[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. M. Camus propose de faire imprimer, chaque semaine, l’extrait du registre des dons patriotiques. Cette proposition est mise en délibération ; l'Assemblée décrète que cette feuille sera imprimée et distribuée chaque semaine. • M. Camus observe que la place d’archiviste ne l’oblige qu’à la garde des papiers*, il demande en conséquence a être déchargé du soin de l’argenterie et des bijoux déposés provisoirement aux archives et propose de nommer un trésorier de la caisse patriotique. Après discussion, l’Assemblée décide qu’il sera nommé au scrutin et à la pluralité des suffrages, trois trésoriers qui garderont chacun une clef différente du dépôt. M. le Président rend compte d’une lettre de M. Sauvage, de l’académie royale de peinture, -qui expose qu’enflammé du désir de se joindre a ses concitoyens pour être utile à la nation, et quoiqu’il n’ait ni fortune, ni biens-fonds, ni pensions, ni rentes, désirant cependant de suivre les exemples des dignes patriotes qui l’ont précédé, il prie la nation d’agréer l’hommage qu’il lui fait •de 2 0/0 des sommes qui lui sont dues pour ouvrages par lui faits aux bâtiments du Roi, et dont le mémoire, arrêté par M. Pierre, premier peintre du Roi, est présentement entre les mains de M. Cuvillier, premier commis des bâtiments. 11 désire que son exemple soit imité par les autres créanciers de l’Etat, quels qu’ils soient; et il joint à sa lettre la déclaration de prendre pour comptant, lors de son payement, la remise qu’il offre. L’Assemblée a agréé l’offre avec l’éloge qu'elle mérite. M. le Président dit que M. Malpart a composé Un mémoire sur les gabelles, qu’il dit être le fruit de 40 ans d’expérience; qu’il en fait hommage à l’Assemblée, et la prie de vouloir bien en ordonner l’impression. L’Assemblée ordonne que le mémoire sera imprimé et distribué à chaque député. M. le Président ajoute qu’il a regu ce matin une députation de Messieurs de la garde nationale Rouennaise escortant un convoi de blé, qui l’ont prié de rendre compte à l’Assemblée de leurs travaux et de leur générosité, et de lui demander son Approbation. L’Assemblée la leur accorde par acclamation. Après quoi, un des secrétaires fait lecture des procès-verbaux des deux séances de la veille, et de différentes adresses d’adhésion , remerciements, demandes, ou comptes rendus des serments prêtés par les troupes, ou des établissements des milices bourgeoises des villes de Nîmes, Sancoins, Rue, Toulon, Saint-Maximin, Orthez, Beaugency et Luçon. 11 lit aussi une déclaration de la noblesse de la sénéchaussée de Draguignan en Provence, remise par MM. le vicomte de Raffelis de Broves,et le comte Lassigny de Juigné, députés delà noblesse de cette sénéchaussée, qui approuve et ratifie le vœu de ses députés pour l’abandon des privilèges lors des arrêtés de l’Assemblée nationale à la séance du 4 août. M. le Président rappelle l’ordre du jour, relatif aux différentes motions faites la veille; l’une, tendant à l’établissement d’un comité de soixante-quatre membres, dont deux de chaque généralité, qui serait chargé d’examiner la réponse du Roi [19 septembre 1789.] sur les arrêtés du 4 août, et de proposer les observations et avis à ce sujet ; l’autre, pour renvoyer cet examen au comité déjà subsistant ; la troisième, pour décider si la sanction pouvait être refusée aux actes du pouvoir constituant; la quatrième, pour que M. le président fût chargé de demander au Roi la promulgation des arrêtés du 4 août et jours suivants; et la dernière, tendant à la convocation d’une nouvelle Assemblée nationaler qui viendrait incessamment relever celle-ci. M. Duport demande que le président se retire sur-le-champ, par devers le Roi, pour supplier Sa Majesté de faire promulguer les arrêtés du 4, et l’assurer que l’Assemblée nationale prendra dans la plus grande et la plus respectueuse considération ses observations sur plusieurs articles, lorsqu’elle s’occupera de la rédaction des luis de détail. M.le vicomte de Mirabeau demande la parole pour combattre la motion de M. Duport, et solliciter la priorité pour celle présentée hier par M. de Volney. M. de Yolney retire sa