[AisemÉléa nationale.] ARÉfilVËS PARLËMfENTÂfftES. [5 octobre 4789.] 347 que ce prélat est fücapable d’une pareille atrocité. Maillard. Je vous supplie, pour ramener la paix, calmer l’effervescence générale et prévenir des malheurs, d’envoyer une députation à MM. les gardes du corps, pour les engager à prendre Ja cocarde nationale, et à faire réparation de l’injure qu’ils bht faite à cette même cocarde. Plusieurs membres s’écrient que les bruits répandus çur les gardes du Roi sont calomnieux. Quelques expressions peu mesurées, échappées à l’orateur, lui attirent alors une injonction du président de se contenir dans le respect qu’il doit à l’Assprablée nationale. Le président ajoute que tous ceux qui veulent être citoyens peuvent fêtre de leur plein gré, et qu’on n’a pas le droit de forcer les volontés. MM. Le baron de Batz. Le comte de Grezolles. De Laville-le-Roux. Salle (de Metz). Le Pelletier de Saint-Far-geau. MM. Le comte de Pardieu, président. Palasne de Champeaux , vice-président. Alquier, secrétaire. Blin, secrétaire. Bion, secrétaire. Un autre secrétaire donne lecture des offrandes patriotiques dont le détail sera consigné sur Je registre imprimé par ordre de l’Assemblée. A six heures la députation envoyée au Roi n’est pas encore de retour. Un membre propose d’en envoyer une seconde. Cette proposition est rejetée. Les citoyens et citoyennes venus de Paris sont toujours à la barre. Maillard. Il n’est personne qui ne doive s’honorer de ce tilre; et s’il est, dans cette diète auguste, quelque membre qui puisse s’en croire déshonoré, il doit en être exclu sur-le-champ. Toute la salle retentit d’applaudissements, et une foule de voix répètent : Oui, oui, tous doivent l'être, nous sommes tous citoyens ! Au même instant on apporte à Maillard une cocarde nationale de la part des gardes du corps. Il la montre aux femmes comme un gage de leurs dispositions pacifiques et toutes s’écrient : Vive le Roi ! vivent les gardes du corps ! Maillard. Je suis bien loin de partager les soupçons qui agitent tous les esprits ; mais je pense qu’il est nécessaire, pour le bien de la paix, d’engager Sa Majesté à prononcer le renvoi de ce régiment qui, dans la disette cruelle qui afflige la capitale et les environs, augmente les malheurs publics, ne fût-ce que par l'augmentation nécessaire qu’il occasionne dans la consommation journalière. L’Assemblée décide que M. le président se rendra à l’instant vers le Roi, avec ceux de MM. les députés qui voudront l’accompagner, pour lui demander nôn-seulement l’acceptation pure et simple de la déclaration des droits et des dix-neuf articles de la Constitution, mais pour réclamer aussi toute la force du pouvoir exécutif sur les moyens d’assurer à la capitale les grains et les farines dont elle a besoin. M. le président se transporte chez le Roi, avec la députation, sur les cinq heures du soir. M. de La Luzerne, évêque de Langres, l’un des ex-présidents, le remplace au fauteuil. M. Gruillotin, membre de la députation, rapporte vers huit heures la réponse de Sa Majesté sur l’objet particulier de la disette des farines; elle est conçue en ces termes : « Je suis sensiblement touché de l’insuffisance de l’approvisionnement de Paris. Je continuerai à seconder le zèle et les efforts de la municipalité par tous les moyens et toutes les ressources qui sont en mon pouvoir, et j’ai donné les ordres les plus positifs pour la circulation libre des grains sur toutes les routes, et le transport de ceux qui sont destinés pour ma bonne ville de Paris. « Signé : Louis. » M. Çruillotin donne ensuite lecture de l’ordre suivant que le Roi vient de sigüèr et que M. le comte dé Saint-Priest, secrétaire d’Etat, a contresigné : « Le Roi, ayant appris par le président de l’Assemblée nationale le bruit répandu