHIER Du tiers-état de la ville de Paris (1). L’assemblée'générale des électeurs du tiers-état de la ville de Paris, avant de procéder au choix de ses représentants et de les revêtir de ses pouvoirs, doit exprimer ses regrets sur une convocation trop tardive, qui l’a tant forcée de précipiter ses opérations. Comme Français, les électeurs s’occuperont d’abord des droits et des intérêts de la nation ; comme citoyens de Paris, ils présenteront ensuite leurs demandes particulières. L’instruction qu’ils vont confier au patriotisme et au zèle de leurs représentants se divise naturellement en six parties. La première portera sur la constitution ; La seconde, sur les finances ; La troisième, sur l’agriculture, le commerce et la juridiction consulaire ; La quatrième, sur la religion, le clergé, l’éducation, les hôpitaux et mœurs ; La cinquième sur la législation ; La sixième, sur les objets particuliersà la ville de Paris. OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. Nous prescrivons à nos représentants de se refuser invinciblement, à tout ce qui pourrait offenser la dignité de citoyens libres, qui viennent exercer les droits souverains de la nation. L’opinion publique paraît avoir reconnu la nécessité de la délibération par tête pour corriger les inconvénients de là distinction des ordres , pour faire prédominer l’esprit public, pour rendre plus facile l’adoption des bonnes lois. Les représentants de la ville de Paris se souviendront ’de la fermeté qu’ils doivent apporter sur ce point; ils la regarderont comme un droit rigoureux, comme l’objet d’un mandat spécial. Il leur est enjoint expressément de ne consentir à aucun subside, à aucun emprunt, que la déclaration des droits de la nation ne soit passée en lois, et que les bases premières de la constitution ne soient convenues et assurées. Ce premier devoir rempli, ils procéderont à la vérification de la dette publique et à sa consolidation. Ils demanderont que tout objet d’un intérêt majeur soit mis deux fois en délibération, à des intervalles proportionnés à l’importance des questions , et ne puisse être décidé que par la pluralité absolue des voix, c’est-à-dire par plus de la moitié des suffrages. DÉCLARATION DES DROITS. Dans toute société politique, tous les hommes sont égaux en droits. Les droits de la nation seront établis et déclarés d’après les principes qui suivent : Tout pouvoir émane de la nation, et ne peut être exercé que pour son bonheur. La volonté générale fait la loi ; la force publique en assure l’exécution. La nation peut seule concéder le subside; elle a le droit d’en déterminer la quotité, d’en limiter la durée, d’en faire la répartition, d’en assigner (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 504 possible de retraites d’anciens officiers, et de désertions dans les troupes. Par là, l’émulation sera conservée à la noblesse, ainsi que les moyens d’avancer, et le soldat sera délivré des punitions qui lui navrent et humilient l’âme, notamment des coups de plat de sabre ; et toute ordonnance ainsi concertée serait plus promptement et plus uniformément exécutée. Art. 7. Que Sa Majesté soit aussi suppliée de ne priver de leur état les officiers de ses troupes que par jugement d’un conseil de guerre, et de permettre à ceux qui ont été privés de leur emploi par ordre du ministère, de se représenter, s’ils le jugent à propos, devant un tribunal de révision que Sa Majesté sera suppliée de leur accorder, notamment à M. le comte de Moreton-Chabrillant et à M. le chevalier de La Deveze, ci-devant commandant des troupes du Sénégal, membre de notre assemblée ; et que Sa Majesté veuille bien rendre l'état et le rang aux officiers sortis de leurs corps, pour les dernières affaires publiques relatives à l’établissement des grands bailliages. Art. 8. Que Sa Majesté soit aussi suppliée de supprimer les capitaineries où elle ne chasse pas personnellement ; de consentir à la réduction de celles qu’elle jugera à propos de conserver; d’empêcher l’abus funeste de la vente faite par les capitaineries des chasses, de cantons à divers particuliers ; de rendre la chasse aux propriétaires des fiefs enclavés dans les terrains qu’elle conservera pour ses plaisirs ; de revoir le code des chasses, d’en corriger les articles d’une rigueur excessive ou attentatoires à la liberté et à la propriété ; de restituer aux cours supérieures l’attribution des cas résultant de faits de chasse, et de permettre à chaque seigneur, dans ses domaines, la chasse aux bêtes fauves. Art. 9. Que les maréchaussées soient augmentées. Art. 10. Que les Etats généraux prennent en considération le dernier traité de commerce fait avec l’Angleterre, ainsi que l’établissement de la nouvelle Compagnie des Indes, et la suppression des privilèges exclusifs, notamment celui des messageries. Art. 11. Que, pour prévenir les accaparements et monopole des grains, il soit établi dans la capitale un magasin qui puisse suffire à ses besoins pendant six mois au moins. Art. 12. Enfin, la noblesse du quatorzième département de Paris croit ne pouvoir mieux terminer les articles de son cahier qu’en déclarant qu’elle renonce à toutes exemptions pécuniaires en matière d’impôt, et qu’elle consent qu’ils soient supportés par toutes les propriétés, sans distinction de la qualité des propriétaires, et ne se réservant que les droits inviolables de la propriété, et les prérogatives, honneurs et prééminences qui sont inhérents à son ordre. Fait et arrêté à Paris, en la salle des actes de la maison de Sorbonne, par nous, membres de la noblesse composant le quatorzième département; et avons signé. Ainsi signé : Du Pré de Saint-Maur, président , avec paraphe ; Basly ; le comte de Waroquier ; ' comte Leblond ; de Favanne ; Robert de Prie ; le vicomte de La Grange ; Le Bègue, avec paraphe; Renaudière; Taupinart de Tillières, avec paraphe ; Boscheron ; Boulard, avec paraphe ; Nau; Chaucbat; Gissey; le comte de Malestroit de Pont-calleck; le chevalier de La Devèze ; Henin ; Chau-chat de Benneville ; le vicomte de Matinel-Saint-Germain, et Gherin, secrétaire. Les pièces originales ci-dessus sont demeurées ès mains de M. Du Pré de Saint-Maur, président. CAHIER Du tiers-état de la ville de Paris (1). L’assemblée'générale des électeurs du tiers-état de la ville de Paris, avant de procéder au choix de ses représentants et de les revêtir de ses pouvoirs, doit exprimer ses regrets sur une convocation trop tardive, qui l’a tant forcée de précipiter ses opérations. Comme Français, les électeurs s’occuperont d’abord des droits et des intérêts de la nation ; comme citoyens de Paris, ils présenteront ensuite leurs demandes particulières. L’instruction qu’ils vont confier au patriotisme et au zèle de leurs représentants se divise naturellement en six parties. La première portera sur la constitution ; La seconde, sur les finances ; La troisième, sur l’agriculture, le commerce et la juridiction consulaire ; La quatrième, sur la religion, le clergé, l’éducation, les hôpitaux et mœurs ; La cinquième sur la législation ; La sixième, sur les objets particuliersà la ville de Paris. OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. Nous prescrivons à nos représentants de se refuser invinciblement, à tout ce qui pourrait offenser la dignité de citoyens libres, qui viennent exercer les droits souverains de la nation. L’opinion publique paraît avoir reconnu la nécessité de la délibération par tête pour corriger les inconvénients de là distinction des ordres , pour faire prédominer l’esprit public, pour rendre plus facile l’adoption des bonnes lois. Les représentants de la ville de Paris se souviendront ’de la fermeté qu’ils doivent apporter sur ce point; ils la regarderont comme un droit rigoureux, comme l’objet d’un mandat spécial. Il leur est enjoint expressément de ne consentir à aucun subside, à aucun emprunt, que la déclaration des droits de la nation ne soit passée en lois, et que les bases premières de la constitution ne soient convenues et assurées. Ce premier devoir rempli, ils procéderont à la vérification de la dette publique et à sa consolidation. Ils demanderont que tout objet d’un intérêt majeur soit mis deux fois en délibération, à des intervalles proportionnés à l’importance des questions , et ne puisse être décidé que par la pluralité absolue des voix, c’est-à-dire par plus de la moitié des suffrages. DÉCLARATION DES DROITS. Dans toute société politique, tous les hommes sont égaux en droits. Les droits de la nation seront établis et déclarés d’après les principes qui suivent : Tout pouvoir émane de la nation, et ne peut être exercé que pour son bonheur. La volonté générale fait la loi ; la force publique en assure l’exécution. La nation peut seule concéder le subside; elle a le droit d’en déterminer la quotité, d’en limiter la durée, d’en faire la répartition, d’en assigner (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. 282 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. ] remploi, d’en demander le compte, d’en exiger la publication. Les lois n’existent que pour garantir à chaque citoyen la propriété de ses biens et la sûreté de sa personne. Toute propriété est inviolable. Nul citoyen ne peut être arrêté ni puni que par un jugement légal. Nul citoyen, même militaire, ne peut être destitué sans un jugement. Tout citoyen a le droit d’être admis à tous les emplois, possessions et dignités. La liberté naturelle, civile, religieuse de chaque homme ; sa sûreté personnelle, son indépendance absolue de toute autre autorité que celle'de laloi, excluent toute recherche sur ses opinions, ses discours, ses écrits, ses actions, en tant qu’ils ne troublent pas l’ordre public et ne blessent pas les droits d’autrui. En conséquence de la déclaration des droits de la nation, nos représentants demanderont expressément l’abolition de la servitude personnelle, sans aucune indemnité ; de la servitude réelle, en indemnisant les propriétaires ; de la milice forcée ; de toutes commissions extraordinaires ; de la violation de la foi publique dans les lettres confiées à la poste ; et de tous privilèges exclusifs, si ce n’est pour les inventeurs, à qui ils ne seront accordés que pour un temps déterminé. Par une suite de ces principes, la liberté de la presse doit être accordée , sous la condition que les auteurs signeront leurs manuscrits ; que l’imprimeur en répondra, et que l’un ou l’autre seront responsables des suites de la publicité. La déclaration de ces droits naturels, civils et politiques, telle qu’elle sera arrêtée dans les Etats généraux, deviendra la charte nationale et la base du gouvernement français. CONSTITUTION. Dans la monarchie française, la puissance législative appartient à la nation, conjointement avec le Roi ; au Roi seul appartient la puissance exécutrice. Nul impôt ne peut être établi que par la nation. Les Etats généraux seront périodiques de trois ans en trois ans, sans préjudice des tenues extraordinaires. Ils ne se sépareront jamais sans avoir indiqué le jour, le lieu de leur prochaine tenue, et l’époque de leurs assemblées élémentaires qui doivent procéder à de nouvelles élections. Au jour fixé, ces assemblées se formeront sans autre convocation. Toute personne qui sera convaincue d’avoir fait quelque acte tendant à empêcher la tenue des Etats généraux sera déclarée traître à la patrie, coupable dû crime de lèse-nation, et puniecomme telle par le tribunal qu’établiront les Etats généraux actuels. L’ordre et la forme de la convocation et de la représentation nationale seront fixés par une loi. En attendant l’uniou si désirable des citoyens de toutes les classes en une représentation et délibération commune et générale, les citoyens du tiers-état auront au moins la moitié des représentants. Il ne sera nommé dans l’intervalle des Etats généraux, aucune commission revêtue de pouvoirs quelconques, mais seulement des bureaux de recherche et d’instruction, sans autorité, même provisoire, pour se procurer des renseignements utiles, et préparer le travail des Etats généraux subséquents. Nos représentants appuieront là de' mande de la colonie de Saint-Domingue , d’être admise aux Etats généraux ; ils demanderont que les députés des autres colonies soient également admis, comme étant composées de nos lrères, et comme devant participer à tous les avantages de la constitution fraçaise. Dans l’intervalle* des tenues d’Etats généraux, il ne pourra être fait que des règlements provisoires pour l’exécution de ce qui aura été arrêté dans les précédents Etats généraux, et ces règle-ments ne pourront être érigés en lois que dans les Etats généraux subséquents. La personne du monarque est sacrée et inviolable. La succession au trône est héréditaire dans la race régnante, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, à l’exclusion des femmes ou de leurs descendants, tant mâles que femelles, et ne peut échoir qu’à un prince né Français en légitime mariage et régnicole. A chaque renouvellement de règne, les députés aux derniers Etats généraux se rassembleront de droit et sans autre convocation . La régence, dans tous les cas, ne pourra être conféré que par eux. Les Etats généraux actuels décideront à qui appartiendra par provision, et jusqu’à la tenue des Etats généraux, l’exercice de la régence, dans tous les cas où il pourra y avoir lieu de la conférer. A chaque renouvellement de règne, le Roi prêtera à la nation et la nation au Roi, un serment, dont la formule sera fixée par les Etats généraux actuels. Aucun citoyen ne pourra être arrêté, ni son domicile violé, en vertu des lettres de cachet, ou de tout autre ordre émané du pouvoir exécutif, à peine, contre toutes personnes qui les auraient sollicitées, contresignés, exécutés, d’être poursuivies extraordinairement et punies de peine corporelle, sans préjudice des dommages et intérêts, pour lesquels elles seront solidaires envers les parties. Les mêmes peines auront lieu contre quiconque aura sollicité, accordé ou exécuté des arrêts du propre mouvement. Les ministres, ordonnateurs en chef de tous les départements, seront responsables, envers la nation assemblée en Etats généraux, de toute malversation, abus de pouvoir, et mauvais emploi de fonds. Tout le royaume sera divisé en assemblées provinciales, formées de membresde la province librement élus dans toutes les classes, et d’après la proportion qui sera réglée. L’administration publique, en tout ce qui concerne la répartition, la perception des impôts, l’agriculture, le commerce, les manufactures, les communications, les divers genres d’améliorations, l’instruction, les mœurs, sera confiée aux assemblées provinciales. Les villes, les bourgs et villages auront des municipalités électives, auxquelles appartiendra pareillement l’administration de leurs intérêts locaux. Les assemblées provinciales et les municipalités ne pourront ni accorder des subsides, ni faire des emprunts. Tous les membres qui les composeront, seront pareillement responsables de toute délibération qu’ils auraient prise à cet égard. Le pouvoir judiciaire doit être exercé en France, au nom du Roi, par des tribunaux composés de membres absolument indépendants de tout acte du pouvoir exécutif. Tout changement dans l’ordre et l’organisation [États gén. 1789.€ahiers.1 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] $S83 des tribunaux ne peut appartenir qu’à la puissance législative. Les nobles pourront, sans dérogeance, faire le commerce et embrasser toutes les professions utiles. Il n’y aura plus aucun anoblissement, soit par charge, soit autrement. Il sera établi par les Etats généraux une récompense honorable et civique, purement personnelle et non héréditaire, laquelle, sur leur présentation, sera déférée, sans distinction, par le Roi, aux citoyens de toutes les classes qui l’auront méritée par l’éminence de leurs vertus patriotiques, et par l’importance de leurs services. Les lois formées dans les Etats généraux seront sans délai inscrites sur les registres des cours supérieures et de tous les autres tribunaux du royaume; comme aussi sur les registres des assemblées provinciales et municipales, et elles seront publiées et exécutées dans tout le royaume. La constitution qui sera faite dans les Etats généraux actuels d’après les principes que nous venons d’exposer, sera la propriété de la nation, et ne pourra être changée ou modifiée que par le pouvoir constitutif; c’est-à-dire, par la nation elle-même, ou par ses représentants, qui seront nommés ad hoc par l’universalité des citoyens, uniquement pour travailler au complément et au perfectionnement de cette constitution. La charte de la constitution sera gravée sur un monument public, élevé à cet effet. La lecture en sera faite en présence du Roi, à son avènement au trône ; sera suivie de son serment, et la copie insérée dans le procès verbal de la prestation de ce serment. Tous les dépositaires du pouvoir exécutif, soit civil, soit militaire ; les magistrats des tribunaux supérieurs et inférieurs ; les officiers de toutes les municipalités du royaume, avant d’entrer dans l’exercice des fonctions qui leur seront confiées, jureront l’observation de la Charte nationale. Chaque année, et au jour anniversaire de sa sanction , elle sera lue et publiée dans les églises, dans les tribunaux, dans les écoles, à la tête de chaque corps militaire et sur les vaisseaux*; et ce jour sera un jour de fête solennelle dans tous les pays de la domination française. FINANCES. Art. 1er. Tous les impôts qui se perçoivent actuellement seront déclarés nuis et illégaux; et cependant, par le même acte, ils seront provisoirement rétablis, pour ne durer que jusqu’au jour qui aura été fixé par les Etats généraux pour leur cessation, et pour le commencement de la perception des subsides qu’ils auront librement établis. Art. 2. La dette du Roi sera vérifiée ; et après l’examen, consolidée et déclarée dette nationale ; et pour faciliter son acquit et en diminuer le poids, il sera arrêté que la nation rentrera dans les domaines engagés, vendus ou inféodés depuis 1566. A l’égard, des échanges, les Etats généraux ordonneront la révision de ceux qui ne sont pas revêtus de toutes les formalités légales, pour prendre ensuite le parti qu’ils jugeront le plus avantageux à la nation sur ces échanges. Art. 3. Les domaines seront déclarés inaliénables par le Roi seul, même pars la voie de l’échange et par celle de l’engagement. Art. 4. Les domaines seront déclarés aliénables par la nation avec le Roi ; et seront aliénés selon la forme de la manière, et dans les temps qui seront déterminés par les Etats généraux, sans que le produit des ventes puisse être employé à autre chose qu’à la diminution de ;la dette nationale. Art. 5. En procédant à la rentrée dans les domaines, les Etats généraux veilleront à ce qu’on respecte le droit et l’ancienne possession relativement aux petits domaines ; et qu’il ne puisse être formé aucune demande en rentrée, à l’égard des détenteurs quelconques, qu’au tant qu’il sera préalablement prouvé que l’objet est véritablement domanial. Art. 6. Les habitants de la capitale déclarent renoncer expressément à leurs privilèges soit sur les droits d’entrée des productions de leurs terres, soit sur les terrains de leurs habitations et jardins d’agrément et de leur exploitation. Art. 7. Toute imposition distinctive quelconque, soit réelle ou personnelle, telle que taille, franc-fief, capitation, milice, corvée, logement des gens de guerre, et autres, sera supprimée, et remplacée, suivant le besoin, en impôts généraux, supportés également par les citoyens de toutes les classes. Art. 8. Les traites ne seront perçues qu’à l’entrée du royaume, où les barrières seront reculées. Art. 9. Tous les droits de contrôle, centième denier, insinuations tant ecclésiastiques que laïques, sur les successions et conventions ; droits de 3 ou 4 deniers pour livre sur les ventes mobilières, seront supprimés le plus tôt possible : et cependant leur tarif sera modéré, éclairci , et rendu précis, de manière à éviter les contestations que ces droits occasionnent journellement. Les abus, vexations et vieilles recherches qui en résultent, seront réprimés dès à présent, sans préjudice des moyens de police utiles à assurer la date, l’authenticité et la publicité des actes. Art. 10. Les Etats généraux s’occuperont essentiellement de la suppression des impôts désastreux des aides et gabelles, et des moyens de les remplacer. Us s’occuperont de la suppression de la ferme du tabac, et du remplacement en un autre impôt. Art. 11. Les Etats généraux, dans le remplacement des impôts , s’occuperont principalement d’impositions directes, qui porteront sur tous les citoyens, sur toutes les provinces, et dont la perception sera la plus simple et la moins dispendieuse. Art. 12. Après que les Etats généraux auront déterminé la forme des subsides qu’ils voudront concéder, ils les partageront en deux classes : l’une affectée au payement des intérêts et des remboursements de la dette devenue nationale ; l’autre à l’acquit des dépenses des différents départements. Art. 13. Il sera ordonné que les. subsides de la première classe suivront, et pour leur durée et pour leur quotité, le sort de la dette nationale. Art. 14. Il sera établi deux caisses, l’une nationale, dans laquelle tous les subsides destinés au payement de la dette consolidée seront directement versés et employés irrévoccablement au payement de l’arrérage et aux remboursements; et cette caise sera, sous la main de l’administration, de la nature, de la manière qui seront réglées par les Etats généraux; Et l’autre caisse également nationale, sera destinée à recevoir le recouvrement des subsides qui doivent être employés aux dépenses des différents départements, après qu’elles auront été fixées par les Etats généraux, et aux dépenses personnelles du Roi, que Sa Majesté aéra suppliée de régler; et auxquelles les Etats généraux doivent, suivant le vœu des peuples, qjautor tout ce 284 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] que l’amour du Roi pour ses sujets aurait pu eu retrancher. Art. 15. Les administrateurs des deux caisses, nommés par la nation, compteront, tant en recettes effectives qu’en dépenses réelles, à la nation. Art. 16. Il sera avisé aux moyens de simplifier les formes et de diminuer les frais de toute comptabilité, et de rendre plus prompte la reddition et l’apurement des comptes de tous les comptables. Art. 17. Pour consacrer à jamais le principe fondamental qu’aucun subside ni aucun emprunt ne pourra désormais avoir lieu sans la concession libre et expresse de la nation, tout titre d’ancien emprunt comme d’ancien - impôt sera totalement anéanti et remplacé par un nouveau titre d'emprunt consolidé de 1789, emprunt créé , impôt consolidé et impôt créé , etc. Art. 18. La nation s’imposera elle-même la loi de ne faire désormais aucun emprunt, sans y destiner et hypothéquer spécialement un fonds", tant pour les intérêts que pour l’amortissement ; et il est à souhaiter même qu’il lui soit possible de s’occuper dès à présent de l’amortissement des dettes anciennes. Art. 19. Toutes les pensions qui seront reconnues n’avoir pas une juste cause, seront supprimées. Celles qui seront jugées excessives seront modérées. 11 n’en sera jamais accordé qu’à une seule époque de l’année ; on en publiera l’état, et en marge on y joindra les noms de ceux qui les auront obtenus, et les motifs qui les auront fait accorder. Art. 20. On publiera également chaque année les comptes de chaque département , ainsi que celui des finances, afin que le jugement et la censure de l’opinion publique puissent en précéder et en éclairer l’examen. AGRICULTURE. Art. 1er. L’agriculture est le premier des arts et le principe de toutes les richesses. Il s’agit de lui rendre tout ce dont elle a été privée, et de faire cesser les abus qui s’opposent à ses progrès. Art. 2. Les Etats généraux sont spécialement et instamment invités par l’assemblée, à prendre, le plus tôt qu’il sera possible, en considération la cherté actuelle des grains; à en rechercher attentivement la cause et les aufeurs, et à s’occuper des moyens d’y remédier efficacement et pour toujours. Art. 3. Les Etats généraux prendront en considération les moyens d’assurer la propriété des communaux, et d’en améliorer le produit. Les terres vaines et vagues, situées ou dans l’étendue des seigneuries du domaine, ou dans les seigneuries particulières , seront incessamment concédées aux conditions qui seront déterminées. A l’égard des concessions déjà faites, même sans aucune espèce de formalités de la part des gens de main-morte , en ce compris l’ordre de Malte, elles seront confirmées. Art. 4. Les Etats généraux prendront en considération le dessèchement des marais. Art. 5. Les Etats généraux prendront en considération les moyens d’opérer la destruction des pigeons, qui sont le fléau de l’agriculture. Art. 6. Tout propriétaire aura le droit d’enclore son héritage, d’y cultiver tous les végétaux qu’il jugera à propos, et d’y fouiller toutes les mines et carrières qui s’y trouveront. Art. 7. Les capitaineries s’étendent sur quatre cents lieues carrées, et peut-être plus : elles sont un fléau continuel de l’agriculture ; la liberté, la propriété y sont dégradées et anéanties ; les bêtes y sont préférées aux hommes, et la force y contrarie sans cesse les bienfaits de la nature. Les députés seront spécialement chargés de demander la totale abolition des capitaineries : elles sont, dans leur établissement, tellement en opposition à tout principe de morale, qu’elles ne peuvent être tolérées sous prétexte d’adoucissement dans leur régime. Art. 8. Il est de droit naturel que tout propriétaire puisse détruire sur son héritage le gibier et les auimauxqui peuvent être nuisibles. A l’égard du droit de chasse, et des moyens qu’on peut employer, soit pour la suppression, soit pour la conservation de ce droit, en supprimant les abus d’une manière facile, Rassemblée s’en rapporte à la sagesse des Etats généraux. Art. 9. Les rentes foncières en argent seront remboursables au denier vingtminq.. Le droit de champart et les rentes foncières en nature seront remboursables ainsi et de la manière qu’il sera avisé aux Etats généraux. Les Etats généraux seront priés de prendre en considérations les banalités. Art. 10. Les Etats généraux prendront en considération s’il convient que les communautés d’habitants soient autorisées ou non pour plaider. Art. 11. Les Etats généraux détermineront la largeur qu’il convient de donner aux grandes routes, pour enlever à la culture le moins de terrain possible. Art. 12. La corvée en nature sera définitivement supprimée, ne sera jamais rétablie, et sera convertie en une prestation pécuniaire, également supportée, sans aucune distinction , par les citoyens de toutes les classes. Art. 13. Les règlements concernant la plantation des arbres le long des routes et grands chemins, continueront d’être exécutés, à la charge néanmoins que quand le propriétaire n’aura pas planté, il pourra rentrer dans la propriété des arbres plantés, en remboursant ceux qui auront fait les frais de plantation et d’éducation de ces arbres. Art. 14. Les droits établis sur les échanges des héritages seront supprimés. Art. 15. Les droits de minage seront supprimés, sauf à rembourser, s’il y a lieu, ceux qui pourraient être fondés en titre constitutif. Art. 16. Les Etats généraux prendront en considération le droit de parcours et celui de vaine pâture, pour déterminer s’ils doivent être supprimés ou conservés. Art. 17. Le Gode des eaux et forêts sera revu et réformé, et entre autres objets, sur la défense de faire écorce, défense qui intéresse si essentiellement le commerce important de la tannerie ; ensemble sur l’administration et le repeuplement des forêts des gens de mainmorte. Art. 18. Suppression absolue des haras royaux et privilégiés; la liberté et encouragement "aux haras particuliers, et aux personnes qui amélioreront les différentes espèces d’animaux utiles à l’économie rurale et domestique. Art. 19. Tous les baux faits par les titulaires des bénéfices, même de ceux de l’ordre de Malte, seront nécessairement faits par adjudication, sur affiches, publication et enchères ; et les baux ainsi faits sans anticipation ne pourront être résiliés par la mort ou par la démission du bénéficier. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 285 Art. 20. Plusieurs bénéficiers mettent les revenus de leurs bénéfices en fermes générales, et les fermiers généraux pressent et oppriment les cultivateurs. IL sera défendu de faire de semblables baux : l’humanité, l’avantage de l’agriculture qui languit par l’épuisement qu’éprouvent les fermiers particuliers avec lesquels traitent les fermiers généraux, exigent que cette précaution soit établie. Art. 21.11 sera avisé par les Etats généraux, s’il ne serait pas nécessaire de déclarer que la loi Emptorem ne doit point être suivie, pour que les tiers acquéreurs ne puissent évincer ni les fermiers, ni les locataires, quels qu’ils puissent être, et que la loi Æde , qui fonde le droit connu sous le nom de Droit bourgeois, doit être également abrogée. Art. 22. Tout propriétaire aura la liberté de faire des baux aussi longs que bon lui semblera, sans être assujetti à aucune prohibition ni à aucuns droits. Art. 23. Il y aura exemption de tous droits et contributions pour les marais desséchés et pour les bois nouvellement plantés, pendant vingt ans; et pour les terres défrichées, pendant quinze ans. COMMERCE. Le commerce n’a plus besoin d’éloges; ses avantages sont connus, et il fait aujourd’hui un des objets les plus essentiels de la politique des Etats; il ne demande donc que liberté et secours. Art. 1er. Les différents traités de commerce faits entre la France et les puissances étrangères seront examinés par les Etats généraux, pour en connaître et balancer les résultats relativement à la France ; il ne pourra en être conclu aucun à l’avenir, sans que le projet en ait été communiqué à toutes les chambres de commerce du royaume, et aux Etats généraux. Xrt. 2. Il sera établi dans les principales villes une chambre de commerce, composée de vingt négociants, marchands, fabricants, artistes-mécaniciens, artisans des plus recommandables, au secrétariat de laquelle seront déposés toutes les lois, règlements, statuts et tarifs de France et de l’étranger, concernant le commerce, ou qui pourront l’intéresser. Art. 3. On affranchira les marchandises nationales, exportées à l’étranger, de tous droits de sortie, et on assujettira les marchandises provenant des fabriques étrangères , à un droit d’entrée dans le royaume, relatif à leur nature et à leur valeur (1). Art. 4. On défendra la sortie hors le royaume des matières premières propres à nos manufactures; et on exemptera de droit les matières premières propres à nos manufactures, venant de l’étranger. Art. 5. 11 sera pris les précautions les plus sages pour prévenir le prix excessif des grains, et leur exploitation sera soumise à l’examen le plus approfondi des Etats généraux et des assemblées provinciales. • Art. 6. On demandera qu’il soit accordé des primes aux marchandises de nos fabriques, qui seront exportées chez l’étranger. Art. 7. La disette de bois exige que l’exploita-(1) Si le roi et son auguste compagne ne faisaient usage que des étoffes de nos manufactures, leur exemple serait bientôt suivi par la nation, et rendrait à nos fabriques languissantes toute leur activité. tion des mines de tourbe et de charbon de terre soit encouragée. Art. 8. On proposera aux Etats généraux de déterminer s’il convient, pour le plus grand avantage du commerce, de se conformer rigoureusement aux règlements faits pour les manufactures, ou d’en modifier les dispositions, ou enfin d’accorder aux fabricants une liberté indéfinie. Art. 9. Et dans le cas où cette liberté ne serait pas accordée, les inspecteurs et sous-inspecteurs des manufactures seront choisis par les chambres de commerce, à la pluralité des voix ; et ils seront tenus d’y faire le rapport de leurs visites toutes les fois qu’ils en seront requis. Art. 10. Tous les droits de péage, pontonage et autres de cette nature, seront, dès à présent, supprimés provisoirement, sauf à rembourser les propriétaires fondés en titres constitutifs. Art. 1 1. Les droits d’octrois des villes, tant qu’ils subsisteront, ne pourront être perçus sur les marchandises en passe-debout, et ne pourront l’être que sur les objets de consommation des villes. Art. 12. L’impôt appelé droit de marque sur les cuirs, en détruisant’ en France les tanneries et le commerce des cuirs, nous force d’en tirer de l’étranger; il est nécessaire de supprimer cet impôt, ainsi que celui de la marque sur les fers. Art. 13. Les amidonniers et mégissiers seront affranchis de toutes visites, en s’abonnant, suivant leurs offres, pour les droits qui subsisteront encore, et dont ils pourront être tenus. Art. 14. Toute espèce de commerce sera interdit aux communautés religieuses. Art. 15. Les droits excessifs de contrôle sur les ouvrages d’or et d’argent, comme essentiellement nuisibles à cette branche de commerce, seront modérés; et ceux qui auront été payés pour des marchandises de cette espèce exportées, seront restitués. Art. 16. Aucune refonte des monnaies, ni aucuns changements dans le titre et dans la valeur ne pourront être faits sans le consentement des Etats généraux. Art. 17. On établira dans tout le royaume l’uniformité des poids et mesures. Art. 18. On restituera aux veuves des marchands et artisans le droit qu’elles avaient avant l’édit de 1776, de continuer le commerce et la profession de leur mari, sans payer une nouvelle réception. Art. 19. Les marchands exclus des charges et emplois, pour n’avoir pas payé le droit de confirmation établi par le même édit, pourront à l’avenir être admis auxdites charges. Art. 20. Les apprentissages seront rétablis, comme le seul moyen de fournir au commerce des sujets doués des connaissances qu’il exige. Art. 21. On demandera la suppression de l’impôt sur le papier, comme très-préjudiciable au commerce de librairie du royaume, et provoquant la contre-façon chez l’étranger. Art. 22. Les propriétés anciennes des auteurs seront conservées-, et les arrêts de 1777 seront supprimés. Art. 23. Si les droits sur les toiles et mousselines subsistent, iis seront diminués. JURIDICTION CONSULAIRE ET ORJETS Y RELATIFS. Art. 1er. L’ordonnance de 1673 sera entièrement refondue, et il sera fait un code général pour le commerce. Art. 2. La juridiction consulaire sera, à l’avenir, composée d’un juge choisi dans les anciens con- 286 [États gén. 178& Êàhiehs.] ARCHIVE® PARLEMENTAIRES. [Paris, infra muros.] suis, et de six consuls ehoisis parmi les négociants, fabricants, artistes, mécaniciens et artisans. Art. 3. Les causes consulaires portées par appel au parlement seront jugées sommairement à une audience particulière et publique, où les parties pourront être entendues par elles-mêmes. Art. 4. Il serait aussi utile que juste de donner aux juges consuls le droit de juger en dernier ressort jusqu'à 1,000 livres, au lieu de 500 livres, qui leur a été accordé en 1563. Art. 5. Les juges consuls connaîtront, quant au civil seulement, des faillites et banqueroutes entre marchands, négociants, banquiers et gens d’affaire. En conséquence, il sera procédé devant eux aux vérifications et affirmations des créances, homologations des délibérations, traités et contrats des faillis, et à la contribution des deniers mo-biiiaires, encore qu’il y eût des créanciers non marchands ; et ce nonobstant toutes attributions particulières. Art. 6. Les banqueroutiers frauduleux seront poursuivis à la requête du ministère public ; et après qu’ils auront été déclarés tels, ils seront inscrits sur un tableau placé à cet effet dans la salle d’audience des juridictions consulaires. Art. 7. Pour mettre un frein aux banqueroutiers frauduleux qui s’enrichissent par des faillites réitérées, leurs créanciers pourront, nonobstant les remises qu’ils auraient faites, avoir action sur les biens acquis par les faillis, ou qui leur seraient échus postérieurement à leur faillite. Art. 8. Le privilège des asiles de sûreté, notamment les enclos du Temple, de Saint-Jean-de-Latran et de tous autres qui servent de refuge aux débiteurs faillis et banqueroutiers, sera supprimé. Art. 9. Les juges-consuls nommeront parmi eux, ou parmi les anciens consuls, cinq commissaires pour examiner la situation active et passive des débiteurs faillis, auxquels il ne pourra être accordé aucun répit que par les tribunaux ordinaires, et seulement sur le certificat motivé desdits commissaires, sans que ledit répit puisse donner la mainlevée des biens, qui demeureront toujours sous la main des créanciers. Art. 10. Les sentences des consuls seront affranchies des droits de scel, contrôle de dépens et autres droits bursaux, si ces droits subsistent. Art. 11. Il ne sera accordé aucuns arrêts de défense contre les sentences des consuls rendues au souverain, si ce n’est dans le cas où Pincompé-tence sera évidente. • Art. 12. A l’égard des sentences rendues et sujettes à l’appel, l’exécution provisoire n’en pourra avoir lieu qu’à la charge de donner une bonne, valable et solvable caution. Art. 13. Il pourra néanmoins être accordé arrêt de défense contre l’exécution desdites sentences, mais seulement à l’audience du tribunal d’appel. Art. 14. Les lettres de change tirées, acceptées ou endossées par les mineurs non commerçants ou artisans, pourront être déclarées nulles , à leur égard seulement, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision. Art. 15. Les sentences des juges et consuls seront rédigées sur les défenses et moyens sommaires des parties, portés au plumitif, sans pouvoir y insérer aucuns plaidoyers et