224 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 juillet 1789.] triotisme croîtront avec les difficultés, et la constitution sera établie. Ce n’est pas votre courage qu’il faut révoquer en doute. Bien loin de le diminuer, le péril ne fait que l’accroître. Je ne puis cependant vous dissimulerune inquiétude : c’est la seule que peut inspirer une Assemblée d’hommes d’honneur. Je crains que les menaces n’exaltent trop votre courage. Tâchons, Messieurs, d’agir de sangfroid, de nous rallier constamment aux principes, de délibérer avec une prudente lenteur. N’oublions jamais qu’il ne faut pas adopter une constitution qui ne convienne qu’aux circonstances présentes, mais qu’elle doit faire le bonheur de nos enfants; que le plus grand fléau qui puisse affliger un peuple, est d’avoir une constitution incertaine, qu’il soit facile de changer, et qui devienne la source du trouble et de l’anarchie. N’oublions jamais que l'autorité royale est essentielle au bonheur de nos citoyens. A quelque point que puissent en abuser aujourd’hui ceux qui ont surpris la religion du Roi, n’oublions jamais que nous aimons la monarchie pour la France, et non la France pour la monarchie. Nous avons toujours un seul but; il sera le môme, quels que soient les obstacles : ce but est la félicité publique. Si nous ne pouvons arriver au port pendant le calme, les orages retarderont notre marche, mais ils ne changeront pas le terme où nous sommes résolus d’arriver. Je propose « qu’il soit fait une adresse au Roi « et une députation, pour le supplier de rappeler « MM. Necker, de Montmorin, de la Luzerne et de « Saint-Priest; pour lui représenter que l’Assem-« blée nationale ne peut avoir aucune confiance « dans ceux qui leur ont succédé, ou qui sont « restés en place ; pour lui exposer tous les dan-« gers que peuvent produire ce changement, et « les mesures violentes dont il est accompagné, « et pour lui déclarer que l’Assemblée nationale « ne consentira jamais à une honteuse banque-« route, et qu’elle prendra la précaution néces-« saire pour y parvenir, quand elle aura terminé « ses travaux relatifs à la constitution du « royaume. > M. Target (1). Le moment où nous sommes réunis offre ces deux caractères que la force de J’Assemblée nationale est au-dessus de toutes les intrigues et que les périls qui ne peuvent nous atteindre, nous entourent. Etonnons nos ennemis par le sang-froid de nos délibérations. Loin d’ici tous ces mouvements oratoires si faciles au milieu des orages publics. Le pouvoir exécutif a le droit de nommer ses ministres ; que cette vérité soit reconnue hautement; mais l’opinion doit diriger ce pouvoir exécutif : c’est cette vérité qu’il faut porter au prince; représentons lui avec fermeté le mal que la puissance se fait à elle-même, en remplaçant des hommes qui avaient la confiance publique par des hommes qui ne peuvent et ne doivent jamais l’obtenir. Rendons le calme aux citoyens par les mêmes armes qui doivent rétablir la liberté. Le moment n’est pas loin où le Roi sera convaincu que le peuple ne s’enflamme que par les mauvais conseils qui assiègent le trône ; qu’il ne s’irrite que par les moyens que l’on emploie pour l’apaiser ; qu’il ne brise le joug qu’on veut lui (1) Le discours de M Target n’a pas été inséré au Moniteur. imposer, que parce que l’on veut le subjuguer par force. J’appuie la motion de M. Mounier. M. de Tally-Tollendal. Messieurs, c’est une suite funeste des excès auxquels se portent les ennemis du bien public, que la modération des bons citoyens semble presque devenir coupable, et se trouve forcée malgré elle à sortir des mesures qu’elle s’était prescrites. Si un retour sur soi-même était permis lorsqu’il faut perdre le sentiment de son existence dans celui d’une calamité générale, je prendrais tous les membres de cette Assemblée à témoin de l’esprit de paix et de justice qui a présidé, j’ose le dire, à tous mes discours, quelque part et dans quelque temps qu’ils aient été tenus. J’espère ne pas m’en écarter, même aujourd’hui, malgré la vive émotion que je ressens ; mais quel que soit le jugement qui m’attend, calomnié ou non calomnié, c’est ici un de ces instants où il faut s’abandonner à sa conscience. On vient de nous dénoncer, Mes'sieurs, la surprise faite à la religion d’un Roi que nous chérissons, et l’atteinte portée aux espérances de la nation que nous représentons. Je ne répéterai point tout ce qui vous a été dit avec autant de justesse que d’énergie. Je vous présenterai un simple tableau ; et je vous demande de vous reporter avec moi à l’époque du mois d’août de l’année dernière. Le Roi était trompé. Les lois étaient sans ministres, et vingt-cinq millions d’hommes sans juges. Le Trésor public sans fonds, sans crédit, sans moyens pour prévenir une banqueroute générale, dont