[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juillet 1791.] ble de remplir les intentions de M. Lépaux et l’on renverra les notes du comité au pouvoir exécutif. (L’Assemblée ordonne le renvoi de la demande de M. La Reveillère-Lépaux au pouvoir exécutif.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi 5 juillet au soir qui est adopté. M. Armand, au nom des comités des rapports et des recherches réunis. Messieurs, vous avez ajourné un projet de décret que je vous ai présenté à la séance de samedi dernier au sujet de V arrestation de trois barils de piastres effectuée à la douane de Forbach et vous avez renvoyé au comité des recherches pour se concerter avec le comité diplomatique et d’agriculture et de commerce, et pour vous présenter leurs vues sur la manière d’exécuter le décrets prohibitifs des 21 et 28 juin derniers relatifs à la sortie des matières d’or et d’argent hors du royaume (1). Ce rapport vous a été fait par un membre du comité diplomatique et vous avez rendu un décret par lequel vous avez déclaré que, par matières d’or et d’argent, vous n’aviez point entendu comprendre les espèces monnayées éirangères(2); mais vous n’avez point statué sur la demande que je vous avais faite relativement aux trois barils de piastres, et au contraire l’Assemblée nationale s’est réservé de statuer par un décret particulier. Je trouve dans le procès-verbal la preuve que la commission est parfaitement conforme à ce que je vous ai exposé. 11 a été prouvé, par la véntication qui a été faite des piastres et par la vérification des lettres de voiture, que tout cela est parfaitement conforme. En conséquence, j’ai rhonneur de vous proposer le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu ses comités réunis des rapports et des recherches, décrète que les barils contenant des espèces monnayées étrangères, mentionnées dans le procès-verbal du receveur des douanes nationales de Forbach, contenant l’arrestation desdites espèces, ordonnée par la municipalité dudit Forbach, en date du 26 juin dernier, jouiront, conformément à son décret du 3 de ce mois, de la libre circulation pour arriver à leur destination. » (Ce décret est adopté.) M. Payen, au nom du comité des colonies , de marine , de Constitution, d'agriculture et de commerce. Messieurs, vous avez adopté, dans la séance du mardi 28 juin dernier, différentes dispositions qui vous ont été proposées par M. ûe-lavigne relativement aux affaires de Saint-Domingue, et vous avez renvoyé kà vos comités pour la rédaction (3). Voici le projet de décret que nous vous présentons : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait au nom de ses comités des colonies, de marine, de Constitution, d’agriculture et de commerce, prenant en considération les explications et rétractations des (l)Voy. Archives parlementaires, tome XXY1I, séance du 2 juillet 1791, page 651. (2) Voy. Archives parlementaires, t. XXV11, séance du 3 juillet 1791, p. 688. (3) Voy. Archives parlementaires, tome XXVII, séance du 28 juin 1791, page 583. 15 membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, contenues daus leurs adresses des 19 avril et 22 mai derniers, « Déclare qu’il u’y a lieu à inculpation contre les membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, ceux du comité provincial de l’ouest de ladite colonie, et le sieur Santo-Domingo, commandant le vaisseau le Léopard. « Eu conséquence, décrète qu’elle lève les dispositions de ses decrets des 20 septembre et 12 octobre 1790, par lesquelles les membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, ceux du comité provincial de l’Ouest, et le sieur Santo-Domingo, ont été mandés et retenus à la suite de l’Assemblée nationale, ainsi que les dispositions par lesquelles le roi a renvoyé l’équipage du vaisseau le Léopard dans ses quartiers respectifs, et enjoint aux officiers de rester dans leurs départements. » (Ce décret est adopté.) M. Merle, secrétaire, fait lecture d’une lettre des commissaires de V Assemblée nationale dans les départements du Nord , du Pas-de-Calais et de U Aisne. Cette lettre est ainsi conçue : « Lille, le 3 juillet 1791. « Messieurs, « Nous profitons d’un instant de relâche pour vous annoncer que nous avons entamé aujourd’hui le but principal de notre mission, en recevant le serment de la garnison de Lille, garnison la plus importante et la plus nombreuse des 3 départements où vous nous avez envoyés. 