mémoires par écrit!, et ne seront point grossoyées. Art; 16. Lorsqu’il aura été prononcé une sentence de séparation entre mari et femme négociants, les meubles et effets ne pourront être vendu� qu’après que le procès-verbal de saisie-exécution, fait à la requête de la femme séparée, aura été affiehé à la juridiction consulaire, et y sera demeuré affiché pendant quinzaine. Le jour de la vente sera indiqué dans l’affiche. Art. 17. Les jours de grâce pour tous les billets et lettres de change seront uniformes dans tout le royaume. Art. 18. Aucun marchand ne pourra vendre son fonds de commerce que quinze jours après en avoir fait et signé sa déclaration au greffe des consuls; laquelle déclaration sera inscrite sur un tableau exposé à cet effet dans la salle d’audience. Art. 19- Toutes sociétés entre marchands et autres justiciables des consuls seront enregistrées au greffe sans qu’il soit besoin de les faire contrôler. Art. 20. La contrainte par corps ne pourra avoir lieu au-dessous de 100 livres. Art. 21. Si les Etats généraux croient devoir laisser subsister le mont-de-piété, dont les avantages sembleraient devoir répondre à son titre, il est au moins très-important d’employer des moyens capables de détruire les abus qui en sont résultés. RELIGION. Clergé , hôpitaux, éducation et mœurs . Art. 1er. La religion, nécessaire à l’homme, l’instruit dans son enfance, réprime ses passions dans tous les âges de la vie, le soutient dans l’adversité, le console dans la vieillesse. Elle doit être considérée dans ses rapports avec le gouvernement qui l’a reçue, et avec la personne qui la professe. Ses ministres, comme membres de l’Etat, sont sujets aux lois ; comme possesseurs de biens, sont tenus de partager toutes les charges publiques ; comme attachés spécialement au culte divin, doivent l’exemple et la leçon de toutes les vertus. Art. 2. La religion est reçue librement dans l’Etat, sans porter aucune atteinte à sa constitution. Elle s’établit par la persuasion, jamais par la contrainte. Art. 3. La religion chrétienne ordonne la tolérance civile. Tout citoyen doit jouir de la liberté particulière de sa conscience ; l’ordre public ne souffre qu’une religion dominante. Art. 4. La religion catholique est la religion dominante en France : elle n’y a été reçue que suivant la pureté de ses maximes primitives; c’est* le fondement des libertés de l’Eglise gallicane. Art. 5. Afin de prévenir toute altération de ces libertés, qu’il ne soit permis à aucun ecclésiastique français d’accepter des dignités et bénéfices dans des Eglises ou des cours étrangères ; ni aux= ecclésiastiques étrangers d’en posséder en France. Art. 6. Que l’article 2 de l’ordonnance d’Orléans, qui défend tout transport de deniers à Rome, sous couleur d'annates, vacants ou autrement , soit exécuté selon sa forme et teneur. Art. 7. Que les dispenses ne soient accordées que par les ordinaires, en connaissance de cause et gratuitement. Art. 8. La juridiction ecclésiastique ne s’étend, en aucune manière, sur le temporel ; son exercice extérieur est réglé par les lois de l’Etat. Art. 9. Nos pères ayant toujours désiré le maintien ou le rétablissement des élections aux pré-latures, comme le plus sûr moyen d’avoir dès ministres savants et vertueux, il sera pris des mesures pour faire revivre cette discipline' primitive de l’Eglise. Art. 10. Que, conformément à l’article-lar de-l’ordonnance d'Orléans, il ne soit, dès à1 pTéâëiif, nommé aux archevêchés et évêchés* que dès [Etats gén. 1789. Cahiers. [ ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [PM$, întra dHfrWvJ-mf ecclésiastiques âgés de trente ans au moins, ayant. exercé les fonctions du ministère au moins pendant cinq années, dans un autre état que celui de grand vicaire. Art. 11. Pour rendre libre l’entrée dans le ministère ecclésiastique et dans les universités, toute adhésion à des formules introduites depuis l’ordonnance d’Orléans sera supprimée. Qu’il soit pris des précautions pour s’assurer des vocation et capacité de ceux qui seront présentés à l’état ecclésiastique. Art. 12. Que l’article 5 de l’ordonnance d’Orléans, sur la nécessité de la résidence des archevêques, évêques; abbés séculiers et réguliers et curés, soit observé; et qu’ils n’en soient jamais dispensés, même pour service à la cour, dans les conseils du Roi, mais seulement pour l’assistance aux conciles. Art. 13. Qu’à défaut de résidence desdits prélats et curés, leurs revenus soient acquis aux hôpitaux du diocèse , et les adninistrateurs d’iceux tenus d’en poursuivre la délivrance, à peine d’en répondre en leur propre et privé nom. Art. 14. Que les chanoines soient pareillement tenus à résidence dans leurs églises, et sous les mêmes peines. Art. 15. Que nul ecclésiastique, pourvu de bénéfices ou jouissant de pensions sur iceux, produisant 3,U00 livres de revenu, ne puisse tenir aucun autre bénéfice ou pension. Art. 16. Ne pourront lesdits ecclésiastiques s’occuper d’emplois ou trafics peu convenables à leur état; et seront tenus de garder dans leurs habits et conduite la décence nécessaire pour se concilier le respect des peuples. Art 17. Les vœux de religion qui seront faits à l’avenir ne lieront point les religieux et religieuses au monastère, et ne feront perdre aucun des droits civils. Ne pourront lesdits religieux et religieuses disposer de leurs biens, mobiliers ou immobiliers, en faveur desdits monastères. Art. 18. Les dispositions de l’édit de 1768, sur la conventualité, seront exécutées même dans les monastères de filles. Les chefs de maisons religieuses seront tenus de rendre compte aux assemblées provinciales des travaux utiles auxquels ils s’occupent pour le bien de l’Eglise et de l’Etat. Art. 19. Les couvents de religieux et religieuses mendiants, jugés nécessaires, seront dotés par l’union de quelques bénéfices, et la mendicité sera généralement interdite. Art. 20. Il sera avisé, par les Etats généraux, aux moyens de pourvoir à ce que les curés des campagnes aient au moins 1,200 livres de revenu daus les pays les plus pauvres ; les vicaires, 600 livres ; que les curés des villes, ainsi que les vicaires qui leur seront nécessaires, soient suffisamment dotés; et l’article 15 de l’ordonnance d’Orléans observé en ce qui concerne la suppression de tout casuel exigible. Art. 21. Que l’article 22 de l’édit de 1695 soit abrogé; en conséquence, les reconstructions et réparations des nefs d’églises, presbytères, cimetières, ainsi que les fournitures et entretien d’ornements, livres et vases sacrés, soient à la charge des revenus ecclésiastiques. . Art. 22. Qu’il soit pourvu, tant par la destination d’un certain nombre de canonicats, que par la création et établissement de pensions, à l’assurance d’une retraite pour les ecclésiastiques qui auront vieilli dans les travaux du ministère, et qui n’auront ni bénéfice simple ou pension, ni patrimoine suffisant Art. 23. Entre les moyens de pourvoir à l’exécution des articles précédents, les Etats généraux prendront en considération ceux qui suivent : que les évêques soient tenus de procéder sans aucun délai, les formes de droit gardées, d’abord à la suppression et union de bénéfices tenus en commende ; ensuite de bénéfices simples ; de menses conventuelles de monastères reconnus inutiles ; d’églises collégiales ; même de bénéfices de nomination royale. En attendant l’effet desdites suppressions, tous les revenus des abbayes étant actuellement aux économats, seront employés’ auxdits objets, sans qu’ils puissent être détournés à autre destination ; et en cas d’insuffisance, la moitié des revenus des abbayes de nomination royale qui deviendront vacantes sera employée aux mêmes objets. Art. 24. Qu’il soit avisé à la réformation dé l’article 11 de l’édit de 1695, de manière que les curés demeurent libres de choisir leurs coopéra-teurs, et que les peuples ne soient pas privés arbitrairement de ministres auxquels ils auraient donné leur confiance. Art. 25. L’article 34 de l’édit de 1695 sera réformé, en ce qu’il attribue aux juges ecélésias-tiques la connaissance des causes matrimoniales1. Art. 26. Que les fêtes soient réduites ou remises au dimanche; que, conformément aux règlements, il soit sévèrement défendu de travailler publiquement et extérieurement le dimanche, si ce n’est dans le temps des récoltes, et dans les nécessités publiques. Art. 27. Les administrateurs des hôpitaux seront renouvelés par moitié tous les trois ans et choisis par les communes de la ville où se trouvent ces hôpitaux. Ils seront responsables envers ces communes , sous la surveillance des assemblées municipales, et supérieurement des assemblées provinciales. Art. 28. Que les dépôts de mendicité soient abolis et des ateliers publics ouverts, dans lesquels les personnes de tout âge, de tout sexe, valides ou invalides, puissent trouver dans tous les temps, et surtout pendant l’hiver, une occupation convenable à leur état et à leur situation : à l’égard des personnes connues et domiciliées, le chef des ateliers leur fournira des ouvrages de nature à les occuper dans leur maison ; le tout sous l’inspection des assemblées provinciales et municipales. Art. 29. Les Etats généraux seront priés d’aviser à la réforme et à l’amélioration des études publiques. Art. 30. Les écoles particulières établies dans les séminaires seront ouvertes au* public et soumises à la surveillance des juges des lieux ; sinon elles sont interdites, et les bourses fondées dans lesdits séminaires, transférées dans l’université la plus prochaine. Art. 31. Il sera établi dans chaque paroisse ayant plus de cent feux, un maître et une maîtresse d’école, pour donner des leçons gratuites à tous les enfants de l’un et de l’autre sexe, et une Sœur de Charité pour soigner les malades. Art. 32. Ajoutant à l’article 25 de l’édit de 1695 , il sera ordonné que, lors de l’examen pour la réception ou renvoi desdits maîtres et maîtresses d’écoles, seront appelés le syndic et quatre notables de la paroisse, même deux curés voisins, au choix desdits maîtres et maîtresses, s’ils le requièrent, le tout sous l’inspection des assemblées provinciales et municipales. Art. 33. Les fonds pour te payement desdits maîtres1 et maîtreses d’école et Sœurs 'de Gfiw- 2gg [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. rite, approvisionnement de livres et papiers pour l’école, fournitures gratuites de médicaments pour les pauvres, seront pris par addition sur les fonds destinés aux réparations des églises et presbytères. Art. 34. Toutes les maisons de jeux et les loteries seront supprimées comme contraires aux bonnes mœurs, et funestes à toutes les classes de la société. Art. 35. Les règlements contre les banquiers des loteries étrangères seront exécutés, et les mises seront confisquées. Art. 36. Les Etats généraux prendront en considération les moyens d’opérer la réforme et la restauration des mœurs. Art. 37. 11 est expressément défendu, sous la loi de l’honneur, à tout député des Etats généraux, d'accepter, soit pendant leur tenue, soit dans les trois années qui suivent, aucunes grâces, gratifications et pensions pour eux ou pour leurs enfants. LÉGISLATION. Art. 1er. L’objet des lois est d’assurer la liberté et la propriété. Leur perfection est d’être humaines et justes, claires et générales; d’être assortis aux mœurs et au caractère national; de protéger également les citoyens de toutes les classes et de tous les ordres, et de frapper, sans distinction de personnes, sur quiconque viole l’ordre public ou les droits des individus. Art. 2. Un assemblage informe de lois romaines et de coutumes barbares, de règlements et d’ordonnances sans rapport avec nos mœurs, comme sans unité de principes, conçus dans des temps d’ignorance et de trouble, pour des circonstances et un ordre de choses qui n’existent plus, ne peut former une législation digne d'une grande nation éclairée de toutes les lumières que le génie, la raison et l’expérience ont répandues sur tous les objets. Art. 3. 11 sera donc proposé aux Etats généraux d’établir un ou plusieurs comités, composés de magistrats, de jurisconsultes et de citoyens éclairés, choisis dans les différentes classes de la nation, lesquels s’occuperont de refondre toutes les lois anciennes et nouvelles, civiles et criminelles, et de former, autant qu’il sera possible, une loi universelle, qui embrasse toutes les matières et gouverne toutes les propriétés et toutes les personnes soumises à la domination française. Les Etats généraux recommanderont surtout à ces comités, de travailler d’abord à la réformation et à la simplification de la procédure civile et criminelle. Art. 4. Les plans arrêtés par ces différents comités seraient présentés aux prochains Etats généraux, pour y être examinés et recevoir la sanction légale. Art. 5. Et cependant, sans attendre la fin d’un travail qui sera nécessairement très-long, les Etats généraux s’occuperont, dès à présent, de la suppression des commissions du conseil, de celle des commissaires départis, deschambres ardentes, et successivement de tous les tribunaux d’exception, dont les fonctions reviendront aux tribunaux ordinaires. En matière civile. Art. 6. 11 leur sera pareillement proposé de s’occuper, dès à présent, des articles suivauts : 1° Il sera choisi, par les habitants, dans des arrondissements de cinq ou six bourgs ou villages, un certain nombre de notables, honorés de la confiance publique, lesquels jugeront sur-le-champ, sans frais et sans appel, les contestations journalières qui s’élèvent dans les campagnes à l’occasion des rixes, des petits vols de fruits, des dommages faits aux arbres et aux récoltes, du glanage, des anticipations et des entreprises des laboureurs sur les héritages voisins, et toutes les causes qui n’excéderont pas 25 livres. Les notables pourront juger, sans appel, toutes les autres contestations où les deux parties consentiront de s’en rapporter à leur arbitrage. 2° Les rapports des instances et procès ne pourront se faire qu’en présence des parties et de leurs défenseurs. 3° Les juges, même ceux des cours supérieures, seront tenus d’opiner à voix haute, soit dans les audiences, soit au rapport, et de motiver chacune des dispositions essentielles de leurs jugements. 4° Les épices et vacations seront supprimées, sauf à pourvoir aux honoraires des juges, et l’arrêt du conseil, qui commande aux juges de se taxer des épices à peine d’amende, sera révoqué. 5° Dans tout contrat de prêt, il sera permis aux parties de stipuler l’intérêt de l’argent au taux fixé par la loi, même sans aucune retenue des impositions royales. 6° Les arrêts de défense ne pourront être accordés qu’à l’audience. 7° Dans les matières de cassation, le conseil du Roi ne pourra jamais prononcer sur le fond des contestations, notamment dans celles où le Roi sera intéressé; mais il sera tenu de renvoyer le jugement au tribunal le plus prochain, de la même nature que celui dont l’arrêt ou jugement aura été anéanti. 8° 11 sera formé une caisse publique où l’on versera les dépôts judiciaires, même ceux des consignations, et le produit des baux judiciaires; et on prendra les moyens convenables pour leur faire produire des intérêts au profit des ayants droit. En matière criminelle. 1° Aucun citoyen domicilé ne pourra être arrêté ni même obligé de comparaître devant aucun magistrat, sans un décret émané du juge compétent; excepté dans le cas où il aurait été pris en flagrant délit, ou arrêté à la clameur publique par les gardes chargés de veiller à la sûreté et à la tranquillité publique ; et, dans ce cas, le citoyen arrêté sera mené sur-le-champ, et dans les vingt-cmatre heures au plus tard, devant le tribunal compétent, qui décernera un décret, s’il y a lieu, pour le constituer prisonnier. On le renverra, s’il n’y a aucune preuve de délit. 2° Nul citoyen ne pourra être décrété de prise de corps que pour un délit qui emporte peine corporelle. 3° Tout accusé aura, même avant le premier interrogatoire, le droit de se choisir des conseils; et dans le cas où il ne serait pas en état de s’en choisir lui-même, il lui en sera donné un par le juge, avec la liberté de l’accepter ou de le refuser. 4° Le serment exigé des accusés étant évidemment contraire au sentiment naturel qui attache l’homme à sa propre conservation, n’est qu’une violence faite à la nature humaine, inutile pour découvrir la vérité, et propre seulement à affaiblir l’horreur du parjure. La raison et l’intérêt des mœurs exigent donc que ce serment soit supprimé. 5° La publicité des procédures criminelles ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 289 [Éta(9gén, 1789. Cahiers.] établie autrefois en France, et en usage, dans tous les temps, chez presque toutes les nations éclairées, sera rétablie, et l’on fera désormais l’instruction portes ouvertes et l’audience tenant. 6° En matière criminelle, le jugement du fait sera loujours séparé du jugement du droit. L’institution des jurés pour le jugement du fait paraissant la plus favorable à la sûreté personnelle et à la liberté publique, les Etats généraux chercheront par quels moyens on pourrait adapter cette institution à notre législation. 7° Tous les tribunaux, sans distinction, seront tenus d’énoncer dans les arrêts et sentences de condamnation, sous peine de nullité, la nature du délit et les chefs de l’accusation, d’indiquer les preuves sur lesquelles ils auront prononcé leur jugement, et de citer le texte de la loi qui prononce la peine. 8° Tout accusé dont le crime n’est pas prouvé aux yeux de la loi, étant présumé innocent, la formule de hors de cour sera supprimée, et l’accusé sera al�sous des chefs d’accusation sur lesquels il n’y aura pas de preuve complète et légale. 9° La législation, en établissant des peines contre le coupable qui aura violé la loi, doit aussi établir une réparation pour l’innocence injustement accusée. Ainsi tout accusé déchargé des accusations intentées contre lui pourra réclamer la publication et l’afliche du jugement, et des indemnités proportionnées au dommage qu’il aura souffert dans son honneur, sa santé ou sa fortune. Cette indemnité sera prise sur les biens des dénonciateurs ou accusateurs, et subsidiairement sur des fonds publics assignés pour cet objet. 10° La confiscation n’aura plus lieu ; les biens du condamné passeront aux héritiers, les frais et les dommages et intérêts préalablement pris sur iceux. 1 1° La modération des lois pénales caractérise la douceur des mœurs et la liberté des gouvernements. L’observation a prouvé que l’extrême sévérité des peines a des effets directement contraires au but même de la loi; qu’elle tend à endurcir les âmes, et à rendre les mœurs cruelles, en familiarisant l’imagination avec des spectacles atroces ; qu’elle diminue l’horreur du crime, et en favorise souvent l’impunité, en excitant la compassion en faveur du criminel. Il sera dqnc fait une loi pour supprimer toute torture préalable à l’exécution et tout supplice qui ajoute à la perle de la vie des souffrances cruelles et prolongées. 12° La peine de mort sera réduite au plus petit nombre de cas possible, et réservée aux crimes les plus atroces. 13° Les coupables du même crime, de quelque classe qu’ils soient, subiront la même peine. 14° Les prisons, dans l’intention de la loi, étant destinées non à punir les prisonniers, mais à s’assurer de leur personne, on supprimera partout les cachots souterrains; on s’occupera des moyens de rendre l’intérieur des autres prisons plus salubres, et on veillera à l’exécution des règlements relatifs à la police et aux mœurs des prisonniers. Il sera établi des ateliers de travail dans les maisons de réclusion, ainsi que dans toutes les prisons où cet établissement ne nuira point à la sûreté. 15° Toute partie, en matière civile, aura de droit la liberté de plaider sa cause elle-même; en matière criminelle, chaque citoyen pourra se charger de plaider la cause de l’accusé. 16° L’usage de la sellette sera aboli. lre Série, T. Y. [Paris, intra ronros.] 17° Les Etats généraux prendront en considération le sort des esclaves noirs, ou hommes de couleur, tant dans les colonies qu’en France. MUNICIPALITÉ. La ville de Paris, à raison de son étendue et de sa population, de son commerce et de son industrie, des deux excès de luxe et de détresse dont elle est le mélange, de sa richesse et de ses besoins multipliés et renaissants, du soin pénible et assidu de pourvoir à sa subsistance, est, sans comparaison, celle des villes du royaume qui exige l’administration la plus active et la plus vigilante, la plus sagement organisée et la mkeux concertée dans tous ses mouvements. Art. 1er. En conséquence, le tiers-état demande pour la ville de Paris une administration composée de membres librement élus pap fous les citoyens, et renouvelés tous les trois ans; formée à l’instar des assemblées provinciales, chargée des mêmes fonctions, et ayant les mêmes rapports avec les Etats généraux, laquelle administration fera, suivant le régime qu’elle établira, les fonctions du corps municipal, et aura la gestion des propriétés de la ville. Art. 2. Toutes les charges du corps de ville actuel seront supprimées et remboursées sur le pied des dernières ventes, comme l’ont été celles de la maison du Roi. Art. 3. Il ne sera plus nécessaire d’être né à Paris pour être éligible et admis dans P Assemblée de Paris. Art. 4. L’assemblée de Paris mettra au nombre de ses premiers et de ses plus importants travaux, de s’occuper des hôpitaux de Paris. Art. 5. Et en attendant, les comptes de tous les hôpitaux, tant en recette qu’en dépense, seront rendus publics tous les ans par la voie de l’impression. Art. 6. Quand quelqu’un aura été blessé, on le transportera dans le lieu le plus prochain, où il pourra recevoir des secours et où l’officier public se transportera. Art. 7. L’assemblée de Paris s'occupera de l’administration du bureau des nourrices et de l’éducation et de la conservation des enfants trouvés. Art. 8. Il sera ouvert des asiles décents aux jeunes personnes honnêtes, mais infortunées, que presse l’indigence et que le vice peut tenter. Art. 9. On donnera une attention particulière aux établissements destinés à recevoir les vieillards honnêtes et indigents. Art. 10. L’assemblée de Paris fera faire, tous les mois, la visite des prisons, pour s’assurer de l’état des prisons, du sort des prisonniers, et de l’exécution des règlements. Art. 11. L’assemblée du tiers-état de Paris renonce au privilège des bourgeois, relativement à la compétence exclusive du prévôt de Paris; ainsi qu’au privilège attribué au scel du châtelet et au droit de suite ; et elle demande qu’en supprimant tous les privilèges de toute espèce existants dans le royaume, ceux-ci ne seront point exceptés. Art. 12. Les administrations provinciales, et particulièrement l’administration de Paris, examineront avec attention s’il convient dé maintenir, réformer ou supprimer les corporations et jurandes. Il sera pareillement renvoyé à l’assemblée de Paris l’examen de la question s’il convient de maintenir, réformer ou supprimer les privilèges des maisons du Roi et des princes, et ceux des corportions. Art. 13. Que dans les halles on supprime le 49 290 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. droit de plaçage, et en général tout impôt sur i les marchés ; et que, pour s’y établir, le marchand n’ait besoin que du consentement de l’officier public. Art. 14. Qu’on démolisse la prison des galériens our réunir le port de la Tournelle à celui de la aile aux vins. Art. 15. Que l’on pèse avec le plus grand soin les intérêts et les droits des habitants du faubourg Saint-Marcel, relativement au projet de détourner la rivière de Bièvre pour la réunir à l’Yvette. Art. 16. Que tous privilèges pour les voitures publiques soient supprimés, et que les carrosses de remise et de place ne soient plus assujettis à aucune rétribution. Art. 17. Que les lois relatives à la falsification des vins et autres liqueurs potables, soient rigoureusement exécutées. Art. 18. Que l’on ne puisse déposséder, sans payement préalable et due estimation, aucun propriétaire des maisons et places à lui appartenantes qui seront prises pour l’utilité et l'embellissement de la ville. Art. 19. Que file Saint-Louis soit jointe à celle de la Cité, par un terre-plein, ou par un pont sur lequel les voitures puissent passer. Art. 20. Que les quais soient continués d’une extrémité de Paris à l’autre, en conservant et en établissant les ports nécessaires. Art. 21. Qu’il soit construit une gare, si nécessaire au commerce et à la navigation, et qu’il soit appliqué à son établissement l’impôt perçu par la ville, depuis vingt ans, sous le nom de droit de gare. Art. 22. L’assemblée de Paris examinera s’il ne serait pas avantageux que les cimetières, les tueries, les fonderies de suif, et toutes les fabriques qui réunissent un grand amas de matières combustibles, fussent éloignées et isolées hors des barrières de Paris, et qu’il en fût de même de tous les ateliers dont les émanations peuvent être pernicieuses. Art. 23. Que la caisse des marchés de Sceaux et de Poissy soit supprimée. Art. 24. Que l’imposition pour le logement des geus de guerre soit supprimée, et que les casernes soient acquises par la ville de Paris. Art. 25. Que les droits d’entrée des marchandises de toute espèce arrivantes à Paris, ne puissent être perçus qu’à raison de leur poids et mesure au moment de la perception. Art. 26. En supprimant à l’entrée de Paris les droits imposés par l’édit d’août 1781, sur les sucres et cafés, en y substituant un droit de 20 sous seulement par quintal à l’entrée du royaume, on parviendrait à détruire la contrebande sur cet objet, et il en résulterait un grand avantage pour le produit de l’impôt. Art. 27. Qu’en attendant leur suppression totale, on diminue les droits excessifs aux entrées de Paris sur les vins et eaux-de-vie, attendu qu’ils provoquent la contrebande, également onéreuse au commerce et nuisible au produit de l’impôt. Art. 28. Que néanmoins il soit pris des mesures, lors de la suppression ou modération des droits aux entrées de Paris, pour donner le temps de consommer les vins et eaux-de-vie qui y seraient alors emmagasinés. Art. 29. Que jusqu’à la suppression des droits d’entrée, les vins, eaux-de-vie et autres espèces de marchandises destinées pour l'approvisionnement de Paris, puissent être emmagasinées hors ses barrières sans payer aucun droit, à la charge cependant de justifier de leur entrée à Paris. Art. 30. Que si les aides subsistent, on fasse cesser l’arbitraire du droit de gros qui se perçoit sur les vins destinés pour les environs de Paris, et qu’on en fixe la perception d’après le prix commun du lieu du cru. Art. 31. Que les droits que la ville de Paris perçoit sur les vins et eaux-de-vie, sous la dénomination de déchargeurs-rouleurs, jurés-vendeurs, officiers-metteurs à port, soient supprimés, parce que la ville ne gage plus ces sortes d’ouvriers, dont les salaires sont payés à l’arrivée par les consommateurs, et que de cette perception il résulte un double emploi. Art. 32. Qu’on supprime pareillement l’impôt perçu par la ville, sous le titre de controleurs-jaugeurs , officiers qui ne subsistent plus. Art. 33. Que les droits d’entrée à Paris pour la portion affectée aux hôpitaux et aux dépenses de la ville, soient convertis en une imposition plus simple et d’une perception plus facile. Art. 34. L’assemblée de Paris s’occupera des moyens de remettre en activité les règlements qui jusqu’ici ont été inutiles pour réprimer le scandale de la prostitution publique. Art. 35. Que les collèges soient distribués également dans tous les quartiers de Paris, pour y répandre et faciliter l’instruction. Art. 36. Qu’il soit construit un pont vis-à-vis l’arsenal et qile les murs qui enferment la ville soient abattus; que les bâtiments qui sont aux portes soient employés à des objets utiles, en en supprimant les emblèmes de la fiscalité. Art. 37. Les Etats généraux prendront en considération les moyens d’étendre l’utilité de la bibliothèque du Roi, et de procurer au public la liberté d’y entrer tous les jours, matin et soir. Art. 38. 11 sera représenté aux Etats généraux l’avantage d’établir un dépôt public, où sera consigné un double du répertoire que les notaires sont obligés de tenir de tous les actes qui se passent devant eux. Art. 39. L’assemblée de Paris s’occupera des moyens de préserver les maisons de la partie septentrionale, des eaux qui inondent les caves. Art. 40. Que les Etats généraux s’assemblent désormais à Paris, dans un édifice public destiné à cet usage. Que sur le frontispice il soit écrit : Palais des Etats généraux , et que sur le sol de la Bastille détruite et rasée, on établisse une place publique, au milieu de laquelle s’élèvera une colonne d’une architecture noble et simple, avec cette inscription : a Louis XVI, restaurateur de la liberté publique. Signé Target, président élu librement; Camus, second président élu librement ; Bailly, secrétaire élu librement ; Guillotin, second secrétaire élu librement. ( Suivent plusieurs signatures des commissaires.) CAHIER PARTICULIER DE LA VILLE DE PARIS (1). Déclaration préliminaire du corps municipal. Le corps municipal, après avoir déclaré, par scs protestations et réserves du 17 avril dernier, qu’il n‘a point entendu déroger ni préjudicier au droit (1) Nous publions ce cahier, d’après un imprimé delà Bibliothèque du Corps législatif. 290 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. droit de plaçage, et en général tout impôt sur i les marchés ; et que, pour s’y établir, le marchand n’ait besoin que du consentement de l’officier public. Art. 14. Qu’on démolisse la prison des galériens our réunir le port de la Tournelle à celui de la aile aux vins. Art. 15. Que l’on pèse avec le plus grand soin les intérêts et les droits des habitants du faubourg Saint-Marcel, relativement au projet de détourner la rivière de Bièvre pour la réunir à l’Yvette. Art. 16. Que tous privilèges pour les voitures publiques soient supprimés, et que les carrosses de remise et de place ne soient plus assujettis à aucune rétribution. Art. 17. Que les lois relatives à la falsification des vins et autres liqueurs potables, soient rigoureusement exécutées. Art. 18. Que l’on ne puisse déposséder, sans payement préalable et due estimation, aucun propriétaire des maisons et places à lui appartenantes qui seront prises pour l’utilité et l'embellissement de la ville. Art. 19. Que file Saint-Louis soit jointe à celle de la Cité, par un terre-plein, ou par un pont sur lequel les voitures puissent passer. Art. 20. Que les quais soient continués d’une extrémité de Paris à l’autre, en conservant et en établissant les ports nécessaires. Art. 21. Qu’il soit construit une gare, si nécessaire au commerce et à la navigation, et qu’il soit appliqué à son établissement l’impôt perçu par la ville, depuis vingt ans, sous le nom de droit de gare. Art. 22. L’assemblée de Paris examinera s’il ne serait pas avantageux que les cimetières, les tueries, les fonderies de suif, et toutes les fabriques qui réunissent un grand amas de matières combustibles, fussent éloignées et isolées hors des barrières de Paris, et qu’il en fût de même de tous les ateliers dont les émanations peuvent être pernicieuses. Art. 23. Que la caisse des marchés de Sceaux et de Poissy soit supprimée. Art. 24. Que l’imposition pour le logement des geus de guerre soit supprimée, et que les casernes soient acquises par la ville de Paris. Art. 25. Que les droits d’entrée des marchandises de toute espèce arrivantes à Paris, ne puissent être perçus qu’à raison de leur poids et mesure au moment de la perception. Art. 26. En supprimant à l’entrée de Paris les droits imposés par l’édit d’août 1781, sur les sucres et cafés, en y substituant un droit de 20 sous seulement par quintal à l’entrée du royaume, on parviendrait à détruire la contrebande sur cet objet, et il en résulterait un grand avantage pour le produit de l’impôt. Art. 27. Qu’en attendant leur suppression totale, on diminue les droits excessifs aux entrées de Paris sur les vins et eaux-de-vie, attendu qu’ils provoquent la contrebande, également onéreuse au commerce et nuisible au produit de l’impôt. Art. 28. Que néanmoins il soit pris des mesures, lors de la suppression ou modération des droits aux entrées de Paris, pour donner le temps de consommer les vins et eaux-de-vie qui y seraient alors emmagasinés. Art. 29. Que jusqu’à la suppression des droits d’entrée, les vins, eaux-de-vie et autres espèces de marchandises destinées pour l'approvisionnement de Paris, puissent être emmagasinées hors ses barrières sans payer aucun droit, à la charge cependant de justifier de leur entrée à Paris. Art. 30. Que si les aides subsistent, on fasse cesser l’arbitraire du droit de gros qui se perçoit sur les vins destinés pour les environs de Paris, et qu’on en fixe la perception d’après le prix commun du lieu du cru. Art. 31. Que les droits que la ville de Paris perçoit sur les vins et eaux-de-vie, sous la dénomination de déchargeurs-rouleurs, jurés-vendeurs, officiers-metteurs à port, soient supprimés, parce que la ville ne gage plus ces sortes d’ouvriers, dont les salaires sont payés à l’arrivée par les consommateurs, et que de cette perception il résulte un double emploi. Art. 32. Qu’on supprime pareillement l’impôt perçu par la ville, sous le titre de controleurs-jaugeurs , officiers qui ne subsistent plus. Art. 33. Que les droits d’entrée à Paris pour la portion affectée aux hôpitaux et aux dépenses de la ville, soient convertis en une imposition plus simple et d’une perception plus facile. Art. 34. L’assemblée de Paris s’occupera des moyens de remettre en activité les règlements qui jusqu’ici ont été inutiles pour réprimer le scandale de la prostitution publique. Art. 35. Que les collèges soient distribués également dans tous les quartiers de Paris, pour y répandre et faciliter l’instruction. Art. 36. Qu’il soit construit un pont vis-à-vis l’arsenal et qile les murs qui enferment la ville soient abattus; que les bâtiments qui sont aux portes soient employés à des objets utiles, en en supprimant les emblèmes de la fiscalité. Art. 37. Les Etats généraux prendront en considération les moyens d’étendre l’utilité de la bibliothèque du Roi, et de procurer au public la liberté d’y entrer tous les jours, matin et soir. Art. 38. 11 sera représenté aux Etats généraux l’avantage d’établir un dépôt public, où sera consigné un double du répertoire que les notaires sont obligés de tenir de tous les actes qui se passent devant eux. Art. 39. L’assemblée de Paris s’occupera des moyens de préserver les maisons de la partie septentrionale, des eaux qui inondent les caves. Art. 40. Que les Etats généraux s’assemblent désormais à Paris, dans un édifice public destiné à cet usage. Que sur le frontispice il soit écrit : Palais des Etats généraux , et que sur le sol de la Bastille détruite et rasée, on établisse une place publique, au milieu de laquelle s’élèvera une colonne d’une architecture noble et simple, avec cette inscription : a Louis XVI, restaurateur de la liberté publique. Signé Target, président élu librement; Camus, second président élu librement ; Bailly, secrétaire élu librement ; Guillotin, second secrétaire élu librement. ( Suivent plusieurs signatures des commissaires.) CAHIER PARTICULIER DE LA VILLE DE PARIS (1). Déclaration préliminaire du corps municipal. Le corps municipal, après avoir déclaré, par scs protestations et réserves du 17 avril dernier, qu’il n‘a point entendu déroger ni préjudicier au droit (1) Nous publions ce cahier, d’après un imprimé delà Bibliothèque du Corps législatif. 291 [États gén. 1789. Cahiers.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] et à la possession de convoquer, exclusivement à tous autres, tous les habitants, nuis exceptés, de la capitale et de ses faubourgs , et que la seule considération de son respect pour le Roi, et de l’ouverture prochaine des Etats généraux, à laquelle le bien public était évidemment attaché, a déterminé son acquiescement provisoire au règlement du 28 mars précédent, demande à être réintégré dans la plénitude de ses droits et possession, pour la convocation aux prochains Etats généraux de tous lesdits habitants compris sous la dénomination de commune. Art. 1er. On se fait un devoir d’adresser aux Etats généraux les vœux les plus ardents pour que la subsistance des habitants de la ville de Paris soit assurée dans tous les temps. On désire aussi que les Etats généraux portent leur prévoyance sur la vente des bestiaux ; qu’ils prennent connaissance du régime de la caisse de Poissy, et balancent, dans leur sagesse, si une diminution dans les intérêts exigés pour la sûreté des avances faites au commerce, ne procurerait pas une modération sur le prix de la viande. Art. 2. Un objet d’approvisionnement de première nécessité pour la capitale, est celui des bois et charbons, dont la consommation, année commune, est d’environ 700,000 voies par chaque espèce. L’épuisement sensible des forêts à ce destinées, et la crainte de ne pouvoir subvenir par la suite à des besoins aussi considérables, imposent l’obligation d’étendre le cercle de l’approvisionnement, par la construction de nouveaux canaux. Il n’est pas moins important d’user, sans retard, de la ressource économique déjà proposée par le bureau de la ville, de défendre l’usage du bois à tous entrepreneurs d’établissements à fourneaux ou chaudières. L’exemple de l’Angleterre, de la Hollande et même de la Flandre, où l’on n’y emploie que du charbon de terre, suffit pour autoriser une pareille défense, et les Etats généraux sontpriés de vouloir bien donner à cet objet essentiel toute l’attention qu’il mérite. Art. 3. L’importation des bois et charbons, dout la surveillance est spécialement confiée au bureau de la ville, ne pouvant se faire en général que par eau, il est dès lors indispensable d’entretenir et d’assurer la navigation. Elle est aujourd’hui presque impraticable sur la Seine, la Marne et les rivières affluentes, à raison des atterrissements qui s’y forment et du mauvais état des pertuis et des écluses destinés à suppléer, en temps de sécheresse, à l’insuffisance des eaux. Le commerce qui, jusqu’à présent, a été seul tenu de ces sortes de réparations, est dans l’impuissance aujourd’hui d’en supporter la dépense excessive. 