on n’était plus séparé que par quelques jours. L’autorité sans respect pour la liberté des particuliers, et sans force pour maintenir l’ordre public. Le peuple, sans autre ressource que les Etats généraux, mais sans espérance de les obtenir, et sans confiance, môme dans la promesse d’un Roi dont il révérait la probité, parce qu’il s’obstinait à croire que les ministres d’alors en éluderaient toujours l’exécution. A ces fléaux politiques, la nature dans sa colère était venue joindre les siens : le ravage et la désolation étaient dans les campagnes ; la famine se montrait déjà de loin, menaçant une partie du royaume. Le cri de la vérité est parvenu jusqu’aux oreilles du Roi ; son œil s’est fixé sur ce tableau déchirant ; son cœur honnête et pur s’est senti ému ; il s’est rendu aux vœux de son peuple, il a rappelé un ministre que ce peuple demandait. La justice a repris son cours. Le trésor public s’est rempli; le crédit a reparu, comme dans les temps les plus prospères. Le nom infâme de banqueroute n’a plus même été prononcé. Les prisons se sont ouvertes, et ont rendu à la société les victimes qu’elles renfermaient. Les révoltes qui avaient été semées dans plusieurs provinces, et dont on avait lieu de craindre le développement le plus terrible, se sont bornées à des émotions toujours affligeantes sans doute, mais passagères, et apaisées par la sagesse et par l’indulgence. Les Etats généraux ont été annoncés de nouveau : personne n’en a plus douté quand on a vu un Roi vertueux confier l’exécution de ses promesses à un vertueux ministre. Le nom du Roi a été couvert de bénédictions. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] Le temps de la famine est arrivé. Des travaux immenses, les mers couvertes de vaisseaux, toutes les puissances de l’Europe sollicitées, les deux mondes mis à contribution pour notre subsistance, plus de 1,400,000 quintaux de farine et de grains importés parmi nous, plus de 25 millions sortis du Trésor royal, une sollicitude active, efficace, perpétuelle, appliquée à tous les jours, à tous les instants, à tous les lieux, ont encore écarté ce fléau ; et les inquiétudes paternelles, les sacrifices généreux du Roi, publiés par son ministre, ont excité dans tous les cœurs de ses sujets de nouveaux sentiments d’amour et de reconnaissance. Enfin, malgré des obstacles sans nombre, les Etats généraux ont été ouverts ..... les Etats généraux ont été ouverts! ..... que de choses, Messieurs, sont renfermées dans ce peu de mots ! Que de bienfaits y sont retracés ! Comme la reconnaissance de la génération présente et des générations futures vient s’y attacher à jamais ! Quelques divisions ont éclaté dans les commencements de cette mémorable Assemblée : gardons-nous de nous les reprocher lunà l’autre, et que personne ne prétende en être totalement innocent. Disons plutôt, pour l’amour de la paix, que chacun de nousapuse laisserentraîner à quelques erreurs trop excusables; disons qu’il en est de l’agonie des préjugés, comme de celle des malheureux humains qu’ils tourmentent ; qu’au moment d’expirer, ils se raniment encore, et jettent une dernière lueur d’existence. Convenons que dans tout ce qui pouvait dépendre des hommes, il n’est pas de plan de conciliation que le ministre n’ait tenté avec la plus exacte impartialité, et que le reste a été soumis à la force des choses. Mais, aü milieu de la diversité des opinions, le patriotisme était dans tous les cœurs. Les efforts pacificateurs du ministre, les invitations réitérées du Roi ont enfin produit leur effet. Une réunion s’est opérée. Chaque jour a fait disparaître un principe de division. Chaque jour a produit une cause de rapprochement. Un projet de constitution tracé par une main exercée, conçu par un esprit sage et par un cœur droit, a rallié tous les esprits et tous les cœurs. Nous avons marché en avant : on nous a vu entrer dans nos travaux ; et la France a commencé à respirer. C’est dans cet instant, après tant d’obstacles vaincus, au milieu de tant d’espérances et de besoins, que des conseillers perfides enlèvent au plus juste des rois son serviteur le plus fidèle, et à la nation le ministre citoyen en qui elle avait mis sa confiance 1 Ce n’était pas assez. Trois ministres étaient animés des mêmes sentiments que lui, de la même fidélité, du même patriotisme ; ils sont frappés de la même disgrâce. C’était encore trop peu. Cet homme qui, depuis un an, s’est sacrifié pour le royaume, ou le présente au Roi comme un criminel qui doit être banni du royaume. Quels sont donc ses accusateurs auprès du trône? Ce ne sont pas sans doute les parlements qu’il a rappelés. Ge n’est pas sûrement le peuple qu’il a nourri. Ce ne sont pas les créanciers de l’Etat qu’il a payés, les bons citoyens dont il a secondé les vœux. Qui sont-ils donc ? Je l’ignore, mais il en est ; la justice, la bonté reconnues du Roi ne permettent pas d’en douter. Quels qu’ils soient, ils sont bien coupables. A défaut des accusateurs, je cherche les crimes qu’ils ont pu dénoncer. Ce ministre que le Roi avait accordé à ses peuples comme un don de l*6 Série, T, VIII. [13 juillet 1789.] 