60 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [On demande la mention honorable et le renvoi aux comités de Législation et de Sûreté générale. CLAUZEL s’oppose à la mention honorable ; il ne faut pas dit-il, que les aristocrates aient l’audace de se flatter que la Convention, parce qu’elle a mis l’humanité à l’ordre du jour, souffrira que la révolution rétrograde ; la véritable humanité est la justice qui frappe le coupable partout où elle l’atteint, et protège l’innocent partout où elle le trouve.] (40) On applaudit. CAMBACÉRÈS (41) : Je crois devoir arrêter un moment l’attention de l’Assemblée sur la mesure qui vient d’être réclamée. Parmi les moyens dont les vieux ennemis de la liberté se servent contre elle, il n’en est pas de plus dangereux ni de meilleurs pour leurs vues, que toute demande en rapport, révision, modification ou rectification de la loi relative aux gens suspects. (On applaudit.) Cette loi a été rédigée en grande connoissance de cause; c’est en la maintenant dans son intégrité, que vous concilierez la justice, que vous avez mise à l’ordre du jour, avec cette sévérité, cette rapidité qui ne sont pas moins nécessaires, et que vous voulez aussi conserver. (On applaudit.) Qu’on relise cette loi, on verra qu’elle ne peut jamais atteindre les bons citoyens ; il est vrai qu’il a fallu classer, parmi les gens suspects, certains individus, à raison de leurs relations, de leurs habitudes antérieures ou de leur parenté. Mais le préservatif est à côté ; vous avez formellement excepté ceux qui auroient donné des preuves constantes de leur attachement à la révolution, et vous avez ainsi prévenu d’avance, dans l’application, les incon-véniens qui pouvoient résulter du principe ; d’ailleurs vous avez donné à votre comité de Sûreté générale, une grande latitude de pouvoir, pour remettre dans le chemin de la règle les autorités constituées qui s’en seroient écartées dans l’application de cette loi* Il est bon que le peuple soit instruit sur cette loi et sur la nécessité de la conserver, afin qu’on ne vienne pas faire ces demandes, dont les conséquences pourraient être extrêmement dangereuses, et qu’on n’égare pas ainsi l’opinion publique. J’ai concouru à la confection de cette loi; il n’est pas une seule de ses dispositions qui ne puissent soutenir les regards de la justice. Il n’y a donc que les abus à craindre ; mais dans les temps de révolution, quelle est l’institution dont on n’abuse pas? L’art du législateur est de prévenir les abus, et de maintenir les institutions dans leur pureté. Vous avez fait tout ce qu’il falloit à cet égard depuis le 9 thermidor. Mais il faut que le peuple sache que vous voulez que la justice (40) J. Mont., n° 12. Moniteur, XXII, 350; Débats, n° 762, 498; J. Paris, n° 35. (41) Gazette Fr., n° 1027, rappelle que Cambacérès a travaillé à l’élaboration de la loi du 17 septembre. règne, mais que vous ne souffrirez pas que la révolution rétrograde. Ce discours est vivement applaudi. CAMBACÉRÈS demande et l’Assemblée adopte l’ordre du jour sur le tout (42). 16 Le comité de surveillance de Es-Plains-sur-Mer, ci-devant Saint-Riquier, [Seine-Inférieure] félicite la Convention nationale sur ses glorieux travaux et l’invite à rester à son poste. A cette adresse est jointe un don de 5 L 14 s et une paire de boucles d’argent pour les besoins de la patrie. Mention honorable, insertion au bulletin (43). 17 La société populaire du Cheylard, département de l’Ardèche, présente à la Convention nationale le tribut de sa recon-noissance pour ses glorieux travaux; elle annonce que deux mille livres de salpêtre sont déjà sorties de l’atelier de cette commune et fait passer 350 L 10 s pour aider à la construction du vaisseau Le Vengeur. Mention honorable, insertion au bulletin (44). [La société populaire du Cheylard à la Convention nationale, le 22 vendémiaire an 7/7] (45) Unité, indivisibilité de la République, liberté, égalité ou la mort. Mandataires du peuple, Le département de l’Ardèche atrocement calomnié par le sanguinaire Couthon serat-il encorre impunément déchiré par les continuateurs infâmes de son système execrable? Verrons nous toujours végéter sur le sol que nous habitons des hommes pervers acharnés à flétrir, à perdre les patriotes purs qui ont confondu leurs complots parricides? La noire intrigue machinera-t-elle sans cesse des nouvelles trames contre la probité et la vertu ? Le peuple sera-t-il encorre long-tems le jouet des hipocrites proyelites des modernes Marius et (42) Débats, n° 762, 498-499. J. Mont., n° 12; Moniteur, XXII, 350; J. Paris, n° 35. (43) P.-V., XL VIII, 44. Voir ci-dessus Arch. Parlement., 3 brum., n° 14. (44) P.