gQ [Assemblée nationale.] Pasteurs des villes, vous, coopérateurs de leurs travaux, vous tous qui pouvez être des principaux instruments du bonheur public, imitez-nous. Nous jurons à nos concitoyens d’être de vrais citoyens; nous jurons de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution, ainsi que les droits de notre religion sainte. Nous inspirerons partout le respect et l’amour pour l’Assemblée nationale, la soumission et l’obéissance à la loi et à ses ministres, le désintéressement et le zèle pour la chose publique. Aux baïonnettes des braves gardes nationales, à la plume des écrivains patriotes, nous unissons notre puissante parole. Quelle force pourra lutter contre ces trois forces? Concitoyens, qu’attendez-vous de plus de nous? aimez-noûs donc comme nous vous aimons. Vous avez dévoué votre sang à la patrie, nous consacrons aussi notre sang et nos sueurs à sa félicité. Signé : Cauchard, vicaire de Notre-Dame ; Giffard, vie. de Notre-Dame ; Le Gros nier, prêtre de Notre-Dame; Dufour, pr. de Notre-Dame ; Badouard, pr. de Notre-Dame ; Damemme, pr. de Notre-Dame ; Foulon, pr. de Notre-Dame; Bertrand, pr. de Notre-Dame ; Beau-lils, pr. de Notre-Dame ; Bertrand, pr. maître de pension; Hébert, pr. de Notre-Dame ; Le Chevalier , ,pr. p rofesseur de rhétorique; Le Chevalier, Vie. de Sainte-Croix ; Le Chevalier-Descarrières, pr. de Sainte-Croix; Poisson, pr. de Sainte-Croix; Le Moigne, sous-diacre de Notre-Dame ; Dodeman, acolyte de Notre-Dame ; Mahias, acolyte de Notre-Dame. Lu par moi, député de la ville de Saint-Lô, à l’Assemblée nationale, de la réquisition des ci-dessus signés. A Paris, ce 13 juillet 1790, Vieillard. Une députation de l'armée de mer demande à être admise à la barre. Elle est introduite. M. d’Estaing, portant la parole, dit : Messieurs, La franchise maritime semble avoir le droit heureux d’offrir l’hommage de la confiance, en suppliant d’agréer celui du respect. Ces deux sentiments, dont le peuple français est également animé pour ses augustes représentants, acquièrent une nouvelle force dans le cœur des marins; comment ne les ressentirions-nous pas pour vous, Messieurs? Vous êtes les pilotes delà nation. Nous croyons trouver une glorieuse similitude entre vos succès et nos travaux. Accoutumés à calculer les effets des éléments, nous admirons la sagesse avec laquelle vous avez su apprécier ceux de l’opinion. Nos résultats aussi naissent au milieu des orages. 11 nous faut de même conserver le calme du talent dans le trouble et dans le chaos des vagues en fureur et des vents déchaînés ; responsables du salut de l’équipage qui uous est confié c’est trop souvent par des sacrifices qu’il nous faut l’assurer; l’œil toujours fixé sur le port, rien n’en détourne nos regards, et nous jouissons ensuite du bonheur inappréciable auquel vous touchez, de celui d’y avoir conduit. Dévoués à la fonction presque miraculeuse de rapprocher ceux que la nature avait le plus séparés, c’est par nous principalement que votre sagesse deviendra communicative; nous serons, s’il est permis de s’exprimer ainsi, les porte-voix de la liberté. Son aurore paraissait à peine à l’ouest du monde, qu’envoyés pour la soutenir, nous fûmes les précurseurs du jour qui nous [13 juillet 1790.J éclaire. Le prince qui aida l'Amérique, prononça dès lors sur le sort de la France. Le zèle avec lequel il fut obéi, l’annonça, et ce zèle est récompensé, s’il rend la marine encore plus intéressante à vos yeux. Une des qualités distinctives qui la caractérisent, c’est que sa force ne peut menacer la liberté du citoyen ; l’influence de cette arme est totalement extérieure, et il est impossible que, dans aucune circonstance, elle puisse désordonner les ressorts d’une Constitution qui exige son accroissement. Il est attaché à celui de votre gloire; c’est en rendant votre existence nationale palpable à ceux d’entre nos voisins qui prétendraient en vouloir douter, que vous préviendrez des projets hostiles; empêcher la guerre, c’est plus que l’avoir faite : il en existe toujours une pour le navigateur; combien de dangers n'a-t-il pas à combattre; de privations à supporter, et d’offrandes de tous genres à déposer sur l’autel de la patrie. C’est par le rassemblement des connaissances humaines, et par la toute-puissance du savoir et des arts, qu’un vaisseau se construit