225 son amour, comment est-il devenu tout à coup un objet d’animadversion ? Qu’a-t-il fait depuis un an ? Nous venons de le voir ; je l’ai dit, je le répète : quand il n’y avait point d’argent, il nous a payés; quand il n'y avait pas de pain, il nous a nourris ; quand il n’y avait point d’autorité, il a calmé les révoltes. Je l’ai entendu accuser tour à tour d’ébranler le trône et de rendre le Roi despote ; de sacrifier le peuple à la noblesse, et de sacrifier la noblesse au peuple. J’ai reconnu dans cette accusation le partage ordinaire des hommes justes et impartiaux, et ce double reproche m’a paru un double hommage. Je me rappelle encore que je l’ai entendu appeler du nom de factieux ; et je me suis demandé alors quel était le sens de cette expression. Je me suis demandé quel autre ministre avait jamais été plus dévoué au maître qu’il servait, quel autre avait été plus jaloux de publier les vertus et les bienfaits du Roi, quel autre lui avait donné et lui avait attiré plus de bénédictions, plus de témoignages d’amour et de respect. Membres des communes, qu’une sensibilité noble précipitait au devant de lui le jour de son dernier triomphe, ce jour où, après avoir craint de le perdre, vous crûtes qu’il vous était rendu pour plus longtemps, lorsque vous l’entouriez, lorsqu’au nom du peuple dont vous êtes les augustes représentants, au nom du'Roi dont vous êtes les sujets fidèles, vous le conjuriez de rester toujours le ministre de l’un et de l’autre, lorsque vous l’arrosiez de vos larmes vertueuses, ah 1 dites si c’est un visage de factieux, si c’est avec l’insolence d’un chef de parti qu’il recevait tous ces hommages, tous ces témoignages de vos bontés ? Vous disait-il, vous demandait -il autre chose que de vous confier au Roi, que de chérir le Roi, que de faire aimer au Roi les Etats généraux? Membres des communes, répondez, je vous en conjure ; et si ma voix ose publier un mensonge, que la vôtre s’élève pour me confondre. Et sa retraite, Messieurs, sa retraite a-t-elle été celle d’un factieux? Ses serviteurs les plus intimes, ses amis les plus tendres, sa famille même ont ignoré son départ. Il a prétexté un projet de campagne. Il a laissé en proie aux inquiétudes tout ce qui l’approchait, tout ce qui le chérissait : on a passé une nuit à le chercher de tous côtés. Que cette marche soit celle d’un ministre prévaricateur qui veut échapper à l’indignation publique, cela se conçoit ; mais quand on songe qu’il voulait se dérober à des hommages, à des regrets qu’il eût recueillis partout sur son passage, et qui eussent pu adoucir sa disgrâce ; qu’il a mieux aimé se priver de celte consolation, et souffrir dans la personne de tous ceux qu’il aimait, que d’être l’occasion d’un instant de trouble ou d’émotion populaire ; qu’enfin le dernier sentiment qu’il a éprouvé, le dernier devoir qu il s’est prescrit, en quittant la France, d’où on le bannissait, a été de donner au Roi et à la nation encore cette preuve de respect et de dévouement ; il faut, ou ne pas croire à la vertu, ou reconnaître une des vertus les plus pures qui aient jamais été sur la terre. Doutez-vous, Messieurs, que je n’adhère, autant que je le puis, à la motion qui vient d’être faite? Je la signerais de mon sang. Je rends hommage, ainsi que M. Mounier, au principe dont il ne faut jamais s’écarter. Sans doute le Roi est maître absolu de composer son conseil comme il lui plaît ; mais nous pouvons lui indiquer les bons serviteurs, comme 15 226 [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 juillet 1789.] le détourner des mauvais. Nous pouvons lui adresser des prières respectueuses, tendres, soumises. Nous pouvons lui dire qu’il est des circonstances où la vertu d’un prince ne suffit pas à elle seule, où elle a besoin de trouver le concours d’autres vertus dans son conseil, et qu’as-surément nous sommes dans une de ces circonstances. Nous pouvons le conjurer par l’amour que nous lui portons, par la fidélité que nous lui garderons toujours, par les entrailles de la patrie déchirée, de rappeler les seuls ministres dignes de sa confiance, et les seuls qui possèdent la nôtre. Hélas ! je crains bien que la religion du Roi ne soit éclairée trop tard, et que la perte qu’il a faite, ainsi que nous, ne soit irréparable. Je crains bien que celui qui a été deux fois méconnu, deux fois calomnié, deux fois rendu suspect au monarque vertueux, mais trompé, qu’il servait de son cœur comme de son génie ; que celui qui