motion pour le mo*- ment ; M. le vicomte de Mirabeau y consent. M. Fréteau. Vous avez décrété hier soir que votre président se retirerait aujourd’hui par devers le Roi, pour demander la promulgation de votre arrêté relatif à la circulation des grains. Cette promulgation devient tous les jours plus instante; quelques provinces, telles que le Luxembourg, la Normandie, etc., sont les lieux des spéculations les plus nombreuses et les plus nuisibles à ce commerce. Votre président n’a pas encore vu le Roi ; je pense donc que l’Assemblée, loin d« s’occuper de quelques motions incidentes, doit s’arrêter d’abord à celle de M. Duport, afin que ie président se retire aujourd’hui, ce matin, devers le Roi, pour demander la promulgation de vos arrêtés du 4, et surtout de celui qui concerne les grains . M. le marquis de Bonnay appuie fortement eet avis, et fait sentir que c’est de l’union qui doit régner entre les pouvoirs exécutif et législatif que sort leur force et leur énergie. M. le Président veut poser la question. M. Malouet s’y oppose; il demande la continuation de la discussion. Plusieurs réclamations s’élèvent contre cet avis, et l’Assemblée décide enfin que la discussion est fermée. M. de Lubersae, évêque de Chartres, représente qu’on aurait dû faire d’abord passer la motion de M. de Volney. {Murmures.) 11 ajoute que le règlement défend de décider aucune question dans le jour môme où elle est proposée, si elle n’est urgente. Cette motion est nouvelle, elle est complexe, puisqu’elle est composée de lamotion d’hier et de la détermination du moment. L’Assemblée est consultée sur l’urgence de la dernière partie : elle décide l’aftirinative. M. le Président. La discussion n’est pas fermée sur le dernier objet, et M. l’évêque de Chartres a la parole. (On réclame de toutes parts.) M. Le Chapelier. Il n’y a point de motion nouvelle, mais seulement une rédaction de la ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 septembre 1789.] [Assemblée nationale.] motion faite et discutée hier. En effet, j’avais proposé hier que M. le président se retirât, sans délai, devers le Roi, pour demander la promulgation de nos décrets des 4 août et jours suivants; ma motion fut discutée conjointement avec la rédaction qu’en proposa M. le duc de la Rochefoucauld ; et c’est sur cette seule et unique motion que l’Assemblée a décidé que la discussion était fermée. M. le Président avoue l’erreur qu’il a commise, et que M. Le Chapelier vient de détruire. Il fait lecture de l’arrêté rédigé parM. Duport, qu’il soumet à la discussion de l’Assemblée. Cet arrêté est presque unanimement adopté, et M. le président se retire pour exécuter le décret de l’Assemblée, qui est conçu dans les termes suivants : L’Assemblée décrète que M. le président se retirera sur-le-champ par devers le Roi, pour le supplier d’ordonner incessamment la promulgation des arrêtés des 4 août et jours suivants, assurant à Sa Majesté que l’Assemblée nationale', lorsqu’elle s’occupera des lois de détail, prendrait dans la plus grande et la plus respectueuse considération les réflexions et observations que le Roi a bien voulu lui communiquer ; Que M. le président suppliera aussi Sa Majesté de revêtir de la sanction royale les décrets du 19 août et du 18 de ce mois relatifs aux grains. M. de La Luzerne, évêque de Langres, prend la place de président, et propose pour l’ordre du jour la discussion de la motion de M. de Yolney. M. le duc de la Rochefoucauld demande qu’on s’occupe de la motion proposée il y a quelques jours par M. Le Chapelier. M. Camus demande qu’on s’occupe plutôt de l’organisation des assemblées provinciales et des municipalités. 