à Paris, qu’il se trouve des blés arrêtés à Senlis et à Lagny, ordonne, au cas que ce rapport soit exact, que ces blés soient, ainsi que ceux qui seront arrêtés ailleurs, transportés à Paris, sans délai ; Sa Majesté entendant qu’on n’apporte aucune résistance à ce qui peut servir à rapprovisionnefnént de Paris ; objet qu’elle veut être rempli de préférence à tout autre. « A ces causes, ordonne Sa Majesté que les commandants militaires et officiers municipaux accomplissent exactement cette disposition. « Fait à Versailles, le 5 octobre 1769. « Signé ; LoüIS. PRÉSIDENCE DE M. DE LA LUZERNE, ÉVÊQUE DE LANGRES. Un de MM. les secrétaires donne lecture ainsi qü’il süit de la liste dès nouveaux membres du comité des rapports : MM. Defermon (de Rennes). Long. Roger. Prieur. Rousselet. Ulry. Brassart. . ... , Mougins de Roquefort, député des communes. Bouchotte. MM. Gassendi. De Clermont-Mont-Saint-Jeah. Terrats. De Lachèze. Emmery. Gaultier de Biauzat. Guillaume. Guiilotin. De Luze de l’Étang. « Et contresigné , le comte de Saint-Priest. » Les cris de vive le Roi ! se font entendre de tous côtés. L’Assemblée voulant concourir, autant qu’il est en son pouvoir, à faire cesser la disette ne pain qu’on éprouve à Paris, prend, après cette lecture de la réponse, du Roi, l’arrêté suivant : « L’Assemblée nationale, instruite que plusieurs particuliers, et même quelques municipalités s’opposent à l’exécution des décrets des 29 août et 18 septembre derniers, au préjudice d’autres municipalités et de l’intérêt général du royaume, « A décrété et décrète que toutes les municipalités du royaume seront tenues d’exécuter et faire exécuter les décrets des 29 août et 18 septembre derniers, à peine contre les contrevenants 348 [Assemblée -nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 octobre 1789.] d’être déclarés perturbateurs de l’ordre public : en conséquence, autorise toutes personnes, et notamment celles qui sont chargées de commissions de leurs municipalités pour acheter des grains et farines, à réclamer le secours du pouvoir exécutif, et la force militaire pour procurer liberté et sûreté dans les marchés, et pour faciliter le transport des blés et farines achetés, à la charge de faire préalablement constater le refus et les contraventions par le premier officier public sur ce requis. « Ordonne que le comité des recherches sera tenu de faire toutes les informations nécessaires contre les auteurs, fauteurs, complices, adhérents et instigateurs, de quelque état et condition qu’ils puissent être, qui ont apporté ou apporteraient quelque obstacle à la libre circulation des grains dans l’intérieur du royaume, ou qui favoriseraient l’exportation à l’étranger, pour, sur le rapport qui en sera fait, à l’Assemblée nationale, être statué ce qu’il appartiendra. « Ordonne, en outre, qu’il sera affiché dans tous les marchés du royaume, des placards contenant les défenses portées par les décrets de l’Assemblée nationale, d’exporter aucuns blés, grains et farines hors du royaume, à peine d’être punis comme perturbateurs du repos public, et qu’il sera écrit par le président de l’Assemblée nationale une lettre circulaire, à toutes les municipalités, pour les inviter à procurer et faciliter la circulation des grains et farines ; que M. le président engagera de plus les municipalités des environs de Paris, à faire porter du pain dans la capitale par les boulangers de leurs arrondis: e-ments. « L’Assemblée a statué déplus que le Roi sera instamment supplié d’envoyer le présent décret, ensemble ceux déjà faits concernant les subsistances, à tous les tribunaux du royaume pour être inscrits sur les registres, publiés et affichés, comme aussi de prendre toutes les mesures nécessaires pour l’exécution pleine et entière du présent décret. » Enfin pour ne négliger aucun des moyens propres à calmer l’agitation populaire que la disette du pain occasionne à Paris, l’Assemblée fait remettre par ses secrétaires, aux citoyens et citoyennes de la capitale, qui se trouvent à la barre, la copie collationnée de ses décrets touchant les subsistances, du 29 août et du 18 septembre ; celle de la réponse du Roi et des ordres expédiés par Sa Majesté dans la soirée de ce jour. et enfin le nouveau décret relatif aux subsistances qui vient d’être rendu. 