fuit actuellement, comme un proscrit, sur les routes de ce royaume qu’il a fait fleurir pendant son premier ministère, qu’il a fait subsister pendant le second, et pour lequel il a sacrifié son repos, sa fortune, sa santé, ne nous soit à jamais enlevé -, mais nous devons au Roi, nous devons alunation, de réclamer celui qui les a si bien servis, et ceux qui l’ont si bien secondé, et dans tous les cas, en nous soumettant, si le Roi nous refuse, comme nous sommes aussi libres dans l’expression de nos sentiments, que le monarque l’est dans la distribution de ses faveurs, nous dont on n’a pas surpris la religion, nous qu’on n’a pas induits en erreur, nous pouvons et nous devons voter des témoignages solennels d’estime et de regret, nous devons adresser des remerciements et des hommages à M. Necker et aux trois ministres qui se sont si généreusement dévoués pour les intérêts du Roi et de la nation. M. le comte de Virieu. Messieurs, les dangers qui menacent le royaume sont sans doute au plus haut degré. Le Roi a convoqué les Etats généraux pour travailler à la régénération de l’Etat. Ses généreuses intentions étaient secondées par des ministres vertueux, qui n’ont jamais craint de lui présenter les vérités utiles à sa gloire et à son bonheur, comme à celui de la nation. Ces vrais amis du trône et de la patrie ont marqué trop d’affection pour le bien public, pour ne pas devenir l’objet de la haine des méchants, qui craignent la réforme des abus et le succès de l’Assemblée nationale ; leurs calomnies ont fini par les priver de la confiance du monarque. La plus violente émotion s’est élevée dans le peuple, et tout annonce les derniers malheurs. C’est un fait certain, et qu’une triste et constante expérience a toujours confirmé, que des ministres pervers suivent toujours les ministres vertueux qu’ils ont fait rejeter. En effet, les méchants seuls sont intéressés à repousser les ministres honnêtes ; et lorsqu'ils ont eu la force de les détruire, ils ont aussi celle de se substituer à eux. Leur entrée dans le ministère est • ainsi un crime, puisqu’ils privent le Roi de fidèles serviteurs, et la nation d’amis et de bienfaiteurs. Pour soutenir ce crime, ils ont besoin de crimes nouveaux, et font payer à la nation par de longs malheurs, par une dure oppression, l’affection qu’elle marquait à leurs prédécesseurs. Ainsi, lorsque les mains pures que le Roi est obligé d’employer pour distribuer sa justice et ses bienfaits à ses peuples sont remplacées par des mains corrompues, l’alliance qui doit subsister entre le trône et la nation semble se relâcher ; un monarque digne de tout notre amour voit tout son peuple ému, la confiance se perdre, l’anarchie élever ses bras menaçants; enfin, pour comble de malheur, le sang coule ..... Cette nuit, cette nuit même, cette nuit funeste a été une nuit de violence et de sang! Triste présage, tristes commencements des maux qui menacent la France î Dans ce funeste état de choses, les représentants de la nation peuvent-ils garder un coupable silence? Non : ils doivent à la vérité, ils doivent à leur fidélité, à leur amour pour le Roi, ils doivent à la confiance dont leurs commettants les ont honorés, de montrer au Roi le criminel abus qu’on fait de sa faveur. Des bouches éloquentes viennent de nous proposer, Messieurs, de voter un acte de reconnaissance et de regret pour les ministres vertueux que nous venons de perdre, et de demander à la fois au Roi l’éloignement des nouveaux et le rappel des anciens. Qu’il me soit permis de vous offrir h ce sujet quelques réflexions. La sagesse de nos délibérations peut seule être le salut de l’Etat. Nous marchons entre deux écueils également dangereux, la fougue du peuple, et les entreprises des ennemis du bien public : sans doute l’appareil de violence dont on nous environne ne peut nous ébranler; sans doute nous sommes au-dessus de la crainte ; l’apparence du danger ne peut affaiblir une seule des délibérations que doivent exiger le bien de la patrie, et le devoir sacré que nos commettants nous ont imposé, de régénérer le royaume par une heureuse constitution ; mais aussi l’effervescence populaire, ni aucun sentiment d’aigreur, ne doivent être capables de nous entraîner au delà de la juste mesure que nous devons garder. Nous n’avons de véritables dangers à craindre que dans nous-mêmes ; les représentants de la nation n’ont à redouter que les actes précipités auxquels la chaleur et l’irritation peuvent entraîner leur courage : défendons-nous-en donc, Messieurs; ne précipitons rien, délibérons avec calme au milieu des apparences menaçantes qui nous entourent, et conservons inviolablement les principes que nous avouons. Nous ne pouvons, nous ne voulons point méconnaître le droit inhérent à la couronne, qu’a le Roi, de nommer les ministres, les