[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 septembre 1791.] 168 Art. 3. « La quatrième législature, augmentée de 249 membres, élus en chaque département, par doublement du nombre ordinaire qu’il fournit pour sa population, formera l’ Assemblée de révision en une seule Chambre. « Les 249 membres seront élus après que la nomination des représentants au Corps législatif aura été terminée : et il en sera fait un procès-verbal séparé. Art. 4. « Les membres de la troisième législature qui aura demandé le changement, ne pourront être élus à l’Assemblée de révision. 5. « L’Assemblée de révision sera tenue de s’occuper, dès qu’elle sera formée, des objets qui auront été soumis à son examen, et aussitôt que son travail sera terminé, les 249 membres nommés en augmentation, se retireront sans pouvoir prendre part aux travaux législatifs. Art. 6. « La première et la seconde législature ne pourront proposer la réforme d’aucun article constitutionnel. » (Ces divers articles sont adoptés.) M. Thouret, rapporteur , donne lecture de l’article 7, ainsi conçu : « L’Assemblée nationale reconnaît que la nation a le droit imprescriptible de revoir et de changer sa Constitution, mais elle déclare qu’il est de l’intérêt général qu’tl e suspende l’exercice de ce droit jusqu’à l’année 1821. » M. Duport. L’Assemblée nationale a pensé qu’il serait plus pratiquement utile d’établir dans la Constitution un mode de révision partielle, que de forcer la nation à s’exposer, par la délégation du pouvoir constituant, à un bouleversement universel. Rejetant tous les systèmes d’assemblées constituantes, elle a adopté le système d’un Corps législatif reviseur. Il ne reste donc plus du premier système que le principe du droit qu’a la nation de changer en entier sa Constitution, quand elle le juge convenable. Je crois que, quand on a dit que la souveraineté de la nation est inaliénable et impn scriptible,on a tout dit à cet éirard; cependant il n’y aurait pas d’inconvénient à établir formellement h* principe que la nation ne peut aliéner ce droit de changer en entier, quand elle le veut, sa Constitution; mais dire que ce changement ne sera pas utile avant 30 ans, ou avant 100 ans, c’est-à-dire faire supposer qu’il sera utile après ce terme, c’est ne guère songer à la tranquillité et au bonheur de la génération suivante, et ne pas donner lieu à nos enfants de bénir notre sagesse. M. Tronchet. Messieurs, pour vous déterminer sur la difficulté qui s’élève, je crois qu’il suffit que vous vouliez bien vous rappeler l’époque et la manière dont le décret dont il s’agit a été rendu. Il vous avait éié proposé purement et simplement de décréter qu’il ne pourrait pas y avoir de révision avant 30 ans; on avait même rejeté tous les amendements qui tendaient à modifier ou à 15 ou à 20 ans, 3t l’on avmt fait plus, car on avait adopté la question préalable qui avait été proposée sur ce projet le décret. Dans cette position, je vous avoue qud j’ai été emporté par la conviction intime où j’étais, qu’il était impossible que vous eussiez le droit de déclarer et de mettre en article constitutionnel, que la nation ne pourra pas revoir la Constitution avant 20 ans. C’est alors que je vous ai dit, en vous faisant prévoir l’inconvénient d’une pareille loi, et les dangers qui pouvaient en résulter, que si vou-; vouliez l’adopter, vous ne pourriez le faire qu’en liant la loi avec le principe même; qu’il fallait absolument reconnaître le droit de la nation, en ne faisant de cette loi qu’un conseil. Aussi, Messieurs, ma rédaction n’est pas celle qu’on vous apporte ici, et que l’on a changée à la lecture du procès-verbal, lorsque je n’y étais pas. Je n’avais pas dit: l’intérêt de la nation est, mais j’avais dit ; i’intérêt de la nation l’invite à suspendre l'exercice de son droit pendant 30 ans, parce que je voulais que ce décret renfermât ces deux objets: l’aveu formel que la nation a toujours le droit de revoir; mais que la deuxième partie d’un décret que je prévoyais qui allait passer, et que je ne voulais pas qui passât comme il était présenté, m’indiquât qu’une déclaration faite par les représentants de la nation, du désir qu’ils avaient d’arrêter une trop prompte révision. Voilà, Messieurs, l’unique motif qui a déterminé le décret et sur lequel il a été admis un mode de révision qui suppose évidemment une possiblité plus prochaine de pouvoir faire cette révision, je crois qu’il n’y a pas lieu à conserver la dernière partie de l’article qui, effectivement, deviendrait une espèce de contradiction avec l’article précédent. Quant à la motion que les 2 législatures ne puissent faire aucune motion, tendant à la révision d’aucun des articles constitutionnels, je pensais que ce ne pouvait être qu’un conseil donné à la nation, et j’avais rédigé ainsi : En conséquence et par les mêmes vues d’intérêt général, et de la nécessité d’attendre des secours de l’expérience, l’Assemblée nationale décrète qu’il ne pourra être fait aucune motion pour la révision de la Constitution, avant la troisième législature. C’est ainsi qu’il n’y avait plus de contradiction, même apparente, entre les deux articles ; mais, d’après les réflexions que je viens de vous faire, je crois qu’il n’y a aucun inconvénient à supprimer la seconde disposition du décret, surtout quand on paraît en avoir fait une loi impérative au lieu d’un simple conseil par le changement du mot: «invite» en celui : « est » mais je crois en même temps qu'il est bon de placer soit dans ce titre-ci, soit dans tel autre endroit de la Constitution, l’aveu franc et loyal que vous faites à la nation du droit imprescriptible qu’elle a et je tiens à ce que cette partie de l’article subsiste, sauf à décider la place dans laquelle vous la mettrez. (Applaudissements.) Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix ! M. Lanjninais opine pour conserver l’article tel qu’il est présenté par les comités. M. Bnzotest d’avis qu’il ne faut pas anéantir une disposition qui rappelle le droit du peuple et qui a un objet utile et sage. M. Dupont. I! est visible qu’il s’est glissé quelque incohérence dans les idées et quelque désordre dans les expressions. Il y a un principe fondamental posé par M. Tronchet, et, bien avant lui, par la nature et par la raison: c’est le droit imprescriptible qu’a la nation de retoucher la Constitution, de la revoir, de la modifier et même