11 est de la justice des Etats généraux de prendre cet objet en considération, d’après les projets, plans et mémoires que le corps municipal mettra sous leurs yeux, et de faire annuellement affecter des fonds proportionnés à ces dépenses. Art. 4. Le défaut d'exécution de l’arrêt du conseil du 13 octobre 1787, concernant l’emprunt, par voie de loterie, de 12 millions, dont le dixième était consacré à la construction de quatre hôpitaux, excite les justes représentations du corps municipal. C’était dans la confiance qu’il demeurerait dépositaire et responsable des fonds, que le public a apporté à la caisse du domaine les deniers qu’il a bien voulu sacrifier à cette destination. Le gouvernement alors a néanmoins exigé le versement de ces fonds au trésor royal, et quoique le remboursement en eût été fixé au plus tard à l’époque du mois de décembre dernier, et qu’aux termes de l’article 6 dudit arrêt, le trésorier de la ville eût dû l’effectuer en deniers comptants, les porteurs des billets gagnants sont encore dans l’attente de leur payement, et il résulte de ce retard que les propriétaires des lots éprouvent un préjudice notable ; que la destination des 1 ,200,000 livres ne s’effectue point, et que la considération et le crédit de la ville sont également compromis. Art. 5. La nécessité de construire cesquatre nouveaux hôpitaux a été vivement sentie, et par le gouvernement, qui y avait destiné le dixième dudit emprunt de 12 millions, et par le public, qui s’est empressé de contribuer à ce grand œuvre, par des soumissions considérables et par des sommes en argent, dont la caisse du domaine de la ville est dépositaire. La construction de ces hôpitaux n’est point encore commencée; une multitude de citoyens malheureux devient chaque jour la victime de ce funeste délai et se plaint, à juste titre, de l’oubli d’un engagement aussi sacré. Le corps municipal manquerait à son devoir s’il ne fixait sur ce point l’attention des Etats généraux. Art. 6. Il en est de même de l’inexécution de l’édit de septembre 1786, concernant l’emprunt des 30 millions destinés à l’embellissement de la capitale. Cette loi, registrée au parlement, ordonnait qu’à compter de 1786, il serait annuellement remis à la caisse du domaine de la ville une somme de 3 millions, pour la dépense des travaux et l’acquittement des indemnités dues aux propriétaires des maisons démolies. La disproportion qui existe entre les fonds remis et ceux solennellement promis, a réduit la ville à l’impuissance d’effectuer les remboursements exigibles, et provoque les justes réclamations desdits propriétaires. Art. 7. Tous les ordres des citoyens se réunissent pour adresser aux Etats généraux les plus vives réclamations contre les abus de la loterie royale de France, évidemment nuisible à la fortune des sujets du Roi, et particulièrement à la portion la plus indigente, qui en suit les chances avec l’aveuglement le plus funeste. Les Etats généraux sont priés d’en obtenir la suppression, aussitôt qu’il résultera de l’amélioration des finances l’heureuse possibilité de renoncer aux bénéfices de cette loterie ; et dans ce cas il sera pourvu, par les précautions les plus sûres, à l’inconvénient de la sortie du numéraire pour les loteries étrangères. Art. 8. Le cloaque qui s’est formé au tournant de la rue de Charenton, et de celle de Reuilly, sur les routes de Champagne et de Lyon, et qui se prolonge jusqu’à la barrière des Poules, mérite l’attention la plus sérieuse et les soins les plus instants de l’administration qui en est chargée. Ce cloaque s’accroît et se creuse chaque jour par le poids énorme des voitures ; ces eaux stagnantes occasionnent, en été, des exhalaisons qui se répandent au loin, et il en résulte dans l’hiver un amas de glaces également dangereux pour les gens à pied et les chevaux. Il existe un autre cloaque de 5 arpents formé à la butte de Chaumont, par le dépôt de tout ce qu’on appelle la voirie. Lorsque, pour en diminuer le volume, on procure l’écoulemeut des q�ux par 292 (États gén. 4789. Cahiers;] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (Paris, intra mnros.] le moyen des vannes, elles se répandent dans un espace entouré de lusses, d’où elles se distribuent par infiltration et autrement, dans les terres voisines. On est persuadé que les personnes de l’art n’ont point été consultées sur cet établissement. On s’alarme des résultats et de tous les genres d’inconvénients d’un tel amas de principes pestilentiels aux portes de cette grande ville. Quoique cet objet ne soit plus, depuis 1666 ou 1667, du ressort de la municipalité , il est toujours de son devoir d’avertir l’autorité de la nécessité d’y remédier ; c’est ce qu’elle a déjà fait et ce qu’elle croit devoir répéter encore, « puisqu’on n’y a pourvu par aucunes mesures. » Art. 9. Les Etats généraux sont invités à donner une attention particulière à l’administration royale des eaux, vulgairement connue sous le nom des eaux Perrier. Un des inconvénients qui résultent de cet établissement, est la dégradation du pavé occasionnée par l’entretien continuel de tuyaux de bois dans presque toutes les rues de la capitale ; la lenteur qu’on apporte au rétablissement du pavé donne lieu à des accidents qui ne se répètent que trop souvent. On ne doit pas non plus passer sous silence les réclamations de propriétaires des maisons situées dans les quartiers du nord de la capitale, dont les caves sont inondées depuis près de deux ans. Elles ont déterminé, aux frais de la ville qui a bien voulu en faire le sacrifice par pur zèle, des visites et examens de la part de l’administration municipale et de plusieurs membres des académies. Les recherches n’ont point encore fixé une opinion certaine sur la cause de ces inondations ; mais le mal n’en exige pas moins un remède d’autant plus prompt , qu’indépendamment du préjudice qu’il cause aux propriétaires, par la privation des caves et le dépérissement des fondations, il donne lieu à des exhalaisons méphitiques, qui souvent deviennent, pour ceux qui les respirent, des causes de maladies très-graves. Art. 10. On ne saurait dissimuler plus longtemps les conséquences dangereuses auxquelles le dépôt et les ventes du mont-de-piété exposent les citoyens. Cet établissement, qui avait pour but, dans le principe, de procurer des secours peu dispendieux a la portion indigente des sujets du Roi, n’a pas rempli son objet, puisqu’il est notoire qu’il est infiniment onéreux au commerce et aux manufactures du royaume. L’intérêt déjà trop excessif de 10 p. 0/0 est encore aggravé par les frais accessoires. Les abus résultant de la faculté qu’on s’arroge, de diviser en différentes parties les objets déposés en pièces, et destinés à être vendus tels qu’ils ont été apportés , sont nuisibles au commerce, et augmentent, au préjudice des emprunteurs, les droits des officiers vendeurs. La facilité avec laquelle les commissionnaires, et le mont-de-piété lui-même, reçoivent des dépôts de toute nature, apportés par des gens suspects, occasionne des vols fréquents, et est contraire à toutes les ordonnances et règlements concernant les effets volés. Les banqueroutiers frauduleux trouvent également le moyen de soustraire en un instant àleurs créanciers le gage ou le dépôt des marchandises qui leur ont été confiées. Enfin l’obligation imposée aux propriétaires réclamants, de rembourser les avances faites sur les effets qu’on leur aura volés, est dans la loi une condition révoltante. Il est donc néeessaire de bien connaître le régime et 1 administration intérieure du mont-de-piété, et si on le laisse subsister, de le soumettre à toutes les réformes dont cet établissement peut être susceptible. Art. 1 1 . Les dépenses considérables faites pour la construction des quais et des ponts, n’ayant eu pour but que l’embellissement de la capitale, la communication la plus commode de ses habitants, et la plus nécessaire au commerce , il est presque impossible de jouir de ces avantages, à raison des boutiques ambulantes ou sédentaires qui obstruent et rétrécissent les passages ; de là les embarras des voitures etles accidents multipliés, dont les gens à pied ne sont que trop souvent les victimes. Il est de l’intérêt des citoyens, que le bureau de la ville soit exclusivement maintenu dans toute l’étendue de sa juridiction à cet égard. Art. 12. Les tueries placées dans l’intérieur de Paris exhalent une odeur infecte, corrompent l’air, surtout en été, et elles ont encore l’inconvénient d’exposer la vie des citoyens, soit à Par rivée des bestiaux, soit lorsque après avoir été frappé, l’animal en fureur s’échappe des tueries Les fonderies de suif ajoutent à l’infection le danger des incendies. 11 est donc nécessaire de les reléguer aux extrémités de Paris et dans des endroits isolés , où le public n’ait à craindre aucun des accidents ci-dessus indiqués. Il ne l’est pas moins de faire exécuter l’arrêt du parlement concernant les cimetières. Art. 13. Le projet du canal de l’Yvette et delà Bièvre a déjà occasionné une multitude de contestations ruineuses pour les citoyens ; il est destructif de l’usage des moulins et de manufactures, infiniment intéressantes; enfin, il porte atteinte à la propriété d’un grand nombre de gens de la campagne et aux usines du faubourg Saint-Marcel. La nécessité, d’accord avec la justice, exigent que ce projet, contre lequel trente paroisses de la vicomté de Paris ont fortement réclamé, et qui entraînerait d’ailleurs la ruine de tous les habitants, du faubourg Saint-Marcel, soit rejeté le plus tôt possible. Art. 14. La mendicité dans l’intérieur de la ville de Paris est toujours sensible ; les règlements jusqu’à ce jour ont eu peu d’effet ; les Etats généraux sont pénétrés sans doute de la nécessité d’y remédier, et pour les mettre à portée de s’en occuper avec succès , on se propose d’en indiquer les moyens dans un mémoire qui leur sera incessamment présenté. Art. 15. Le droit qui se lève sur les maisons des faubourgs, et même sur grand nombre de celles de l’intérieur de Paris, pour le logement des gens de guerre, s’est considérablement accru par les nouvelles constructions. Les Etats généraux regarderont sans doute comme digne de leur attention la perception d’un droit qui ne pèse que sur une portion des citoyens, et dont le produit réel peut excéder la somme des besoins. Art. 16. Il est de l’intérêt public que toutes les quittances des rentes qui se payent à l’hôtel de ville soient faites sur papier revêtu du même timbre ; la différence de ces quittances et l’augmentation du timbre porté à 12 livres 6 deniers pour les unes, et à 3 livres 9 deniers pour les autres, sont onéreuses et embarrassantes pour les rentiers et principalement pour les propriétaires des moindres parties. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 293 La simplification du payement des rentes et de la comptabilité exige qu’il n’y ait qu’un timbre pour toutes les quittances ; et les Ejtats généraux voteront sans doute pour le plus ancien, comme le moins à charge. Art. 17. 11 sera inutile de rien ajouter aux réflexions insérées dans différents cahiers, relativement aux plans d’une bonne éducation, si nécessaire pour former l’homme d’honneur, l’homme d’Etat et le citoyen, et on se borne à faire des vœux pour l’exécution la plus prompte des nouveaux règlements que l’importance de l’objet rend indispensables. Art. 18. La multiplicité des petits spectacles, leur prix modique , et la licence effrénée qui y règne, forment tout à la fois le scandale de la religion, la dépravation des mœurs, la décadence des lettres, des arts et du goût, entretient l’insubordination et la ruiûe des serviteurs et garçons ouvriers; tels sont les puissants motifs qui se réunissent pour leur suppression. Art. 19. L'exécution des édits et déclarations concernant les jeux, sera continuellement surveillée, et il ne sera admis aucune exception, aucune autorisation particulière qui tendraient à en anéantir ou modifier les sages dispositions. Art. 20. Le respect des mœurs publiques étant un moyen essentiel pour maintenir le bon ordre, et la sûreté des citoyens , il est intéressant de réprimer enfin la licence delà prostitution. 11 sera donc nécessaire de réunir, à des défenses précises, les mesures les plus capables d’en assurer l’exécution, pour qu’à l’avenir les prostituées ne puissent provoquer dans les rues, les places et les jardins, et pour écarter le danger de l’exemple. Art. 21. 11 est d’usage de rendre, chaque année, la liberté à un certain nombre de gens détenus dans la maison de Bicêtre ; on observe que plusieurs d’entre eux sont renvoyés sans le moindre secours; il paraît néanmoins indispensable de pourvoir à leurs premiers besoins, pour qu’ils ne soient pas tentés, à l’instant même de leur sortie, de repreudre leurs pernicieuses habitudes. Art. 22. Les endroits privilégiés, ou réputés tels, sont absolument contraires au régime d’une bonne police, ainsi qu’aux intérêts du commerce, et leur suppression semble indiquée comme nécessaire. Art. 23. On ne peut se dispenser de demander la suppression de tous les privilèges exclusifs, de quelque genre qu’ils soient, parce qu’ils détruisent l’émulation, l’avantage de la concurrence, et favorisent des prix arbitraires. On observe cependant qu’il sera juste d’excepter ceux dont l’objet serait de récompenser une découverte particulière, de conserver à l’auteur le fruit d’une invention utile, et dont le bénéfice néanmoins doit toujours être limité à quelques années seulement. Art. 24. Les ordonnances de 1415 et de 1672 forment les bases principales de la législation municipale de la ville de Paris. Elles ne comprennent pas toutes les parties de sa juridiction antérieure à ces mêmes ordonnances. Plusieurs de leurs dispositions sont abrogées ou tombées en désuétude. Depuis 1672 il est intervenu un grand nombre d’édits, déclarations , lettres patentes du Roi, arrêts de son conseil, arrêts du parlement, ordonnances du bureau de la ville, qui ont augmenté le fonds de sa législation, et réglé sa jurisprudence. On demande qu’il soit rédigé un nouveau code municipal qui ait pour but de perfectionner le régime, de faire connaître aux particuliers ce qu’ils sont tenus d’observer ou d’éviter ; que les principes des lois qui sont la sauvegarde des propriétés, de la sûreté et de la liberté des personnes, en dirigent toutes les dispositions; que celles des règlements précédents qui devront y entrer, et les nouvelles qu’il conviendra d’ajouter, v soient rapprochées, classées et distribuées dans leur ordre naturel; que la rédaction en soit claire et précise. Art. 25. L’origine de la constitution municipale remonte aux temps les plus reculés ; elle n’a éprouvé depuis d’autre changement que celui de la réunion du corps échevinal au corps des nautes. Il est évident, toutefois, que la ville de Paris n’est, sous aucun rapport, dans le moment présent, ce qu’elle était à l’époque qu’on rappelle, et l’on est en droit d’en conclure, que son antique constitution, très -convenable sans doute au temps de sa formation, semble aujourd’hui n’êtrepas organisée pour la plus désirable représentation delà commune actuelle. 11 paraît donc indispensable de s’occuper des modifications et réformes dont elle peut être susceptible, après en avoir préalablement calculé les effets et les conséquences. Art. 26. Tels sont les articles dont MM. les députés de Paris et officiers composant le corps municipal ont cru devoir arrêter, dès à présent , la rédaction , se réservant à l’avenir d’y en ajouter de nouveaux, de donner aux vues qui les ont dictés tous les développements dont elles sont susceptibles, et sans préjudice, au surplus, des mandats plus amples qui ont pu être donnés à aucuns des députés représentant la ville. Il a été, en outre, arrêté qu’il sera établi une correspondance entre la municipalité et MM. les députés, pendant le temps de la présente tenue, et que la municipalité s’occupera, dès à présent, de préparer tous les renseignements et mémoires nécessaires à MM. les députés, pour présenter aux Etats généraux, avec une parfaite connaissance et dans le plus grand détail, les abus de tous genres, contre lesquels il a été si longtemps difficile de réclamer, et les mesures qu’il est possible de prendre pour établir un meilleur ordre de choses. Fait et arrêté en la grande salle de l’hôtel de ville, le 14 juin 1789, par les députés de Paris aux Etats généraux, et les officiers composant le corps municipal. Signé De Flesselles ; Buffault ; Sageret ; Vergne; Rouen; Ethis de Corny; Veytard ; de Ghenïzot ; de Lamouche ; Henri ; Famin ; Agasse ; Giroust ; Santilly ; Chéret ; Du Parc ; Yanglenne ; Pluvinet de Gaux; Guyot; Hubert; Deyeux; Darnault; Moinerv; Rousseau; Bossu; Gallet de Souscar-rière ; Revil ; Bernier ; Etienne ; Honoré; Arnelin; Gibert-f Ant. El., archevêque de Paris; Guil-lotin ; Du Port ; Martineau ; Demeunier ; Le duc de La Rochefoucault; Le marquis de Montesquiou; Dumouchel; Le Pelletier de Saint-Fargeau; F. Che-vreux ; Bevière; Gros; B. Vignon; H. de Lusi-gnem ; Le Clerc ; Dosfant ; Berthereau ; Le Moine; Poignot ; Germain d’Oisan ville; Anson; Veytard, curé de Saint-Gervais ; abbé de Barmond ; A. de Bourge ; Garnier ; Tronohet ; Hutteau ; Dionis Du Séjour ; Treilhard ; le comte de Rochechouart. Du dimanche 7 juin 1789. Ce jour, nous, prévôt des marchands et éche-vins, avocat et procureur du Roi et de la ville, greffier en chef, conseillers et quarteniers composant ensemble le corps de ville, tous en habits noirs et en manteaux, nous sommes transportés, à quatre heures de relevée, en la grande salle de l’hôtel de ville, où étant, sont arrivés successive- 294 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra xnuros.] ment MM. les députés de la ville de Paris aux Etats généraux, lesquels se sont rendus de Versailles audit hôtel de ville, en conséquence de la lettre d’invitation, en date d’hier, écrite à chacun d’eux par le bureau de la ville, à l’effet de procéder en commun à la rédaction du cahier particulier d’icelle, conformément aux articles 10 et 11 du règlement fait par le Roi le 28 mars dernier. Mesdits sieurs les députés, après avoir monté le grand escalier de l’hôtel de ville, ont trouvé sous les armes les gardes sédentaires dudit hôtel, formant la haie sous le péristyle, à la tête desquels était 2e sieur May, capitaine commandant, qui a fait battre au champ toutes les fois que chacun de MM. les députés s’est présenté au passage; de ce péristyle ils ont été accompagnés par le major et l’aide-major jusqu’à la porte de la grande salle, à l’entrée de laquelle étaient deux huissiers chargés de les conduire et de leur indiquer le côté de ladite salle où ils devaient tous se réunir. Imôdiatement après l’arrivée de MM. les députés, au nombre de trente-quatre, au lieu de quarante, à cause de l’indisposition ou des affaires de six d’entre eux, ils ont occupé, sans distinction d’ordre, les places d’honneur qui leur avaient été réservées au haut de la salle, ayant tous la cheminée derrière eux, et n’étant séparés du corps municipal, placé du côté de la porte d’entrée, que par une table destinée au travail. L’ouverture de la séance a commencé par un discours de M. le prévôt des marchands, dont la teneur suit. « Messieurs, « Le spectacle imposant de la réunion so-« lennelle des trois ordres de la ville de « Paris au sein de leur hôtel commun, est dans ce « moment d’autant plus mémorable, qu’il est le « premier exemple de ce genre dont nous ayons « à nous féliciter, et que c’est un privilège parti ticulier que la justice et la bienfaisance du Roi « ont accordé à nos représentations en faveur de « la capitale du royaume. Son titre éminent, la « nature de ses intérêts, l’étendue de ses rap-« ports la rendaient digne sans doute de cette « distinction honorable. « Il vous appartient peut-être, Messieurs, de la « rendre encore une occasion et un modèle de « concorde et de patriotisme qui, dépouillant « chaque ordre de citoyens de son esprit indivi-« duel, les réunit et les confond tous un instant « pour le seul intérêt de la commune. « Nous sommes prêts à soumettre à vos lu-« mières, Messieurs, les matériaux que nous « avons rassemblés dans cet esprit. « C’est à vous d’en déterminer le choix, d’en « diriger l’emploi, et il vous appartiendra d’en « protéger le succès. « Il ne nous reste qu’à désirer que ces préli-« minaires vous soient une preuve de notre zèle « pour le bien commun, et de notre empresse - « ment à prévenir les vœux et les intentions de « la commune. « Cette circonstance nationale, en illustrant nos « fonctions, deviendra, par votre suffrage, le prix « le plus flatteur de nos travaux, et elle sera en-€ core l’aiguillon le plus pressant de notre ardeur « à continuer de mériter votre estime. » Monseigneur l’archevêque a répondu à M. le prévôt des marchands par les remercîments les plus obligeants pour le corps municipal; et, après l’avoir assuré, au nom de MM. les députés, de toutes leurs dispositions à la concorde et à la confiance, il a demandé qu’il fût donné communication du projet de cahier qui venait d’être annoncé. En conséquence, le greffier en chef, autorisé par mondit sieur le prévôt des marchands, s’est approché de la table, et a fait, debout, lecture dudit projet de cahier, qui s’est trouvé contenir vingt-trois articles. Toutes les dispositions en ont été généralement approuvées et jugées suffisantes par le plus grand nombre ; mais, sur la proposition qui a été faite par quelques députés de le signer sur-le-champ, deux autres opinions se sont alors établies. On a objecté que la lecture rapide d’un pareil travail ne permettant pas d’en bien saisir tous les rapports, il était indispensable de le soumettre à un examen préalable, et ces premiers délibérants ont conclu à ce qu’il fût nommé des commissaires pour faire cette vérification, et, sur leur rapport, être ensuite procédé ainsi qu’il appartiendrait. La dernière proposition a eu pour objet d’établir l’inutilité delà nomination aes commissaires, ainsi que celle de la signature du cahier, et d’indiquer, comme troisième moyen, le parti d’un procès-verbal de simple remise dudit cahier, lequel procès-verbal pourrait, en ce cas, et à l’instant même, être signé par les députés et rester déposé au greffe. Ces trois avis, discutés par MM. les députés seulement et sans aucune observation de notre part, ont été soutenus avec une telle égalité, du moins apparente, de suffrages, qu’il a fallu pour reconnaître, par la pluralité, celui auquel on devait s’attacher, avoir recours à l’appel des votants; les voix ont été, en conséquence, recueillies par MM. l’abbé de Barmond et Chevreux, qui d’eux-mêmes, et sans qu’il ait été besoin du choix préalable d’aucun scrutateur ou secrétaire, ont procédé à cette opération, et il a résulté du calcul des voix que le premier avis pour signer à l’instant a été rejeté, et que l’opinion en faveur des commissaires, a été adoptée, ce qui a dispensé de délibérer sur le troisième avis; en conséquence, MM. les députés ont nommé en ladite qualité de commissaires, d’un commun accord et sans la formalité d’un nouvel appel, MM. de Clermont-Tonnerre, Duport, abbé de Barmond, Martineau et Bevière; Lesquels commissaires sont convenus de se rendre dimanche prochain, à onze heures du matin, à l’hôtel de ville, pour y examiner avec le bureau et les huit commissaires du corps municipal, le projet de cahier dont il s’agit, 'et en rendre compte à MM. les députés dans une seconde assemblée générale, à l’effet de quoi celle-ci a été prorogée à dimanche prochain 14 de ce mois, quatre heures de relevée, et la clôture du présent procès-verbal différée pour n’en faire qu’un seul des dires exprimés et arrêtés pris dans les deux séances. f Antoine, El. arch. de Paris, Pour et au nom des députés. De Flesselles. Pour et au nom du corps municipal. Aujourd’hui, dimanche 14 juin 1789, quatre heures des relevée, MM. les députés de la ville de Paris aux Etats généraux, dont treize ont été retenus à Versailles pour des affaires indispensables, s’étant réunis au nombre de vingt-sept seulement, avec tous les officiers du corps municipal, en la grande salle de l’hôtel de ville, conformément à l’arrêté pris en l’assemblée de dimanche dernier, prorogée à ce jour, ainsi qu’il résulte du procès-verbal ci-dessus ; ils ont été reçus avec le même [Mats gen.1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 295 cérémonial, et de suite introduits en la grande salle, où ils ont occupé, toujours sans distinction d’ordre, les mêmes places qui avaient été disposées à cet effet, comme elles l’étaient en la dernière séance du 7 de ce mois, et alors M. l’abbé de Barmond, l’un des cinq commissaires nommés par mesdits sieurs les députés, à l’effet de procéder avec ceux du corps municipal à l’examen du projet de cahier par lui rédigé, a. pris la parole et a dit que toutes les dispositions de ce cahier avaient été lues avec attention dans la séance qui avait eu lieu le matin en ce même hôtel, et qu’il avait résulté du travail commun de légers retranchements au cahier et additions de quelques nouveaux articles, dont un entre autres a pour objet d’établir, entre MM. les députés et le corps municipal, une correspondance mutuelle et nécessaire au développement des vues et des moyens qui pourraient faciliter les décisions relatives aux demandes du cahier. M. l’abbé de Barmond a ajouté que MM. les commissaires, n’ayant aperçu la nécessité d’aucun autre changement dans les différents articles dudit cahier, estimaient qu’il devait être présentement signé, tant pcçr MM. les députés que par les officiers du corps municipal, sur quoi M. le prévôt des marchands ayant marqué le désir que toutes les dispositions en fussent préalablement rappelées à l’assemblée, le greffier en chef de la ville en a fait la lecture, après laquelle, un de MM. les députés a observé qu’il ne pouvait se dispenser de fixer l’attention des délibérations sur le premier article, où la protestation du corps municipal contre le règlement du 28 mars dernier se trouvait expressément motivée, ainsi que la demande qu’il formait à l’effet d’être reintégré dans l’exercice de son droit exclusif de convocation de tous les habitants de cette capitale et de ses faubourgs ; et il a dit que le conflit qui s’était élevé à cet égard entre la ville et le prévôt de Paris, devant être regardé comme une question encore indécise, il ne croyait pas que les députés, dans l’incertitude du droit des parties, dussent prendre par leurs signatures l’engagement d’en solliciter la décision en faveur de la ville. Cette difficuté a donné lieu à une discussion qui a été sur-le-champ terminée par l’observation suivante: on a supposé avec raison que rengagement des députés ne pouvait s’étendre au delà de ce qui était exprimé dans les articles du cahier, et, partant de ce principe, on a dit que, pour faire cesser toute difficulté, par rapport à ladite protestation, il suffirait sans doute de n’en pas faire mention comme article du cahier, et de substituer à celte qualification celle de déclaration préliminaire du corps municipal. Ce moyen de conciliation a été généralement adopté, la radiation proposée a été faite-sur-le champ : tous les députés, au nombre de vingt-sept, ont ensuite signé ledit cahier, ainsi que les officiers présents du corps municipal, et il en a été remis une expédition auxdits députés en la personne de M. l’archevêque de Paris. On croit ne devoir pas omettre que l’un desdits députés de l’ordre du tiers, a fait part à M. le prévôt des marchands de tout le regret qu’avait eu M. Bailli, président dudit ordre, de ne pouvoir se rendre à l’assemblée, et qu’il ne s’était dispensé d’y venir que par le seul motif des affaires importantes qui l’avaient retenu à Versailles. De tout quoi nous avons dressé procès-verbal pour être déposé au greffe de la ville et y avoir recours au besoin. Fait, clos, et arrêté par nous, soussignés, les jour, mois et an que dessus. f Antoine, El. arch. de Paris, Pour et au nom de MM. les députés de Paris. De Flesselles, Pour et au nom du corps municipal. Et depuis, M. le comte de Rochechouart, M. Dio-nis Du Séjour et M. Treilhart, qui étaient au nombre des treize députés absents dé la dernière assemblée, se sont présentés à l'hôtel de ville, ont pris au greffe lecture du cahier, et ont signé sur la minute d’icelui. De Flesselles. CAHIER Particulier et local du tiers-état de la ville de Paris (1). De toutes les pétitions locales, et d’une nécessité particulière à la ville de Paris, celle qui forme l’article suivant doit être la première : Art. 1er. Que la ville soit réintégrée dans son ancien droit naturel d’élire elle-même son prévôt des marchands ; que ce premier magistrat muni-pal soit pris indistinctement dans la noblesse, la robe et la bourgeoise ; que son nom soit changé en celui de maire de Paris. Art. 2. Que tout bourgeois de Paris puisse être nommé échevin, sans être obligé de passer par les grades de dixainier, de quartenier , etc., et que l’autorité municipale, presque nulle à Paris, soit rétablie dans ses antiques droits. Art. 3. Que ce mur odieux, à l’aide duquel les fermiers du Roi ont emprisonné la capitale, malgré les prodigieux efforts du parlement, et le très-énergique patriotisme des magistrats municipaux, soit démoli de fond en comble au frais des susdits fermiers. Art. 4. Supplier le Roi de passer les hivers dans sa bonne ville de Paris, réellement bonne et très-bonne pour Sa Majesté. Art. 5. Que la capitation, cet impôt arbitraire et mesquin, soit tellement modifié, et sa perception tellement changée, que les préposés ne puissent à volonté l’augmenter chez les uns et la diminuer chez les autres. Art. 6. Diminuer le luxe effrayant des voitures, arrêter leur féroce impétuosité ; et qu’à l’instant où chacun crie à la liberté, le malheureux piéton puisse du moins défendre sa vie. Art. 7. Qu’on établisse les trottoirs si longtemps désirés, et qu’en attendant on place des bornes dans les grandes rues ; qu’on n’y souffre jamais qu’une seule file de voitures ; qu’on attache une sonnette à tous les cabriolets, même à ceux des princes, et que cette nouvelle musique devienne la sauvegarde du citoyen. Art. 8. Qu’il soit défendu à tout propriétaire d’élever sa maison au-dessus du quatrième étage, afin que les rues ne soient plus des vallons fangeux, où le soleil semble ne descendre qu’à regret. Art. 9. Abroger l’usage féroce et absurde de promener un malheureux blessé de commissaire en commissaire; que ces Messieurs soient obligés de rester chez eux, et que les premiers soins donnés aux blessés soient ceux du chirurgien. Art. 10. Qu’aujourd’hui , où les hommes ne veulent plus être jugés arbitrairement, ils daignent jeter un œil de pitié sur ces malheureuses, qu’un (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la, Bibliothèque du Corps législatif. [Mats gen.1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 295 cérémonial, et de suite introduits en la grande salle, où ils ont occupé, toujours sans distinction d’ordre, les mêmes places qui avaient été disposées à cet effet, comme elles l’étaient en la dernière séance du 7 de ce mois, et alors M. l’abbé de Barmond, l’un des cinq commissaires nommés par mesdits sieurs les députés, à l’effet de procéder avec ceux du corps municipal à l’examen du projet de cahier par lui rédigé, a. pris la parole et a dit que toutes les dispositions de ce cahier avaient été lues avec attention dans la séance qui avait eu lieu le matin en ce même hôtel, et qu’il avait résulté du travail commun de légers retranchements au cahier et additions de quelques nouveaux articles, dont un entre autres a pour objet d’établir, entre MM. les députés et le corps municipal, une correspondance mutuelle et nécessaire au développement des vues et des moyens qui pourraient faciliter les décisions relatives aux demandes du cahier. M. l’abbé de Barmond a ajouté que MM. les commissaires, n’ayant aperçu la nécessité d’aucun autre changement dans les différents articles dudit cahier, estimaient qu’il devait être présentement signé, tant pcçr MM. les députés que par les officiers du corps municipal, sur quoi M. le prévôt des marchands ayant marqué le désir que toutes les dispositions en fussent préalablement rappelées à l’assemblée, le greffier en chef de la ville en a fait la lecture, après laquelle, un de MM. les députés a observé qu’il ne pouvait se dispenser de fixer l’attention des délibérations sur le premier article, où la protestation du corps municipal contre le règlement du 28 mars dernier se trouvait expressément motivée, ainsi que la demande qu’il formait à l’effet d’être reintégré dans l’exercice de son droit exclusif de convocation de tous les habitants de cette capitale et de ses faubourgs ; et il a dit que le conflit qui s’était élevé à cet égard entre la ville et le prévôt de Paris, devant être regardé comme une question encore indécise, il ne croyait pas que les députés, dans l’incertitude du droit des parties, dussent prendre par leurs signatures l’engagement d’en solliciter la décision en faveur de la ville. Cette difficuté a donné lieu à une discussion qui a été sur-le-champ terminée par l’observation suivante: on a supposé avec raison que rengagement des députés ne pouvait s’étendre au delà de ce qui était exprimé dans les articles du cahier, et, partant de ce principe, on a dit que, pour faire cesser toute difficulté, par rapport à ladite protestation, il suffirait sans doute de n’en pas faire mention comme article du cahier, et de substituer à celte qualification celle de déclaration préliminaire du corps municipal. Ce moyen de conciliation a été généralement adopté, la radiation proposée a été faite-sur-le champ : tous les députés, au nombre de vingt-sept, ont ensuite signé ledit cahier, ainsi que les officiers présents du corps municipal, et il en a été remis une expédition auxdits députés en la personne de M. l’archevêque de Paris. On croit ne devoir pas omettre que l’un desdits députés de l’ordre du tiers, a fait part à M. le prévôt des marchands de tout le regret qu’avait eu M. Bailli, président dudit ordre, de ne pouvoir se rendre à l’assemblée, et qu’il ne s’était dispensé d’y venir que par le seul motif des affaires importantes qui l’avaient retenu à Versailles. De tout quoi nous avons dressé procès-verbal pour être déposé au greffe de la ville et y avoir recours au besoin. Fait, clos, et arrêté par nous, soussignés, les jour, mois et an que dessus. f Antoine, El. arch. de Paris, Pour et au nom de MM. les députés de Paris. De Flesselles, Pour et au nom du corps municipal. Et depuis, M. le comte de Rochechouart, M. Dio-nis Du Séjour et M. Treilhart, qui étaient au nombre des treize députés absents dé la dernière assemblée, se sont présentés à l'hôtel de ville, ont pris au greffe lecture du cahier, et ont signé sur la minute d’icelui. De Flesselles. CAHIER Particulier et local du tiers-état de la ville de Paris (1). De toutes les pétitions locales, et d’une nécessité particulière à la ville de Paris, celle qui forme l’article suivant doit être la première : Art. 1er. Que la ville soit réintégrée dans son ancien droit naturel d’élire elle-même son prévôt des marchands ; que ce premier magistrat muni-pal soit pris indistinctement dans la noblesse, la robe et la bourgeoise ; que son nom soit changé en celui de maire de Paris. Art. 2. Que tout bourgeois de Paris puisse être nommé échevin, sans être obligé de passer par les grades de dixainier, de quartenier , etc., et que l’autorité municipale, presque nulle à Paris, soit rétablie dans ses antiques droits. Art. 3. Que ce mur odieux, à l’aide duquel les fermiers du Roi ont emprisonné la capitale, malgré les prodigieux efforts du parlement, et le très-énergique patriotisme des magistrats municipaux, soit démoli de fond en comble au frais des susdits fermiers. Art. 4. Supplier le Roi de passer les hivers dans sa bonne ville de Paris, réellement bonne et très-bonne pour Sa Majesté. Art. 5. Que la capitation, cet impôt arbitraire et mesquin, soit tellement modifié, et sa perception tellement changée, que les préposés ne puissent à volonté l’augmenter chez les uns et la diminuer chez les autres. Art. 6. Diminuer le luxe effrayant des voitures, arrêter leur féroce impétuosité ; et qu’à l’instant où chacun crie à la liberté, le malheureux piéton puisse du moins défendre sa vie. Art. 7. Qu’on établisse les trottoirs si longtemps désirés, et qu’en attendant on place des bornes dans les grandes rues ; qu’on n’y souffre jamais qu’une seule file de voitures ; qu’on attache une sonnette à tous les cabriolets, même à ceux des princes, et que cette nouvelle musique devienne la sauvegarde du citoyen. Art. 8. Qu’il soit défendu à tout propriétaire d’élever sa maison au-dessus du quatrième étage, afin que les rues ne soient plus des vallons fangeux, où le soleil semble ne descendre qu’à regret. Art. 9. Abroger l’usage féroce et absurde de promener un malheureux blessé de commissaire en commissaire; que ces Messieurs soient obligés de rester chez eux, et que les premiers soins donnés aux blessés soient ceux du chirurgien. Art. 10. Qu’aujourd’hui , où les hommes ne veulent plus être jugés arbitrairement, ils daignent jeter un œil de pitié sur ces malheureuses, qu’un (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la, Bibliothèque du Corps législatif. 