agents de son pouvoir. Quelques raisons que nous ayons de regretter ceux auxquels il vient de retirer sa confiance, qu’ils méritaient si justement, et de craindre ceux qui les remplacent, n’affaiblissons point les justes principes qui établissent les droits du trône. Je ne pense pas que nous devions entreprendre de gêner l’exercice de son légitime pouvoir, en désignant au Roi les ministres qu’il doit prendre. Ce serait prêter une arme nouvelle à la calomnie qui nous accuse auprès du Roi ; on dirait que nous voulons en quelque sorte porter la main à son sceptre ; il ne faut pas qu’on puisse jamais nous reprocher d’avoir enfreint un seul des principes que nous reconnaissons. Bornons-nous donc, Messieurs, bornons-nous à rendre aux ministres dont la perte afflige la nation le tribut d’estime et de regret qu’ils ont mérité en se montrant les amis de la vérité, du monarque et du bien public. Faisons ensuite parvenir au Roi le tableau dé ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] [13 juillet 1789]. 227 la vérité ; peignons-lui en traits de feu, dans une adresse, les dangers dont des conseillers pervers investissent le salut de la France, en engageant Sa Majesté à éloigner des ministres qui faisaient aimer le trône, et qui ont abusé de son nom pour adopter des mesures si fatales à la paix publique. Indépendamment de ce que ce serait violer la prérogative royale dans le choix de ses ministres, que d’insister sur le renvoi ou le rappel de ministres désignés, considérons, Messieurs, que ce moyen, infructueux peut-être, ne marcherait point encore suffisamment vers le grand but qui nous rassemble. Réunis par un Roi que nous aimons, pour régénérer le royaume, pour affermir une saine constitution; nos travaux sont devenus l’objet de l’attente universelle; nous devons la faire, cette constitution: nous avons à rendre justice aux créanciers de l’Etat, et à subvenir à ses besoins; c’est par là que nous satisferons à ce que nous devons au souverain, à la patrie, et à nos commettants; c’est par notre inébranlable fermeté à accomplir ces grands devoirs, que nous en imposerons aux ennemis de la nation, qu’ils verront dans notre fidélité et notre courage ceux qui leur feront rendre un compte sévère des maux dont ils seront cause. Il faut leur ôter jusqu’au plus léger espoir de nous détourner du grand ouvrage qui nous est imposé ; il faut qu’aucune cabale, aucune intrigue ne puisse suspendre nos travaux patriotiques. Oui, Messieurs, resserrons les liens qui nous unissent; ne perdons pas un seul instant à travailler à la constitution, pour pouvoir nous occuper ensuite immédiatement du sort des créanciers de l’Etat; renouvelons, confirmons, consacrons ces glorieux arrêtés pris le 17 du mois dernier; unissons-nous à cette résolution célèbre du 20 du même mois, qui attacha sans retour une partie de cette Assemblée à l’accomplissement de nos devoirs communs: actes imposants, qui ont valu à l’Assemblée les suffrages de la France entière. Jurons tous, oui tous, tous les ordres réunis, d’être fidèle à ces illustres arrêtés, qui seuls peuvent aujourd’hui sauver le royaume. A ces vifs, à ces généreux applaudissements qui manifestent vos vœux, puis-je hésiter plus longtemps? Oui, j’y serai fidèle; je m’y unis de toutes les puissances de mon âme; jamais, jamais, je ne me séparerai de vous que quand nous aurons rempli l’importante tâche qui nous est prescrite pour le bonheur et la tranquillité du monarque que nous chérissons, et pour la félicité publique ; que nous n’ayons enfin assuré la constitution et consolidé la dette publique, qui repose dès à présent sous la garde de l’honneur national. C’est ainsi que nous ferons trembler les coupables qui voudraient faire perdre à la France les fruits de cette noble Assemblée ; que nous ferons bénir les Etats généraux, et par le Roi dont nous aurons affermi les justes droits et assuré la tranquillité, et par la nation qui nous devra sa félicité. M. de Clermont-Tonnerre. Messieurs, dans les temps de calamités publiques, il faut s’attacher aux principes. Le Roi est le maître de composer et de décomposer son Conseil ; la nation ne doit pas nommer les ministres, elle ne peut que les indiquer par le témoignage de sa confiance ou de son improbation. Quant aux serments, Messieurs, il est inutile de les renouveler; la constitution sera, ou nous ne serons plus. Mais il est des maux plus pressants: Paris est dans une affreuse fermentation ; on s’y égorge, et les troupes y présentent deux spectacles également effrayants: des Français indisciplinés qui ne sont dans la main de personne, et des Français disciplinés qui sont dans la main du despotisme. On a voulu nous rassurer; on nous a répondu par des paroles consolantes; mais les troupes sont alternativement cause et effet: rappelons-nous l’époque du mois d’août, cette époque que M. de Lally nous a si éloquemment retracée; alors il n’y avait plus de tribunaux, plus de justice; les troupes furent retirées, et tout rentra dans l’ordre par l’effet seul de l’esprit public et du redressement des griefs. Je pense qu’on doit voter une adresse de re-mercîments à ceux qui sont les victimes dn despotisme. Ces longs discours, la multiplicité des propositions faites par différents membres, n’ont fait qu’augmenter le tumulte. On proposait, et on ne décidait rien. M. Quillotin, l’un des députés de la ville de Paris, lit une pétition au nom des électeurs de cette ville, qui prient l’Assemblée nationale de lui procurer le rétablissement de la garde bourgeoise, unique moyen de faire cesser les troubles qui déchirent cette capitale. Divers membres font lecture des avis qui leur ont été envoyés de Paris, avec les détails de tout ce qui s’est passé depuis le départ secret et précipité de M. JSecker. Tous les citoyens ont pris les armes; des troupes étrangères sont en présence et semblent les menacer; elles n’attendent que le premier ordre pour faire un carnage affreux. Le sang des citoyens a déjà coulé; en un mot, tout semble présager les événements les plus affreux. Plusieurs membres de la noblesse se lèvent et s’écrient qu’il faut étouffer le souvenir des divisions passées; que tous les députés doivent se réunir pour sauver la patrie prête à périr. On fait successivement diverses propositions. Les uns veulent qu’il soit fait une députation au Roi, pour lui représenter les dangers qui menacent la capitale, la nécessité de faire retirer les troupes dont la présence est un aliment à la fermentation du peuple. D’autres veulent qu’il soit fait une députation vers la ville de Paris, pour porter à cette ville désolée des paroles de consolation et de paix. M. le comte de Cnsiine, député de la noblesse de Lorraine. Je n’adopte pas l’avis qui jusqu’ici paraît l’emporter. La députation au Roi me semble au contraire un moyen d’augmenter la fermentation, et insuffisant, pour arrêter l’effusion du sang. Le meilleur remède que l’on peut employer est de s’occuper sur-le-champ de la constitution; c’est ainsi qu’il faut prévenir les funestes effets de l’éloignement du plus fidèle et du plus vertueux ministre. M. Blauzat. Je regarde l’adresse que l’on projette pour le Roi comme inutile et dangereuse: inutile, en ce que le Roi est toujours entouré des mêmes ministres. Sa religion est séduite; on ne peut parvenir au Roi que par un canal pestiféré. Depuis le commencement, l’Assemblée n’a cessé d’être dupe, et le Roi dans l’erreur. C'est de là que vous devez sentir la nécessité de la constitution; elle arrêtera sur ce ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 228 [Assemblée nationale.) point la responsabilité des ministres; on les rendra comptables de leur déprédation comme de leur conduite. Un membre de la noblesse . Il suffit de faire mention sur le procès-verbal des regrets qu’a occasionnés le renvoi des ministres, et de dire que ces témoignages ont été jusqu’à demander leur retour et solliciter pour eux une adresse de remercîments. M. le curé Grégoire fait un tableau de toutes les entraves dont la cour environne l’Assemblée; il parle avec une force et une énergie peu communes, sans s’écarter cependant des bornes de la modération. 11 demande en outre un comité pour dénoncer tous les ministres coupables, tous les conseillers perfides du Roi. M. Le Franc de Fompignan, archevêque de Vienne , se lève et représente que les expressions fortes dont s’était servi l’orateur ne devaient pas se trouver dans la bouche d’un ministre de paix. Un murmure d’improbation interrompt la remarque de M. le président. M. le curé Grégoire répond avec franchise que s’il lui est échappé des expressions trop fortes, et qui ne conviennent pas à la majesté de l’Assemblée, il est prêt à les désavouer. M. de Gouy d’Arcy. Un général, dont la mémoire vivra éternellement dans notre histoire, reçoit le coup de la mort ; les soldats tombent dans l’abattement et la douleur; un orateur sacré monte dans la chaire et s’écrie avec vérité: « La mort d’un seul homme est une calamité publique! » C’est dans ce moment surtout que l’on reconnaît la vérité de cette réflexion. Je ne vous parlerai pas de ce qui s’est passé il y a un an ; une bouche plus éloquente vous en a présenté les détails. Il ne restait pas 500,000 livres au trésor publie; mais la confiance s’est ranimée, les alarmes ont cessé, et l’ordre s’est rétabli. Pourquoi faut-il que ce moment de tranquillité ait été si rapide? Aujourd’hui l’on entend de tous côtés des cris d’épouvante et d’horreur. Le despotisme rassemble autour de nou3 des troupes étrangères, comme s’il méditait contre la patrie quelque coup dont les troupes