[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 novembre 1790.] 697 M. Fréteau. Je demande la question préalable et le renvoi au pouvoir exéculit. Il est important que nous ne fassions pas légèrement des accusations contre des absents, surtout quand nous faisons les fonctions de jurés, et qu’il n’y a point de code pénal établi. M. Barnave. Il existe des troubles à Uzès. Vos décrets éprouvent une résistance trop longtemps prolongée, qui n’a pas encore été réprimée. Des troubles ultérieurs se sont fait craindre et ont alarmé le département. Dans ces circonstances, les députés du département ont pensé que les troupes actuellement à Uzès étaient peu propres, par les sentiments qu’elles ont manifestés, à rétablir l’ordre dans cette ville. C’est dans ces circonstances que le gouverneur de la ci-devant province de Languedoc a refusé d’obéir aux ordres du ministre et à la réquisition du département. Les directoires ont, d’après vos décrets, le droit de faire aux commandants militaires toutes les réquisitions nécessaires pour le maintien de la police, de la paix publique et pour l’exécution des décrets. Les commandants ne peuvent se refuser à ces réquisitions sans acquérir le droit de disposer de la liberté, de la tranquillité publique et delà sûreté des citoyens, droit qui certainement ne saurait leur être accordé. Ces usurpations d’autorité sur le pouvoir civil, d’abord peu sensibles, pourraient devenir très dangereuses. Le gouverneur de Languedoc, répréhensible dans les principes, ne saurait trouver d’excuses dans ses intentions ; si on les sondait, peut-être seraient-elles à sa charge. Nous ne pouvons pas faire grâce à une infraction qui mettrait en danger la liberté publique. {On applaudit.) Un très grand nombre de membres demandent à aller aux voix. On ferme la discussion. La question préalable, demandée par MM. Ma-louet et Maury sur la partie du décret relative à M. Montaigu, est mise aux voix. — M. le président prononce qu’il y a lieu à délibérer. — Plusieurs membres du côté droit prétendent qu’il y a du doute. M. de Montlosier. Une partie des membres du côté gauche ne s’est levée ni pour ni contre. Je vous prie, M. le président, d’observer combien cette neutralité d’une partie saine de l’Assemblée est favorable à notre amendement. M. le Président. Les six secrétaires sont du même avis que moi ; cependant je vais renouveler l’épreuve. Le premier résultat est confirmé à une majorité non douteuse. Sur la partie du décret relatif à M. Lespin, on décide, presque à l’unanimité, qu’il n’y a pas lieu à délibérer. L’amendement de M. Barnave est adopté en ces termes: « Faute par les commissaires de l’assemblée des soi-disant catholiques de Nîmes etd’Uzès d’obtempérer, huit jours après la notification du présent décret, à celui du 17 juin dernier qui les mandait à la barre, ils y seront conduits parla force publique. » M. de Folleville. Je demande que des commissaires nommés par vous soient chargés de constater les faits relatifs à M. Montaigu, ou plutôt qu’il soit entendu avant d’être jugé. Il est de la justice de l’Assemblée de faire pour lui ce qu’elle a fait pour les procureurs du district de la commune de Gorbigni. Je demande qu’il soit mandé à la barr.e. (La question préalable est demandée sur cette proposition.) (L’ Assemblée décide qu’il y a lieu à délibérer.) M. La Réveillère-Kjépeanx. Il n’est point ici question de juger M. Montaigu sans l’avoir entendu, mais de le renvoyer à un tribunal où il fera entendre sa justification. M. Dubols-Crancé. Quand les malheureux soldats du régiment du roi ont été égarés et se sont écartés des règles de la discipline, ont-ils été mandés à la barre? (Cette observation est très vivement applaudie). M. de Mirabeau . Pour qu’un pareil amendement fût adopté, il faudrait déclarer que tout citoyen doit être appelé à la barre avant d’être traduit devant les tribunaux. Il est clair que nous n’avons aucun droit de faire venir à la barre ceux qui contreviennent aux lois. Les tribunaux sont là pour faire exécuter les lois et pour punir ceux qui les violent. Plusieurs membres sont encore entendus. Enfin, l’Assemblée nationale ayant adopté l’article additionnel deM. Barnave, relativement aux commissaires des assemblées des soi-disant catholiques de Nîmes et d’Uzès, le décret est rendu ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, après avoir ouï le compte que lui a fait rendre son comité des rapports, de l’adresse du directoire du département du Gard, du 5 de ce mois, relative à la ville d’Uzès; « Décrète que le roi sera prié : 1° de donner des ordres pour que la réquisition du directoire du département du Gard ait incessamment son effet, et que la tranquillité de la ville d’Uzès soit efficacement protégée ; « 2° De donuer pareillement des ordres afin que le procès soit fait selon les lois, par les juges du district de Montpellier, au sieur Montaigu, pour fait de désobéissance à la loi ; « Décrété, en outre, que le roi sera prié de donner des ordres pour qu’à défaut par les commissaires des soi-disant catholiques de Nimes et d’Uzès, d’obtempérer, dans le délai de huit jours après la notification du présent décret, à celui du 17 juin dernier qui les mande à la barre, ils y soient conduits par la force publique. » M. le Président • annonce l’ordre du jour pour demain et lève la séance à 10 heures et demie.