296 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. lieutenant de police emprisonne tous les mois sur la simple déposition d’un caporal du guet, d’un clerc de commissaire, ou d’un espion vindicatif. Que les filles divagantes, leurs protectrices , marcheuses , et toute la cohorte impure, soient reléguées dans un quartier séparé; et que leur promenade immodeste n’aille pas corrompre, jusque dans les bras de sa mère, la jeune personne assise dans un comptoir. Art. 11. Que le vénérable corps des commissaires de quartier soit changé, refondu et purgé de toutes les petites iniquités qu’on leur a si souvent reprochées ; que leurs procès-verbaux, qui ont trop d’influence dans les affaires criminelles, soient éclairés de près ; qu’ils se montrent accessibles et affables, non-seulement à l 'épicier voisin qui les approvisionne, au marchand de draps qui leur donne à dîner le dimanche, mais encore au plus petit gagne-denier. Art. 12. Réduire le nombre incroyable de ces petits assassins, qui à l’aide d’une perruque et d’un privilège , et n’ayant souvent manié que le rasoir, s’ingèrent de traiter les maladies les plus compliquées, et à qui l’on semble avoir abandonné le sang du peuple. Art. 13. Q’il soit défendu, sous peine d’amende et de prison, à toutes personnes tenant hôtel ou chambres garnies, d’avoir des doubles clefs des armoires, commodes, etc. des appartements qu’ils louent, et de retenir sous aucun prétexte, les effets de leurs locataires , permis à eux de prendre leurs sûretés d’avance. Art. 14. Que tout marchand de vin, épicier, et autres chimistes obscur s, convaincu d’avoir altéré, falsifié la marchandise, soit livré comme empoisonneur public à toute la rigueur des lois : là où le délit est facile à commettre et difficile à surprendre, il faut que la loi effraye par sa sévérité. Art. 15. Mettre des bornes à la cherté extravagante des loyers, et que le petit bourgeois ne soit pas obligé d’employer la moitié de son revenu pour mettre, lui et sa famille, à l’abri des injures de l’air. Art. 16. Empêcher que les revendeurs et les revendeuses n’accaparent les denrées qu’on apporte aux marchés, pour les taxer à volonté, et surtout la marée, à laquelle le peuple ne peut atteindre que lorsqu’elle est en putréfaction, et pour laquelle le bourgeois dévot est obligé d’enfreindre chaque vendredi les commandements de l’Eglise. Art. 17. Proscrire à jamais l’impôt tyrannique et odieux de cinq sous par chaque bouteille de vin qui entre dans la capitale, et que le marchand de vin n’ait aucun prétexte pour mixtionner cette liqueur consolatrice. Art. 18. Mettre des bornes aux gains illicites des bouchers, dont les femmes ont des diamants, qui entretiennent des filles, et qui jouent la valeur d’un bœuf à une partie de triomphe ; supprimer la caisse de Poissy, qui cause en partie ia cherté de la viande. Art. 19. Que les tueries soient situées hors de la ville, ou du moins aux extrémités ; et reléguer dans des lieux isolés les fonderies de suif, afin qu’après avoir méphytisé leur voisinage, ces chaudières infectes ne finissent point par l’incendier. Art. 20. Que les espions et mouchards soient conservés, puisque leur vile existence est réellement nécessaire ; mais qu’une politique odieuse ne s’en serve point pour surprendre le secret des familles, et surtout pour faire courir des bruits trompeurs , et asservir ainsi jusqu’à l’opinion , qu’ils soient les instruments de la sûreté publique, et non ceux d’une inquisition sourde. Art. 21. Que les accidents qui peuvent attester l’invigilance ou la corruption des préposés à la sûreté de cette ville , ne soient point dérobés à l’œil du public ; et pour prévenir cet escamotage ministériel , il soit permis aux journaux d’en faire mention. Art. 22. Défendre expressément aux grands et petits préposés à la police, de recevoir aucuns présents ou pots-de-vin des corporations de métiers. Art. 23. Que les Parisiens, qui payent beaucoup plus qu’il ne faut pour les réverbères et les boues, soient mieux éclairés et mieux appropriés qu’ils ne le sont ; que les entrepreneurs de l 'illumination de la capitale ne calculent plus leurs bénéfices sur les quartiers de la lune. Art. 24. Diminuer cette quantité d’écoles gratuites de dessin et autres, de bourses dans les collèges, ce qui dépeuple journellement les campagnes et les ateliers, bien plus utiles à la société que cette foule de barbouilleurs, d’abbés, de clers, de commis sans place, d’écrivassiers qui, n’ayant pour tout bien que leur plume et leur pinceau, traînent partout leur indigence et leur ignorance orgueilleuse. Tel homme qui aurait peut-être été un matelot expert ou un cultivateur excellent, lancé hors de sa sphère, devient un aventurier, qui va terminer à Bicêtre des jours qu’il aurait conservés dans son village. Art. 25. Que ces capitalistes , dont toute la fortune est dans le portefeuille , qui aiment mieux placer leur argent à dix et à vingt pour cent, replacent ensuite l’intérêt de l’intérêt, et accumulent ainsi des richesses qu’ils enlèvent à l’agriculture, soient imposés et taxés bien au-dessus des propriétaires. Art. 26. Diminuer le nombre des notaires, les restreindre à leurs véritables fonctions; qu’ils ne soient plus tout à la fois emprunteurs et prêteurs, dépositaires et agioteurs ; et qu’à raison de la confiance que leur office semble commander, leur dérangement soit suivi de près, et leurs banqueroutes rigoureusement punies. Art. 27. Permettre à toute personne d’établir des petits spectacles, afin qu’à la longue leur multiplicité en dégoûte les spectateurs et les entrepreneurs. Art. 28. Interdire ces tavernes et tabagies , où le peuple dégoûté de cette eau teinte, que l’on nomme vin, va se gorger d’une eau-de-vie meurtrière. Art. 29. Abroger la loi de la contrainte par corps, pour fait de lettre de change, excepté pour les personnes qui exercent le commerce. Art. 30. Que l’emprisonnement pour mois de nourrice n’ait plus lieu, attendu que cette loi est cruellement absurde, la cessation du travail ôtant les moyens aux pères et mères de satisfaire au payement ; que la police, qui s’est chargée de pourvoir à la nourriture des nouveaux nés, cherche dans la bienfaisance les moyens de remédier à Y impossibilité des parents. 4rt. 31. Que la maison de force, dite Bicêtre, ce gouffre de toutes les misères humaines, soit rendu accessible à tout le monde, pour mettre en évidence le régime qui la gouverne : que ces malheureux, qui, sous le nom de bons pauvres, y sont entassés , soient un peu plus à l’aise ; car en comprimant ainsi ces infortunés, on fait de la charité une vertu bien cruelle. Art. 32. Que la loterie. royale, cette dangereuse [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra rauros.] 297 sirène, soit supprimée, et qu’on ne fasse plus jouer au Roi le rôle d’un banquier qui s'avantage; . mais comme il doit être permis à chacun de laisser une porte ouverte à la fortune , et de dépenser son argent comme bon lui semble, qu’il en soit établi une moins onéreuse pour les pontes, et dont l’administration plus claire ne serve point à engraisser une douzaine de régisseurs, qui, sous des noms empruntés, tenant de petits bureaux clandestins à leur compte, pressurent, sous l’appât d’un gain illusoire, jusqu’au malheureux mendiant, et sont par là tout à la fois banquiers et commis. Art. 33. Abolir tout privilège exclusif pour fait de messageries, diligences, voitures de cour et de place; de manière qu’il soit libre à chacun de voiturer qui bon lui semble, et qu’on puisse donner un coup de fouet sans la permission du Roi. Art. 34. Que les jardins publics, qui ne sont ouverts au peuple que le jour de saint Louis, le soient toute l’année, pour qu’il dise : du Roi c’est tous les jours la fête. Art. 35. Défendre aux hommes les métiers de coiffeur et de tailleur pour femme, d’abord par décence, et ensuite pour ne pas ôter le pain à tant de malheureuses ouvrières, que le défaut d’occupation semble autoriser à tirer parti de leur jeunesse. Art. 36. Interdire l’usage de ces pages modernes, connus sous le nom de jockeys, aux demoiselles, et ce pour de bonnes raisons, et môme à quelques hommes, pour de meilleures encore. Art. 37. Qu’il soit créé un conseil de santé pour surveiller la nourriture du peuple, lequel conseil députera tous les jours quelques-uns de ses membres pour inspecter toutes les denrées qu’on étale dans les marchés et dans les boutiques. Art. 38. Etablir hors de Paris un hospice, où toute personne attaquée de la maladie anti-sociale puisse se présenter, et y être radicalement et gratuitement guérie, sans avoir besoin du billet du lieutenant général de police et d’aucun préalable quelconque ; qu’en attendant cet établissement, on ne borne pas au nombre de cent les individus des deux sexes reçus à Bicêtre, et qu’un infirmier vexateur, qui se masque du titre de gouverneur, n’exige plus un impôt de 2 livres 8 sous de chaque malade qui se présente, et sans lequel il lui ferme la porte. Art. 39. Demander une loi expresse qui déclare nulle de plein droit toute hypothèque donnée sur des biens à venir, afin d’ôter aux usuriers l’infernale facilité d’envahir d’avance la succession des fils de famille. Art. 40. Qu’il soit pris des moyens pour rendre moins fréquentes les banqueroutes, et qu’on ne voie plus un marchand qui a failli rue Saint-Honoré préparer un autre bilan au faubourg Saint-Germain. Art. 41. Que ces ventes simulées, faites par autorité de justice , et imaginées pour allécher les acheteurs, soient surveillées par la police ; et que ces petjts accapareurs qui y empêchent le public de se pmirvoir soient sévèrement punis. Art. 42. Supprimer ces officiers mesureurs , ces officiers de la vallée, de la marée , etc., qui, sous une dénomination ridicule, sont une charge onéreuse pour le citoyen, et désormais inutiles à l’administration mercantile. Art. 43. Que les riches consommateurs soient publiquement priés de diminuer la quantité de leurs cheminées à feu ; le bois que le riche brûle inutilement manque souvent au nécessaire du pauvre. Art. 44. Que dorénavant on ne soit plus obligé de payer sa place à l’église comme au spectacle, attendu qu’une pareille rétribution éloigne souvent de nos temples, surtout dans les fêtes solennelles, l’honnête citoyen qui calcule que pour assister à l’office divin, lui et sa famille, il lui en coûtera son revenu d’un jour. Art. 45. Que le Mont-de-Piété, dont l’administration n’est guère pieuse, soit changé dans son régime ; que l’intérêt de dix pour cent soit réduit à huit, attendu que les gains sont encore assez considérables par l’affluence des emprunteurs ; que les ventes publiques en apparence, et clandestines par le fait, soint surveillées avec la vigilance la plus sévère ; que les huissiers-priseurs ne se fassent pas adjuger, sous des prête-nom, les effets qui sont à leur convenance, au prix le plus modique et au détriment du public. Art. 46. Que les grands et petits égouts, dont l’odeur infecte occasionne souvent des maladies, soient beaucoup mieux soignés. Art. 47. Que le charroi au moellon, pavés, et autres pierres de bâtisse , ne soit fait que la nuit, ou au moins de grand matin, afin que les rues de Paris, déjà obstruées par la quantité innombrable de voitures, soient débarrassées de ces masses énormes, qui arrêtent la circulation et menacent sans cesse le malheureux piéton d’être écrasé du poids de leur chute, ou coupé en deux par leur essieu. Art. 48. Que le sublime projet de rendre la rivière navigable, et de restituer à la ville de Paris son ancien port, soit réalisé ; qu’on y établisse un commerce maritime, qui sera une nouvelle source de richesse pour la France et fournira à la marine un plus grand nombre de matelots. Le Roi et les Etats généraux seront suppliés d’assigner les fonds nécessaires à cette grande et utile entreprise, qui mettra le comble à la gloire de la nation. Art. 49. Le dernier vœu des citoyens de la ville de Paris est que les Etats généraux, constitutionnellement convoqués tous les trois ans, soient tenus dorénavant dans la capitale, où Sa Majesté peut, tout aussi bien qu’à Versailles, s’environner de l’amour de ses sujets. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris , séante en l’église des Mathurins (1). Le premier sentiment de l’assemblée du tiers-état réuni aux Mathurins, a été un sentiment d’admiration pour un monarque qui a su se convaincre que la gloire la plus solide consistait à rétablir la nation dans 1 exercice de ses droits primitifs. 11 n’est qu’un moyen de lui témoigner une reconnaissance digne de ce bienfait : c’est de proposer ce qui peut consolider ce grand ouvrage. Liberté, propriété ; voilà ce qui constitue une véritable monarchie. La liberté ne peut se concilier avec les ordres arbitraires; la propriété ne peut exister, si la facul té d’imposer ne réside pas uniquement dans la nation assemblée. C’est à ces deux principes essentiels et fonda-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra rauros.] 297 sirène, soit supprimée, et qu’on ne fasse plus jouer au Roi le rôle d’un banquier qui s'avantage; . mais comme il doit être permis à chacun de laisser une porte ouverte à la fortune , et de dépenser son argent comme bon lui semble, qu’il en soit établi une moins onéreuse pour les pontes, et dont l’administration plus claire ne serve point à engraisser une douzaine de régisseurs, qui, sous des noms empruntés, tenant de petits bureaux clandestins à leur compte, pressurent, sous l’appât d’un gain illusoire, jusqu’au malheureux mendiant, et sont par là tout à la fois banquiers et commis. Art. 33. Abolir tout privilège exclusif pour fait de messageries, diligences, voitures de cour et de place; de manière qu’il soit libre à chacun de voiturer qui bon lui semble, et qu’on puisse donner un coup de fouet sans la permission du Roi. Art. 34. Que les jardins publics, qui ne sont ouverts au peuple que le jour de saint Louis, le soient toute l’année, pour qu’il dise : du Roi c’est tous les jours la fête. Art. 35. Défendre aux hommes les métiers de coiffeur et de tailleur pour femme, d’abord par décence, et ensuite pour ne pas ôter le pain à tant de malheureuses ouvrières, que le défaut d’occupation semble autoriser à tirer parti de leur jeunesse. Art. 36. Interdire l’usage de ces pages modernes, connus sous le nom de jockeys, aux demoiselles, et ce pour de bonnes raisons, et môme à quelques hommes, pour de meilleures encore. Art. 37. Qu’il soit créé un conseil de santé pour surveiller la nourriture du peuple, lequel conseil députera tous les jours quelques-uns de ses membres pour inspecter toutes les denrées qu’on étale dans les marchés et dans les boutiques. Art. 38. Etablir hors de Paris un hospice, où toute personne attaquée de la maladie anti-sociale puisse se présenter, et y être radicalement et gratuitement guérie, sans avoir besoin du billet du lieutenant général de police et d’aucun préalable quelconque ; qu’en attendant cet établissement, on ne borne pas au nombre de cent les individus des deux sexes reçus à Bicêtre, et qu’un infirmier vexateur, qui se masque du titre de gouverneur, n’exige plus un impôt de 2 livres 8 sous de chaque malade qui se présente, et sans lequel il lui ferme la porte. Art. 39. Demander une loi expresse qui déclare nulle de plein droit toute hypothèque donnée sur des biens à venir, afin d’ôter aux usuriers l’infernale facilité d’envahir d’avance la succession des fils de famille. Art. 40. Qu’il soit pris des moyens pour rendre moins fréquentes les banqueroutes, et qu’on ne voie plus un marchand qui a failli rue Saint-Honoré préparer un autre bilan au faubourg Saint-Germain. Art. 41. Que ces ventes simulées, faites par autorité de justice , et imaginées pour allécher les acheteurs, soient surveillées par la police ; et que ces petjts accapareurs qui y empêchent le public de se pmirvoir soient sévèrement punis. Art. 42. Supprimer ces officiers mesureurs , ces officiers de la vallée, de la marée , etc., qui, sous une dénomination ridicule, sont une charge onéreuse pour le citoyen, et désormais inutiles à l’administration mercantile. Art. 43. Que les riches consommateurs soient publiquement priés de diminuer la quantité de leurs cheminées à feu ; le bois que le riche brûle inutilement manque souvent au nécessaire du pauvre. Art. 44. Que dorénavant on ne soit plus obligé de payer sa place à l’église comme au spectacle, attendu qu’une pareille rétribution éloigne souvent de nos temples, surtout dans les fêtes solennelles, l’honnête citoyen qui calcule que pour assister à l’office divin, lui et sa famille, il lui en coûtera son revenu d’un jour. Art. 45. Que le Mont-de-Piété, dont l’administration n’est guère pieuse, soit changé dans son régime ; que l’intérêt de dix pour cent soit réduit à huit, attendu que les gains sont encore assez considérables par l’affluence des emprunteurs ; que les ventes publiques en apparence, et clandestines par le fait, soint surveillées avec la vigilance la plus sévère ; que les huissiers-priseurs ne se fassent pas adjuger, sous des prête-nom, les effets qui sont à leur convenance, au prix le plus modique et au détriment du public. Art. 46. Que les grands et petits égouts, dont l’odeur infecte occasionne souvent des maladies, soient beaucoup mieux soignés. Art. 47. Que le charroi au moellon, pavés, et autres pierres de bâtisse , ne soit fait que la nuit, ou au moins de grand matin, afin que les rues de Paris, déjà obstruées par la quantité innombrable de voitures, soient débarrassées de ces masses énormes, qui arrêtent la circulation et menacent sans cesse le malheureux piéton d’être écrasé du poids de leur chute, ou coupé en deux par leur essieu. Art. 48. Que le sublime projet de rendre la rivière navigable, et de restituer à la ville de Paris son ancien port, soit réalisé ; qu’on y établisse un commerce maritime, qui sera une nouvelle source de richesse pour la France et fournira à la marine un plus grand nombre de matelots. Le Roi et les Etats généraux seront suppliés d’assigner les fonds nécessaires à cette grande et utile entreprise, qui mettra le comble à la gloire de la nation. Art. 49. Le dernier vœu des citoyens de la ville de Paris est que les Etats généraux, constitutionnellement convoqués tous les trois ans, soient tenus dorénavant dans la capitale, où Sa Majesté peut, tout aussi bien qu’à Versailles, s’environner de l’amour de ses sujets. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris , séante en l’église des Mathurins (1). Le premier sentiment de l’assemblée du tiers-état réuni aux Mathurins, a été un sentiment d’admiration pour un monarque qui a su se convaincre que la gloire la plus solide consistait à rétablir la nation dans 1 exercice de ses droits primitifs. 11 n’est qu’un moyen de lui témoigner une reconnaissance digne de ce bienfait : c’est de proposer ce qui peut consolider ce grand ouvrage. Liberté, propriété ; voilà ce qui constitue une véritable monarchie. La liberté ne peut se concilier avec les ordres arbitraires; la propriété ne peut exister, si la facul té d’imposer ne réside pas uniquement dans la nation assemblée. C’est à ces deux principes essentiels et fonda-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. 298 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Paris, inlra muros. mentaux que se rapportent les principaux objets de demandes à faire. En conséquence, l’assemblée charge expressément ses représentants de demander qu’il soit inséré dans les cahiers généraux : 1° Que les Etats généraux du royaume seront assemblés au plus tard tous les trois ans, dans la forme qui sera jugée, par les prochains Etats généraux, la plus convenable pour représenter véritablement la nation ; 2° Qu’aucun acte public ne sera réputé loi* s’il n’a été consenti on demandé par les Etats généraux ; 3° Qu’il sera défendu d’attenter à la liberté individuelle du citoyen par lettre de cachet ou autres actes d’autorité; . 4° Que la Bastille sera démolie, et qu’il sera élevé sur son emplacement un monument avec la statue du Roi, et au bas cette inscription : A Louis XVI, roi d'un peuple libre ; 5° Que la presse sera absolument libre, à la charge par l’auteur de signer son ouvrage ; et à défaut de sa signature, l’imprimeur demeurera responsable de ce qui pourra être contraire à la religion, aux mœurs et au droit d’autrui ; 6° Il ne sera perçu aucun impôt, de quelque espèce qu’il puisse être, s’il n’a été librement et expressément octroyé par les Etats généraux, qui ne pourront consentir que pour trois ans au plus, et en proportion avec les besoins véritables; 7° En conséquence, les dépenses de chaque département seront fixées sur les états et pièces justificatives qui seront représentées, et chaque administrateur demeurera responsable de l’emploi des fonds assignés à son département ; 8° Les impôts seront également répartis sur toutes les classes de citoyens, sans aucune espèce de privilèges ni de distinctions, et tous les impôts distinctifs seront supprimés ; 9° La dette publique sera reconnue et consolidée, et à l’avenir il ne sera fait aucun emprunt, si ce n’est sur la demande des Etats généraux, et à la charge que les fonds seront employés à l’extinction des dettes plus anciennes ; 10° Qu’il sera nommé un ou plusieurs comités pour examiner, dans l’intervalle de la première à la seconde tenue des Etats généraux, ce qu’il convient de réformer dans la nature de l’impôt, et dans la manière de le lever ; 11° Faire prêter au militaire serment de refuser tout service : 1° pour tout ordre qui pourrait teudre à éluder la convocation périodique des Etats ; 2° pour tout ordre qui pourrait favoriser la levée d’un impôt non accordé par la nation, et demander une loi qui condamne à une mort infâme, comme coupable de lèse-nation, celui qui sera convaincu d’avoir violé ce serment; 12° Réformer l’éducation nationale; 13° Toutes les lois, usages et coutumes qui excluent les membres du ,tiers-état d’offices civils et militaires, seront et demeureront abrogées; 14° Que les lois civiles, criminelles, celles relatives aux bâtiments, à la voirie, au commerce ‘et particulièrement sur les banqueroutes et séparation de femmes de commerçants, seront réformées ; 15° Que le corps municipal actuel de la ville sera supprimé, et qu’il sera fait une nouvelle division des différents quartiers de Paris, pour être procédé tous les deux ans, dans chaque quartier, à la nomination de quarteniers, lesquels, pour former avec eux le corps municipal, nommeront les prévôt des marchands et échevins; 16° Qu’à l’avenir, le quartenier ancien de chaque quartier convoquera l’assemblée de son district, dont il sera le président, pour l’élection des représentants du quartier à rassemblée générale de la municipalité ; 17° Que les loteries seront supprimées, comme contraires aux bonnes mœurs, et funestes à la classe la plus indigente de la société ; 18° Qu’il sera pourvu à la réforme des abus dans l’administration du mont-de-piété et de la caisse de Poissy; 19° Que le secret des lettres confiées à la poste sera inviolable; 20° Qu’il ne sera désormais accordé aucun sauf-conduit, ni arrêt de surséance, pour quelque cause et prétexte que ce soit ; 21° Que toutes évocations générales et commissions extraordinaires seront supprimées ; 22° Qu’il ne sera accordé de privilèges exclusifs qu’aux auteurs et inventeurs ; 23° Que la direction des corps et communautés sera ôtée aux juges de police, pour être attribuée à une chambre de commerce, composée de dix anciens négociants, présidés , par le député du commerce de Paris. 24° Qu’il n’y aura plus désormais aucun lieu privilégié, ni pour les marchands, ni pour les banqueroutiers; 25° Qu’il sera pourvu à la réforme des inconvénients résultant de la manière dont a été fait le rétablissement des corps et communautés dans la ville de Paris, par l’édit de 1777; 26° Que les droits excessifs sur les cuirs et sur le papier, et autres matières premières, seront réduits aussitôt qu’il sera possible de le faire; 27° Qne les députés seront tenus de s’occuper des moyens de faire cesser à l’avenir les monopoles, accaparements et autres manœuvres tendantes au renchérissement excessifs des grains et denrées ; 28° Que les députés seront chargés de solliciter de la manière la plus pressante l’exécution la plus prompte des bâtiments projetés pour les hôpitaux, et la réforme de l’administration de ceux de la capitale, réforme qui intéresse si essentiellement la classe des habitants la plus pauvre, que les représentants du tiers s’empresseront toujours de défendre et de soulager. 29° Ils s’occuperont de même du moyen de supprimer l’agiotage, soit par la conversion en contrats de tous les effets au porteur, ou par toutes les autres voies qu’ils estimeront convenables. 30° Qu’ils prendront en considération le vœu qui a été porté par une grande quantité de bailliages, relativement à l’établissement des Etats proVinciaux dans toutes les provinces du royaume. 31° Qu’ilg seront invités d’insister fortement pour l’admission à l’Assemblée nationale, des députés qui ont été nommés et envoyés par les colonies. Le peu d’instants qu’on a eus, pour la rédaction des cahiers ne permet pas de faire mention d’une foule d’autres abus, dont la commune de Paris a droit de se plaindre; mais l’assemblée s’en rapporte aux autres cahiers qui seront fournis par les différents districts; et chaque corporation se réserve d’ailleurs de fournir aux Etats généraux, ainsi u’elles en ont le droit, des mémoires explicatifs e ces abus. Enfin, il est enjoint aux députés de ne pouvoir délibérer sur les impôts, avant d’en avoir obtenu la charte solennelle qui assurera la convocation périodique et régulière des Etats généraux, le droit de législation résidant dans la nation, celui [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. - [Paris, intra muros.l 299 de ne pouvoir être imposée que de son consentement, la répartition égale des impôts et la liberté individuelle des citoyens. Signé Treilhard, avocat au parlement; Blonde, avocat au parlement; Choron, notaire; Gérard de Melcy, procureur au parlement ; Mautard, imprimeur-libraire; Gafiin, marchand chapelier; Baudouin, imprimeur-libraire ; Bizet, marchand mercier ; Bureau du Colombier, avocat au parlement; Feval, avocat au parlement; de Maison-Neuve, ancien négociant; Boullanger, marchand papetier, commissaires pour la rédaction dudit cahier. M. Caillaü, président. M. ÂGIER, secrétaire. PROCÈS-VERBAL Del' assemblée partielle du tiers-état , tenue enV église des Mathurins , quartier de Sorbonne , premier district. L’an 1789, le mardi 21 avril, en vertu de la lettre du Roi pour la convocation des Etats généraux à Versailles le 27 du présent mois, et du mandement des prévôt des marchands et échevins de la ville de Paris, du 15 aussi présent mois, les habitants du tiers-état de la ville et faubourgs de Paris, quartier de la Sorbonne,' premier district, se sont assemblés et réunis en l’église des Mathurins, depuis sept heures jusqu’à neuf du matin, pour rédiger le cahier des instructions et pouvoirs à donner aux électeurs qui doivent être par eux députés, et nommer ensuite lesdits électeurs ; à laquelle heure de neuf heures M. Etienne, quartenier de ville, que lesdits habitants ont trouvé dans la nef des Mathurins, placé au milieu du bureau, et à la place du président de l’assemblée, assisté du sieur Guesneau, certificateur des criées du châtelet, qui tenait la place du greffier, et de MM. Delpêche, avocat; Choron, notaire, et Mongaluy, huissier-priseur, siégeant à ses côtés comme assesseurs après avoir fait fermer les portes, a pro-noncéà l’assemblée composéededeux cent soixante personnes , un discours analogue aux circonstances; après quoi ayant fait prêter serment audit sieur Guesneau, il lui a dit de faire lecture de la lettre du Roi et du règlement relatif à la convocation de la présente assemblée. Alors un membre de l’assemblée s’étant levé, a fait motion tendante à proposer à l’assemblée de se choisir elle-même, suivant son droit incontestable, un président, un secrétaire et les autres officiers nécessaires à son organisation, ce qui a été accepté par acclamation, et, sur la réquisition de M. Etienne, que l’on prît les voix sur cette motion, pour savoir si tel était le vœu général de l’assemblée, ayant été demandé si quelqu’un était d’avis contraire; après un silence de quelques minutes, il a été répété que c’était le vœu unanime ; et en conséquence, il a été résolu que sans s’arrêter aux articles 16, 17 et aux subséquents du règlement du 13 avril présent mois, contre lesquels l’assemblée a protesté de la manière la plus expresse, elle devait se choisir un président, quatre assistants ou scrutateurs, et un sécrétaire; et à l’instant M. Gailleau, ancien bâtonnier de l’ordre des avocats, doyen d’âge de l’assemblée, a été par acclamation et provisoirement élu pour président, jusqu’à ce qu’il en eût été nommé un régulièrement par la voie du scrutin. Il a été de suite, par scrutin, procédé à l’élection d’un président; et à la grande pluralité, le même M. Gailleau a été nommé président et a pris place en cette qualité sur le même siège qu’avait occupé jusqu’à cet instant M. Etienne. Alors il a été, également par la voie du scrutin et séparément, procédé à la nomination d’un secrétaire et ensuite à celle de quatre assistants ou scrutateurs. M. Agier, avocat, a été nommé pou r secrétaire, et MM. Treilhard et Blonde, avocats; Choron, notaire, et Gérard de Melsy, procureur du parlement, ont été nommés pour assistants ou scrutateurs. Pendant la vérification des scrutins, pour la nomination des assistants, sont arrivées successivement différentes députations, tant de l’ordre de la noblesse que de celui du tiers-état, assemblés dans les divers départements de cette ville, savoir : une du troisième département, de la noblesse de Paris, assemblée le jour d’hier en l’église de l’oratoire Saint Honoré, et que MM. de La Cios et Le-Blond, députés, ont déclaré avoir été continuée cejourd’hui en la chambre du conseil du Châtelet ; lesquels députés ont fait lecture et ont laissé sur le bureau copie d’un arrêté, portant en substance que la noblesse de leur département a protesté, notamment contre la violation du droit de commune, comme contraire au vœu actuel de la noblesse; qu’elle a décidé de donner à cette protestation une nouvelle force, en communiquant aux soixante assemblées du tiers-état les instructions données par la noblesse à ses électeurs, relativement aux intérêts de la commune, aussitôt que ces instructions auront été entièrement rédigées. M. le président a témoigné à MM. les députés combien l’assemblée était sensible aux sentiments d’union dont ils avaient été chargés de lui faire part, et les a assurés qu’après que l’opération qui l’occupait serait finie, elle ne manquerait pas de prendre en considération l’objet important qu’ils venaient de lui communiquer. Après quoi MM. les députés de la noblesse ont été reconduits jusqu’à la porte par quatre membres de l’assemblée, ainsi qu’ils avaient été reçus. Ensuite a été annoncée une autre députation de l’assemblée partielle des citoyens nobles de Paris, convoquée dans la grande salle du Châtelet ; ladite députation, composée de M. le comte de Chabril-lant père, et de MM. André de La Prelle, d’Avène de Fontaines, et deCharton, lesquels, M. le comte de Chabrillant portant la parole, ont dit qu’ils étaient chargés de témoigner à l’assemblée les regrets de leur commettants de se voir séparés de l’ordre du tiers-état ; qu’ils déposaient dans le sein de l’assemblée leurs protestations unanimes à cet égard, se flattant que l’ordre du tiers-etat joindrait ses vœux aux leurs pour obtenir la réunion des deux ordres; et que les membres de leur assemblée les avaient chargés de déclarer qu’elle adhérait unanimement aux résolutions prises par la noblesse de renoncer expressément à toutes les exemptions pécuniaires. L’assemblée a généralement applaudi aux sentiments de justice qui avaient dicté à la noblesse la résolution généreuse qu’elle lui faisait annoncer ; et M. le président, en remerciant MM. les députés des vœux qu’ils lui témoignaient pour la réunion des deux ordres, les a assurés de la disposition de Rassemblée pour y concourir autant qu’il serait en son pouvoir. Après quoi, MM. les députés ont été reconduits ainsi qu’ils avaient été reçus, en la manière ci-dessus énoncée. Les députations du tiers-état arrivées dans cet intervalle ont été celles des assemblées convoquées aux églises de Saint-Etienne-du-Mont, Saint- 300 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J Germain-des-Prés , et Saint-Severin, lesquelles ont rendu compte à l’assemblée de ce qui s’était passé dans les leurs, relativement à leur formation et à la nomination des officiers. M. le président les a remerciées de leur attention et leur a dit que la conduite de cette assemblée avait été conforme à la leur. MM. les assistants ayant pris place au bureau après leur nomination, il a été observé que l’assemblée ayant actuellement toute sa consistance, et s’agissant de s’occuper de la rédaction des cahiers, il ne devait rester dans le lieu de l’assemblée que les membres qui la composaient, et que néanmoins M. Etienne, le sieur Guesneau et autres personnes étrangères dont il était accompagné, étaient encore dans l’assemblée ; qu’il convenait de les inviter à se retirer. Sur quoi, la matière mise en délibération, àlaréquisitiondeM. Etienne, il a été arrêté, à la presque unanimité des voix , que lui et les personnes qui l’accompagnaient ne pouvaient rester. Eux retirés, il a été procédé à la nomination de huit commissaires, pour travailler à la rédaction du cahier conjointement avec MM. les assistants ci-dessus nommés, lors de laquelle nomination, à la réquisition de MM. les commerçants présents à l’assemblée, il en a été choisi quatre parmi eux, savoir : MM. Moutard, imprimeur; Caffin, chapelier; Baudouin, imprimeur; Bizet, marchand de soie; et les quatre autres nommés parM. le président ont été : MM. Bureau du Colombier et Fe-val, avocats ; M. de Maison-Neuve, ancien négociant; M. Boullanger, marchand papetier. Pendant le travail de MM. les commissaires, sont arrivées d’autres députations des assemblées du tiers-état, tenues dans les églises de Saint-André des Arts , des Prémontrés de la Croix-Rouge, de Saint-Roch, des Petits-Augustins, des Jacobins-Saint-Dominique, des Blancs-Manteaux, de Saint-Etienne-du-Mont, de Sainte-Elisabeth, de Notre-Dame, de Saint-Severin, des Feuillants, du Petit-Saint-Antoine, des Grands-Augustins, de Saint-Jean-en-Grève, et de Saint-Gervais. L’assemblée, de son côté, a député à tous les districts de son ordre, à l’exception seulement de ceux des Jacobins-Saint-Dominique, des Théatins, de Saint-Victor, de Saint-Nicolas-des-Champs, des Filles-Dieu, de Saint-Laurent, des Petits-Pères de la place des Victoires, des Filles Saint-Thomas, des Capucins de la chaussée d’Antin, vers lesquels le temps n’a pas permis de se rendre. Ces députations respectives avaient pour but de s’instruire réciproquement de ce que l’on avait fait, et de ce qu’il convenait de faire ; et il est résulté, tant des récits faits à l’assemblée par les députés des autres districts, que des rapports faits à la présente par les membres députés par icelle, que dans presque toutes les assemblées du tiers-état, le nombre des votants s’étant trouvé beaucoup moindre qu’il n’v avait lieu de s’attendre, on avait reconnu l’impossibilité de se réduire à ne nommer qu’un électeur par cent votants, suivant la proportion établie par le règlement, et qu’on s’était déterminé à en nommer un nombre plus considérable pour parvenir à compléter au moins celui de trois cents, que doivent former les électeurs du tiers-état. Pendant le même intervalle sont venues deux autres députations d’assemblées partielles de la noblesse, l’une séante aux Bernardins, l’autre en la maison de Sorbonne; la remière députation, composée de M. le comte de ally-Tollendal, président de ladite assemblée convoquée aux Bernardins, et de M. le chevalier d’Aubocide; la seconde, composée de M. le vicomte de La Grange et de M. le comte Malestroit, lesquels ont témoigné à l’assemblée, au nom de leurs commettants, les mêmes regrets quant à la séparation des ordres, et les mêmes dispositions quant à la renonciation aux privilèges pécuniaires, et ont laissé sur le bureau copie de leurs discours signé d’eux, lesquelles demeureront annexées à la minute du présent procès-verbal. Est arrivée pareillement une. autre députation de l’assemblée partielle de la noblesse, tenue aux Récollets, actuellement réunie chez M. le prévôt de Paris, ladite députation composée de M. Dartau de la Feuillade et de M. le chevalier de Perpignan, lesquels ont témoigné à l’assemblée le désir de leurs commettants de se réunir au tiers-état, de faire rétablir la commune, et de se tenir assemblés respectivement jusqu’à l’ouverture des Etats généraux, pour se communiquer réciproquement les résolutions qui seraient prises. M. le président, au nom de l’assemblée, a témoigné sa sensibilité aux dispositions de la noblesse; elle désire de concourir à ses vues, autant qu’il dépendra d’elle. Cependant l’assemblée avait, de son côté, député aux deux assemblées de la noblesse dont elle avait reçu les députations pendant la vérification des scrutins, et avoir chargé les membres envoyés vers elle de leur témoigner que l’assemblée était pénétrée de l’avantage de la réunion des forces ; qu’elle concevait que cette réunion si précieuse pouvait s’effectuer facilement et sans inconvénients, en nommant pour électeurs et pour députés aux Etats généraux un nombre de citoyens pris dans le tiers-état, égal au nombre des électeurs et des députés des deux premiers ordres réunis. Après le retour des députés envoyés dans les différents districts et assemblées, il a été procédé à la lecture des cahiers projetés par les commissaires ci-dessus nommés et à la réformation desdits cahiers article par article, d’après les observations qui ont été faites par aucun des membres de l’assemblée. Après quoi il a été mis en délibération quel nombre d’électeurs il convenait de nommer ; il a été résolu d’en nommer dix, dont les cinq premiers seront électeurs de droit, et les cinq autres, soit pour substituer les premiers en cas d’empêchement, soit pour servir à compléter le nombre des trois cents électeurs du tiers-étal, prescri par le règlement. Et sur-le-champ a été procédé aux scrutins, par l’événement desquels ont été nommés MM. Agier, Treilhard, Blonde, anciens avocats; M.Gauchez, dessinateur et graveur, et M. Caffin, marchand chapelier pour électeurs de droit ; et MM. Baudouin, Moutard, Clousier, tous trois imprimeurs; MM. Boulanger, marchand papetier, et Serpaud, avocat, pour électeurs adjoints; après quoi les cahiers ayant été signés, ont été réunis ès mains des cinq électeurs de droit. M. Baudouin, imprimeur, a fait à l’assemblée l’offre honnête d’imprimer le cahier ainsi que le présent procès-verbal, et d’en faire remettre des exemplaires à tous les membres de l’assemblée, même aux électeurs nommés dans les autres districts de l’assemblée du tiers-état ; ce qui a été accepté avec reconnaissance. Fait et clos en l’assemblée du tiers-état, tenue en l’église des Mathurins, sans désemparer, à Paris, ces 21 et 22 avril 1789. Signé CAlLLAU, président; ÀG1ER, secrétaire. Et à l’instant de la clôture du procès-verbal de l’assemblée du tiers-état de la ville de Paris, assem- [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [Paris, in tra muros.] 