nationales ne voudraient pas se rendre les complices. Hier, Messieurs, j’ai entendu le canon tonner; j’ai vu le sang couler, des cadavres couvrir les plaines. J’ai vu nos troupes françaises s’entr’égorger mutuellement; j’ai vu le peuple se transporter en foule aux spectacles, en faire fermer les portes, et annoncer que dans ce jour de deuil et de douleur l’on devait s’abandonner aux regrets de la perte commune. Au milieu de la calamité publique, au milieu des couseiis pervers qui assiègent Je trône, que peut-on attendre d’un ministère nouveau, dont l’inexpérience ne pourra qu’augmenter encore les troubles de la patrie? L’orateur finit par appuyer la motion de M. Mou-nier. M. de Castellane dit, en peu de paroles, qu’il faut rédiger sur-le-champ une adresse au Roi, et s’occuper de la motion de M. le marquis de La-fayette. [13 juillet 1789.] M. Guillotin annonce qu’il est chargé par MM. les électeurs de la capitale de donner lecture de l’arrêté qu’ils ont pris le 12. Le voici en substance : « L’Assemblée des électeurs de la ville de Paris, sensiblement touchée des émeutes populaires, et voyant avec le plus grand regret que les moyens faits pour rétablir l’ordre sont précisément ceux qui fomentent le désordre, supplie l’Assemblée nationale de concourir, autant qu’il est en elle, à établir une milice bourgeoise. M. Guillotin termine en priant l’Assemblée de prendre l’arrêté en considération, et de le mettre en délibération. Plusieurs membres pensent que ce n’est pas le moment de délibérer sur une telle motion; que l’Assemblée a déjà décidé ce point en votant la dernière adresse au Roi; qu’on avait retranché de l’arrêté la partie où l’on demandait pour Paris et pour Versailles une milice bourgeoise. Mais la plus grande partie de l’Assemblée paraît ne pas penser de même : on observe que les circonstances sont changées; c’est Paris qui réclame pour sa sûreté une milice bougeoise ; c’est Paris qui est assiégé de troupes étrangères et ennemies; il faut s’empresser d’aller à son secours. Telles étaient les réflexions particulières que différents membres faisaient entre eux, lorsque M. de Saint-Fargeau prend la parole. M. Le Pelletier de Saint-Fargeau. Je crois que le parti du silence serait très-dangereux dans ce moment. L’Assemblée nationale doit porter elle-même au pied du trône les sentiments dont elle est affectée, et calmer l’agitation du peuple. Lorsque personne ne représente le peuple, il se représente lui-même, et c’est alors qu’il se porte à des excès terribles, qu’on aurait évités en prenant ses intérêts et en allant à son secours. Je crois qu’il est très-important de faire une adresse au Roi pour le retour des ministres; qu’on ne doit pas surtout y oublierles principes qui tiennent à la responsabilité des ministres, et que l’on doit présenter au Roi les sentiments de douleur dont la nation est affectée; enfin faire mention de l’arrêté lu par M. Guillotin. M. Chapelier. Vous avez à délibérer d’abord sur les troupes ennemies et étrangères qui assiègent uu peuple bon et fidèle ; le sang coule, les propriétés ne sont pas en sûreté; enfin le scandale des Allemands ameutés est à son comble. Il n’y a que la garde bourgeoise qui puisse remédier à tous ces malheurs : l’expérience nous l’a appris. C’est le peuple qui doit garder le peuple. Vous avez un second objet de délibération, c’est l’éloigneuient des ministres. Il est de la dignité de l’Assemblée de voter des remercîments à ces hommes généreux, victimes de leur innocence et de l’intrigue la plus basse. C’est par des témoignages aussi flatteurs que l’on doit encourager les gens de bien ; et tandis qu’ail-leurs on récompense le crime, honorons au moins la vertu. 11 est encore un principe adopté dans tous vos cahiers; c’est la responsabilité des ministres. De cette loi résulte une conséquence nécessaire coutre l’ordre arbitraire qui a banni de la France le ministre dont nous pleurons la perte. Devenu Français par ses travaux, il emporte avec lui notre reconnaissance, notre estime et ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (13 juillet 1789,] 229 [Assemblée nationale.] notre admiration. Cependant il est banni. Il doit rendre compte à l’Assemblée de sa conduite; s’il est coupable, c’est à nous de le juger. Mais s’il n’a fait que secourir la France dans les calamités les plus funestes, c’est à nous d’assurer son triomphe. Le Roi n’a pu l’exiler sans commettre une injustice. — Un courrier du commandant de Paris est introduit; il remet au président une lettre à peu près conçue en ces termes : a La foule est immense au Palais-Royal; plus de dix mille hommes sont armés; ils annoncent qu’ils vont attaquer les troupes des Champs-Elysées, puis de là aller à Saint-Denis se joindre aux régiments et se rendre à Versailles. a Toutes les barrières