et se dirige; de même que c’est d’après des décisions instantanées qu’il se manœuvre. Il faut qu’une volonté conservatrice décide de tous ses mouvements, et se communique avec la même rapidité que la pensée agit sur le corps humain; ce motif suffira pour que votre sollicitude paternelle rétablisse et consacre, par ses décrets, une discipline dont tous les peuples ont d’autant plus connu la nécessité, qu’ils ont été libres. Leurs législateurs ont pu precrire cette discipline, parce que la latitude de tout pouvoir légitime et indispensable s’accroît par la liberté. Vous en êtes une preuve; c’est de par nous-mêmes, c’est en notre nom que vous nous commandez. Nos mœurs maritimes ne sont point au-dessous de votre attention. Vous vous complairez peut-être à entendre que les vaisseaux de guerre français n’étaient déjà , sous l’ancien régime, qu’une grande famille. Le capitaine, le général, confondus sur le gaillard avec les derniers matelots, cédaient souvent la place à la foule qui la leur disputait; ils aimaientà partager en égaux les divertissements de tous, tandis que chez les Anglais, le commandant éloigne, épouvante, dès qu’il parait, et devient le propriétaire exclusif de l’endroit où il se promène ; ce n’est point ces formes nationales et précieuses dont le changement est désirable; elles n’empêcheront point la discipline dans les objets de service, dès que vous l’aurez prescrite. La muriue militaire obéit sans peine, lorsque vous lui ordonnez de ne faire qu’un avec les citoyens utiles par qui elle est nécessaire. Elle s’est fréquemment enrichie de leurs actions. Le commerce a souvent daigné croire celui qui remplit l’emploi de vous assurer que cette obéissance ne peut être péniüle. L’uniforme dont il est honoré, et avec lequel il a l’honneur de paraître devant vous, est un signe révéré de l’union et du dévouement civique; doublement autorisé à le porter, il a la convenance, dans le jour à jamais mémorable de la fédération, de désigner que les cœurs sont confondus. Puisse cet habit servir à obtenir, pour tout le corps des marins, la popularité dont ils sont dignes; il atteste des sentiments mieux sentis par la marine entière, -qu’ils ne viennent d’être exprimés. M. le Président répond : Messieurs, dans un Empire riche et puissant tel que le nôtre, dans un empire qui possède à ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLE la fois un vaste territoire et d'importantes colonies, et qui puise dans la fertilité de son sol, comme dans l’industrie de ses habitants, de quoi fournir aux besoins et au luxe de tant de contrées; dans un tel Empire, dis-je, on ne peut trop honorer la classe d’hommes qui se vouent à favoriser le commerce ou à le défendre. La marine française a toujours rempli avec gloire cette double fonction, quelquefois négligée, toujours redoutable; elle n’a jamais eu de commencement, et son réveil, après des années de léthargie, a toujours été celui du lion. Parmi les guerriers célèbres qui ont conduit nos flottes à la victoire, parmi ceux qui ont inspiré le plus de terreur à leurs ennemis, l’histoire s’est plue à confondre les rangs comme les services ; Jean Bart et d’Estrées, TourvilleetDuguay-Trouin sont placés ensemble au temple de Mémoire. Aujourd'hui que l’Assemblée nationale, en terrassant tous les préjugés, n’a fait, de tous les Français, qu’un peuple de frères; les liens qui unissent tous les corps de la marine, vont encore se resserrer. Ils ne disputeront désormais que de dévouement et de zèle pour leur pays. La gloire du pavillon français se maintiendra sur toutes les mers, et l’on ne fera plus de différence entre ceux par qui se fait le commerce, et ceux par qui il est protégé. Cet accord de sentiments et de principes est le vœu de tous les bons citoyens. L’Assemblée nationale en reçoit de vous l’heureux augure. Elle se plaît à vous voir déjà réunis par un patriotisme commun, et elle aime à vous entendre solliciter vous-mêmes cette discipline exacte qu’il est si facile d’allier avec la liberté. Jouissez, Messieurs, de tous les bienfaits de cette liberté pour laquelle vous feriez tout, et contre laquelle vous ne pouvez rien; et faites jouir votre pays de cette splendeur que vous êtes destinés à lui assurer dans les deux Mondes. L’Assemblée nationale, touchée de votre hommage plein de franchise, vous invite