-V., XL VIII, 44. (45) C 325, pl. 1403, p. 27. Bull., 8 brum. (suppl.); C. Eg., n° 804. SÉANCE DU 4 BRUMAIRE AN III (25 OCTOBRE 1794) - N° 17 61 Sylla? Lui arracheront-ils toujours par l’astuce des adresses marquées au coin de l’imposture, de la perfidie et du Robespierisme ? Non, Représentants, le terme de tant de crimes est arrivé, le reigne de la justice a succédé à celui de la terreur et de l’oppression ; le patriotisme vertueux et inflexible ne sera plus en butte aux traits vénéneux de la détraction ; l’horison de la liberté ne sera plus obscurci par les nuages infects de l’intrigue ; les vertus qui constituent le gouvernement démocratique vont briller d’un nouvel éclat, et le peuple éclairé par vos soins aprendra enfin à connaitre et à pulvériser ses téméraires ennemis. On vous a annoncé, représentans, que l’aristocratie et le modérantisme lèvent dans l’Ardèche une tête audacieuse, que le fanatisme comprimé semble vouloir reprendre son insolente morgue, que les patriotes zélés sont emprisonnés et la célèbre journée du 9 thermidor y à ravivé les criminelles espérances des ennemis de la révolution ; et nous, nous aimons à vous aprendre que depuis cette mémorable époque, le patriotisme triomphe parmi nous, que le peuple de ces contrées constammant dévoué aux grands principes que vous avez proclamés leve avec une nouvelle vigueur sa massue terrible contre les contradicteurs de son indépendance, et qu’il est déterminé à frapper sans pitié ceux qui s’efforcent d’arrierer l’époque de son bonheur. Nous annonçons avec une plaine satisfaction à la république entierre que le fanatisme écrasé par la force de la Raison ne cherche point à rétablir au milieu de nous l’empire de ses ridicules préjugés ; que les Ardéchiens comme les autres Français saurons toujours fronder ses projets insensés et maintenir le reigne des loix et de la saine philosophie, qu’ils nous disent, ces hommes vendus au mensonge, ces méprisables séducteurs de leurs concitoyens, ces ravisseurs impudents de leur confiance qui jettent les hauts-cris contre ce département, quels sont les patriotes qui ont été incarcérés depuis la chûte du dernier tyran, et fïdelles à nos serments, nous solliciterons de votre justice austère leur prompt élargissement et la punition de leurs persécuteurs. Mais que nous nous plaisons à vous retracer la vérité ! Placés au centre de l’Ardèche et à portée de connaître les événements dont il est le théâtre, nous osons avancer qu’aucun de nos compatriotes, zéllateur ardent du triomphe de la liberté n’a été victime de son patriotisme depuis que l’attroce triumvirat n’existe plus. Le modérantisme et l’aristocratie relevent insolemment leur tête hideuse, hommes de mauvaise foi, exhibés des preuves de votre téméraire assertion, ou vos noms vont être voués à l’éxécration nationale. Certes Législateurs incorruptibles si l’on traite de modérés ceux qui abhorent le système de sang et de cruauté qui afligea trops long-tems notre patrie, ceux qui bénissent la Révolution bienfaisante des 9 et 10 thermidor cette époque immortelle ou nous fumes délivrés de la domination monstrueuse des triumvirs et ou nous passâmes, grâces à votre admirable energie, du joug affreux de la tyrannie et de la terreur au reigne enchanteur de la liberté et de l’allégresse, de l’empire du crime et de l’hipocri-sie patriotique à celui de la vertu et de la franchise républicaine, de la stupeur mortelle de la défiance et de la dissimulation aux étreintes de la fraternité et aux délicieux épanchements de l’amitié, ceux qui poursuivent les intrigants et leurs détestables suppôts dans leurs derniers retranchements, ceux qui sont inviolablement attachés au faisceau sacré de la représentation nationale et qui pérriront tous plutôt que de le voir briser, nous méritons ce nom proscrit. Si l’on est aristocrate parce qu’on veut le gouvernement révolutionnaire dans toute sa vigueur, parce qu’on est partisans de la justice et de la vertu, qu’on hait implacablement les Rois et les dictateurs, qu’on fouille avec une patience invincible les entrailles de la terre pour en extraire ce minéral précieux qui forme la foudre nationale ; par ce qu’on observe religieusement toutes les dispositions des loix émanées de votre sagesse éclairée, qu’on prodigue a l’envi aux Ardéchiens cet épithete odieux. Mais que la calomnie déguise ses traits contre les citoyens de l’Ardêche, contre nous ; que l’intrigue s’agitte en tout sens pour défigurer et obscurcir nos principes révolutionnaires, nous n’en resterons pas moins fermes et inébranlables dans les sentiers du républicanisme et nous confondrons par notre zèle civique, et nos vertus sociales les criminelles vociférations de nos petits détracteurs et la France aprendra a aprécier leurs insidieuses et dégoûtantes clameurs ; deux milliers de salpêtre sont déjà sortis de l’attelier de cette commune et nous remuons sans cesse le sein de la terre pour en arracher jusqu’au dernier atome de cette matière terrible qui doit pulvériser tous les ennemis sacrilèges de nos droits. Des sommes énormes ont déjà été employées à cette importante opperation; elles excédent de beaucoup le produit du salpêtre que nous avons fourni, mais nous ne savons point calculer lorsqu’il s’agit du salut de notre patrie et les sacrifices que nous commandent ses intérêts sont infiniment chers à nos coeurs. Agréez Représentants le tribut sincère de notre gratitude pour vos glorieux traveaux et la somme modique de trois cents cinq livres dix sols que nous offrons a la république pour la construction du vaisseau le Vengeur ; nous regretons que la médiocrité de nos fortunes traverse le désir ardent qui nous anime de lui présenter un don plus considérable, mais notre sang et notre vie sont entre vos mains et appartiennent à la patrie, parlés, disposés en, nous sommes prêts à les sacrifier à sa prospérité et à sa félicité. Les membres composant le comité de correspondance de la société populaire du Cheylard. Viallard, L. Félicien Perraud, Vernhes, Mirabel et cinq autres signatures.