301 blé en l’église des Mathurins,sur le bruit-gui s’est répandu que MM. les officiers de ville étaient disosés à ne point recevoir de dépôt dudit procès-ver-al, ni le cahier de l’assemblée, ladite assemblée a arrêté qu’elle continuerait de tenir, jusqu’à ce que les électeurs par elle nommés, et qui se transporteront ceiourd’hui à l’hôtel de ville, en exécution de l’article 22 du règlement du 13 du présent mois, soient venus lui rendre compte, ou l’aient informée de la manière dont ils auront été reçus. Arrêté, en outre, qu’il sera fait deux originaux, tant du procès-verbal que du cahier, dont l’un restera entre les mains du secrétaire. Fait en ladite assemblée tenante, le mercredi 22 avril 1789. Signé Gaillaü, président ; ÂGIER, secrétaire. Et ledit jour, 22 avril 1789, 10 heures du soir, MM. les électeurs, de retour de l’hôtel de ville, ayant annoncé à l’assemblée que leur procès-verbal avait été reçu, que l’on était occupé à former la liste générale des élections, et que demain jeudi, dès le grand matin, M. Agier devait recevoir la liste particulière des électeurs du présent district, le procès-verbal a été clos définitivement, et l’assemblée s’est séparée. Signé Agier, Treilhard, Blonde, anciens avocats au parlement ; GaüCHEZ, dessinateur et graveur ; CAFFIN, marchand chapelier ; Baudoin, MOUTARD, GloüSIER, imprimeur s-libraires-, Boul-LANGER, marchand papetier ; SERPAUD, avocat au parlement ; Choron, notaire ; GÉRARD DE MELCY, procureur au parlement. Gaillau, président ; Agier, secrétaire. Discours de MM. les députés de rassemblée de la noblesse convoquée aux Bernardins. Messieurs, L’assemblée, partielle de la noblesse séante aux Bernardins, nous a chargés de témoigner à nos concitoyens du tiers le regret que nous éprouvons dè la dissolution de cette commune, où tous les citoyens, sans distinction d’ordre, confondaient paternellement tous leurs nœuds dans l’intérêt public et général ; que si nous nous sommes soumis aujourd’hui à cette disposition pour ne pas nous rendre coupables d’avoir différé les Etats généraux, nous n’en espérons pas moins fermement de la justice du Roi et de celle des Etats généraux le rétablissement de cette commune si précieuse ; qu’en attendant, nous adhérons de tous nos cœurs à la résolution prise par la noblesse de toutes les provinces, de supporter toutes les contributions publiques, dans la plus parfaite égalité, avec nos concitoyens du tiers. Signé Le comte de Lally-Tollendal, président et député, et Bigeon, secrétaire. Le comte de Lally-Tollendal, président de l’assemblée partielle de la noblesse convoquée aux Bernardins, et député vers les assemblées de ce lieu. Le chevalier d’Aubocide, député. Discours de MM. les députés de l'assemblée de la noblesse convoquée en la maison de Sorbonne. Messieurs, L’assemblée de la noblesse du quatorzième département, assemblée dans la même maison de Sorbonne, où se tient celle des communes, a l’honneur de vous porter son vœu sur la confraternité des deux ordres, et sur la renonciation particulière à ses privilèges pécunaires, pour partager avec vous tous les impôts dans une proportion égale. Signé Le vicomte de La Grange ; le comte de Malestroist-Pontkalleck, membres des États de Bretagne. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris , tenue dans l'église de Sorbonne, les 21 et 22 avril 1789 (1). L’assemblée proteste, avant toutes choses , contre le mode de convocation des assemblées de district, en ce que les intérêts de la capitale s’y trouvent blessés par la destruction de la commune, dont tous les habitants ont fait partie jusqu’à présent, sans distinction d’ordres; et encore en ce qu’on n’a pas laissé le temps de pouvoir rédiger avec soin les propositions particulières que chaque assemblée de district aurait pu faire, pour contribuer à la rédaction du cahier général : En conséquence, l’assembiée demande que, pour éviter de tels inconvénients, il soit avisé dans la prochaine tenue des Etats généraux au moyen de fixer une forme de convocation générale, et telle qu’en réunissant tous les citoyens de cette grande ville, elle procure à chacun d’eux le double avantage de faire connaître son vœu personnel, et de profiter des lumière de tous ; n’entendant néanmoins, ladite assemblée, que la présente protestation puisse retarder la tenue si désirée des Etats généraux, et priver le royaume des fruits qu’il doit se promettre de la réunion des connaissances, du zèle et des représentants de toute la nation. L’assemblée se bornera à présenter ici l’aperçu général des grands objets qui doivent occuper les députés aux Etats généraux, le temps ne lui permettant pas de donner à des matières aussi importantes, le développement qu’elles exigeraient, mais sur lequel il s’en rapporte avec confiance aux lumières et au zèle de ses représentants. Constitution. Art. 1er Aucune loi désormais ne pourra devenir obligatoire qu’elle n’ait été délibérée et consentie par les Etats généraux sous l’autorité du Roi. 1 . Il sera établi et reconnu comme maxime fondamentale, et qui seule peut assurer la tranquillité et la propriété des citoyens, que lés Etats généraux ont seuls le droit de consentir les emprunts et les impôts. 2. Les impôts ne pourront être accordés que pour un temps limité. 3. Les Etats généraux feront une loi constitutionnelle de leur retour périodique à des époques certaines. Il serait à désirer que ce terme ne pût jamais excéder trois ans. 4. 11 sera également reconnu et irrévocablement assuré, par une loi fondamentale, que tous les ordres doivent contribuer aux impôts, et dans la même proportion, sans qu’il puisse en être établi aucun qui frappe exclusivement sur le tiers-état ; qu’en conséquence, l’impôt de franc-fief, et tous autres personnels au tiers - état, seront et demeureront dès ce moment anéantis et remplacés, s’il est jugé nécessaire, par un autre impôt commun à tous les ordres. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [Paris, in tra muros.] 301 blé en l’église des Mathurins,sur le bruit-gui s’est répandu que MM. les officiers de ville étaient disosés à ne point recevoir de dépôt dudit procès-ver-al, ni le cahier de l’assemblée, ladite assemblée a arrêté qu’elle continuerait de tenir, jusqu’à ce que les électeurs par elle nommés, et qui se transporteront ceiourd’hui à l’hôtel de ville, en exécution de l’article 22 du règlement du 13 du présent mois, soient venus lui rendre compte, ou l’aient informée de la manière dont ils auront été reçus. Arrêté, en outre, qu’il sera fait deux originaux, tant du procès-verbal que du cahier, dont l’un restera entre les mains du secrétaire. Fait en ladite assemblée tenante, le mercredi 22 avril 1789. Signé Gaillaü, président ; ÂGIER, secrétaire. Et ledit jour, 22 avril 1789, 10 heures du soir, MM. les électeurs, de retour de l’hôtel de ville, ayant annoncé à l’assemblée que leur procès-verbal avait été reçu, que l’on était occupé à former la liste générale des élections, et que demain jeudi, dès le grand matin, M. Agier devait recevoir la liste particulière des électeurs du présent district, le procès-verbal a été clos définitivement, et l’assemblée s’est séparée. Signé Agier, Treilhard, Blonde, anciens avocats au parlement ; GaüCHEZ, dessinateur et graveur ; CAFFIN, marchand chapelier ; Baudoin, MOUTARD, GloüSIER, imprimeur s-libraires-, Boul-LANGER, marchand papetier ; SERPAUD, avocat au parlement ; Choron, notaire ; GÉRARD DE MELCY, procureur au parlement. Gaillau, président ; Agier, secrétaire. Discours de MM. les députés de rassemblée de la noblesse convoquée aux Bernardins. Messieurs, L’assemblée, partielle de la noblesse séante aux Bernardins, nous a chargés de témoigner à nos concitoyens du tiers le regret que nous éprouvons dè la dissolution de cette commune, où tous les citoyens, sans distinction d’ordre, confondaient paternellement tous leurs nœuds dans l’intérêt public et général ; que si nous nous sommes soumis aujourd’hui à cette disposition pour ne pas nous rendre coupables d’avoir différé les Etats généraux, nous n’en espérons pas moins fermement de la justice du Roi et de celle des Etats généraux le rétablissement de cette commune si précieuse ; qu’en attendant, nous adhérons de tous nos cœurs à la résolution prise par la noblesse de toutes les provinces, de supporter toutes les contributions publiques, dans la plus parfaite égalité, avec nos concitoyens du tiers. Signé Le comte de Lally-Tollendal, président et député, et Bigeon, secrétaire. Le comte de Lally-Tollendal, président de l’assemblée partielle de la noblesse convoquée aux Bernardins, et député vers les assemblées de ce lieu. Le chevalier d’Aubocide, député. Discours de MM. les députés de l'assemblée de la noblesse convoquée en la maison de Sorbonne. Messieurs, L’assemblée de la noblesse du quatorzième département, assemblée dans la même maison de Sorbonne, où se tient celle des communes, a l’honneur de vous porter son vœu sur la confraternité des deux ordres, et sur la renonciation particulière à ses privilèges pécunaires, pour partager avec vous tous les impôts dans une proportion égale. Signé Le vicomte de La Grange ; le comte de Malestroist-Pontkalleck, membres des États de Bretagne. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris , tenue dans l'église de Sorbonne, les 21 et 22 avril 1789 (1). L’assemblée proteste, avant toutes choses , contre le mode de convocation des assemblées de district, en ce que les intérêts de la capitale s’y trouvent blessés par la destruction de la commune, dont tous les habitants ont fait partie jusqu’à présent, sans distinction d’ordres; et encore en ce qu’on n’a pas laissé le temps de pouvoir rédiger avec soin les propositions particulières que chaque assemblée de district aurait pu faire, pour contribuer à la rédaction du cahier général : En conséquence, l’assembiée demande que, pour éviter de tels inconvénients, il soit avisé dans la prochaine tenue des Etats généraux au moyen de fixer une forme de convocation générale, et telle qu’en réunissant tous les citoyens de cette grande ville, elle procure à chacun d’eux le double avantage de faire connaître son vœu personnel, et de profiter des lumière de tous ; n’entendant néanmoins, ladite assemblée, que la présente protestation puisse retarder la tenue si désirée des Etats généraux, et priver le royaume des fruits qu’il doit se promettre de la réunion des connaissances, du zèle et des représentants de toute la nation. L’assemblée se bornera à présenter ici l’aperçu général des grands objets qui doivent occuper les députés aux Etats généraux, le temps ne lui permettant pas de donner à des matières aussi importantes, le développement qu’elles exigeraient, mais sur lequel il s’en rapporte avec confiance aux lumières et au zèle de ses représentants. Constitution. Art. 1er Aucune loi désormais ne pourra devenir obligatoire qu’elle n’ait été délibérée et consentie par les Etats généraux sous l’autorité du Roi. 1 . Il sera établi et reconnu comme maxime fondamentale, et qui seule peut assurer la tranquillité et la propriété des citoyens, que lés Etats généraux ont seuls le droit de consentir les emprunts et les impôts. 2. Les impôts ne pourront être accordés que pour un temps limité. 3. Les Etats généraux feront une loi constitutionnelle de leur retour périodique à des époques certaines. Il serait à désirer que ce terme ne pût jamais excéder trois ans. 4. 11 sera également reconnu et irrévocablement assuré, par une loi fondamentale, que tous les ordres doivent contribuer aux impôts, et dans la même proportion, sans qu’il puisse en être établi aucun qui frappe exclusivement sur le tiers-état ; qu’en conséquence, l’impôt de franc-fief, et tous autres personnels au tiers - état, seront et demeureront dès ce moment anéantis et remplacés, s’il est jugé nécessaire, par un autre impôt commun à tous les ordres. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 302 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra mnros. 5. La responsabilité des ministres, tant pour leur administration que pour l’emploi des fonds qui leur seront confiés, sera établie comme une maxime sans laquelle le bon ordre ne peut ja-maie subsister : ils seront tenus de rendre compte tous les ans dans la forme qui sera prescrite par les Etats généraux. 6. On assurera comme une loi sacrée la liberté individuelle des citoyens. Celle de la presse sera également assurée , avec les précautions que le bon ordre exige, mais en telle sorte que la liberté soit dirigée sans être enfreinte. 7. Les habitants des colonies françaises d’Amérique, étant citoyens de la même patrie, seront désormais convoqués, et assisteront par leurs députés aux Etats généraux qui doivent représenter la nation française dans son intégrité. 8. Les Etats généraux régleront la forme de leurs convocations pour l’avenir, et décideront, dans la prochaine tenue, la question de savoir si l’on doit opiner par ordre ou par tête. 9. Les articles précédents accordés et sanctionnés, les Etats généraux s’attacheront à connaître : 1° l’état au vrai de la situation actuelle des finances ; 2° arrêteront toutes les économies, les suppressions et réductions des pensions et autres dépenses non nécessaires, pour parvenir à acquitter la dette nationale; 3° ils fixeront les dépenses nécessaires de chaque département, et les secours convenables pour en faire le service, dont il sera pareillement rendu compte annuellement, dans la forme qui sera déterminée par les Etats généraux. 10. Les députés aux Etats généraux demanderont la réformation de tout ce qu’il y a de défectueux dans nos lois civiles, et plus encore dans les lois criminelles qui intéressent si essentiellement tout ce que l’homme a de plus cher, l’honneur et la vie. 11 est bien à souhaiter surtout que les peines soient mieux graduées et qu’en réservant la peine de mort pour les crimes énormes, on évite dans ce cas-là même les supplices attroces, et qu’il n’y ait plus à l’avenir qu’un même genre de supplice pour les citoyens de tous les ordres. 11. Une réforme moins importante sans doute, mais néanmoins très-essentielle pour le bien de l’agriculture, dont on ne s’est pas assez occupé dans le royaume le plus fertile, et le plus propre à rassembler les productions du monde entier, est la suppression des capitaineries, et la destruction des lapins, mêmes dans les terres particulières. 12. Enfin on demandera la suppression des jeux de hasard , celle des loteries, établissement immoral et cruel, qui expose le sort des familles aux caprices de la fortune, et celle de l’agiotage, dont l’effet est d’enrichir les uns sans aucun travail utile de leur part, et de ruiner les autres qui se laissent entraîner à de mauvaises spéculations. Ces accroissements et ces diminutions subites de fortunes, font dans l’ordre politique des secousses toujours funestes et dangereuses. Du commerce. Art. 2. Il n’est pas possible d’entrer dans les détails qu’exigerait cette portion importante de la richesse nationale; mais présentons quelques idées générales, que les députés aux Etats généraux voudront bien développer. 1. On demandera donc que le commerce national soit protégé et dégagé de toutes entraves ; qu’en conséquence toutes les douanes de l’intérieur du royaume soient portées sur les frontières. 2. Qu’il soit pris des précautions efficaces pour assurer un approvisionnement suffisant, au royaume, et prévenir les disettes et les chertés, avant qu’aucune exportation de grains et de farines soit permise. 3. Qu’il soit également pris de justes mesures pour empêcher et pour punir même toute espèce d’accaparement sur les grains et autres denrées de première nécessité. 4. Qu’il soit avisé aux moyens d’assurer la bonne foi dans le commerce, et de prévenir et punir les banqueroutes frauduleuses. 5. En conséquence, qu’il ne soit plus accordé de lettres d’Etat, saufs-conduits, lettre de répit, arrêts ou lettres de surséance, tous moyens propres à enhardir la mauvaise foi, et que les lieux privilégiés ne puissent plus servir de refuge pour soustraire les débiteurs injustes aux poursuites de leurs créanciers. 6. Que, pour l’avantage du commerce, on établisse dans tout le royaume l’uniformité des poids et mesures, même à l’égard des fonds de terres ; en sorte que les noms d’arpent, boisseaux, journal, etc., présentent toujours à l’esprit une idé j juste et partout la même. Demandes particulières à la ville de Paris. Art. 3. Les citoyens de la bonne ville de Paris ont eu la douleur, dans ces derniers temps, de se voir renfermer dans une enceinte de murs qui, en leur dérobant le spectacle de la campagne et les beautés de la nature, les a privés de la salubrité de l’air. Les auteurs d’un projet si humiliant pour la capitale n’ont pas considéré qu’en doublant l’enceinte de la ville, ils doubleraient la difficulté de la garde, et qu’un circuit de sept lieues exigerait une armée de gens oisifs et onéreux par leur inutilité, leur consommation et leur paye. 1. On demandera donc que ce mur soit démoli, et que les barrières, si même on les estime nécessaires, soient rétablies dans leur ancien état, sauf à les supprimer tout à fait si, par un système dont on croit l’exécution très-possible, on parvient à retrancher ou à modifier l’impôt indirect, et, par cette raison, infiniment onéreux, sur les consommations. La seule objection est la dépense faite. Mais elle peut n’être pas tout à fait perdue ; et la démolition de ces guérites ridiculement fastueuses, destinées à loger des commis, peut servir à construire les hôpitaux qu’on avait annoncés à la capitale, et opérera deux biens à la fois, en rendant à tous la liberté, et aux malheureux la santé et la vie. Quel monarque que celui qui saura ainsi tirer le bien du mal, et que de bénédictions il se prépare ! 2. Les députés du tiers-état de la ville de Paris sont invités à profiter de toutes les lumières qui se trouvent répandues dans les différents cahiers des différents bailliages du royaume, pour assurer, autant qu’il sera en leur pouvoir, la gloire du trône et le bonheur des citoyens. C’est un trésor commun dont les ressources doivent profiter à tout le monde. 3. Us demanderont encore qu’il soit avisé aux moyens de réformer les abus qui peuvent s’être glissés dans l’administration des revenus municipaux, et qu’à l’exemple des ministre et de tous les autres administrateurs des deniers publics, les officiers municipaux rendent compte tous les ans à la commune, en la forme qui sera réglée par les Etats généraux, des revenus d’octroi et autres appartenant à la ville, et de leur emp loi, qui sera [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 303 délivré en commun lorsqu'il s’agira d’entreprises importantes. 4. Que, conformément aux lois générales du royaume, l’élection des prévôt des marchands, échevins, quarteniers, etc., appartienne à la commune, et se fasse librement et dans la forme qui sera déterminée par les Etats généraux ; en sorte que ces différents officiers puissent être véritablement les représentants et mandataires de la commune. 5. Que les anciens privilèges accordés par nos rois à leur bonne ville de Paris, et que d’autres villes moins importantes ont conservés, lui soient rendus. 6. Que l’impôt connu sous le nom de logement de gens de guerre soit aboli, comme étant aujourd’hui sans objet, ou du moins infiniment plus considérable que ne l’exige sa destination; et qu’à l’effet de connaître la mesure du besoin, s’il en existe, les Etats généraux se feront représenter les rôles de cette imposition, et se feront rendre compte de l’emploi des sommes reçues. 7. Que la capitation de la ville de Paris soit fixée par un règlement précis, qui préserve les citoyens de l’arbitraire odieux qui règne dans la répartition de cet impôt. 8. Que le droit de petite voirie soit supprimé, ou du moins fixé d’une manière si modérée, qu’il cessera d’être une surcharge onéreuse pour les citoyens de la capitale. 9. Enfin, que les députés de la ville de Paris réclament aux Etats généraux, contre tous les abus préjudiciables aux intérêts des habitants de cette ville, et qui peuvent exciter les plaintes des différentes assemblées de district. On croit devoir comprendre au nombre de ces abus la multiplicité des petits spectacles, qui corrompent en même temps et le goût et les mœurs, et sont pour le peuple une source d’oisiveté et de dérèglement. Fait et arrêté dans l’assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris, tenue dans l’église de Sorbonne, les 21 et 22 avril 1789. Signé Minier, avocat au parlement, commissaire et électeur; Maton, commissaire et électeur; Arsandaux, avocat au parlement, commissaire; Théry, docteur en médecine, commissaire; Voisin, commissaire; Gauche, avocat au parlement, commissaire: Ponce, commissaire; Le Camus, commissaire et électeur; Le Long, commissaire et électeur; Gourtin, avocat au parlement, président; Pain, secrétaire. CAHIER Du tiers-état du district assemblé dans l'église de Saint-Eustache, à Paris , le 21 avril 1789 (1). Art. 1er. Les électeurs ne pourront prendre les députés que dans les membres du tiers-état. Art. 2. Les députés ne délibéreront aux Etats généraux sur aucun objet particulier, avant que la constitution de l’Etat n’ait été fixée et arrêtée. Art. 3. Pouvoir législatif dans la nation. Art. 4. Le nombre des députés de chaque ordre proportionné à la population. Art. 5. La fixation du retour périodique des Etats généraux. Art. 6. Celle des formes et du délai des convocations pour les assemblées relatives aux Elats généraux. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la J Bibliothèque du Sénat. Art. 7. La liberté absolue de toute délibération. Art. 8. Opiner aux Etats généraux par tête. Art. 9. La réforme dans l’élection des membres des municipalités, qui a lieu sans le concours des citoyens compris dans ces municipalités. Art. 10. La liberté individuelle. Art. 11. La faculté de se transporter librement dans tous les lieux de la nomination du Roi, et môme hors du royaume. Art. 12. La liberté de la presse. Art. 13. Le droit de n’être jugé que par des tribunaux légalement constitués par la nation. Art. 14. Consolider la dette publique. Art. 15. La réforme de la justice criminelle. Art. 16. La simplification des formes judiciaires. Art. 17. Le respect pour les propriétés, à moins quelles ne soient utiles à la chose publique, et à la charge d’indemniser. Art. 18. La responsabilité des ministres. Art. 19. Le respect dû aux secrets que les citoyens confient sous leur cachet aux agents despostes. Art. 20. La concurrence entre les ordres pour tous les emplois civils, militaires et ecclésiastiques, et l’abolition du Concordat. Art. 21. L’égalité des peines envers les criminels, sans distinction de rang ni d’état. Art. 22. La suppression des barrières et droits d’entrée. Art. 23. La perception des impôts à attribuer aux Etats provinciaux, avec versement direct dans le trésor national. Art. 24. L’assujettissement de tous les ordres aux contributions et aux charges publiques. Art. 25. Abolir la vénalité des charges. Art. 26. La suppression de tout privilège exclusif, à moins qu’il ne s’agisse d’une découverte ou d’un ouvrage qui puisse être considéré comme une propriété. Art. 27. L’admission des colonies aux Etats généraux, comme faisant partie de la nation. Art. 28. La faculté de recevoir des évêques les dispenses de parenté dans tous les degrés pour lesquels la cour de Rome les accorde. Art. 29. La suppression des billets de confession et autres formes iusolites tendant à établir des tribunaux inquisiteurs, ou des opinions capables d’alarmer les consciences. Art. 30. La défense de prononcer des vœux en religion avant l’âge de trente ans. Art. 31. La suppression des ordres religieux reconnus inutiles, ou plutôt leur extinction successive, et l’application des biens dont ils jouissent à des objets d’utilité publique. Art. 32. Les mariages mixtes avec les effets civils. Art. 33. La suppression du droit de franc-fief. Art. 34. La réduction du droit de chasse, excepté celle du souverain, dans les limites qui circonscrivent chaque fief. Art. 35. Abolition des arrêts de surséance et de répit, des sauf-conduits, évocations, commissions, lettres de cachet, et privilège du Temple et lieux semblables. Art. 36. Suppression du droit de committimus , de celui du scel attributif et autres du même genre. Art. 37. L’exemption de tous droits et impôts eu faveur des pères et mères de dix enfants. Art. 38. La fixation d’un sort suffisant aux curés et vicaires réduits à portion congrue. Art. 39. Que le corps national s’occupe, par des délégués, d’améliorer et de surveiller l’éducation publique. Art. 40. L’éducation et l’emploi des enfants trouvés. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 303 délivré en commun lorsqu'il s’agira d’entreprises importantes. 4. Que, conformément aux lois générales du royaume, l’élection des prévôt des marchands, échevins, quarteniers, etc., appartienne à la commune, et se fasse librement et dans la forme qui sera déterminée par les Etats généraux ; en sorte que ces différents officiers puissent être véritablement les représentants et mandataires de la commune. 5. Que les anciens privilèges accordés par nos rois à leur bonne ville de Paris, et que d’autres villes moins importantes ont conservés, lui soient rendus. 6. Que l’impôt connu sous le nom de logement de gens de guerre soit aboli, comme étant aujourd’hui sans objet, ou du moins infiniment plus considérable que ne l’exige sa destination; et qu’à l’effet de connaître la mesure du besoin, s’il en existe, les Etats généraux se feront représenter les rôles de cette imposition, et se feront rendre compte de l’emploi des sommes reçues. 7. Que la capitation de la ville de Paris soit fixée par un règlement précis, qui préserve les citoyens de l’arbitraire odieux qui règne dans la répartition de cet impôt. 8. Que le droit de petite voirie soit supprimé, ou du moins fixé d’une manière si modérée, qu’il cessera d’être une surcharge onéreuse pour les citoyens de la capitale. 9. Enfin, que les députés de la ville de Paris réclament aux Etats généraux, contre tous les abus préjudiciables aux intérêts des habitants de cette ville, et qui peuvent exciter les plaintes des différentes assemblées de district. On croit devoir comprendre au nombre de ces abus la multiplicité des petits spectacles, qui corrompent en même temps et le goût et les mœurs, et sont pour le peuple une source d’oisiveté et de dérèglement. Fait et arrêté dans l’assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris, tenue dans l’église de Sorbonne, les 21 et 22 avril 1789. Signé Minier, avocat au parlement, commissaire et électeur; Maton, commissaire et électeur; Arsandaux, avocat au parlement, commissaire; Théry, docteur en médecine, commissaire; Voisin, commissaire; Gauche, avocat au parlement, commissaire: Ponce, commissaire; Le Camus, commissaire et électeur; Le Long, commissaire et électeur; Gourtin, avocat au parlement, président; Pain, secrétaire. CAHIER Du tiers-état du district assemblé dans l'église de Saint-Eustache, à Paris , le 21 avril 1789 (1). Art. 1er. Les électeurs ne pourront prendre les députés que dans les membres du tiers-état. Art. 2. Les députés ne délibéreront aux Etats généraux sur aucun objet particulier, avant que la constitution de l’Etat n’ait été fixée et arrêtée. Art. 3. Pouvoir législatif dans la nation. Art. 4. Le nombre des députés de chaque ordre proportionné à la population. Art. 5. La fixation du retour périodique des Etats généraux. Art. 6. Celle des formes et du délai des convocations pour les assemblées relatives aux Elats généraux. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la J Bibliothèque du Sénat. Art. 7. La liberté absolue de toute délibération. Art. 8. Opiner aux Etats généraux par tête. Art. 9. La réforme dans l’élection des membres des municipalités, qui a lieu sans le concours des citoyens compris dans ces municipalités. Art. 10. La liberté individuelle. Art. 11. La faculté de se transporter librement dans tous les lieux de la nomination du Roi, et môme hors du royaume. Art. 12. La liberté de la presse. Art. 13. Le droit de n’être jugé que par des tribunaux légalement constitués par la nation. Art. 14. Consolider la dette publique. Art. 15. La réforme de la justice criminelle. Art. 16. La simplification des formes judiciaires. Art. 17. Le respect pour les propriétés, à moins quelles ne soient utiles à la chose publique, et à la charge d’indemniser. Art. 18. La responsabilité des ministres. Art. 19. Le respect dû aux secrets que les citoyens confient sous leur cachet aux agents despostes. Art. 20. La concurrence entre les ordres pour tous les emplois civils, militaires et ecclésiastiques, et l’abolition du Concordat. Art. 21. L’égalité des peines envers les criminels, sans distinction de rang ni d’état. Art. 22. La suppression des barrières et droits d’entrée. Art. 23. La perception des impôts à attribuer aux Etats provinciaux, avec versement direct dans le trésor national. Art. 24. L’assujettissement de tous les ordres aux contributions et aux charges publiques. Art. 25. Abolir la vénalité des charges. Art. 26. La suppression de tout privilège exclusif, à moins qu’il ne s’agisse d’une découverte ou d’un ouvrage qui puisse être considéré comme une propriété. Art. 27. L’admission des colonies aux Etats généraux, comme faisant partie de la nation. Art. 28. La faculté de recevoir des évêques les dispenses de parenté dans tous les degrés pour lesquels la cour de Rome les accorde. Art. 29. La suppression des billets de confession et autres formes iusolites tendant à établir des tribunaux inquisiteurs, ou des opinions capables d’alarmer les consciences. Art. 30. La défense de prononcer des vœux en religion avant l’âge de trente ans. Art. 31. La suppression des ordres religieux reconnus inutiles, ou plutôt leur extinction successive, et l’application des biens dont ils jouissent à des objets d’utilité publique. Art. 32. Les mariages mixtes avec les effets civils. Art. 33. La suppression du droit de franc-fief. Art. 34. La réduction du droit de chasse, excepté celle du souverain, dans les limites qui circonscrivent chaque fief. Art. 35. Abolition des arrêts de surséance et de répit, des sauf-conduits, évocations, commissions, lettres de cachet, et privilège du Temple et lieux semblables. Art. 36. Suppression du droit de committimus , de celui du scel attributif et autres du même genre. Art. 37. L’exemption de tous droits et impôts eu faveur des pères et mères de dix enfants. Art. 38. La fixation d’un sort suffisant aux curés et vicaires réduits à portion congrue. Art. 39. Que le corps national s’occupe, par des délégués, d’améliorer et de surveiller l’éducation publique. Art. 40. L’éducation et l’emploi des enfants trouvés. 