à assister à sa séance. Divers membres demandent l’impression de l’adresse de l’armée de mer. L’impression est ordonnée. M. Schwendt, député de Strasbourg, écrit qu’une maladie le retient au lit depuis dix jours et exprime ses regrets d'être dans l’impossibilité d’assister demain à la cérémonie de la fédération. Une députation des gardes nationales confédérées à Rouen est admise, et fait un discours, dans lequel elle exprime le zèle intrépide dont cette fédération est animée pour le maintien de la Constitution. Les députés remettent sur le bureau le procès-verbal de leur assemblée fédérative. M. deBroglie, au nom du comité des rapports , rend compte des troubles survenus dans les départements de Seine-et-Marne et du Loiret où les habitants refusent de se soumettre au décret de l’Assemblée nationale relativement au droit de dîmes et de champart, Le décret sur le droit de dîmes et de champart qui a calmé, dans beaucoup de provinces, les troubles que ces droits avaient excités, les a augmentés dans les départements de Seine-et-Marne et dans celui du Loiret. Deux villes surtout, Nemours et Montargis et les villages des environs ont refusé nettement d’obéir à vos décrets. Des lr* Série. T. XVII. IENT AIRES. [13 juillet 1790.] potences ont été dressées contre ceux qui voudraient faire payer les droits. Des cavaliers de maréchaussée ont été insultés. Les officiers municipaux paraissent coupables de négligence et peut-être de connivence. Votre comité des rapports, estimant que vos décrets doivent être rigoureusement exécutés partout, vous propose : 1° de supplier le roi d’envoyer des troupes de ligne pour prêter main-forte aux gardes nationales ; 2° de charger le tribunal de Melun d’informer contre ceux qui feraient résistance et déjuger en dernier ressort. M. Defermon. La dernière disposition qu’on vous propose d’adopter est inadmissible et contraire aux principes de l’Assemblée nationale. Vous avez supprimé les prévôtés et vous ne souffrirez pas qu’un tribunal fasse l’information et juge sans appel. M. Merlin. Je demande que le décret que vous rendrez concerne tout le royaume, parce que des troubles ont éclaté à la fois dans plusieurs départements contre le droit de champart. Plusieurs plaintes sont parvenues au comité de féodalité. Mais ce qui occasionne ces troubles, c’est que le décret du 18 juin n’a été envoyé que depuis quelques jours dans les provinces ; les bureaux ministériels sont soumis à des lenteurs, à des formalités minutieuses qui font perdre souvent les heureux effets d’un décret de l’Assemblée nationale. M. Duport. J’appuie les observations qui viennent de vous être présentées et j’ajoute que c’est assurément l’ignorance de vos décrets qui est cause des désordres ; d’ailleurs, le peuple est excité à commettre des excès par des personnes mal intentionnées. Je propose, en outre, de décréter que le droit de enampart continuera à être perçu, sauf à se pourvoir par les voies légales. M. Dupont (de Nemours). Je pense, comme le préopinant, que les troubles de mon pays ont des instigateurs. C’est près de ma maison que la potence a été dressée. Les députés de la circonscription se sont efforcés de calmer les troubles, mais on les a mis en suspicion et représentés comme traîtres. Je vous présente un projet de décret qui, sans s’écarter beaucoup de celui de votre comité des rapports, me semble conforme à l’équité, tout en ne frappant point trop durement sur des gens égarés. M. Bordler, député de Nemours. L’envoi de troupes de ligne ne ferait qu’irriter les populations, aussi je demande que ceci soit retranché du décret. Ni les troupes de ligne, ni les gardes nationales ne voudront jamais tirer sur leurs concitoyens. (Il s’élève un violent murmure dans la salle. — Des protestations partent des tribunes remplies de militaires et de gardes nationales.) M. Démeunier. Une disposition du décret qui vous est proposé permet d’informer contre les officiers municipaux. C’est une grosse question de savoir si un tribunal peut informer contre une municipalité. Le comité de Constitution prépare un décret sur cet objet ; aussi je demande que cet article soit réservé. M. Briois de Beaumetz. Il y a quelque chose de contradictoire d’envoyer des troupes à la disposition des municipalités et de permettre qu’on informe contre ces mêmes municipalités. 6