15 officiers seulement ont refusé de prêter le serment, et se sont dispensés en conséquence de se trouver sous les armes, lors du rassemblement de la garnison. 3 autres, contre lesquels il existait des plaintes et quelques soupçons, ont été par nous suspendus de leurs fonctions, jusqu’à ce qu’ils se soient justifiés, et nous avons remis leur prestation de serment, jusqu’à cette époque. Du reste, tous les autres ofticiers, qui avaient remis d’avance leur déclaration aux ch�fs de leurs corps respectifs, ont prêté individuellement le serment à la tète de ces corps, et ont souscrit la formule insérée dans notre procès-verbal. Les corps entiers ont ensuite acquiescé à ce serment, etl’ontcollectivement prêté avec une ardeur et des acclamations qui annoncent leur patriotisme et leur zèle pour la défense de l’Etat. « Nous vous ferons passer, le plus tôt qu’il sera possible, une expédition de notre procès-verbal, qui vuus instruira de tous les détails de nos opérations, dont nous ne pouvons aujourd’hui vous rendre compte que d’une manière générale et abrégée. « Nous ne devons pas manquer de vous informer que, dès l’instant de notre arrivée, la garde nationale de Lille, qui est très nombreuse et de la plus belle formation, nous fit témoigner par ses chefs le désir de prêter le serment prescrit par la loi du 22 juin. Nous ne connaissons point de raison qui puisse nous empêcher d’acquiescer à cette demande. En conséquence, dès le lendemain, nous nous rendîmes avec M. de Roctiam-beau, commandant général de l’armée du Nord, à l’esplanade, dite le Champ-de-Mars, où la garde nationale s’était assemblée, et où nous reçûmes son serment. La garde nationale a dû vous rendre compte, par une adresse dont elle nous a fait remettre un exemplaire, de cette cérémonie patriotique, où l’on a mis toute la pompe qui 16 Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 17 juillet 1791.J pouvait avoir lieu dans de telles occasions : l’ordre qui y a régné, ainsi que la prestation du serment de la garnison, et les sentiments que la garde nationale et les troupes de ligne ont fait éclater, sont la meilleure réfutation des prétentions de ceux qui, dans les calculs ou dans les transports aveugies de leur haine, osent avancer que nous n’avons plus de force publique. « Nous sommes, etc... « Signé : DE BlRON, BOULLÉ, ALQUIER. » M. Goudard, au nom du comité d’ agriculture et de commerce, fait un rapport sur Le transit et l’entrepôt réclamés par les départements du Haut et du Bas-Rhin, et sur le remboursement des droits perçus sur les toiles blanches de coton étrangères qui seront introduites dans le royaume pour être imprimées dans les manufactures du département du Haut-Rhin ; il s’exprime ainsi : Messieurs, les départements du Haut et du Bas-Rhin sont aujourd’hui, par le reculement des douanes aux frontières, placés dans l’intérieur du royaume, et se trouvent, avec l’étranger, dans les mêmes rapports que les autres départements de l’intérieur. Vu leur position particulière, ils réclament de la justice de l’Assemblée nationale : 1° La conservation du transit pour les marchandises étrangères; 2° L’établissement d’un entrepôt dans la ville de Strasbourg, pour recevoir les marchandises étrangères qui entreront dans le royaume par certains bureaux situés sur le Haut et le Bas-Rhin ainsi que pour toutes les marchandises ve' antdes îles françaises, qui seraient expédiées avec acquit-à-caution pour celte destination; 3° La faculté de recevoir le remboursement des droits acquittés sur les toiles blanchi s de coton tirées de l'étranger par le bureau de Saint-Louis, avec la destination d’être réexportées à l’étranger, après avoir été peintes dans les manufactures du Haut et du Bas-Rhin. Ces trois objets de demande sont, il est vrai, une exception à la loi générale; mais les raisons qui les motivent ont paru assez pressantes à votre comité; il s’est convaincu que l’égalité sera toujours le dernier résultat de cette légère différence établie pour les douanes d’une localité particulière; si les demandes des départements du Haut et du Bas-Rhin ne s’appuyaient que sur un intérêt purement particulier ne relevant en