304 [Éta,ts gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, inlra muros.] Art. 41 . Abolir la confiscation des biens des condamnés. Art. 42. Les moyens de fournir le premier aliment aux enfants, sans que la liberté de leurs parents soit menacée. Art. 43. La suppression de la gabelle, ou remplacement de ce droit par un autre qui ne puisse ni exciter 1a. contrebande, ni peupler les galères de faux sauniers. Art. 44. L'unité des poids et des mesures dans tout le royaume. Art. 45. La publicité à donner aux délibérations des administrations municipales, et surtout à celles des hôpitaux. Art. 46. Les mesures propres à assurer dans cette capitale 1’approvisionnement des objets de première nécessité, et notamment le blé et le bois. Art. 47. Celles capables d’extirper l’esprit d’agiotage qui règne à Paris, et qui empêche des opérations où se trouveraient réunis un lucre honnête pour celui qui les entreprendrait, et la prospérité publique. Art. 48. Un impôt sur les voitures, que le luxe multiplie dans la capitale, et qui, en faisant courir des risques aux pauvres, pourraient servir du moins à des embellissements publics. Art. 49. La récompense des cultivateurs intelligents qui auront augmenté les moyens de féconder la terre, ou de tirer de ses productions un parti plus avantageux pour la subsistance ou pour le commerce, et celle des auteurs de découvertes intéressantes pour l’humanité. Art. 50. L’encouragement de tous ceux qui travailleront avec succès à améliorer les différentes espèces d’animaux utiles, et principalement les bestiaux. Art. 51. La manière d’employer les mendiants valides, en les occupant d’unè manière utile et pour eux et pour l’Etat. Art. 52. Faculté de stipuler l’intérêt dans les prêts d’argent à terme. Art. 53. Les Etats généraux devant s’occuper essentiellement de l’agriculture et du commerce, les vraies sources des richesses de l’Etat, les députés réclameront spécialement à cet égard l’examen des abus résultant du commerce des grains, et du traité de commerce fait entre la France et l’Angleterre. Art. 54. La résidence des évêques et bénéficiers, à peine de confiscation de leurs revenus, pendant tout Je temps que durera leur absence, en faveur des hôpitaux Art. 55. La suppression générale des loteries. Fait et arrêté en notre assemblée tenue en la paroisse de Saint-Eustache, depuis le 21 avril 1789, neuf heures du matin, jusqu’à cejourd’hui 22 avril, même année, sept heures du matin, sans interruption. Signé Gorrant; Bancal Desissarts, secrétaire-greffier de l’assemblée : et Gavet, secrétaire-greffier, adjoint. PROCÈS-VERBAL De l'assemblée partielle de l'ordre du tiers-état de la ville de Paris, tenue à l'abbaye Saint-Germain-des-Prés , les 22 et 23 avril 1789, avec les pouvoirs et instructions données à ses représentants (1). L’an 1789, le mardi 22 avril, en l’assemblée du (1) Nous publions ce document d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. quartier Saint-Germain-des-Prés, premier district de l’abbaye Saint-Germain, les bourgeois de Paris, domiciliés dans ledit quartier, assemblés en vertu de la lettre du Roi du 13 avril présent mois, se sont rendus en l’église de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, où, étant arrivés à neuf heures du matin, il a été procédé, par M. Hubert, quartenier, à l’appel ; après lequel appel, mondit sieur Hubert a déclaré qu’il était disposé à faire tout ce que ses concitoyens assemblés désireraient. Sur quoi il a été délibéré de procéder par la voie du scrutin, à l’instant, à la nomination d’un président ; et pour parvenir à la publication dudit scrutin, M. Le Roi, ancien avocat au parlement, demeurant rue de Seine, a été choisi unanimement comme l’un des plus anciens de l’assemblée. MM. Regnier, Dubois, Lejeune etDulion, quatre des notables, ont été pareillement choisis pour assister mondit sieur Le Roi et vérifier les scrutins. Par le résultat dudit scrutin, le choix de la présidence est tombé sur M. Camus, ancien avocat au parlement, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, demeurant rue Guénégaud; lequel ayant accepté ladite qualité de président, MM. Fortin, négociant, demeurant rue de Bussy, etHémart, ancien notaire, demeurant rue de Seine, ont été nommés secrétaires, à l’effet de rédiger le procès-verbal de la présente assemblée en double minute; et, de suite, il a été procédé, ainsi qu’il suit, à la reconnaissance des noms, qualités et demeures de tous les membres présents, par la vérification des titres reconnus suffisants, qu’il a plu à chacun d’eux de représenter, et à l’enregistrement des noms, qualités et demeures des personnes présentes à l’assemblée, au nombre de quatre cent trente-neuf. M. le président ayant fait observe}* que le temps de la vérification pourrait être d’ailleurs employé, soit à la lecture des mémoires qu’aucuns des membres auraient à proposer, soit au développement des moyens et des idées qu’ils croiront utiles au bien général; il a été, en effet, présenté plusieurs réflexions et lu différents mémoires, également dignes de l’attention de l’assemblée, dictés par un vrai patriotisme. La nature et l’importance des opérations ont fait penser à M. le président qu’il serait utile de députer des membres de l’assemblée à celles des autres districts, auprès desquels le temps et la distance permettra de se rendre, à l’effet de les instruire de ce qui s’est passé jusqu’à présent, et de leur porter les témoignages de l’union que les circonstances doivent rendre aussi précieuse qu’elle est nécessaire; et sur-le-champ MM. Guillot de Blancheville et Vielle, tous deux procureurs au parlement; MM. Odent, commissaire, et Jan-son; MM. Nyon, Céard; MM. Cheradame eiGhalin; MM. Julhiard et Louault; MM. Regnier et Guey-mard ; MM. Deversy et Molion; MM. Geoffroy et Lefèvre; MM. Boicervoise et Demonge, et successivement plusieurs autres membres ont été nommes pour former diverses députations. Sur l’avertissement donné que deux députés de la noblesse partielle, séante au département des Petits-Pères, se présentaient, plusieurs membres Ont été chargés de les recevoir et les introdùire ; ils sont entrés, et ont exposé que l’objet de leur mission était d’annoncer à leurs concitoyens du tiers-état le véritable regret dont la noblesse, qu’ils représentaient, était pénétrée de la division que l’on avait opérée pour les assemblées, au lieu, comme par le passé, de ne faire qu’une assemblée de la commune de Paris, composée 304 [Éta,ts gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, inlra muros.] Art. 41 . Abolir la confiscation des biens des condamnés. Art. 42. Les moyens de fournir le premier aliment aux enfants, sans que la liberté de leurs parents soit menacée. Art. 43. La suppression de la gabelle, ou remplacement de ce droit par un autre qui ne puisse ni exciter 1a. contrebande, ni peupler les galères de faux sauniers. Art. 44. L'unité des poids et des mesures dans tout le royaume. Art. 45. La publicité à donner aux délibérations des administrations municipales, et surtout à celles des hôpitaux. Art. 46. Les mesures propres à assurer dans cette capitale 1’approvisionnement des objets de première nécessité, et notamment le blé et le bois. Art. 47. Celles capables d’extirper l’esprit d’agiotage qui règne à Paris, et qui empêche des opérations où se trouveraient réunis un lucre honnête pour celui qui les entreprendrait, et la prospérité publique. Art. 48. Un impôt sur les voitures, que le luxe multiplie dans la capitale, et qui, en faisant courir des risques aux pauvres, pourraient servir du moins à des embellissements publics. Art. 49. La récompense des cultivateurs intelligents qui auront augmenté les moyens de féconder la terre, ou de tirer de ses productions un parti plus avantageux pour la subsistance ou pour le commerce, et celle des auteurs de découvertes intéressantes pour l’humanité. Art. 50. L’encouragement de tous ceux qui travailleront avec succès à améliorer les différentes espèces d’animaux utiles, et principalement les bestiaux. Art. 51. La manière d’employer les mendiants valides, en les occupant d’unè manière utile et pour eux et pour l’Etat. Art. 52. Faculté de stipuler l’intérêt dans les prêts d’argent à terme. Art. 53. Les Etats généraux devant s’occuper essentiellement de l’agriculture et du commerce, les vraies sources des richesses de l’Etat, les députés réclameront spécialement à cet égard l’examen des abus résultant du commerce des grains, et du traité de commerce fait entre la France et l’Angleterre. Art. 54. La résidence des évêques et bénéficiers, à peine de confiscation de leurs revenus, pendant tout Je temps que durera leur absence, en faveur des hôpitaux Art. 55. La suppression générale des loteries. Fait et arrêté en notre assemblée tenue en la paroisse de Saint-Eustache, depuis le 21 avril 1789, neuf heures du matin, jusqu’à cejourd’hui 22 avril, même année, sept heures du matin, sans interruption. Signé Gorrant; Bancal Desissarts, secrétaire-greffier de l’assemblée : et Gavet, secrétaire-greffier, adjoint. PROCÈS-VERBAL De l'assemblée partielle de l'ordre du tiers-état de la ville de Paris, tenue à l'abbaye Saint-Germain-des-Prés , les 22 et 23 avril 1789, avec les pouvoirs et instructions données à ses représentants (1). L’an 1789, le mardi 22 avril, en l’assemblée du (1) Nous publions ce document d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. quartier Saint-Germain-des-Prés, premier district de l’abbaye Saint-Germain, les bourgeois de Paris, domiciliés dans ledit quartier, assemblés en vertu de la lettre du Roi du 13 avril présent mois, se sont rendus en l’église de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, où, étant arrivés à neuf heures du matin, il a été procédé, par M. Hubert, quartenier, à l’appel ; après lequel appel, mondit sieur Hubert a déclaré qu’il était disposé à faire tout ce que ses concitoyens assemblés désireraient. Sur quoi il a été délibéré de procéder par la voie du scrutin, à l’instant, à la nomination d’un président ; et pour parvenir à la publication dudit scrutin, M. Le Roi, ancien avocat au parlement, demeurant rue de Seine, a été choisi unanimement comme l’un des plus anciens de l’assemblée. MM. Regnier, Dubois, Lejeune etDulion, quatre des notables, ont été pareillement choisis pour assister mondit sieur Le Roi et vérifier les scrutins. Par le résultat dudit scrutin, le choix de la présidence est tombé sur M. Camus, ancien avocat au parlement, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, demeurant rue Guénégaud; lequel ayant accepté ladite qualité de président, MM. Fortin, négociant, demeurant rue de Bussy, etHémart, ancien notaire, demeurant rue de Seine, ont été nommés secrétaires, à l’effet de rédiger le procès-verbal de la présente assemblée en double minute; et, de suite, il a été procédé, ainsi qu’il suit, à la reconnaissance des noms, qualités et demeures de tous les membres présents, par la vérification des titres reconnus suffisants, qu’il a plu à chacun d’eux de représenter, et à l’enregistrement des noms, qualités et demeures des personnes présentes à l’assemblée, au nombre de quatre cent trente-neuf. M. le président ayant fait observe}* que le temps de la vérification pourrait être d’ailleurs employé, soit à la lecture des mémoires qu’aucuns des membres auraient à proposer, soit au développement des moyens et des idées qu’ils croiront utiles au bien général; il a été, en effet, présenté plusieurs réflexions et lu différents mémoires, également dignes de l’attention de l’assemblée, dictés par un vrai patriotisme. La nature et l’importance des opérations ont fait penser à M. le président qu’il serait utile de députer des membres de l’assemblée à celles des autres districts, auprès desquels le temps et la distance permettra de se rendre, à l’effet de les instruire de ce qui s’est passé jusqu’à présent, et de leur porter les témoignages de l’union que les circonstances doivent rendre aussi précieuse qu’elle est nécessaire; et sur-le-champ MM. Guillot de Blancheville et Vielle, tous deux procureurs au parlement; MM. Odent, commissaire, et Jan-son; MM. Nyon, Céard; MM. Cheradame eiGhalin; MM. Julhiard et Louault; MM. Regnier et Guey-mard ; MM. Deversy et Molion; MM. Geoffroy et Lefèvre; MM. Boicervoise et Demonge, et successivement plusieurs autres membres ont été nommes pour former diverses députations. Sur l’avertissement donné que deux députés de la noblesse partielle, séante au département des Petits-Pères, se présentaient, plusieurs membres Ont été chargés de les recevoir et les introdùire ; ils sont entrés, et ont exposé que l’objet de leur mission était d’annoncer à leurs concitoyens du tiers-état le véritable regret dont la noblesse, qu’ils représentaient, était pénétrée de la division que l’on avait opérée pour les assemblées, au lieu, comme par le passé, de ne faire qu’une assemblée de la commune de Paris, composée [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. 305 des trois ordres de l’Etat -, qu’ils s’étaient empressés de protester; que néanmoins, pour n’apporter aucun retard qui put préjudicier au grand objet dont on s’occupe, ils s’étaient décidés à suivre le plan tracé par le Roi. Au reste, qu’uniquement dirigés par leur amour pour le bien public et pour ta splendeur de 1 Etat, ils avaient arrêté de renoncer généralement à tous privilèges pécuniaires ; qu’enfin ils demandaient au tiers d’arrêter dès à présent, et pour commencer l’exercice de l’union qu’ils désirent de cimenter à jamais, que les électeurs, par lui nommés, se réuniraient aux électeurs de la noblesse et du clergé pour nommer en commun les quarante députés, savoir : dix pour le clergé, dix pour la noblesse, et vingt pour le tiers, que la ville de Paris doit envoyer aux Etats généraux. A quoi M. le président a répondu, que l’assemblée mettrait en délibération la proposition de Messieurs de la noblesse réunie aux Petits-Pères ; et que dès à présent elle recevait avec reconnaissance une députation qu’elle eût désiré de prévenir, si les travaux n’eussent pas absorbé ses moments ; qu’elle ne veut faire usage de ses efforts que pour concourir au bien général avec la noblesse, dont les sacrifices ne peuvent mériter que déplus en plus l’inviolable attachement de l’ordre du tiers. Cette députation était composée de M. de Vergennes, maître des requêtes, et de M. le chevalier de La Motte. Il est. arrivé successivement plusieurs autres députations des différentes assemblées de la noblesse, savoir : celle séante à l’Oratoire, composée de MM. le marquis du Cret et le chevalier de Castelnau; celle séante à Saint-Martin, de MM. Lelong, Lourdet, et Lourdet de Santerre, maîtres des comptes ; de M. Marchais de Villeneuve, lequel a déclaré ne vouloir être connu à l’assemblée que sous la qualité d’avocat au parlement ; de M. Chan-laire, avocat. Les députés des deux dernières assemblées ont laissé sur le bureau l’expression par écrit de leurs sentiments, lesquels écrits seront joints à un des originaux du présent procès-verbal. Il est arrivé aussi une députation du clergé assemblé à Saint-André-des-Arts, laquelle a témoigné à l’assemblée le désir que le clergé aurait de se trouver réuni avec l’assemblée de la commune. Le président de l’assemblée a exprimé le désir que tous les membres de l’assemblée ne cesseraient d’abord de s’unir à leurs concitoyens, soit ecclésiastiques, soit nobles, et de répondre aux sentiments fraternels dont ils leur donnaient des témoignages si marqués. Quant aux différentes députations adressées par l’assemblée aux autres assemblées des différents districts, le compte que ses députés lui ont rendu de la cordialité et de l’amitié avec laquelle ils avaient été reçus, l’a vivement affectée; mais autant elle avait été touchée de reconnaissance des sentiments fraternels qui lui avaient été témoignés, autant elle a été surprise de ce qui lui a été rapporté par ses députés, que les commissaires du bureau de la ville, qui tenaient les assemblées aux Théatins et aux Grands-Augustins, n’avaient pas voulu introduire les députés dans l’assemblée ; qu’en particulier aux Grands-Augustins, M. Guyot, ancien échevin par charge, avait refusé absolument de présenter les députés à Rassemblée, sous prétexte qu’on ne devait parler qu’à lui, et qu’il n’appartenait qu’à lui de répondre. Dans le nombre des députations fréquentes que Rassemblée a reçues dans la même soirée, elle a vu avec satisfaction l’esprit de concorde etl’harmo-l‘e Série, T. Y. nie qui régnaient dans les assemblées des différents districts, ainsi que le zèle dont tous les membres de la nation étaient animés pour le rétablissement de la liberté et de la chose publique. Dans les écrits qui ont été remis par plusieurs députés de cette assemblée, et parmi les faits dont ils ont rendu compte, elle a remarqué des particularités importantes. Il lui a paru que dans le plus grand nombre des assemblées, on avait refusé de se laisser présider par les commissaires de la ville, à moins qu’ils n’eussent été préal'ablement et librement élus; une déclaration qui a été remise au nom de Rassemblée du district des Jacobins de la rue Saint-Honoré, et qui sera jointe à l’un des originaux du procès-verbal, est signée de M. Dori-val, comme président élu librement, quoiqu’il fut un des commissaires élus du bureau de la ville; les députés de l’assemblée qui se tenait aux Petits-Augustins ont assuré que M. Pochet, qui avait été nommé pour présider par le bureau delà ville, se voyant exclu par les membres de Rassemblée, et ayant écrit audit bureau de ta ville pour savoir la conduite qu’il devait tenir, il lui avait été répondu qu’il devait se conformer aux vues des membres du liers-état. Les députations étant retirées, Rassemblée, après avoir délibéré, a déclaré, en premier lieu qu’elle proteste contre l’exécution que l’on a prétendu donner aux règlements des 28 mars et 13 avril présent mois, contre tout ce qui s’en était suivi et ce qui pourrait s’ensuivre : en ce qu’on voudrait faire exécuter comme loi ce qui ne pouvait avoir, dans les inten tions même du Roi, que le caractère d’instruction ; en ce qu’ils privent Rassemblée du tiers du droit essentiel à toute assemblée libre de choisir ses officiers et son président: droit expressémen t réservé dans les mômes règlements à Rassemblée de la noblesse; en ce qu’ils portent plusieurs atteintes à la constitution de la commune; en ce qu’ils gênent la liberté des élections, et en ce que, par la précipitation inconcevable dont on a fait une nécessité, on a mis les habitants de la ville de Paris presque dans l’impossibilité de proposer leurs plaintes et leurs justes griefs. En second lieu, Rassemblée jugeant indispensable de spécifier les pouvoirs qu’elle entend donner aux personnes qui la représenteront à Rassemblée générale de la ville de Paris, a arrêté de nommer des commissaires pour rédiger, à l’instant, les instructions et pouvoirs de personnes qu’elle députera à ladite assemblée générale ; et ayant procédé à la nomination, les commissaires nommés ont été MM. Popelin, avocat au parlement ;Ifegnier, correspondant des assemblées provinciales ; Cheradame, marchand drapier; Monge, de l’Académie des sciences ; Henri Voisin, horloger ; Loyer, marchand épicier; Hom, avocat au parlement ; Gosson, professeur émérite en l’Université ; Fortin, marchand de draps, rue de Bussy; Dubois, horloger ; Le Jeune, marchand de laine ; Quiret, bourgeois; Boicervoise, avocat au parlement; Le Roy, avocat au parlement; Perard; Bernier, graveur du Roi à la Monnaie. Lesquels se sont sur-le-champ retirés, avec le président de Rassemblée et les secrétaires, dans une des salles de l’abbaye. i Pendant que lesdits commissaires travaillaient ! à la rédaction des pouvoirs et instructions à donner ! aux députés, il est survenu plusieurs nouvelles | députations, entre autres une de Rassemblée qui se ! tenait aux Grands-Augustins, pour excuser, autant que Rassemblée des Augustins pouvait s’en flatter, la conduite de M. Guyot qui la présidait. Pendant 20 306 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] [États gén, 1779. Cahiers.} le même temps aussi, les membres de l’assemblée qui avaient été députés vers les assemblées des différents districts, ont continué à rendre compte de leur mission. MM. Geoffroi et Lefèvre, députés vers la noblesse qui était assemblée au grand Châtelet, ont rapporté qu’ils avaient été reçus par la noblesse comme des frères et des égaux et même avec distinction. Les commissaires ayant achevé le travail dont ils avaient été chargés, il a été fait lecture de leurs projets de pouvoirs et instructions, lesquels, après quelques observations et une mûre délibération, ont été approuvés ainsi qu’il suit : Pouvoirs et instructions donnés aux représentants du district de V abbaye Saint-Germain-des-Prés. CONSTITUTION NATIONALE. Art. 1er. Il sera arrêté qu’à la nation assemblée, réunie au Roi, appartient le droit de faire les lois du royaume. Art. 2. Qu’à la nation seule appartient le droit d’accorder les subsides nécessaires aux besoins de l’Etat. Art. 3. Qu’il ne sera consenti aux Etats généraux aucune contribution , que la constitution nationale n’ait été reconnue. Art. 4. Le retour périodique des Etats généraux sera déterminé de trois ans en trois ans.' Art. 5. Pour opérer ce retour périodique, on fixera, à chaque tenue d’Etats, le jour et le lieu auxquels les prochains Etats s’assembleront, sans qu’il soit besoin d’autre convocation ; déclarant nuis dès à présent, comme pour lors, tous actes qui tendraient à mettre obstacle, directement ou indirectement, à ladite tenue , et traîtres à la patrie tous les auteurs ou fauteurs desdits actes. Art. 6. Expressément enjoint à tous les députés du tiers aux Etats généraux, de ne se soumettre a aucune sujétion ou formalité humiliante lors et dans l’assemblée. Art. 7. Il ne sera porté aucune atteinte à la liberté individuelle, ni à la propriété des corps et des citoyens, par lettres de cachet, arrêts du propre mouvement, ou autres actes de quelque nature que ce puisse être ; en conséquence, nul ne pourra être arrêté qu’après des formes judiciaires, ou, dans tous les cas, il sera remis, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de ses juges naturels. Art. 8. Que la liberté de la presse soit laissée, à la charge par l’auteur et l’imprimeur de mettre leurs noms aux ouvrages et de demeurer, par chacun d’eux , responsables des suites desdits ouvrages. Art. 9. Il sera établi des Etats provinciaux , dont l’organisation sera arrêtée par les Etats généraux, et tous les commissaires départis seront supprimés. Art. 10. Que tous les membres du tiers-état soient admis aux charges et emplois civils , ecclésiastiques et militaires. Art. 11. Qu’il ne soit plus accordé de noblesse à prix d’argent, mais seulement à ceux qui se seront rendus utiles à la patrie, dans le commerce et les sciences comme dans les armes. SUBSIDES. Art. 12. Fixer et consolider la dette nationale. Art. 13. Vérifier les besoins de l’Etat. Art. 14. Les subsides consentis n’auront lieu que jusqu’à la prochaine tenue des Etats généraux. Art. 15. Etablir une caisse nationale, et la responsabilité des ministres. Art. 16. Les subsides de toute nature seront supportés par tous les citoyens indistinctement. Art. 17. Supprimer les fermes du sel et du tabac, et rendre ces objets au commerce. RELIGION, MOEURS, ÉDUCATION. Art. 18. Avertir les prélats et ecclésiastiques de se réformer suivant les règles du saint Evangile et des conciles. Art. 19. Rendre l’entrée du ministère ecclésiastique libre, en suprimant les formules gênantes imaginées depuis le milieu du siècle dernier. Art. 20. Remettre en vigueur l’ordonnance d’Orléans ; en conséquence, supprimer les annotes et autres exactions de pareille nature. Art. 21. Prendre les moyens les plus efficaces pour améliorer et multiplier les facilités d’éducation et instruction, tant dans les villes que dans les campagnes. Art. 22. La suppression absolue des loteries et des maisons de jeu. Art. 23. Prendre les moyens d’encourager l’agriculture, l’industrie, les arts et le commerce, principalement en reculant les barrières aux frontières, et remédiant à toutes les entraves qui gênent la circulation dans l’intérieur du royaume. Art. 24. Anéantir l’abus des arrêts ou lettres de surséance, sauf-conduits, etc., etc. Art. 25. Peser les inconvénients du traité de commerce fait avec l’Angleterre. JUSTICE. Art. 26. Réformer l’administration de la justice civile et criminelle, et ordonner la confection d’un code pénal, qui, proportionnant les peines aux délits, n’excepte ni la fortune ni les rangs. Assurer dès à présent un conseil aux accusés. Art. 27. Aviser à la suppression des justices subalternes, en sorte qu’il n’y ait plus, en France, que deux degrés de juridiction. Art. 28. Supprimer les tribunaux d’exception, ainsi que toutes attributions , commissions ou évocations particulières. Art. 29. Supprimer les capitaineries ; et que tous les enclos soient exceptés de la chasse des seigneurs, et des visites de leurs gardes. VILLE DE PARIS. Art. 30. Donner à la municipalité de Paris une constitution libre; qu’aucuns de ses offices ne soient plus vénaux, mais purement électifs par la commune régulièrement assemblée. Art. 31. Rendre la police à la municipalité. Art. 32. Régler la forme de la convocation et composition des assemblées pour nommer les députés aux Etats. Art. 33. Rendre aux bourgeois de Paris tous les privilèges d’honneur, déclarant tous, d’une commune voix, qu’ils renoncent aux privilèges pécuniaires. Art. 34. Détruire les murs et les barrières qui enchaînent Paris. Art. 35. Construire les hôpitaux, conformément à ce qui avait été ordonné. Art. 36. Pourvoir à la salubrité, en écartant de la ville les inhumations, les tueries et les fonderies. Art. 37. Supprimer la caisse de Poissy. Art. 38. Prévenir les monopoles , procurer des approvisionnements abondants, notamment par la prohibition sévère des compagnies. 307 (États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muïos.] Art. 39. Ordonner la suppression du mont-de-piété. Art. 40. La suppression de tout privilège exclusif, si ce n’est pour les objets d’invention, qui sont la véritable propriété de l’inventeur. Art. 41. Suppression de tous les lieux privilégiés. Art. 42. Supprimer l’imposition par le logement des gens de guerre, à Paris. Art. 43. Favoriser le commerce de Paris, en réprimant avec plus de sévérité les banqueroutes, et avisant à l’extension et perfection de la juridiction consulaire. Art. 44. Réprimer la licence publique et le scandale de la débauche. L’assemblée, continuant à délibérer sur lès objets qui devaient l’occuper avant de procéder à la nomination de ses représentants, a arrêté : 1° Qu’attendu le nombre de personnes dont elle est composée, elle nommera cinq représentants, et cinq suppléants et adjoints des représentants, à l’effet, tant de remplacer ceux que quelques causes légitimes priveraient de la faculté de se rendre à rassemblée, que de demander à entrer clans l’assemblée de la municipalité, au cas où, à raison du petit nombre de personnes dont quelques assemblées de district auraient été composées, les représentants du tiers ne s’y trouveraient pas dans la proportion où ils doivent être avec les représentants du clergé et de la noblesse. 2° Que, quelque désir que l’assemblée eût de répondre dès à présent aux vues du clergé et de la noblesse, pour délibérer en commun, le peu de temps qu’il y a pour délibérer met l’assemblée dans l’impossibilité de rien changer à ce qui se trouve établi provisoirement, et qui ne saurait ne pas être exécuté, pour cette fois, sans retarder peut-être la tenue des Etats. 3° Attendu le peu de temps que l’assemblée a eu pour rédiger ses griefs, elle autorise les représentants par. elle nommés à s’assembler pendant la durée des Etats généraux, toutes fois et quantes ils aviseront, à l’effet de faire les démarches nécessaires, même de concert avec les représentants des assemblées des autres districts, auxquels semblables pouvoirs auraient pu être donnés, pour le bien et la conservation des droits de la municipalité. Et de suite, quoique la nuit fût déjà avancée, l’assemblée a procédé, par voie de scrutin, à la nomination de ses représentants et de leurs suppléants. Et le mercredi 22, du matin, les scrutins ayant été recueillis et vérifiés, il en est résulté que MM. Camus, président de l’assemblée; Hom, avocat au parlement; Renier, correspondant deplusieurs administrations provinciales; Lobier, marchand épicier; Dulion, notaire au châtelet de Paris, ont été élus, à la pluralité, pour représentants; et MM. Voisin, horloger; Fortin, marchand drapier; Garan de Coulon, avocat; Le Roi, ancien avocat ; Popelin, avocat, ont été élus pour suppléants : en conséquence, l’assemblée, d’une commune voix, les a nommés et constitués pour ses mandataires et représentants, ainsi qu’il est ci-dessus dit, à l’effet de se présenter cejourd’hui à l’hôtel de ville (sans néanmoins attribuer aux officiers municipaux des droits qui ne leur appartiendraient), de là, de se transporter, demain, à l’assemblée générale, qui doit se tenir, en la grande salle de l’archevêché, à l’effet d’y concourir à toutes les opérations qui intéresseront, soit la nation entière, soit la ville de Paris en particulier ; sous la condition toutefois et non autrement, qu’ils ne s’écarteront en rien des pouvoirs et instructions qui ont été ci-dessus déterminés, désavouant tout ce qu’ils feraient au préjudice desdites instructions et au delà desdits pouvoirs : et pour justifier, tant desdits pouvoirs que des conditions auxquelles ils sont accordés, l’assemblée a arrêté qu’indépendamment de la minute du procès-verbal, qui doit être remise, soit à l’hôtel de ville, soit au greffe des Etats, il sera remis, entre les mains de M. Camus, pour lui et les autres députés, le second original du procès-verbal. Ce fut ainsi fait, clos et arrêté en l’église de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, le mercredi 22 avril 1789, six heures de relevée : et à l’instant ledit procès-verbal a été signé du sieur Fortin et dudit sieur Hémart, secrétaire de l’assemblée, des commissaires nommés pour la rédaction desdits pouvoirs et instructions , et des représentants élus. Camus, president; Dubois ; Regnier ; Cheradame; Le Jeune; Dernier; Cosson; Quiret; Popelin; Hom ; Boicervoise ; Dulion ; Lobier ; Perard ; Henri Voisin; Garan de Coulon; Monge; Bernier; Le Roi ; Fortin, secrétaire, Hémart, secrétaire. Et ledit jour 22 avril, neuf heures du soir, M. Camus, président, s’étant transporté au bureau de la ville, assisté des électeurs, de retour dans l’assemblée, a rendu compte de la manière dont il a été reçu, ainsi que les autres électeurs, audit bureau. 11 a dit qu’il avait fait enregistrer les noms desdits électeurs, qu’il avait déposé au procès-verbal, et qu’il lui avait été promis par MM. les échevins, qu’il recevrait une lettre portant décharge de la remise du procès-verbal, et convocation pour demain jeudi ; qu’il instruirait, avec le plus grand plaisir, chacun des membres de l’assemblée, en particulier, du résultat des opérations qui se feront demain; qu’il se propose aussi de déposer la présente minute entre les mains de M. Dulion, notaire plus ancien du quartier. Ensuite un des membres de l’assemblée (M. Le Fèvre) a dit ; « Messieurs, nous avons été témoins, avec la plus vive satisfaction, des soins que s’est donnés, dans le cours de cette assemblée, le président que nous avons eu le bonheur de choisir. Nous avons tous admiré sa facilité, son énergie, sa sagesse et sa prudence ; les moyens clairs et simples qu’il nous a présentés pour organiser cette assemblée, l’ordre qu’il a su y maintenir avec une telle précision, que nous n’avons pas vu naître la moindre difficulté ni la moindre réclamation, la dignité avec laquelle il a reçu les différentes députations qui nous ont honorés de leurs visites. « Tant de titres, Messieurs, assurent à M. Camus des droits à notre reconnaissance. Je demande donc, Messieurs, et certainement vos cœurs ont prévu mon vœu, je demande qu’il soit décerné à M. Camus un hommage public de notre sincère reconnaissance, et que la présente motion soit, sous votre bon plaisir, Messieurs, insérée au procès-verbal de l’assemblée. > L’assemblée a applaudi par les acclamations les plus vives et les plus générales, et ordonné que la motion proposée soit insérée au procès-verbal. Sur l’offre faite par MM. Couturier et Froullé, d’imprimer le présent procès-verbal, l’assemblée a ordonné qu’il serait imprimé, et a chargé M. Camus de faire, dans les occasions, et auprès des .membres des différents districts, toutes les excuses que l’assemblée pourrait leur devoir, à raison de ce que la brièveté du temps et la multitude des opérations ne lui auraient pas permis de dé- 308 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra mures.] puter, ainsi qu’elle l’aurait désiré, vers lesdites assemblées. Fait et arrêté en l’assemblée de l’ordre du tiers-état, séant à l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, ledit jour mercredi 22, dix heures du soir. Signé Camus, président-, Regnier; Cheradame; Le Jeune; Bernier; Cosson; Guiret ; Popelin; Hom ; Boicervoise ; Dulion ; Lohier; Perard ; Henri Voisin; Garan de Coulon; Monge; Bernier; Le Roi; Fortin, secrétaire-, Hémart, secrétaire. CAHIER D' instructions pour MM. les électeurs nommés par l'assemblée du tiers-état, tenue en l'église de Saint-Gervais, commencé le 21 avril 1789, rédigé par MM. les commissaires nommés par le procès-verbal dudit jour (1). L’assemblée du tiers-état du district de Saint-Gervais, considérant que l'assemblée des Etats libres et généraux du royaume doit, aux termes de la déclaration du Roi, s’ouvrir à Versailles lundi prochain, 27 du présent mois; que l’assemblée des trois ordres de l’intérieur de Paris, dont la séance est remise à dimanche prochain, il heures du matin, destinée à nommer les députés de ladite ville, qui doivent se présenter pour elle à l’assemblée des Etats généraux à Versailles le lendemain, sera physiquement dans l’impossibilité, vu ce qui s’est passé, et le peu de temps qui lui reste, de nommer des députés pour ladite ville; qu’il serait fâcheux pour les citoyens de tous les ordres, et nuisible à leurs intérêts, de ne pouvoir être représentés par des députés à l’ouverture de Rassemblée desdits Etats généraux; a unanimement arrêté que, dans l’assemblée des trois ordres de l’intérieur de Paris, remise audit jour dimanche prochain, 11 heures du matin, l’un des électeurs du tiers-état du district de Saint-Gervais demandera, pour son district, a être entendu, pour faire lecture de la présente délibération, et requerra : 1° qu’il soit nommé des députés particuliers de l’ordre du tiers de la ville de Paris, pour se présenter, au nom de cet ordre, à l’ouverture de l’assemblée générale de la nation, et demander acte de leur présentation, en attendant la nomination des députés de ladite ville de Paris, dont le retard ne procède du fait d’aucun des trois ordres ; 2° qu’il soit fait mention de la motion du district de Saint-Gervais dans le procès-verbal de l’assemblée dudit jour dimanche prochain; qu’il en soit donné acte, et sur-le-champ délibéré. Certifié conforme à l’original par nous, secrétaire de Rassemblée dudit district de Saint-Gervais, ce 24 avril 1789. Gueulleite. Les membres du tiers-état de la ville de Paris, assemblés particulièrement en l’église paroissiale de Saint-Gervais pour procéder au choix des personnes chargées d’élire les députés et représentants de l’ordre du tiers-état de la ville de Paris aux Etats généraux du royaume, et de rédiger les cahiers dudit ordre ; Considérant que l’intention du Roi, en convoquant les Etats généraux du royaume, ayant été d’apprendre de la nation elle-même les moyens d’assurer son bonheur, ils croiraient s’écarter des vues paternelles de Sa Majesté, s’ils ne consignaient le vœu qu’ils ont formé pour la gloire et la prospérité de la nation, dans un papier particulier qu’ils remettront aux personnes qui seront (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. choisies pour élire les députés, et rédiger le cahier général du tiers-état de la ville de Paris ; En conséquence, pour répondre au désir bienfaisant de Sa Majesté, qui rassemble la nation autour de son trône, pour remédier aux maux de l’Etat, Rassemblée estime qu’avant d’en indiquer le remède, il est nécessaire d’en connaître et d’en déterminer la cause. Or, il paraît à Rassemblée que la cause des désordres qui se sont glissés dans toutes les parties de l’administration, et particulièrement dans les finances, viennent du vice de la constitution. En conséquence, Rassemblée a arrêté de charger ses électeurs de s’occuper d’abord, dans la rédaction du cahier général qui sera remis à ses députés aux Etats, de la réforme de la constitution et de Rétablissement d’une meilleure. L’assemblée est d’avis que la meilleure constitution possible est celle qui se rapproche le plus de l’ordre de la nature et du vœu de la raison; que, suivant la nature, si tous les hommes naissent égaux, ils sont tous également libres ; mais que l’inégalité des forces individuelles, exposant le plus faible à être la victime du plus fort, il a été nécessaire d’avoir recours à une force artificielle pour arrêter l’oppression, c’est-à-dire d’établir des lois et de créer des gouvernements ; qu’ ainsi, à la liberté naturelle, la raison a substitué la liberté civile, qui consiste à n’obéir qu’aux lois et à ceux qui sont chargés de les faire exécuter, lorsqu’ils commandent au nom des lois. En conséquence, Rassemblée propose d’arrêter, comme maximes fondamentales de la constitution, les articles qui suivent : Articles constitutionnels. Art. 1er. Tous les membres des Etats généraux seront personnes inviolables et sacrées, et ne seront comptables de leurs opinions aux Etats généraux qu’aux Etats généraux eux-mêmes, et les députés du tiers ne s’y présenteront, ils n’y parleront et n’y resteront que dans la même posture les deux autres ordres. Art. 2. Le pouvoir législatif appartient conjointement au Roi et a la nation, représentée par ses députés aux Etats généraux, et aucun acte émané du Roi, sans le concours et la volonté de la nation, ne pourra avoir force de loi. Art. 3. Le pouvoir exécutif appartient au Roi, comme chef suprême et premier magistrat de la nation; mais comme il est impossible au Roi d’exercer ce pouvoir dans toute son étendue, ceux qui en sont chargés en son nom en sont comptables au Roi et à la nation. Art. 4. Les Etats généraux seront pérodiques ; leur organisation sera la même quant au nombre proportionnel des députés des trois ordres ; ils s’assembleront aux époques qui seront déterminées à chaque tenue d’Etats, sauf les cas extraordinaires qui exigeront le rapprochement de la nation, pour raison desquels les mêmes députés s’assembleront dans l’espace de deux mois en l’église métropolitaine de Paris, pour y désigner le lieu où se tiendra Rassemblée, et alors ils feront faire par les différentes provinces le remplacement des membres qui ne s’y trouveront pas. Art. 5. Les députés seront chargés de s’opposer à Rétablissement de toutes commissions intermédiaires, et de déclarer que la nation ne peut être représentée par aucune espèce de corps, lorsqu’il est question d’impôts et de législation. Art. 6. Toutes les provinces du royaume seront érigées en pays d’Etats et seront chargées : 308 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra mures.] puter, ainsi qu’elle l’aurait désiré, vers lesdites assemblées. Fait et arrêté en l’assemblée de l’ordre du tiers-état, séant à l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, ledit jour mercredi 22, dix heures du soir. Signé Camus, président-, Regnier; Cheradame; Le Jeune; Bernier; Cosson; Guiret ; Popelin; Hom ; Boicervoise ; Dulion ; Lohier; Perard ; Henri Voisin; Garan de Coulon; Monge; Bernier; Le Roi; Fortin, secrétaire-, Hémart, secrétaire. CAHIER D' instructions pour MM. les électeurs nommés par l'assemblée du tiers-état, tenue en l'église de Saint-Gervais, commencé le 21 avril 1789, rédigé par MM. les commissaires nommés par le procès-verbal dudit jour (1). L’assemblée du tiers-état du district de Saint-Gervais, considérant que l'assemblée des Etats libres et généraux du royaume doit, aux termes de la déclaration du Roi, s’ouvrir à Versailles lundi prochain, 27 du présent mois; que l’assemblée des trois ordres de l’intérieur de Paris, dont la séance est remise à dimanche prochain, il heures du matin, destinée à nommer les députés de ladite ville, qui doivent se présenter pour elle à l’assemblée des Etats généraux à Versailles le lendemain, sera physiquement dans l’impossibilité, vu ce qui s’est passé, et le peu de temps qui lui reste, de nommer des députés pour ladite ville; qu’il serait fâcheux pour les citoyens de tous les ordres, et nuisible à leurs intérêts, de ne pouvoir être représentés par des députés à l’ouverture de Rassemblée desdits Etats généraux; a unanimement arrêté que, dans l’assemblée des trois ordres de l’intérieur de Paris, remise audit jour dimanche prochain, 11 heures du matin, l’un des électeurs du tiers-état du district de Saint-Gervais demandera, pour son district, a être entendu, pour faire lecture de la présente délibération, et requerra : 1° qu’il soit nommé des députés particuliers de l’ordre du tiers de la ville de Paris, pour se présenter, au nom de cet ordre, à l’ouverture de l’assemblée générale de la nation, et demander acte de leur présentation, en attendant la nomination des députés de ladite ville de Paris, dont le retard ne procède du fait d’aucun des trois ordres ; 2° qu’il soit fait mention de la motion du district de Saint-Gervais dans le procès-verbal de l’assemblée dudit jour dimanche prochain; qu’il en soit donné acte, et sur-le-champ délibéré. Certifié conforme à l’original par nous, secrétaire de Rassemblée dudit district de Saint-Gervais, ce 24 avril 1789. Gueulleite. Les membres du tiers-état de la ville de Paris, assemblés particulièrement en l’église paroissiale de Saint-Gervais pour procéder au choix des personnes chargées d’élire les députés et représentants de l’ordre du tiers-état de la ville de Paris aux Etats généraux du royaume, et de rédiger les cahiers dudit ordre ; Considérant que l’intention du Roi, en convoquant les Etats généraux du royaume, ayant été d’apprendre de la nation elle-même les moyens d’assurer son bonheur, ils croiraient s’écarter des vues paternelles de Sa Majesté, s’ils ne consignaient le vœu qu’ils ont formé pour la gloire et la prospérité de la nation, dans un papier particulier qu’ils remettront aux personnes qui seront (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. choisies pour élire les députés, et rédiger le cahier général du tiers-état de la ville de Paris ; En conséquence, pour répondre au désir bienfaisant de Sa Majesté, qui rassemble la nation autour de son trône, pour remédier aux maux