702 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLE KENT AIRES. « décembre 1793 Compte rendu du Moniteur universel (1). Barère. Je vais vous entretenir d’un objet digne de toute votre attention. Le 3 frimaire, les administrateurs du dépar¬ tement de l’Yonne ont pris une délibération portant établissement dans la ville d’Auxerre d’un comité central, qui tiendra dans ses mains les subsistances de tout le département. Ce comité doit être composé de trois citoyens. Chaque district doit proposer deux citoyens : ce qui composera une liste de quatorze, parmi lesquels le représentant du peuple et les admi¬ nistrateurs du département choisiront les trois citoyens qui doivent composer le comité central. Un pareil établissement devrait mettre à la disposition des administrateurs du département, sous la direction de trois citoyens, toutes les subsistances de ce département. Les citoyens ont senti le danger d’une pareille mesure. Le district de Sens s’est refusé à y concourir. Les _ administrateurs du département ont écrit, le 9, à ceux du district, qu’ils avaient vu avec indignation que le district s’était permis de délibérer sur un arrêté pris en présence du représentant du peuple, et d’en suspendre pro visoirement l’exécution. Ils ont ajouté qu’ils surveilleront les com¬ plots liberticides, et que le représentant du peu¬ ple est décidé à punir rigoureusement les traîtres. Ces qualifications, ces menaces employées à contre-temps pour contraindre, par la terreur, les administrateurs du district d’exécuter un arrêté dont les suites pourraient devenir funestes et contrarier les dispositions du gouvernement. Les administrateurs du district de Sens ont rédigé les motifs qui les ont déterminés à ne pas exécuter l’arrêté du département de l’Yonne, et ils ont chargé quatre de leurs collègues de les soumettre à la Convention nationale. On ne peut qu’approuver la conduite de ces administrateurs; on ne peut trop tôt annuler l’arrêté du département et anéantir un projet d’établissement contraire aux principes du gouvernement, dont l’exécution répandrait l’alarme, et mettrait toutes les subsistances à la disposition de trois citoyens, sous les ordres des administrateurs du département. .S’il est un fédéralisme dangereux, c’est sans doute celui qui était établi par une coalition d’intrigants qui voulaient perdre la République et la livrer aux tyrans; mais il est un autre fédéralisme aussi dangereux, celui des subsis¬ tances. Il faut arrêter cette manie inspirée par la malveillance, autant que par des craintes, exagérées ou factices, de manquer de subsis¬ tances. Voici le projet de décret qui apprendra sans doute aux autres départements à ne pas établir de telles Commissions centrales, qui engagera les représentants du peuple à ne pas tolérer dans les départements les institutions qui (1) Moniteur universel [n° 77 du 17 frimaire an II (samedi 7 décembre 1793), p. 311, col. 2]. violent la liberté nécessaire à la circulation des subsistances. ( Suit le texte du décret que nous avons inséré ci-dessus d’après le procès-verbal.) Ce décret est adopté. « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de ses comités de législation, d’aliénation, des domaines nationaux et d’agri¬ culture [Merlin {de Douai), rapporteur (1)], dé¬ crète ce qui suit : Art. 1er. « La faculté que l’article 34 de la quatrième section de la loi du 25 juillet 1793, laisse aux acquéreurs des biens nationaux provenant des émigrés, de résilier les baux en vertu desquels les fermiers et locataires des ci-devant posses¬ seurs de ces biens, les occupent ou exploitent, et les dispositions des articles 38 et 37 de la même section, sont déclarées communes aux acquéreurs des biens que la nation a retirés des mains du ci-devant clergé, des corporations laïques suppri¬ mées et du tyran, ou qu’elle a confisqués sur les personnes mises hors de la loi ou condamnées pour crimes contre-révolutionnaires, et dont les adjudications seront postérieures à la publication du présent décret; auquel effet il est dérogé, pour l’avenir seulement, à l’article 9 du titre Ier de la loi du 14 mai 1790, en ce qu’il privait les acquéreurs de cette faculté. Art. 2. « Pour être admis à résilier les baux men¬ tionnés dans l’article précédent, les acquéreurs, même ceux qui sont compris dans la loi du 25 juil¬ let 1793, seront tenus de payer aux fermiers ou locataires qu’ils congédieront, l’indemnité qui se trouvera réglée par ces baux. Art. 3. « Si les baux ne règlent pas cette indemnité, elle demeure fixée, savoir, pour les maisons et moulins, à une demi-année de loyer une fois payée; et pour les biens ruraux, ainsi que pour les usines autres que les moulins, à une somme aussi une fois payée, égale au quart des fermages qui auraient couru depuis la résiliation effectuée jus¬ qu’à la fin des baux, si les baux avaient eu leur entière exécution. (1) D’après la minute du décret qui existe aux Archives nationales, carton C 282, dossier n° 790. Voy. ci-dessus, séance du 7 frimaire an II, p. 264 le projet de décret sur les baux à ferme et à loyer des biens nationaux, présenté par Merlin (de Douai )t au nom des comités de législation, d’aliénation et d’agriculture.