11 était neuf heures et demie du soir et la séance durait depuis neuf heures du matin. M. le vice-président la lève et indique la séance suivante pour demain neuf heures du matin. Reprise de la séance. Le plus grand nombre de MM. les députés avait quitté la salle, d’après l’ajournement de M. le vice-président, lorsque M. le président revient du château. La crise où l’on se trouve et des événements nouveaux le déterminent à rouvrir et à continuer la séance. M. Meunier, président, annonce que le Roi, sur les représentations de l’Assemblée, a accepté purement et simplement la déclaration des droits ainsi que les dix-neuf articles de la Constitution. La réponse de Sa Majesté est ainsi conçue : ? « J’accepte purement et simplement les articles de la Constitution et la déclaration des droits de l’homme, que l’Assemblée nationale m’a présentés. « 5 octobre au soir. « Signé : Louis. » Un nombreux détachement de la garde nationale parisienne étant arrivé à Versailles sur les dix heures du soir, le Roi a rappelé près de sa personne M. le président, qui venait de quitter Sa Majesté. Le Roi a également appelé auprès de lui ceux de MM. les députés qui se trouvaient dans la salle. M. le Président s’est rendu auprès de Sa Majesté, avec un très-grand nombre de membres. Le Roi lui a dit : « Je vous ai fait appeler, parce que je voulais m’environner des représentants de la nation et m’éclairer de leurs conseils dans cette circonstance difficile ; mais M. de Lafayette est arrivé avant vous et je l’ai déjà vu. Assurez l’Assemblée nationale que je n'ai jamais songé à me séparer d’elle et que je ne m’en séparerai jamais. » L’agitation de Paris, et le grand nombre d’habitants de la capitale qui se sont rendus à Versailles, ont déterminé M. le président à faire, à une heure après minuit, avertir MM. les députés au son du tambour. L’Assemblée se trouve assez nombreuse à une heure et demie pour délibérer. M. le Président a répété le discours du Ro afin que le peuple, qui était en grand nombre dans la salle, en eût connaissance. Un des secrétaires fait lecture du projet rédigé par le comité judiciaire, pour la réforme de quelques articles du code criminel. Ce projet est mis à la discussion. Les femmes qui se trouvaient encore en foule dans la salle, réclament la délibération sur les grains. Eh quoi ! s’écrient-elles, que nous importe la jurisprudence criminelle, quand Paris est sans pain ! M. le comte de Mirabeau. Je prie M. le président de préserver la dignité de la délibération, en donnant ordre de faire retirer dans les galeries les étrangers répandus dans la salle. Ce n’est pas au milieu d’un tumulte scandaleux que les représentants de la nation peuvent discuter avec sagesse; et j’espère que les amis de la liberté ne sont pas venus ici pour gêner la liberté de l’Assemblée. Un membre propose d’aller tenir la séance chez le Roi. M. le comte de Mirabeau. Je m’y oppose; il n’est pas de notre dignité, il n’est pas même sage de déserter notre poste au moment où des dangers imaginaires ou réels semblent menacer la chose publique. M. le Président parvient à faire évacuer la salle, et la séance continue jusqu’à trois heures du matin. M. le Président lève la séance après avoir annoncé qu’elle serait reprise le même jour à onze heures,