de l’Etat, Rassemblée estime qu’avant d’en indiquer le remède, il est nécessaire d’en connaître et d’en déterminer la cause. Or, il paraît à Rassemblée que la cause des désordres qui se sont glissés dans toutes les parties de l’administration, et particulièrement dans les finances, viennent du vice de la constitution. En conséquence, Rassemblée a arrêté de charger ses électeurs de s’occuper d’abord, dans la rédaction du cahier général qui sera remis à ses députés aux Etats, de la réforme de la constitution et de Rétablissement d’une meilleure. L’assemblée est d’avis que la meilleure constitution possible est celle qui se rapproche le plus de l’ordre de la nature et du vœu de la raison; que, suivant la nature, si tous les hommes naissent égaux, ils sont tous également libres ; mais que l’inégalité des forces individuelles, exposant le plus faible à être la victime du plus fort, il a été nécessaire d’avoir recours à une force artificielle pour arrêter l’oppression, c’est-à-dire d’établir des lois et de créer des gouvernements ; qu’ ainsi, à la liberté naturelle, la raison a substitué la liberté civile, qui consiste à n’obéir qu’aux lois et à ceux qui sont chargés de les faire exécuter, lorsqu’ils commandent au nom des lois. En conséquence, Rassemblée propose d’arrêter, comme maximes fondamentales de la constitution, les articles qui suivent : Articles constitutionnels. Art. 1er. Tous les membres des Etats généraux seront personnes inviolables et sacrées, et ne seront comptables de leurs opinions aux Etats généraux qu’aux Etats généraux eux-mêmes, et les députés du tiers ne s’y présenteront, ils n’y parleront et n’y resteront que dans la même posture les deux autres ordres. Art. 2. Le pouvoir législatif appartient conjointement au Roi et a la nation, représentée par ses députés aux Etats généraux, et aucun acte émané du Roi, sans le concours et la volonté de la nation, ne pourra avoir force de loi. Art. 3. Le pouvoir exécutif appartient au Roi, comme chef suprême et premier magistrat de la nation; mais comme il est impossible au Roi d’exercer ce pouvoir dans toute son étendue, ceux qui en sont chargés en son nom en sont comptables au Roi et à la nation. Art. 4. Les Etats généraux seront pérodiques ; leur organisation sera la même quant au nombre proportionnel des députés des trois ordres ; ils s’assembleront aux époques qui seront déterminées à chaque tenue d’Etats, sauf les cas extraordinaires qui exigeront le rapprochement de la nation, pour raison desquels les mêmes députés s’assembleront dans l’espace de deux mois en l’église métropolitaine de Paris, pour y désigner le lieu où se tiendra Rassemblée, et alors ils feront faire par les différentes provinces le remplacement des membres qui ne s’y trouveront pas. Art. 5. Les députés seront chargés de s’opposer à Rétablissement de toutes commissions intermédiaires, et de déclarer que la nation ne peut être représentée par aucune espèce de corps, lorsqu’il est question d’impôts et de législation. Art. 6. Toutes les provinces du royaume seront érigées en pays d’Etats et seront chargées : 309 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 1° Pour la répartition et la perception de l’impôt; 2° Pour la confection et entretien des ponts et chaussées, chemins de communication de ville à ville et de bourg à bourg; 3° Pour la navigation intérieure, en ce qui concerne l’administration seulement, le contentieux renvoyé aux juges ordinaires. Quant à la composition, au régime et à la police intérieure des Etats provinciaux, il y sera pourvu par un règlement émané des Etats généraux. Art. 7. Au moyen de l’article ci-dessus, les intendants des provinces et l’administration des ponts et chaussées seront supprimés. Précautions à prendre pour assurer la liberté individuelle des citoyens. Art. 8. La liberté individuelle des citoyens sera sacrée de manière qu’aucun, sous quelque prétexte que ce soit, ne puisse être arrêté qu’en vertu d’un décret de prise de corps émané des tribunaux ordinaires ou d’un jugement portant condamnation par corps, au moyen de quoi les lettres de cachet et ordres du Roi seront irrévocablement supprimés. Art. 9. Toutes les lettres de cachet et ordres du Roi, en vertu desquels aucun citoyen se trouverait détenu ou exilé, seront révoqués; en conséquence, les gouverneurs, concierges, supérieurs de maisons religieuses, sous quelque dénomination que ce soit, seront tenus, dans la quinzaine de la publication des lois qui seront arrêtées par les Etats généraux, de dénoncer aux juges royaux plus prochains les noms des détenus dont ils seront chargés, avec les mémoires ou ordres en vertu desquels ils leur auront été amenés, à peine d’être garants envers eux de leurs dommages et intérêts. Art. 10. Le juge principal, ou son lieutenant, dans le délai de trois jours après lesdites dénonciations, sera, sous les mômes peines, tenu de se transporter dans les châteaux où autres lieux où les détenus seront enfermés, à l’effet de procéder à leur interrogatoire en la forme ordinaire, et de statuer ensuite sur leur liberté, s’il y a lieu, sauf, dans le cas contraire, à faire transporter lesdits détenus dans les juridictions de leur domicile, avec les pièces et procédures relatives à l’instruction par eux commencée, pour être statué sur leur liberté et dommages et intérêts. Art. 11. Si néanmoins il se trouvait, dans une famille, un sujet qui lui donnât de justes craintes d’ètre déshonorée par lui, le juge, sur les plaintes qui lui seront faites, et d’après une information concluante, convoquera en son hôtel les parents et amis qui auront signé le mémoire, et Je sujet contre qui les plaintes seront dirigées; le mémoire et l’information lui seront communiqués ; il lui sera libre de se choisir un conseil pour sa défense, et s’il n’administre aucun moyen de justification, §t que les parents et amis persévèrent dans leur demande, il sera, en vertu d’une ordonnance du juge, conduit en telle maison qui sera indiquée. Egalité dans la punition des crimes. Art. 12. La punition des crimes sera uniforme pour les citoyens de tous les ordres, sans qu’elle puisse porter note d’infamie, ni fermer l’entrée des charges, emplois civils et militaires aux parents du supplicié ; les biens des condamnés ne seront plus sujets à la confiscation. Liberté de la presse. Art. 13. La liberté de la presse sera permise avec la précaution que les Etats généraux jugeront convenable. Constitution des troupes. Art. 14. Les troupes sont à la charge de la nation, et ne peuvent servir qu'à la défense de l’Etat, contre ses ennemis, à la sûreté publique et au maintien des lois constitutionnelles; toutes infractions à ces principes'réputées crimes d’Etat. Responsabilité des ministres. Art. 15. Les ministres seront comptables de leur administration aux Etats généraux; et dans le cas où ils auraient passé les bornes du pouvoir légitime, ils seront poursuivis comme prévaricateurs. Assiette de la dette nationale. Art. 16. Le Roi ne pourra établir aucun impôt, ni hypothéquer à aucun emprunt les propriétés de ses sujets, ni même les domaines de la couronne, sans le consentement de la nation régulièrement assemblée en Etats généraux. Police du clergé. Art. 17. Les archevêques, évêques, abbés ou prieurs commandataires, et tous autres ecclésiastiques possédant bénéfice, seront tenus de résider dans le chef-lieu de leurs bénéfices, et d’y remplir les fonctions de leur ministère, à peine de saisie de leur temporel. Art. 18. Le Concordat sera supprimé et la Prag-matique-Sanction rétablie et exécutée. Les bulles, dispenses et autres rescrits qui s’impétraient ci-devant en cour de Pmme, seront dorénavant accordés par l’ordinaire, sauf l’appel au métropolitain et au primat. Art. 19. Les ecclésiastiques ne pourront posséder qu’un seul bénéfice. Art. 20. Sera demandé que les curés, suivant leur ancienneté, soient nommés aux prébendes vacantes dans les cathédrales et collégiales, sur le nomination de l’ordinaire. Art. 21 . Les nouveaux titulaires seront tenus d’entretenir les baux faits par leurs prédécesseurs, pourvu que ces baux ne soient pas d’un prix inférieur aux précédents. Art. 22. Les dettes contractées parle clergé pour l’acquit de son don gratuit seront à sa charge; mais celles par lui contractées pour le gouvernement seront à la charge de la nation. Chasse et droits seigneuriaux. Art. 23. Les capitaineries seront supprimées et ne pourront les propriétaires de fiefs chasser dans les clos et jardins dépendants des maisons de leurs vassaux et censiaires. Art. 24. Les droits seigneuriaux pour péage, pesage, mesurage, aunage et autres seront supprimés, de manière que le commerce soit libre de toute espèce de droit et de monopole, dans l’intérieur du royaume, et que les propriétaires en soient indemnisés en justifiant de leurs propriétés aux Etats provinciaux, qui en rendront compte aux Etats généraux pour être pourvu à leur remboursement. Noblesse commerçante. Art. 25. Les nobles pourront sans déroger se livrer au commerce, même à celui en détail. 310 [États gén. 1789- Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros. Concours des trois ordres pour les charges et dignités, Art. 26. La naissance ne sera plus un obstacle pour parvenir aux charges, emplois et dignités, lorsqu’on y sera appelé par son mérite. Intérêts du prêt. Art. 27. Le prêt de l’intérêt au taux de l’ordonnance par billets et obligations remboursables \ terme, sera autorisé indéfiniment. Commerce. Art. 28. Les Etats généraux s’occuperont des moyens d’empêcher les accaparementsdes grains, provisions, marchandises et denrées de première nécessité, et de les tenir à prix raisonnable, soit en établissant des greniers publics, soit par toute autre voie ; comme aussi ils s’occuperont des moyens de supprimer les commissions multipliées, les entrepôts, les privilèges exclusifs, les grandes compagnies de commerce dans l’intérieur du royaume. Art. 29. Les députés proposeront aux Etats généraux de s’occuper des avantages ou désavantages résultant du traité de commerce entre la France et l’Angleterre, et les pèseront dans leur sagesse. Art. 30. Il sera avisé qu’il ne serait pas utile de faire quelques changements dans l’organisation des corps et métiers, et à cet effet, autoriser les députés à se charger de tous les mémoires qui leur seront remis par les corps et métiers du district. Art. 31. Les privilèges accordés au Temple et aux autres lieux d’asile et de sûreté seront supprimés. Il ne sera plus accordé à l’avenir aucuns arrêts de surséance et sauf-conduits. Art. 32. S’occuperont des moyens de rendre tous les poids et mesures du royaume uniformes. Réforme des lois. Art. 33. Demanderont la réformation des lois civiles et criminelles; La suppression des révocations et commissions au conseil; Celle de la vénalité des charges; Et celle des épices, vacations, et de toutes rétributions aux juges; Et demanderont l’inamovibilité des offices de magistrature. Art. 34. Les cours seront tenues d’enregistrer passivement les lois émanées du pouvoir législatif; elles seront maintenues dans le droit de vérifier et enregistrer librement celles qui émaneront du pouvoir exécutif, pour qu’il ne puisse être porté atteinte à la législation nationale. Dette nationale. Art. 35. Les députés, après avoir obtenu une loi qui fixera notre constitution et assurera la liberté individuelle de tous les citoyens, prendront communication de la dette du gouvernement; ils en fixeront exactement et irrévocablement le montant; déclareront nuis tous les emprunts faits jusqu’ici sans l’aveu de la nation, et cependant, pour donner au Roi une marque de notre déférence, ils l’admettront ensuite comme dette nationale ; s’occuperont des moyens d’en arrêter la progression, et détermineront le plan le plus convenable pour parvenir successivement à l’éteindre. Impôts. Art. 36. Les impôts actuellement subsistants, n’ayant point reçu le consentement de la nation, seront supprimés comme inconstitutionnels et rétablis provisoirement jusqu’à ce qu’il ait été créé un nouvel impôt proportionné aux besoins de l’Etat, et sous la forme la moins onéreuse et la plus égale. Administration et bien public. Art. 37. Tout bourgeois de Paris, sans distinc tion d’état et sans y être né , après vingt ans de résidence, pourra être nommé échevin; les charges de conseillers, dizainiers, quarteniers seront supprimées, les élections seront libres et faites par les notables de la commune. Art. 38. On s’occupera de réformer la municipalité de la ville de Paris, qui sera réintégrée dans son ancien droit naturel d’élire elle-même le premier magistrat municipal, qui sera pris alternativement dans la noblesse, la robe et la bourgeoisie. Art. 39. Sera augmentée la solde des troupes ; elles seront employées aux travaux publics, et on les fera camper deux tiers de l’année pour les accoutumer à la fatigue. Art. 40. Sera demandée la suppression du mont-de-piété , comme ayant opéré la ruine du commerce et comme étant la source d’une infinité de désordres. Art. 41. Seront supprimées toutes les loteries, sans distinction, ainsi que toutes les maisons de jeux. Art. 42. Seront supprimés tous les droits d’octroi perçus pour la bâtisse des casernes dans la ville de Paris, les droits de guerre, et logement des gens de guerre. Art. 43. Supprimer tous les droits de voiries, les bureaux des finances, et en général tous les tribunaux d’attributions, et confier leurs fonctions aux juges ordinaires. Art. 44. Les députés demanderont que les procureurs généraux, dans toute espèce de crime, seront tenus de déclarer aux accusés jugés innocents les noms, surnoms, qualités et demeures de leurs dénonciateurs ; comme aussi qu’il soit fait un fonds, par la nation, pour les accusés déclarés innocents, lequel servira à leur procurer une indemnité raisonnable, lorsque leurs dénonciateurs seront insolvables. Arrêté les présents cahiers rédigés par les commissaires soussignés, après y avoir vaqué, sans désemparer, depuis le 21 avril 1789 jusqu’au lendemain six heures du matin. Signé Gitton de Fontenille ; Daugy ; Hiver de Popincourt ; Baras ; Babasse-Dumail ; Mallet, médecin ; Boyard de Saint-Paul ; Blacque ; Bezassier; Dessemel-Castillon ; Denise Filse; Lugesse; Pbi-lipon ; Soreau ; Gault ; Petit de la Motte, avocat ; Flament , avocat et procurer au parlement ; Jean-Baptiste Lasseray, sauf la protestation par moi faite et annexée au procès-verbal d’assemblée du jour d’hier et d’aujourd’hui, pour l’article 27 du cahier ci-dessus et des autres parts. Signé Jean-Baptiste Lasseray. Lu et approuvé, en l’assemblée du district de Saint-Gervais, ce 22 avril 1789. Signé Vanglenne et Gueullette. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] RH CAHIER De rassemblée du tiers-état de la ville de Paris, du district, de Saint-Louis-de-la-Culture , commencé le mardi 21 avril 1789 au soir (1). Le vœu de cette assemblée est : Que dans la prochaine assemblée des Etats généraux on opine par tête et non par ordre; que les voix soient recueillies alternativement dans les trois ordres, de manière qu’en commençant par prendre l’avis d’un membre du clergé, on prenne ensuite celui d’un membre de la noblesse, et enfin celui de deux membres du tiers-état, et toujours dans le même ordre alternatif. Que les bases de la constitution soient établies et scellées. Qu’il soit reconnu que l’état est monarchique, que la couronne est héréditaire en ligne masculine par ordre de primogéniture, et que la régence est dative aux mâles seulement. Que la majorité du roi soit réglée. Qu’il soit reconnu que le pouvoir législatif appartient à la nation et le pouvoir exécutif au Roi. Que les troupes doivent serment de fidélité à la nation comme au Roi. Que les ministres sont responsables envers la nation comme envers le Roi. Qu’aucun impôt ni subside ne peuvent être établis que par la nation, à laquelle seule il appartient d’en déterminer la durée. Que le retour périodique des Etats généraux soit assuré de manière qu’ils aient lieu tous les trois ans. Que la forme de la convocation, le nombre des électeurs et députés, l’organisation des assemblées et le régime des délibérations soient déterminés, dans la prochaine tenue, d’une manière invariable. Que le tiers-état ne puisse jamais être représenté que par des membres choisis dans son ordre. Que dans toutes les provinces du royaume il soit établi des Etats provinciaux, chargés de veiller à toutes les parties de l’administration, et particulièrement à la répartition des impôts. Qu’il y ait une assemblée particulière chargée des mêmes objets pour la ville de Paris et ses faubourgs. Que la dette nationale soit reconnue et consolidée. Qu’il soit établi une caisse d’amortissement, dans laquelle seront versés tous les fonds destinés aux remboursements, sans que ces fonds puissent être employés à aucun autre usage. Que les domaines de la couronne soient déclarés aliénables à perpétuité. Que la liberté individuelle, la liberté civile et la liberté religieuse soient assurées. Que la liberté de la presse soit consacrée, sous l’obligation, de la part de l’auteur, de signer, et de la part de l’imprimeur, de garantir la sincérité de la signature. Que les propriétés soient sacrées, et qu’on n’y puisse porter aucune atteinte, pas même pour cause d’intérêt public, sans estimation à l’amiable ou légale, et sans payement effectué. Qu’on supprime tous les impôts actuels, et qu’on y substitue un impôt territorial en argent et une capitation. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif. Que ces nouveaux impôts frappent également, et dans une juste proportion, sur toutes les personnes et sur tous les biens sans distinction. Que tous les privilèges et exemptions pécuniaires, ou tendant à affranchir de quelque charge, soient supprimés. Qu’il ne puisse être établi aucun impôt que pour un temps limité, lequel temps expiré, l’impôt cessera de droit. Que toutes les dépenses des différents départements soient réglées. Qu’il soit fait une révision des pensions et des causes pour lesquelles elles auront été accordées. Qu’il y ait un fonds déterminé pour les pensions dans chaque département, sans qu’il puisse jamais être rien accordé au delà du fonds destiné, pas même à titre de survivance. Qu’il soit publié tous les ans une liste nominative des pensions accordées pendant l’année, avec mention des causes pour lesquelles elles auront été accordées. Que ces pensions, ainsi que les appointements militaires et civils, soient susceptibles d’oppositions et saisies. Suppression absolue de tous les gouverneurs et commandants, et de tous les intendants de province. Abolition de la milice et de la corvée. Suppression de toute servitude personnelle et de tout droit de mortaillabilité, à la charge toutefois d’une indemnité. Abolition de tout privilège exclusif. Suppression de tous privilèges dans les corps et communautés, et notamment dans les trois corps de la médecine. Suppression de toutes les justices seigneuriales qui ne ressortissent pas nûment aux parlements, sauf à indemniser les seigneurs s’il y a lieu. Faculté de racheter les droits seigneuriaux, de banalité et de corvée. Que la vénalité des charges de magistrature soit abolie. . Qu’il soit procédé à la réformation des lois civiles et criminelles. Qu’il n’y ait point de distinction dans la manière de juger et de punir les criminels nobles ou roturiers. Que la peine prononcée contre un membre d’une famille ne soit point un obstacle à l’admission des autres membres de cette famille dans aucun ordre, grade, charge ou emploi. Que la confiscation soit abolie. Que le tiers-état soit admissible dans tous les grades militaires et dans toutes les charges de magistrature, et qu’il puisse être élevé à toutes les dignités ecclésiastiques. Suppression du droit de franc-fief. Qu’il n’y ait qu’un poids et qu’une mesure. Que le traité de commerce avec l’Angleterre soit examiné. Que les Etats généraux s’occupent d’établir une bonne législation sur le commerce des grains. Qu’il soit pourvu d’une manière honorable à la subsistance des ecclésiastiques attachés aux paroisses. Que tous les ecclésiastiques bénéficiers soient tenus de résider dans le lieu de leur bénéfice, et qu’ils ne puissent jamais en posséder plusieurs à la fois. Qu’aucun ecclésiastique ne puisse jamais être admis dans le ministère. Qu’il ne soit plus accoraé ni arrêt de surséance ni sauf-conduit. Abolition de toutes les capitaineries. 312 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES P Suppression de toutes les loteries et maisons de jeux. Réformation du régime actuel de la municipalité de la ville de Paris. Suppression de toutes celles des charges de ladite municipalité qui ne tiennent point au contentieux, sauf les indemnités. Que le prévôt des marchands et échevins et conseillers de ville soient nommés par des notables bourgeois, choisis dans chaque quartier de la ville, sans que la naissance dans la capitale puisse être considérée comme une condition nécessaire pour l’admission (1). Que nulle charge ou commission ne puisse donner la noblesse héréditaire, ni même personnelle. Que les collèges de plein exercice soient distribués dans les différents quartiers de la ville de Paris. Qu’il soit établi dans cette même ville un bureau général pour la conservation des hypothèques sur les immeubles réels et fictifs dans toute l’étendue du royaume, sans cependant qu’il en résulte l’extinction des différents bureaux particuliers, et que ce bureau général soit tellement constitué, que l’opposition qui y sera formée conserve l’hypothèque du créancier sur tous les biens de son débiteur, dans quelque partie du royaume qu’ils soient situés. Que le prêt par obligations ou billets puisse produire intérêt. Qu’il soit établi une banque nationale dont l’in-lluence se fasse sentir dans toute l’étendue du royaume, et qui soit sous la protection immédiate des Etats généraux. Que les compagnies fiscales soient supprimées, en pourvoyant, d’une manière certaine, au remboursement de leurs avances. Que la perception des droits soit faite directement pour le compte de la nation, et que ceux qui seront chargés de la suite de ces perceptions soient comptables de leur conduite aux Etats généraux. Que l’on accorde des facilités au commerce pour le payement des droits, s’il en est conservé, sauf aux États généraux à statuer sur les mesures à prendre pour la sûreté des crédits qui seront faits. Que la destruction des murs de Paris soit faite incessamment. Que le boulevard Saint-Antoine soit continné, et que, pour l’avantage du commerce et la communication des boulevards, et qu’avant de s’occuper d’aucune autre entreprise publique, il soit construit un pont vis-à-vis le Jardin du Roi. Enfin que tous les bâtiments de la Bastille soient détruits, et que sur les ruines de cette prison d’Etat, il soit élevé, à la gloire de Louis XVI, un monument en reconnaissance de la convocation des Etats généraux et du recouvrement de la liberté publique. L’assemblée a cru devoir terminer ici ses demandes, en regrettant que les bornes étroites du temps ne lui aient pas permis d’y donner plus d’étendue, et de les présenter avec plus d’ordre ; elle déclare, au surplus, qu’elle se repose sur le zèle, les lumières et l’intégrité des électeurs et des personnes qui seront choisies pour représenter la nation aux Etats généraux. Arrêté en l’assemblée, le 22 avril 1789, à six heures du matin. (1)11 y a eu différentes réclamations contre la dernière partie de cet article, et particulièrement de la part du président de l’assemblée. ELEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] Signé Deyeux, président élu, et Türiot de la Rosière, secrétaire-greffier élu. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris, séante en Véglise de Suint-Nicolas-des-Champs (1). Aujourd’hui mardi 21 avril 1789, en l’assemblée convoquée par affiches, en exécution des mandements de MM. les prévôt des marchands et échevins, le sieur Pierre Rousseau, se disant nommé par commission spéciale en date du 18 de ce mois, par mesdits sieurs prévôt des marchands et échevins, à l’effet d’assembler les habitants domiciliés dans l’arrondissement du premier district, quartier Saint-Denis, en l’église de Saint-Nicolas-des-Champs , lieu de réunion de l’assemblée desdits habitants, tous nés Français ou naturalisés et âgés au moins de vingt-cinq ans, et lesdits habitants s’étant assemblés audit lieu pour obéir aux ordres du Roi portés par les lettres données à Versailles le 8 mars dernier pour la convocation et tenue des Etats généraux du royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement arrêté par Sa Majesté le 13 du présent mois, ainsi qu’à l’ordonnance y relative desdits sieurs prévôt des marchands et échevins, et après avoir justifié de leurs droits d’admission en ladite assemblée et de celui de voter pour le choix des électeurs dudit district Saint-Denis, ont déclaré avoir une parfaite connaissance de tout ce qui est contenu audit règlement, ainsi que dans les-dites lettres du Roi, tant par la lecture qui en a été faite par M. Bon Maximilien-Thomas, avocat en parlement, choisi par ledit sieur Rousseau pour greffier, que par les publications antérieures et affiches ci-devant mises. Après quoi ledit sieur Rousseau, assisté de MM. Etienne-Innocent Ghavet, conseiller du Roi, notaire à Paris, y demeurant, rue Saint-Martin ; Toussaint-Nicolas Garnier, aussi notaire à Paris, rue Saint-Martin; Jean Maugé, procureur au châtelet, susdite rue Saint-Martin ; Claude-Louis Du-lion, procureur en la chambre des comptes, demeurant aussi susdite rue Saint-Martin, qu’il avait choisis pour scrutateurs parmi les personnes notables dudit district, ayant procédé à la vérification du nombre des personnes présentes en ladite assemblée, et après avoir constaté, par l’énumération exacte des billets, qu’il y avait trois cent quarante-trois votants, ledit sieur Rousseau a alors annoncé que la nomination des électeurs devait être fixée au nombre de quatre, à raison d’un sur cent personnes présentes, de deux, de cent à deux cents, conformément à l’article 18 dudit règlement , et qu’en conséquence, lesdits habitants devaient inscrire sur leurs feuilles imprimées qui leur avaient été remises en entrant, par le préposé à cet effet, les noms des quatre personnes du district, tant absentes que présentes, qui leur paraîtraient les plus dignes de les représenter à titre d’électeurs. Cette déclaration faite et chacun ayant repris sa place, il a été fait une motion tendante à protester contre le règlement : 1° en ce qu’il fait de la commune de Paris un partage qui tend à la détruire, et à rendre illusoire la double députation qui a toujours appartenu à la ville de Paris ; en ce que, par des distinctions nouvelles entre les (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque impériale. 312 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES P Suppression de toutes les loteries et maisons de jeux. Réformation du régime actuel de la municipalité de la ville de Paris. Suppression de toutes celles des charges de ladite municipalité qui ne tiennent point au contentieux, sauf les indemnités. Que le prévôt des marchands et échevins et conseillers de ville soient nommés par des notables bourgeois, choisis dans chaque quartier de la ville, sans que la naissance dans la capitale puisse être considérée comme une condition nécessaire pour l’admission (1). Que nulle charge ou commission ne puisse donner la noblesse héréditaire, ni même personnelle. Que les collèges de plein exercice soient distribués dans les différents quartiers de la ville de Paris. Qu’il soit établi dans cette même ville un bureau général pour la conservation des hypothèques sur les immeubles réels et fictifs dans toute l’étendue du royaume, sans cependant qu’il en résulte l’extinction des différents bureaux particuliers, et que ce bureau général soit tellement constitué, que l’opposition qui y sera formée conserve l’hypothèque du créancier sur tous les biens de son débiteur, dans quelque partie du royaume qu’ils soient situés. Que le prêt par obligations ou billets puisse produire intérêt. Qu’il soit établi une banque nationale dont l’in-lluence se fasse sentir dans toute l’étendue du royaume, et qui soit sous la protection immédiate des Etats généraux. Que les compagnies fiscales soient supprimées, en pourvoyant, d’une manière certaine, au remboursement de leurs avances. Que la perception des droits soit faite directement pour le compte de la nation, et que ceux qui seront chargés de la suite de ces perceptions soient comptables de leur conduite aux Etats généraux. Que l’on accorde des facilités au commerce pour le payement des droits, s’il en est conservé, sauf aux États généraux à statuer sur les mesures à prendre pour la sûreté des crédits qui seront faits. Que la destruction des murs de Paris soit faite incessamment. Que le boulevard Saint-Antoine soit continné, et que, pour l’avantage du commerce et la communication des boulevards, et qu’avant de s’occuper d’aucune autre entreprise publique, il soit construit un pont vis-à-vis le Jardin du Roi. Enfin que tous les bâtiments de la Bastille soient détruits, et que sur les ruines de cette prison d’Etat, il soit élevé, à la gloire de Louis XVI, un monument en reconnaissance de la convocation des Etats généraux et du recouvrement de la liberté publique. L’assemblée a cru devoir terminer ici ses demandes, en regrettant que les bornes étroites du temps ne lui aient pas permis d’y donner plus d’étendue, et de les présenter avec plus d’ordre ; elle déclare, au surplus, qu’elle se repose sur le zèle, les lumières et l’intégrité des électeurs et des personnes qui seront choisies pour représenter la nation aux Etats généraux. Arrêté en l’assemblée, le 22 avril 1789, à six heures du matin. (1)11 y a eu différentes réclamations contre la dernière partie de cet article, et particulièrement de la part du président de l’assemblée. ELEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] Signé Deyeux, président élu, et Türiot de la Rosière, secrétaire-greffier élu. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers-état de la ville de Paris, séante en Véglise de Suint-Nicolas-des-Champs (1). Aujourd’hui mardi 21 avril 1789, en l’assemblée convoquée par affiches, en exécution des mandements de MM. les prévôt des marchands et échevins, le sieur Pierre Rousseau, se disant nommé par commission spéciale en date du 18 de ce mois, par mesdits sieurs prévôt des marchands et échevins, à l’effet d’assembler les habitants domiciliés dans l’arrondissement du premier district, quartier Saint-Denis, en l’église de Saint-Nicolas-des-Champs , lieu de réunion de l’assemblée desdits habitants, tous nés Français ou naturalisés et âgés au moins de vingt-cinq ans, et lesdits habitants s’étant assemblés audit lieu pour obéir aux ordres du Roi portés par les lettres données à Versailles le 8 mars dernier pour la convocation et tenue des Etats généraux du royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement arrêté par Sa Majesté le 13 du présent mois, ainsi qu’à l’ordonnance y relative desdits sieurs prévôt des marchands et échevins, et après avoir justifié de leurs droits d’admission en ladite assemblée et de celui de voter pour le choix des électeurs dudit district Saint-Denis, ont déclaré avoir une parfaite connaissance de tout ce qui est contenu audit règlement, ainsi que dans les-dites lettres du Roi, tant par la lecture qui en a été faite par M. Bon Maximilien-Thomas, avocat en parlement, choisi par ledit sieur Rousseau pour greffier, que par les publications antérieures et affiches ci-devant mises. Après quoi ledit sieur Rousseau, assisté de MM. Etienne-Innocent Ghavet, conseiller du Roi, notaire à Paris, y demeurant, rue Saint-Martin ; Toussaint-Nicolas Garnier, aussi notaire à Paris, rue Saint-Martin; Jean Maugé, procureur au châtelet, susdite rue Saint-Martin ; Claude-Louis Du-lion, procureur en la chambre des comptes, demeurant aussi susdite rue Saint-Martin, qu’il avait choisis pour scrutateurs parmi les personnes notables dudit district, ayant procédé à la vérification du nombre des personnes présentes en ladite assemblée, et après avoir constaté, par l’énumération exacte des billets, qu’il y avait trois cent quarante-trois votants, ledit sieur Rousseau a alors annoncé que la nomination des électeurs devait être fixée au nombre de quatre, à raison d’un sur cent personnes présentes, de deux, de cent à deux cents, conformément à l’article 18 dudit règlement , et qu’en conséquence, lesdits habitants devaient inscrire sur leurs feuilles imprimées qui leur avaient été remises en entrant, par le préposé à cet effet, les noms des quatre personnes du district, tant absentes que présentes, qui leur paraîtraient les plus dignes de les représenter à titre d’électeurs. Cette déclaration faite et chacun ayant repris sa place, il a été fait une motion tendante à protester contre le règlement : 1° en ce qu’il fait de la commune de Paris un partage qui tend à la détruire, et à rendre illusoire la double députation qui a toujours appartenu à la ville de Paris ; en ce que, par des distinctions nouvelles entre les (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque impériale. 