11 propose : Premièrement un comité composé d’un membre à prendre dans chaque généralité, pour aviser à la distribution des assemblées provinciales dans les diverses parties du royaume; Secondement, que, pour la détermination des lieux où les districts et municipalités seront établis, ce comité appelle les députés des provinces; Troisièmement, que l’on s’occupe en assemblée générale d’établir le nombre et la qualité des personnes qui doivent composer les diverses assemblées, et de régler le temps et l’ordre des convocations. M. le vicomte de Mirai» eau (1). Il doit paraître bien étonnant, Messieurs, qu’une motion qui a été saisie hier avec un enthousiasme rare, sans qu’il se soit élevé une seule réclamation, ne trouve aujourd’hui que des contradicteurs, quand il s’agit d’établir sa priorité. L’approbation unanime qu’elle a obtenue, quant au fond , a prouvé, ce me semble, deux choses : la première, que nous vouions tous le bien, quoique par des routes différentes ; la seconde, que nous croyons, qu’il est impossible de l’opérer par la diversité de nos opinions et de nos moyens. Si cette conviction est entière en nous, nous ne devons pas balancer à donner la priorité à la motion de M. de Volney sur toute autre; car le seul argument qu’on ait cherché à faire valoir en faveur (1 ) Le discours de M. le vicomte de Mirabeau est très-incomplet au Moniteur. des autres discussions a été que nous devions nous occuper d’abord du bonheur et du repos de tous, avant de songer à nos intérêts particuliers; et j’avoue que je ne connais rien qui puisse y contribuer davantage qu’une nouvelle convocation, dont le résultat sera sans doute, comme l’a dit M. de Volney, qu’il n’y aura que fort peu de membres des classes privilégiées dans l’Assemblée nationale, mais dont nous tirerons un avantage bien réel : la probabilité de voir remplacer les orateurs par des propriétaires et les philosophes par des citoyens. Un dernier avantage non moins inappréciable que nous offrira cette nouvelle convocation est celui de remplir l’objet si sagement exposé par M. l’abbé Siéyès, dans sa Déclaration ées droits de rhomme , de faire ratifier ou perfectionner par nos commettants ce que nous avons cru devoir faire pour leur bonheur. Plus instruits att-j ittrd’hiii que nous-mêmes de l’utilité de nos arrêtés des 4 août et jours subséquents, ils seront bien plus en état de faire les lois qui doivent en être la suite et le développement. Les institutions humaines ne se perfectionnent que par le temps et l’expérience. Une troisième convocation sera certainement encore plus parfaite; cette Assemblée sera sans doute un joue digne d’être comparée aux plus augustes assemblées politiques du monde, et nous jouirons, sans envie, car nous aurons par devers nous la gloire d’avoir frayé la route, lorsqu’elle était cruellement épineuse. Toutes ces considérations, Messieurs, me portent à appuyer la motion deM. de Volney quant au fond, et de demander qu’elle obtienne la priorité sur toute autre, vu son importance. Je désire seulement qu’on admette deux amendements, auxquels l’auteur de la motion m’a paru lui-même acquiescer: le premier, que nul membre de P Assemblée actuellement existante ne puisse être réélu pour cette fois. Je ne chercherai point à développer les avantages de ce premier amendement; ils sont renfermés, je crois, dans ces mots: ce ne seront pas les mêmes. Il est un second amendement que je crois au moins aussi nécessaire : c’est qu'aucun des membres de l'Assemblée, quelque voisins qu’ils soient du lieu des élections, ne pourra s'y présente t ou du moins y discuter ni voter, étant censé siéger toujours à P Assemblée nationale. Il me semble d’ailleurs que c’est l’esprit de la motion de M. de Volney, et notre décision sur cet objet nous fera d’autant plus d’honneur que nous nous serons rendu justice. M. Lavie. Je demande si nous sommes vernis ici faire un cours d’épigraftimes, et si la tribune est un tréteau. M. le marquis de Rounay. Je rejette la motion de M. de Volney, quanta présentée rejette aussi celle de MM. le Chapelier et Camus ; et quoiqu’elles puissent avoir de grands objets d’utilité, je pense que nous devons nous occuper exclusivement de la constitution : j’opine donc à ce que votre comité de constitution soit sommé de nous communiquer son travail, d’après lequel nous devons continuer nos opérations. M. Madier de Montjau. Nous avons pris un ordre de travail établi dans des propositions de M. Guillotin, et je demande qu’on discute la troisième question. Cette question ne peut être ajournée, parce qu’on ne peut ajourner, des principes constitutionnels ; je rejette la motion de M. de Volney. En l’adoptant, Messieurs, quel serait celui