du côté du nord ont été saccagées. Celle du Trône est en feu. « Les armuriers ont été pillés, et chacun prend la cocarde verte. « Paris va être en feu dans un instant. Ils disent qu’ils vont ouvrir toutes les prisons. Ils ont ôté mal instruits à Versailles; on veut punir les bandits et les garder dans les prisons. » Après en avoir délibéré l’arrêté suivant est pris : L’Assemblée nationale arrête : « Qu’il serait fait une députation au Roi, pour lui représenter tous les dangers qui menacent la capitale et le royaume; la nécessité de renvoyer les troupes, dont la présence irrite le désespoir du peuple, et de confier la garde de la ville à la milice bourgeoise. » Il a été de plus arrêté que, si l’Assemblée obtient la parole du Roi pour le renvoi des troupes et l’établissement de la milice bourgeoise, elle enverra des députés à Paris, pour y porter ces nouvelles consolantes, et contribuer au retour de la tranquillité. Tous les membres de l’Assemblée se sont offerts avec empressement, pour être admis dans la députation qui doit être chargée de se rendre à Paris. Il a été résolu que les membres de cette députation seraient choisis par le sort, au nombre de quatre-vingts, pris dans les diverses provinces. Les députés de la ville de Paris ont représenté que connaissant le peuple de cette ville, et étant honorés de sa confiance, il paraissait juste et convenable qu’ils fussënt tous admis dans la députation ; ce qui a été approuvé par l’Assemblée. Les députés chargés de se rendre vers le Roi ont été nommés par M. le Président, au nombre de quarante, ainsi qu’il suit : Députation au Roi. CLERGÉ. MM. MM. L’archevêque de Vienne. L’archevêque d’Aix. L’archevêque d’Arles. L’évêque de Limoges. Gennetet. Landreau. Brousse. Melon. Mesnard. Martin. NOBLESSE. MM. Le duc de Praslin. Le baron de Marguerites. Le vicomte de Toulongeon. Le comte do Marsanne. De Fréteau. MM. Le marquii de Lezay-Marneiia. Le duc de Mortemart. De Provençal. Le vicomte de Sanrlrouin. Le marquis de Biencourt. COMMUNES. MM. Couppé. Giraud Duplessis. Goupil de Prefeln. Milscent. Millon de Montherlant. Nairac. Populus. Cherfils. Mougeotte de Vignes. Bertrand de Montfort. MM. Turpin. Desèze. De Guilhermy. Meunier du Breuil. Rivière. Dupont. Dauchy. Bonnet de Treiches Salles. Meynier de Salinelles. Ces députés sont sortis de la salle, pour s’acquitter de leur mission. M. le Président a dit lorsqu’ils ont été rentrés, qu’il avait représenté au Roi la situation alarmante où se trouve le royaume; le danger de voir naître bientôt successivement dans les autres villes les mêmes troubles qui existent dans la capitale; la nécessité de rétablir la tranquilité publique dans la ville de Paris, en éloignant promptement les troupes, et en établissant une milice bourgeoise, et qu’il avait ajouté que l’Assemblée nationale reconnaissait Je droit qu’avait Sa Majesté de régler la composition de son Conseil, mais qu’elle ne pouvait lui déguiser que le changement des ministres était la première cause des malheurs actuels. Sa Majesté a répondu en ces termes : Je vous ai déjà fait connaître mes intentions sur les mesures que les désordres de Paris m’ont forcé de prendre; c’est à moi seul de juger de leur nécessité, et je ne puis, à cet égard, apporter aucun changement. Quelques villes se gardent elles-mêmes, mais l’étendue de cette capitale ne permet pas une surveillance de ce genre. Je ne doute pas de la pureté des motifs qui vous portent ' à offrir vos services dans cette affligeante circonstance, mais votre présence à Paris ne ferait aucun bien ; elle est nécessaire ici pour l’accélération de vos importants travaux dont je ne cesse de vous recommander la suite. La réponse du Roi ne satisfait point l’Assemblée ; plusieurs membres témoignent leur indignation de la tranquillité apparente du Roi, au milieu du désordre général, et du peu de condescendance qu’il a pour les demandes de l’Assemblée nationale. On propose divers projets d’arrêté ; mais on ne se fixe sur aucun. On propose alors dénommer des commissaires qui seront chargés de rédiger sur-le-champ un projet d’arrêté. Cette proposition est adoptée. Les commissaires sont nommés. Ils se retirent un moment, et bientôt ils reviennent apporter le projet d’arrêté qui suit et qui est unanimement approuvé : « L’Assemblée, interprète de la nation, déclare que M. Necker, ainsi que les autres ministres qui viennent d’être éloignés, emportent avec eux son estime et ses regrets. « Déclare qu’effrayée des suites funestes que peut entraîner la réponse du Roi, elle ne cessera d’insister sur l’éloignement des troupes extraordinairement rassemblées près de Pans et de Versailles, et sur l’établissement des gardes bourgeoises. « Déclare de nouveau qu’il ne peut exister d’intermédiaire entre le Roi et l’Assemblée nationale.