313 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J bourgeois de Paris, qualité devant laquelle tout autre devrait s’évanouir, il peut s’allumer des discordes mal éteintes entre des ordres dont l’intérêt est de réunir leurs forces pour assurer leur liberté commune ; 2° En ce que le règlement donne à l’assemblée un président, des assesseurs et un secrétaire qui ne sont point de son choix ; 3° En ce que le président constitué qui n’est qu’un commissaire du Roi, et les assesseurs par lui choisis, sont laissés seuls arbitres des suffrages ; 4° En ce que le règlement ordonne que chaque assemblée ne pourra choisir des représentants que dans son district; 5° En ce qu’il tend à ôter aux assemblées des districts de la capitale du royaume le droit de faire ses plaintes et doléances d’une manière libre et sûre, et de donner des instructions à ceux qui sont choisis par elle, droit dont a joui librement le dernier village du royaume ; 6° Enfin, protestation contre le retard qui a été apporté à la convocation de la commune de Paris, et à la précipitation étrange avec laquelle on la force de procéder à l’élection de mandataires dépourvus de mandats suffisants. Il a été observé ensuite, qu’encoreque le règlement ne doive être regardé que comme une simple instruction, et non comme une loi, n’en ayant pas les caractères, cependant il est quelques articles qui • même en donnant matière à de justes protestations, paraissent pouvoir être suivies avec quelques modifications convenables, attendu la nécessité impérieuse où sont les membres de l’assemblée de profiter du premier moment où leurs droits de citoyen leur sont en partie rendus. Ainsi, à l’égard de l’article qui concerne les présidents, assesseurs et greffiers, comme ceux qui se présentent dans rassemblée n’ont personnellement aucun motif d’exclusion contre eux, et que les moments sont trop chers pour les consumer en vaines disputes, il est de la prudence de l’assemblée, tout en protestant contre le règlement, de les laisser dans les fonctions qui leur ont été attribuées, bien entendu qu’ils n’en devront la continuation qu’au suffrage libre de chacun des membres de l’assemblée, et qu’il en sera fait mention dans le présent procès-verbal. Comme aussi que l’assemblée procédera à la nomination de quatre scrutateurs pour assister ceux déjà choisis par le subdélégué dudit sieur prévôt des marchands. * Qu’encore qu’il soit injuste de forcer des citoyens à donner leurs suffrages à ceux qu’ils connaissent le moins, cependant telle est la fatalité des conjectures où se trouvent les membres de Rassemblée, qu’elle exige peut-être pour cette fois seulement, et sans tirer à conséquence, sous la réserve de faire statuer d’une manière fixe et invariable, que dorénavant la commune soit assemblée suivant une forme plus constitutionnelle, l’on suive à certains égards et par provision le règlement dont le temps ne permet pas de solliciter la réformation de la justice d’un monarque dont l’intention paraît n’avoir pas été remplie. Mais comme, avant de choisir un mandataire, il faut avoir un mandat à lui confier, il est de la plus grande importance que Rassemblée, avant de s’occuper de toute autre chose, et de songer à l’élection de ses représentants, élection qui, une fois faite, amènerait la dissolution de Rassemblée, il est important qu’au préalable elle s’occupe d’une rédaction de cahier, tel que la brièveté du temps pourra le comporter ; que chaque citoyen qui compose Rassemblée puisse faire le premier acte de sa liberté, en rendant publiques ses idées et ses vues, et par là contribuer réellement à la régénération de l’Etat. Il paraît donc nécessaire de choisir dans Rassemblée des commissaires qui rédigent de suite et le plus brièvement possible un cahier qui soit ensuite lu à Rassemblée, et qui, après avoir été approuvé par elle, soit remis aux électeurs qui se-seront chargés de le porter à l’hôtel de ville. Cette motion faite, étayant été agréée de toute Rassemblée, d’une voix unanime, le sieur Rousseau a été requis de déclarer s’il entendait se dépouiller de la qualité de président à lui donnée par les sieurs prévôt des marchands et échevins, pour accepter la nomination libre et volontaire que pourrait faire de lui la présente assemblée, pour remplir les fonctions de président d’icelle, et la même demande ayant été faite aux quatre scrutateurs ci-devant nommés, ledit sieur Rousseau a déclaré qu’il ne pouvait ni ne devait se départir d’une qualité qui lui a été conférée; Rassemblée désirant toujours, par considération personnelle pour ledit sieur Rousseau et ses assesseurs, nommer ledit sieur Rousseau pour présider, et les quatre personnes par lui annoncées, pour assesseurs, leur a demandé s’ils consentaient s’en tenir au vœu unanime, volontaire et libre de l’assemblée, ce qu’ils n’auraient pas voulu accepter, voulant cumuler leur nouvelle nomination avec celle qu’ils avaient déjà. En conséquence, Rassemblée a, par acclamation, déclaré qu’elle n’entendait plus être présidée par ledit sieur Rousseau, mais au contraire que son intention ôtait de se nommer par la voie du scrutin, tant son président que ses scrutateurs et greffiers, pourquoi elle requérait que les archers, gardes de la ville, qui se trouvaient présents et accompagnaient ledit sieur Rousseau, se retirassent, ce que lesdits archers ayant fait, et Rassemblée se trouvant libre dans ses suffrages par la retraite dudit sieur Rousseau, on s’est occupé de différents objets de délibérations, pendant lesquelles sont intervenus M. Marty, chevalier de Ghitenav, et M. Ferrand, conseiller au parlement, lesquels ont déclaré qu’ils étaient députés j)ar la noblesse assemblée aujourd’hui au district des Petits-Pères, à l’effet de faire part à Rassemblée de l’arrêté fait par elle le 21 de ce mois-Et après lecture a été faite dudit arrêté, contenant, entre autres choses, que les membres de leur assemblée ont protesté contre la destruction faite des communes par le règlement et déclaré qu’ils ne voulaient avoir, dans les assemblées libres de cette capitale, d’autre qualité que celle de bourgeois de Paris, ainsi que des motifs qui y ont donné lieu, Rassemblée y a répondu par diverses acclamations. Et en reprenant le cours des opérations qui avaient été suspendues, sont encore intervenus MM. les députés de Rassemblée partielle des nobles de Paris, convoquée dans l’église de l’Oratoire, et prorogée au lendemain dans la chambre du conseil du châtelet de Paris, lesquels ont fait part que leur dite assemblée avait cru devoir commencer cette seconde séance pour renouveler leurs protestations dans tous les points et particulièrement sur la violation contraire aux principes, aux usages consacrés et aux vœux actuels et constants de la noblesse, de ne pas se séparer en aucune manière de ces concitoyens, comme ayant à ne former que les mêmes vœux et à ne traiter que des intérêts communs; qu’en conséquence, 314 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. IParis, intra muros. laditeassemblée avait unanimement décidé d’ajouter une nouvelle forme à sa protestation par les instructions données à ses électeurs, et relatives aux intérêts de la commune; instructions qui seraient communiquées aux soixante assemblées aussitôt qu’elles auraient été entièrement déci dées, et que l’assemblée avait pareillement arreté qu’il serait député aux soixante assemblées pour leur faire part desdites résolutions, et les assurer de leur désir de concourir de toute leur puissance aux sentiments de concorde, d’union et de fraternité qui doivent faire à la fois leur bonheur et leur force. Lesdits sieurs députés, se retirant, sont intervenus MM. les députés de la noblesse partielle assemblée à Saint-Martin, lesquels ont dit que leur assemblée avait protesté contre tout ce que les règlements des 28 mars dernier et 13 avril présent mois renfermaient de contraire aux droits de tous les ordres par la formation des différentes assemblées de la ville de Paris ; le surplus des réclamations desdits sieurs députés, ainsi que de ceux de l’assemblée de l’église des Petits-Pères, place des Victoires, et de l’assemblée du Châtelet, qui sont aussi intervenus, se trouvant en tout conforme, et mesdits sieurs les députés de la noblesse ayant déclaré qu’elle se réunissait à la noblesse des différentes provinces, qu’elle entendait contribuer avec le tiers-état également sous la même forme et dénomination, et en proportion de ses facultés, aux impositions qui seront jugées nécessaires pour subvenir aux charges et besoins de l’Etat, et qu’elle invitait Messieurs du clergé, dont elle connaissait le zèle et les sentiments, à suivre son exemple, et désirait que lesdits députés des différents ordres réunis le 23 du courant, jour de l’assemblée générale, formassent ensemble un seul vœu et un seul cahier, pour représenter, autant qu’il serait possible, la commune qui était dans l’usage de faire le cahier de la bonne ville de Paris. Lesquelles députations ont été reçues avec les plus vives acclamations de la présente assemblée, qui a chargé chacun de mesdits sieurs députés de ses sincères remercîments pour la noblesse, et du concours qu’elle désire former avec tous les ordres de l’Etat. Sont intervenues, en outre, les députations au nombre de vingt-deux des différents districts du tiers-état, lesquelles ont fait part à l’assemblée des différentes opérations qui s’étaient passées dans leurs districts ; elles ont été reçues en conséquence avec joie et reconnaissance. Lesquelles députations retirées, il a été par ladite assemblée procédé, par la voie du scrutin, à la nomination de son président, de ses scrutateurs, qu’elle a unanimement arrêté au nombre de quatre, et des deux greffiers; duquel scrutin il est résulté qu’à la pluralité de cent vingt-trois voix, M. Delondre, marchand épicier-droguiste à Paris, y demeurant rue des Arcis, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents, a été élu pour président de la présente assemblée ; MM. Victor de Chantereyne, avocat au parlement, demeurant à Paris rue des Lombards, même paroisse, à la pluralité de cent dix voix ; François-Barthélemy Le Febvre, ancien garde du corps de la draperie-mercerie, demeurant à Paris, rue Quincampoix, paroisse Saint-Nicolas-des-Champs, à la pluralité de cent sept voix ; Joseph-Jean-Chrisostôme Far-cot, négociant, rue Quincampoix, paroisse Saint-Merri, à la pluralité de cent cinq voix; et Antoine-François Frenex, avocat en parlement, demeurant à Pans, rue des Ecrivains, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents, à la pluralité de cent voix, ont tous été nommés scrutateurs. M. Rémv-Glément Gosse, agréé au consulat de cette ville, y demeurant rue de la Vielle-Monnaie, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents, à la pluralité de soixante-sept voix, a été élu secrétaire, et M. Pierre-Jacques Brunet, procureur au châtelet de Paris, y demeurant rue Salle-au-Comte, à la pluralité de trente-huit voix, a aussi été élu secrétaire. Lesquelles nominations ainsi faites, ladite assemblée a unanimement, et par acclamation, nommé pour commissaires, à l’effet de procéder à la rédaction de ses cahiers et doléances, MM. Louis Le Comte, marchand mercier à Paris, y demeurant, rue Salle-au-Comte ; Louis-Achille An-dry, marchand épicier à Paris, y demeurant rue Saint-Denis, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents ; Louis-Désiré Bouvier, marchand mercier à Paris, y demeurant rue Saint-Denis, paroisse Saint-Leu et Saint-Gilles ; Barihélemv Ghoissinon, marchand épicier à Paris, y demeurant rue Saint-Martin, paroisse Saint-Josse; Charles Lesguilliers, marchand épicier à Paris, y demeurant rue des Lombards, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents ; Michel Dumas, marchand épicier, rue des Cinq-Diamants, même paroisse; André Fadeau, procureur au parlement de Paris, y demeurant rue Quincampoix, paroisse Saint-Merri ; Jean-Baptiste Séjourné, négociant, rue des Arcis, paroisse Saint-Jacques et des Saints-Innocents; Victor-Joseph Miroy, avocat en parlement de Paris, y demeurant rue des Lombards, même paroisse ; François Gérard de Bury, procureur au parlement de Paris, y demeurant rue Saint-Martin, paroisse Sainl-Merri, lesquels, assistés desdits sieurs scrutateurs, se sont occupés de la rédaction desdits cahiers, et ladite assemblée a en outre arrêté qu’un double de son procès-verbal serait déposé, parM. le président, chez un notaire de cette ville. Et pour l’approbation desdites nominations et élections, et généralement de tout ce que dessus, l’assemblée a signé ledit présent procès-verbal. Toutes ces opérations faites, nous, président susdit, ayant considéré que si l’élection des personnes que cette présente assemblée devait nommer pour ses représentants était bornée à raison d’une par cent, de deux de cent à deux cents, le nombre de trois cents électeurs qui doivent représenter le tiers-état dans l’assemblée du 24 du présent mois ne pourrait être rempli ; que les diverses assemblées des soixante districts de cette ville, ayant voté pour augmenter ce nombre déterminé par le règlement, ce qui démontrait l’inconséquence de celui-ci et la validité des protestations qu’il a occasionnées, il paraissait convenable, au lieu de quatre représentants que cette assemblée aurait dû nommer, d’en nommer un plus grand nombre ; que c’était d’ailleurs le vœu qui avait été annoncé par toutes les députations faites à cette assemblée, dans le cours de ses opérations; pourquoi nous avons cru devoir soumettre à l’assemblée que nous présidons nos différentes réflexions sur tous ces points ; et ladite assemblée ayant demandé, d’une voix unanime, de fixer à dix ses représentants, dont les quatre, qui, par la voie du scrutin, réuniraient le plus de suffrages, ne pourraient jamais cesser d’être lesdits représentants, et les six autres seraient admis pour concourir à la formation du nombre déterminé pour former les trois cents électeurs, à condition que de ces six, un, deux, ou plus grand nombre était choisi pour parfaire ledit nombre de trois cents, ce serait toujours ceux qui [Etats gén. 4789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 34g auraient le plus réuni de suffrages, qui auraient la préférence. 11 a été procédé par l’un de nos secrétaires à l’appel de toutes les personnes composant la présente assemblée, sur les bulletins que chacun avait remis lors de son entrée en la présente assemblée; et à mesure de cet appel, les personnes nommées se sont tour à tour transportées à la boîte du scrutin, où elles ont séparément, les unes après les autres, mis leur bulletin électif dans ladite boîte, en la présence desdits sieurs scrutateurs ci-devant nommés ; ce qui ayant été terminé, lesdits bulletins, ont été tirés de ladite boîte les uns après les autres, et avons fait inscrire au fur et à mesure les noms de ceux dénommés en chacun desdits bulletins dont nous avons fait un extrait général, duquel nous avons ensuite extrait les noms des personnes qui avaient réuni le plus grand nombre de suffrages et qui sont : MM. Delondre père, marchand épicier, à la pluralité de cent vingt et une voix ; Fremin, avocat, à la pluralité de cent dix-huit voix ; Lefebvre, négociant, à la pluralité de cent sept voix ; de Chan-tereyne, avocat, à la pluralité de cent et une voix; Farcot, négociant, à la pluralité de cent voix ; Les-guilliers, négociant, à la pluralité de soixante-dix voix ; Séjourné, négociant, à la pluralité de cinquante voix ; Dumas, négociant, à la pluralité de quarante-quatre voix. Lesquels dénommés ont été proclamés élus comme représentant la présente assemblée, ce qu’ils ont accepté, et il leur a été remis par nous les cahiers et doléances que les commissaires de la présente assemblée avaient été chargés de rédiger pendant le cours d’icelle, et qu’ils venaient de nous remettre à l’instant, après que mention de leur annexe à ces présentes a ôté faite sur iceux par nos secrétaires, et signés d'eux et de nous. Et de tout ce que dessus nous avons dressé le présent procès-verbal , ouvert le mardi 21 avril 1789, à neuf heures du matin, et continué dans ladite assemblée, pendant sa durée, sans aucune interruption, de jour ni de nuit, jusques cejourd’hui mercredi 22 avril 1789, onze heures de relevée, et avons signé avec nosdits secrétaires ces présentes. Louis Delondre; Fremin ; Lefebvre; de Chan-tereyne ; Farcot ; Lesguilliers ; Garnier ; Àndry , Séjourné ; Dumas; Gosse et Brunet, secrétaires. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers en V église de Saint-Nicolas-des-Champs , quartier Saint-Denis , 1er district. Le district demande : Que les Etats généraux s’occupent, avant tout, de la forme à donner à la représentation nationale pour l’avenir. Qu’il soit établi, comme maxime fondamentale, la liberté individuelle de chaque citoyen, la liberté de la presse sagement modifiée. La liberté entière du commerce épistolairc. La nécessité du consentement de la nation à tous impôts directs ou indirects, même à tous emprunts. La suppression de tous impôts distinctifs entre les différents ordres. La réduction, s’il est possible, de tous les impôts en un seul, non susceptible d’arbitraire, avec mesures nécessaires pour éviter les frais de perception. Consolidation de la dette nationale. Retour périodique des Etats généraux, et fixation, par lesdits Etats généraux eux-mêmes, du jour de l’assemblée prochaine, époque à laquelle l’impôt établi cessera. La responsabilité des ministres. Suppression de toutes évocations et commissions qui tendent à soustraire les citoyens à leurs juges naturels. Suppression de tous arrêts de surséance et de défense, de tous sauf-conduits et lieux privilégiés. Réformation des lois civiles et criminelles et, en particulier, de l'ordonnance du commerce. Qu’il soit fait un règlement pour le fait des faillites, et surtout pour les revendications. Etablissement d’une chambre de commerce pour la ville de Paris, et d’un comité qui connaîtra des faillites. Suppression des loteries, du mont-de-piété, de la caisse de Poissy, des abus de la voirie et autres établissements vexatoires. Barrières reculées aux frontières. Libre sortie et sans droits de toutes marchandises fabriquées dans le royaume. Uniformité de poids et mesures. Que l’échéance des effets de commerce, et le délai pour faire le protêt, soit rendu uniforme dans tout le royaume. Que toutes séparations de biens entre mari et femme, même non marchands, soient rendus publiques. Suppression de la vénalité de toutes les charges quelconques, et habileté à tous citoyens indistinctement d’y être nommés. Suppression en particulier des offices municipaux de la ville de Paris, dont les officiers seront dorénavant tous éligibles, et les anciens échevins continueront de faire partie du conseil de ville. Qu’il ne soit désormais fait aucune altération dans toutes les monnaies, sans le consentement de la nation. Qu’il soit pris les précautions les plus sévères et les mesures les plus efficaces pour prévenir le prix excessif des grains. Suppression de la régie des cuirs. Révision des statuts actuels de toutes les communautés. Rétablissement de la Pragmatique-Sanction, et révocation de tous les édits, ordonnances, arrêts, règlements intervenus depuis à ce sujet. Qu’il soit rendu un compte public et annuel de l’administration des hôpitaux. GAH1ER Pour le tiers-état du district de l'église des Théa-tins à Paris (1). OBJETS PRÉLIMINAIRES. Art. 1er. Dans l’assemblée des Etats généraux, on opinera par tête et non par ordre ; il est impossible que cela soit autrement, car l'équité doit être la première loi de cette assemblée, et il n’y a point de justice là où l’équilibre est rompu. Art. 2. Il sera statué que, dans les prochains Etats généraux, le nombre des représentants des trois ordres sera (le plus possible) dans un rapport égal à la proportion qui existe entre eux dans la population générale de la France. Ce rapport est de toute équité, et dans les disposi-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque impériale. [Etats gén. 4789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] 34g auraient le plus réuni de suffrages, qui auraient la préférence. 11 a été procédé par l’un de nos secrétaires à l’appel de toutes les personnes composant la présente assemblée, sur les bulletins que chacun avait remis lors de son entrée en la présente assemblée; et à mesure de cet appel, les personnes nommées se sont tour à tour transportées à la boîte du scrutin, où elles ont séparément, les unes après les autres, mis leur bulletin électif dans ladite boîte, en la présence desdits sieurs scrutateurs ci-devant nommés ; ce qui ayant été terminé, lesdits bulletins, ont été tirés de ladite boîte les uns après les autres, et avons fait inscrire au fur et à mesure les noms de ceux dénommés en chacun desdits bulletins dont nous avons fait un extrait général, duquel nous avons ensuite extrait les noms des personnes qui avaient réuni le plus grand nombre de suffrages et qui sont : MM. Delondre père, marchand épicier, à la pluralité de cent vingt et une voix ; Fremin, avocat, à la pluralité de cent dix-huit voix ; Lefebvre, négociant, à la pluralité de cent sept voix ; de Chan-tereyne, avocat, à la pluralité de cent et une voix; Farcot, négociant, à la pluralité de cent voix ; Les-guilliers, négociant, à la pluralité de soixante-dix voix ; Séjourné, négociant, à la pluralité de cinquante voix ; Dumas, négociant, à la pluralité de quarante-quatre voix. Lesquels dénommés ont été proclamés élus comme représentant la présente assemblée, ce qu’ils ont accepté, et il leur a été remis par nous les cahiers et doléances que les commissaires de la présente assemblée avaient été chargés de rédiger pendant le cours d’icelle, et qu’ils venaient de nous remettre à l’instant, après que mention de leur annexe à ces présentes a ôté faite sur iceux par nos secrétaires, et signés d'eux et de nous. Et de tout ce que dessus nous avons dressé le présent procès-verbal , ouvert le mardi 21 avril 1789, à neuf heures du matin, et continué dans ladite assemblée, pendant sa durée, sans aucune interruption, de jour ni de nuit, jusques cejourd’hui mercredi 22 avril 1789, onze heures de relevée, et avons signé avec nosdits secrétaires ces présentes. Louis Delondre; Fremin ; Lefebvre; de Chan-tereyne ; Farcot ; Lesguilliers ; Garnier ; Àndry , Séjourné ; Dumas; Gosse et Brunet, secrétaires. CAHIER De l'assemblée partielle du tiers en V église de Saint-Nicolas-des-Champs , quartier Saint-Denis , 1er district. Le district demande : Que les Etats généraux s’occupent, avant tout, de la forme à donner à la représentation nationale pour l’avenir. Qu’il soit établi, comme maxime fondamentale, la liberté individuelle de chaque citoyen, la liberté de la presse sagement modifiée. La liberté entière du commerce épistolairc. La nécessité du consentement de la nation à tous impôts directs ou indirects, même à tous emprunts. La suppression de tous impôts distinctifs entre les différents ordres. La réduction, s’il est possible, de tous les impôts en un seul, non susceptible d’arbitraire, avec mesures nécessaires pour éviter les frais de perception. Consolidation de la dette nationale. Retour périodique des Etats généraux, et fixation, par lesdits Etats généraux eux-mêmes, du jour de l’assemblée prochaine, époque à laquelle l’impôt établi cessera. La responsabilité des ministres. Suppression de toutes évocations et commissions qui tendent à soustraire les citoyens à leurs juges naturels. Suppression de tous arrêts de surséance et de défense, de tous sauf-conduits et lieux privilégiés. Réformation des lois civiles et criminelles et, en particulier, de l'ordonnance du commerce. Qu’il soit fait un règlement pour le fait des faillites, et surtout pour les revendications. Etablissement d’une chambre de commerce pour la ville de Paris, et d’un comité qui connaîtra des faillites. Suppression des loteries, du mont-de-piété, de la caisse de Poissy, des abus de la voirie et autres établissements vexatoires. Barrières reculées aux frontières. Libre sortie et sans droits de toutes marchandises fabriquées dans le royaume. Uniformité de poids et mesures. Que l’échéance des effets de commerce, et le délai pour faire le protêt, soit rendu uniforme dans tout le royaume. Que toutes séparations de biens entre mari et femme, même non marchands, soient rendus publiques. Suppression de la vénalité de toutes les charges quelconques, et habileté à tous citoyens indistinctement d’y être nommés. Suppression en particulier des offices municipaux de la ville de Paris, dont les officiers seront dorénavant tous éligibles, et les anciens échevins continueront de faire partie du conseil de ville. Qu’il ne soit désormais fait aucune altération dans toutes les monnaies, sans le consentement de la nation. Qu’il soit pris les précautions les plus sévères et les mesures les plus efficaces pour prévenir le prix excessif des grains. Suppression de la régie des cuirs. Révision des statuts actuels de toutes les communautés. Rétablissement de la Pragmatique-Sanction, et révocation de tous les édits, ordonnances, arrêts, règlements intervenus depuis à ce sujet. Qu’il soit rendu un compte public et annuel de l’administration des hôpitaux. GAH1ER Pour le tiers-état du district de l'église des Théa-tins à Paris (1). OBJETS PRÉLIMINAIRES. Art. 1er. Dans l’assemblée des Etats généraux, on opinera par tête et non par ordre ; il est impossible que cela soit autrement, car l'équité doit être la première loi de cette assemblée, et il n’y a point de justice là où l’équilibre est rompu. Art. 2. Il sera statué que, dans les prochains Etats généraux, le nombre des représentants des trois ordres sera (le plus possible) dans un rapport égal à la proportion qui existe entre eux dans la population générale de la France. Ce rapport est de toute équité, et dans les disposi-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque impériale. 316 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.] lions présentes, si les ordres du clergé et de la noblesse d’une part, si le tiers-état de l’autre, étaient chacun d’un avis unanime, il serait impossible de décider. Art. 3. Il sera fait une loi formelle par laquelle les représentants du tiers-état ne pourront à l’avenir, et dans aucun cas, être choisis que dans cet ordre seul. Il est sans doute inutile de développer ici toute l’importance de cetle loi. Art 4. Il sera pareillement statué que, hors de la tenue des prochains Etats généraux, le tiers-état de la ville de Paris jouira, dans les assemblées préparatoires, du droit commun aux deux autres ordres de se nommer des présidents, secrétaires, etc.; ce point, une fois arrêté, nous délivrera de la morgue et des ridicules prétentions des échevins et autres gens de ville. OBJETS DE PREMIÈRE IMPORTANCE. Art. 5. Les Etats généraux feront le plus sérieux examen, les recherches les plus exactes sur la quantité de grains qui se trouvent en ce moment dans la France. S’il existe des magasins opiniâtrement fermés, ils les feront ouvrir en vertu de l’autorité que la nation leur a transmise; s’ils rencontrent des accapareurs, ils les puniront de mort, de quelque rang qu’ils puissent être, comme criminels de lèse-humanité au premier chef, et ils se joindront au ministre pour favoriser l’importation par toutes sortes de moyens. Art. 6. Le pouvoir législatif sera pour jamais séparé du pouvoir exécutif, et remis entre les mains de la nation (1). II est aisé de démontrer qu’il n’en peut être autrement que dans un pays soumis au despotisme. En effet, s’il était vrai que la volonté du monarque, écrite et consignée dans les registres publics, fît elle seule la loi, qui ne voit qu’alors la différence entre le gouvernement monarchique et le despotique ne consisterait que dans la vaine formule d’écrire la volonté du prince, différence futile et qui s’évanouit dès qu’on l’examine de près? Art. 7. La nation ayant seule le droit de faire les lois, il est évident qu’à elle seule appartient celui de les consigner dans les registres publics. Les parlements seront donc réduits aux simples fonctions qui leur conviennent, celles dejugeurs. Art. 8. Le militaire de tout le royaume, n’étant établi que pour la défense de la patrie, doit être à la solde de la nation. Le Roi en aura la discipline et le commandement général. Art. 9. Par une suite de l’article précédent, toutes les troupes tant françaises qu’étrangères prêteront le serment solennel de ne jamais prendre les armes que contre les ennemis. Les malheurs dont nous avons été témoins nécessitent cette précaution. Art. 10. La dette du Roi sera consolidée, car elle est celle de la nation, et des secours extraordinaires seront accordés pour remplir les engagements à époque fixe, car la foi publique doit être sacrée. Art. 11. Par une suite de l’article précédent, les ministres des finances seront comptables à la nation, et les plus légères prévarications de leur part seront punies d’une manière exemplaire. Art. 12. Il sera accordé à toutes les" provinces de France, sans exception, des Etats particuliers, (1) Le monarque faisant partie de la nation, et étant d’ailleurs chargé du pouvoir exécutif, il est évident que son consentement est nécessaire à la confection de la loi. composés des trois ordres dans la proportion ci-dessus indiquée. Ces Etats seront chargés de la répartition des impôts dans l’étendue de leur province, et en verseront le produit dans une caisse nationale établie pour cet effet ; les membres qui les composeront seront changés tous les ans. Art. 13. 11 sera fait, par les Etats généraux, un examen scrupuleux des pensions, et toutes celles non méritées seront supprimées. Art. 14. Tous les impôts arbitraires seront supprimés et remplacés par d’autres également répartis. Art. 15. Dans la répartition de l’impôt on aura égard à la classe nombreuse de citoyens insolvables qui existent en France. Ceux-là ne payeront absolument rien, puisqu’ils ne possèdent rien. OBJETS D’UTILITÉ GÉNÉRALE. Art. 16. Les fermes, aides, gabelles, entrées, péages, tailles, corvées, et cette multitude innombrable de droits de toute espèce qui nous accablent, seront supprimés et remplacés ainsi que dessus. Art. 17. La vénalité des charges de la magistrature sera supprimée, et ces charges, ni aucune autre quelconque, ne donneront plus la noblesse. Art. 18. Tous les juges, de quelque rang qu’ils soient, pourront être pris à partie. Art. 19. L’administration de la justice se faisant au nom du Roi, il sera tenu d’accorder des dommages et intérêts aux accusés injustement détenus ou condamnés, à moins que leur accusateur ne soit un homme privé, auquel cas ces dommages et intérêts retomberont sur lui. Art. 20. Toute la France n’a qu’un même vœu pour la réformation de la jurisprudence civile et criminelle, et pour l’extinction des épices et frais de procédure. Art. 21. L’assemblée générale de la nation reconnaîtra les inconvénients sans nombre qui naissent de cette multitude de coutumes, qui se heurtent, se croisent, se détruisent dans un meme empire. En s’occupant des moyens de simplifier les lois, elle s’attachera donc â les rendre uniformes dans toute l’étendue de la France. Art. 22. Les capitaineries seront supprimées, et la chasse sera libre à tous les hommes. Art. 23. La noblesse ne sera plus héréditaire. Art. 24. Toutes les places, charges, emplois et dignités, tant ecclésiastiques quemilitaires, seront accessibles aux citoyens du tiers-état. Art. 25. Il sera permis aux prêtres de se marier, car le mariage n’est point incompatible avec leurs fonctions, et ne leur est interdit par aucune loi divine. Art. 26. Le divorce sera pareillement permis, car un contrat indissoluble est opposé au caractère inconstant de l’homme. Art. 27. Les dispenses de mariage seront supprimées; car si une chose est mauvaise en soi, on ne doit point la permettre pour de l’argent. Art. 28. Tous les tributs que nous portons à la cour de Rome seront pareillement à jamais supprimés. Art. 29. On reconnaîtra enfin que la tolérance est une des vertus les plus essentielles dans l’état de société, et qu’il n’appartient point à l’homme de décider de ce qui n’a nul rapport à l’homme. Toutes les religions sont permises chez la nation la plus polie du monde. Elles y jouiront de leur libre culte, et ne seront plus un motif d'exclusion à aucun des privilèges dont jouissent les catholiques romains. [États gén. 1789, Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, intra muros.J 317 Art. 30. Les professions religieuses seront à l’avenir généralement éteintes et supprimées, comme contraires au vœu social et au bien de la patrie dont elles diminuent la population. Par ce moyen également doux et simple, les ordres réguliers desdeux sexes s’éteindront successivement en France (1) et leurs biens, acquis à la nation, serviront au payement de la dette publique, et à une multitude d’objets d’utilité générale. Cet article est un des plus importants de ce cahier. Art. 31. Les revenus des évêques, abbés, prieurs, curés, vicaires, et autres personnes engagées dans les ordres, seront répartis dans une proportion moins inégale et moins révoltante ; de telle sorte qu’il ne se trouve, clans aucun lieu, de curé qui ait moins de 1,200 livres de revenu. Comment pourrait être utile à ses paroissiens celui qui a lui-même besoin de secours? Art. 32. Aucun évêque, abbé, ou autre ecclésiastique, ne pourra, dans aucun cas, posséder plus d’un bénéfice, ainsi qu’il est prescrit par les canons de l’Eglise. Art. 33. Les évêques seront, une fois pour toutes, tenus de résider dans leurs diocèses, comme les colonels à la suite de leurs régiments. Art. 34. Les banqueroutiers frauduleux , de quelque condition qu’ils soient, seront poursuivis et punis comme les voleurs qui s’introduisent dans les maisons, car ils sont au moins aussi criminels. Les lettres de surséance qui favorisent leur malversation, et les lieux privilégiés qui leur offrent asile, seront supprimés. Art. 35. Les grands ne seront plus soustraits au glaive de la justice. Il n’y aura plus de supplice infamant, c’est-à-dire qu’il n’y en aura qu’un seul pour les trois ordres, et la famille des suppliciés ne sera plus déshonorée. Art. 36. La liberté de la presse sera pleine et entière, ce qui n’aurait point lieu si les imprimeurs étaient responsables des auteurs, et que ceux-ci fussent obligés d’imprimer leurs noms. Il existe assez de moyens de poursuivre et de punir les libellistes. Art. 37. Les cachots, les bastilles seront à jamais' démolis, et cet acte de justice célébré par des réjouissances publiques ; les lettres de cachet ne seront valables que pendant vingt-quatre heures ; l’espionnage sera aboli, etc. OBJETS PARTICULIERS A LA VILLE DE PARIS. Art. 38. Le projet arrêté de quatre hôpitaux pour cette ville sera mis à exécution le plus promptement possible. Les souscriptions faites depuis longtemps pour cet objet doivent permettre de commencer les travaux. Art. 39. Il sera pris les plus sages mesures pour que l’administration en soit aussi parfaite que le permettent les vices de l’homme. L’importance de cet objet doit exciter le zèle des citoyens les plus éclairés. Art. 40. On s’occupera plus sérieusement qu’on ne l’a fait jusqu’ici, dans les hôpitaux, de l’art de guérir les maniaques. On croit avoir tout fait quand, en les resserrant dans des réduits obscurs, capables d’altérer la raison de l’homme le mieux constitué, on les a mis hors d’état de nuire à leurs semblables. On abolira l’usage barbare de les donner en (1) Bien entendu qu’il sera expressément interdit à tous les couvents de France de faire venir des religieux des pays étrangers, autrement ils feraient comme le phénix qui renaît de ses cendres. spectacle comme des bêtes féroces, pour un vil tribut, et nous tâcherons, s’il se peut, d’effacer ce fait des annales du dix-huitième siècle. Art. 41. On détruira pour jamais ce préjugé honteux qui flétrit les bâtards ; et ce, en les admettant indistinctivement dans toutes les fonctions publiques ou privées. On s’occupera des moyens de rendre les enfants trouvés utiles à l’Etat en en faisant des élèves, soit pour la marine, soit pour le service de terre, soit pour quelque autre objet d’utilité publique. Art. 42. On fera construire à Paris une ou plusieurs prisons, spacieuses, éclairées, salubres, autant que peuvent l’être des lieux où l’on perd le premier des biens. Le ministre qui tient dans ses mains le sort de la France avait manifesté sur cet objet des vues bienfaisantes qu’il sera prié de développer de nouveau. Art. 43. Après avoir porté l’attention la plus sévère sur le commerce des grains, on s’occupera de la viande, aliment de seconde nécessité. Pour nous mettre désormais à l’abri du despotisme insultant des bouchers, on fera les règlements les plus précis sur la vente et sur la taxation des viandes, sur les faux poids, etc ; et l’on autorisera les marchands des environs de Paris à venir publia quement y vendre du bœuf, du veau, du mouton, etc. Art. 44. La vigilance publique veillera aussi sans cesse sur la salubrité des aliments et des boissons; et cet objet, l’un des plus importants, ne pourra être parfaitement rempli qu’autant qu’on en attribuera la connaissance à une compagnie d’hommes intègres, nommés par la nation, et lesquels eux-mêmes ne seront point à l’abri de plaintes rendues contre eux. Art. 45. On placera hors Paris les tueries, les échaudoirs et les fonderies de suif, suivant le projet qu’avait adopté M. de Breteuil. Art. 46. On suivra d’ailleurs et l’on exécutera successivement les projets d’embellissement et de salubrité qu’avait conçus ce ministre. Art. 47. Si des temps plus heureux permettent de disposer de sommes considérables (que souvent l’on voit s’engouffrer dans de folles entreprises, dans des fantaisies ruineuses) , le Roi sera supplié de faire terminer le Louvre sur l’ancien plan de Perrault. Alors, dans cet édifice, monument digne du plus puissant des rois, on renfermerai bibliothèque, lecabinetd’histoirenatureile, le muséum et la galerie des plans. 11 sera ouvert au public, non six heures par semaine, comme l’est aujourd’hui le dépôt des livres, mais tous les jours. Bien entendu que la nation contribuant à cet établissement, le ministre des bâtiments sera tenu de mettre sous les yeux des Etats généraux les devis et plans relatifs à cet objet. Art. 48. Par une suite de l’article 16, on démolira, le plus promptement possible, ces murailles dont on vient d’enceindre Paris, et dont la dépense effrayante a fait gémir tous les cœurs vertueux. Les inconvénients qu’elles entraînent sont trop nombreux pour qu’il soit permis de les laisser subsister plus longtemps. Art. 49. La police de la ville de Paris sera désormais observée avec la plus grande exactitude, non cette police iusidieuse qui, ne cherchant que des coupables, est toujours prête à attenter à la liberté des citoyens, mais celle qui les protège, qui leur assure'lapaixetla tranquillité dont ils doivent jouir. Art. 50. Les réverbères qui éclairent cette ville seront désormais constamment allumés depuis la fin du jour jusqu’au lever de l’aurore, quel que 318 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris, ultra muros.f soit l’état du ciel; s’il est besoin d’un surcroît de contribution , il est à présumer que nul ne s’y refusera. On doit observer que les réverbères rempliraient beaucoup mieux leur objet s’ils étaient placés de droite et de gauche le long des maisons. Art. 51. Le pavé de la ville sera entretenu avec plus de soin, et il ne sera plus permis de le remuer sans cesse pour satisfaire aux ridicules opérations d’une compagnie. Art. 52. Afin que les précédents articles et ceux qui y ont rapport soient plus sûrement exécutés, les voyers, et tous ceux qui président à l’entretien de la ville, seront sous l’œil de la vigilance publique. Il sera permis à un chacun de les dénoncer et ils seront sévèrement punis pour la moindre prévarication, pour la plus légère négligence. Art. 53. Tous les privilèges exclusifs, de quelque genre qu’ils puissent être, seront supprimés comme contraires à la liberté et au bien public. Il n’est aucun propriétaire qui n’ait ressenti vivement les inconvénients de .celui établi sur le vidage des latrines. Art. 54. L’on pèsera dans un mûr examen les avantages et les inconvénients des maîtrises, qui déjà ont été supprimées une fois. On ne peut disconvenir qu’elles ne soient une entrave à la liberté du commerce. Art. 55. Dans le cas où on les conserverait, on supprimera, par une suite de l’article 30, les certificats de catholicité exigés pour la plupart d’entre elles et pour presque toutes les charges. Ces restes odieux des siècles d’intolérance et de barbarie doivent être à jamais anéantis. Art. 56. Puisque dans un siècle que l’on dit le plus éclairé, le plus policé de tous, rien ne peut arrêter le délire des hommes opulents -, puisqu’ils se font un barbare plaisir de voler dans des chars rapides à travers une multitude de piétons que leur âge, leur sexe, l’embarras des rues, la fange qui les couvre, leur peu de largeur, mettent souvent dans l’impossibilité d’échapper au danger; puisque lorsque ces hommes féroces ont renversé, mutilé, écrasé leurs semblables, ils fuient sans témoigner la moindre émotion, et demeurent insensibles lorsqu’on sollicite leur charité ; puisque enfin la police est restée muette sur cet objet, il faut bien que les représentants de la nation s’en occupent. Ils ont sous les yeux les lois justes que le roi d’Espagne a faites. Tout cocher qui, volontairement ou involontairement, (car il est impossible de juger l’intention), aura blessé quelqu’un, sera mis au carcan pendant trois jours; la voiture et les chevaux seront confisqués au profit des pauvres, les biens du maître saisis, et l’on prélèvera dessus le traitement de la personne blessée, et 3,000 livres dé dommages et intérêts (1). Art. 57 et dernier. Il est une multitude d’autres abus importants à réformer, et dont la plupart sont consignés dans les cahiers du tiers-état des autres districts. Nous nous référons à tout ce que ces cahiers renferment d’utile pour le maintien de la liberté et des propriétés, deux points sans lesquels il ne peut y avoir de bon gouvernement. (1) Il est inutile de détailler ici les précautions à prendre contre la cupidité des malheureux qui, pour avoir des dommages et intérêts, feindraient d’avoir été blessés.