rien de l’intérêt national, votre comité ne s’en serait pas rendu l’organe auprès de vous. Je passe maintenant à l’examen de ces trois questions importantes. La première question est relative au transit. La ville de Strasbourg se trouve située au milieu à peu près d’une étendue de 50 lieues, dont une extrémité débouché au Palalinat par le bureau de Rulsheim, et l’autre touche à la Suisse par le bureau de Saint-Louis. Le Rhin parcourt cette étendue dans toute la longueur, et se trouve, pour ainsi dire, enfermé entre deux routes, dont l’une est sur le territoire français, et l’autre passe sur le territoire allemand; toutes deux partent à peu près du même point, de Spire, et aboutissent à Bâle. Le milieu du fleuve sert de limites aux deux puissances. Cette position fuit sentir de quel-e importance il est de conserver sur la rive et sur la rouie française le transit réciproque des marchandises d’Allemagne et de Suisse. Le commerce national ne peut qu’en être vivifié, le numéraire étranger arrive et reste daus les communautés riveraines par la consommation des denrées qui se fait sur le lieu même dans une étendue de plus de 50 lieues. Les habitants de ces cantons sont assurés d’un débouché périodique de leurs comestibles et de leurs fourrages. Ce commerce d’ailleurs attache à la France un nombre considérable de voituriers et de bateliers, qui, en cas de guerre, deviennent une ressource précieuse pour le transport des vivres et des munitions nécessaires à nos armées. Ainsi, sous tous les rapports possibles de commerce et d’industrie, de convenance et de sûreté, il doit vous paraître démontré, comme à votre comité, qu’il est utile de conserver et même de favoriser le transit dans les départements du Haut et du Bas-Rhin, en l’entourant de tous les moyens de surveillance nécessaires pour qu’il ne puisse être fait aucune introduction de marchandises étrangères dans le royaume. 208 voitures sont employées au transit sur le territoire français; la valeur des marchandises qu’elles portent s’élève à 70 millions, et si elles étaient destinées pour la France, elles acquitteraient environ 6,600,000 livres. Il ne faut donc pas laisser sans surveillance cette masse énorme de marchandises traverser notre territoire pendant plusieurs jours et sur une étendue de 50 lieues; mais le commerce ne devrait pas être moins inquiet de les voir sur la rive opposée menaçant toujours nos manufactures, parce que tous les points ne peuvent être tellement gardés que l’introduction soit impossible. Les nombreuses sinuosités du Rhin rendraient la fraude très facile ; aussi a-t-il paru à votre comité que le transit était lui-même un moyen efficace de surveiller ces marchandises. La deuxième question est relative à l’entrepôt. C’est une très grande question que celle de savoir si, après avoir repoussé toutes perceptions aux extrêmes frontières, on peut et l’on doit établir dans certains lieux, ou rapprochés des frontières ou plus intérieurs dans le royaume, des entrepôts pour y recevoir les marchandises étrangères et qui ne payeraient les droils que lorsqu’elles seraient destinées à la consommation du royaume. Sur une question de cette importance, il faut se tenir en garde contre la première impression qui naturellement doit, être contraire à de pareils établissements, il ne faut pas croire que cette exception est un privilège, qui, par cela seul qu’il� est avantageux à la ville qui le sollicite, doit être nuisible à l’intérêt général du commerce. Il faut surtout que ceux qui confondent ces entrepôts avec ce qu’étaient les douanes extérieures apprennent à les distinguer et à les considérer comme des dépôts libres qui ne mettent aucune entrave à ceux qui ne veulent pas en user. La circulation générale et intérieure ne se trouvant nullement gênée, la question devient simple et se réduit à examiner si le commerce national est ou n’est pas intéressé à ce qu’il y ait de ces sortes d’établissements dans le royaume. L’entrepôt, considéré sous ses plus grands rapports et distribué avec sagesse dans certains lieux du royaume, offrirait de grands avantages; peut-être rendrait-il inutiles les franchises des ports. Mais ce n’est pas une mesure générale dont votre comité s’est occupé et qu’il vous soumet en ce moment. Lorsque l’esprit public plus