[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 juin 1790.] évêque métropolitain, et, s’il a été élu pour le siège de la métropole, au plus ancien évêque de l’arrondissement avec le procès-verbal d’élection et de proclamation, et il le suppliera de lui accorder la confirmation canonique. » M. Martineau, rapporteur , donne lecture de l’ancien art. 16, qui deviendra le 17e du décret. « Art. 16. L’évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qu’après en avoir délibéré avec tout le clergé de son église, et à la charge par lui de donner par écrit les raisons de son refus, signé de lui et des deux tiers au moins des membres de son conseil. » M. Dnquesnoy. Je demande la question préalable sur cet article : il n’est pas possible que l’évêque puisse refuser la confirmation à celui qui aura obtenu le suffrage du peuple. S’il en était autrement, vous verriez bientôt les évêques n’admettre que les ecclésiastiques qu’ils sauraient devoir perpétuer l’esprit de corps, si dangereux pour une constitution libre. M. l’abbé Gouttes. Les électeurs peuvent faire de mauvais choix ; il faut bien que l’évêque et son conseil examinent le sujet. C’est le seul moyen d’exclure de l’état ecclésiastique ces hommes dont les mœurs sont absolument contraires à l’esprit de cet état. M. l’abbé Bourdon, curé d'Évaux. Quand l’Assemblée a refusée au roi le pouvoir de rejeter les juges qui lui étaient présentés, il est bien étonnant qu’on nous propose de donner à un évêque le droit de pouvoir contredire le suffrage du peuple. On craint, dit-on, que la cabale et l’intrigue n’agissent dans les assemblées des électeurs; je demande si elles n’auront pas bien plus d’effet dans la cour de l’évêque. Je demande donc que 1 eveto ecclésiastique ne soit point établi par la Constitution. M. ldanjuinais.il faut que la confirmation de l’évêque soit un acte nécessaire et libre, ou bien vous confondez les deux pouvoirs, te pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, et vous détruisez la religion. On demande que la discussion soit fermée.) Cette proposition mise aux voix est décrétée.) M. l’abbé Bilion, curé du Vieux-Pouz anges . Dans la primitive Eglise on n’a jamais demandé la confirmation métropolitaine. Je demande la division de l’article, que je rédige ainsi : « L’évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qui lui aura été demandée. » (On observe que la discussion est fermée, et que la proposition de M. l’abbé Dillon est une motion et non un amendement.) M. Laborde de Mérévllle. Plusieurs membres du comité ecclésiastique qui siègent dans cette partie de la salle m’observent que l’article proposé par M. Martineau n’est pas le vœu de la majorité du comité. Je demande que l’article lui soit renvoyé. M. Martineau. Je n’ai proposé aucun article à l’Assemblée qui D’ait auparavant été consenti par le comité, et particulièrement celui que nous discutons en ce moment. 217 (L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur le renvoi au comité.) M. de Sillery. Si vous accordez aux évêques le droit de refuser la confirmation qui leur sera demandée, et qu’ils la refusent effectivement, il faudra bien, sans doute, procéder à une nouvelle élection. Je demande donc qu’après cette seconde élection, si le môme ecclésiastique est élu, l’évêque ne puisse plus refuser la confirmation. M. Lanjuinais. Ou l’Assemblée entend faire des lois pour la religion catholique, qui est celle de l’Etat, ou pour une religion qu’il lui plairait de faire. A Dieu ne plaise qu’une pareille idée soit jamais mise à exécution! Je la repousse loin de ma pensée. L’amendement proposé ne fait que reculer la difficulté, et nous fait toucher au doigt combien il est nécessaire que la confirmation ne soit accordée que par ceux qui ont reçu de Dieu une mission expresse. M. Treilhard. Il faut prendre bien des précautions pour que les fonctions du sacerdoce ne soient accordées qu’à des gens qui en soient véritablement dignes; mais il faut avoir soin aussi que jamais l’évêque ne puisse refuser la confirmation à un sujet par des prétextes frivoles. Il s’agit donc de composer avec le plus grand soin le synode; en conséquence, je demande l’ajournement de l’article jusqu’à ce que cette for mation soit achevée. M. Goupil de Préfeln. On a d’autant moins à„,craindre que la confirmation des évêques soit refusée sous faux prétextes, que la voie d’appel comme d’abus sera toujours ouverte. . (On demande la question préalable sur l’ajournement. L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’ajournement.) M. l’abbé Bourdon, curé d'Évaux. Je demande, pour l’intérêt public, que l’Assemblée mette toujours dans ses délibérations la plus grande lenteur, et qu’elle renvoie aux comités ecclésiastique et de Constitution une question qui a besoin encore d’ètre éclaircie. Je suis bien surpris de voir que les membres qui, quatre ou cinq fois, sont venus nous annoncer qu’ils ne prenaient aucune part aux délibérations sur tout ce qui regarde le clergé, s’élèvent en ce moment avec précipitation pour rejeter un ajournement ou un renvoi qui ont pour objet unique d’éclairer l’Assemblee sur des matières d’une grande importance. M. Prieur demande la parole. On demande à aller aux voix. L’Assemblée décide que M. Prieur sera entendu. M. Prieur. Je ne conçois pas comment, lorsqu’il s’agit de déléguer aes pouvoirs importants, on peut presser ainsi la délibération. Une partie de l’Assemblée s’oppose à ce qu’on délibère; je vais justifier ma résistance personnelle. Ma religion n’est point éclairée; la discussion n’a porté jusqu’à ce moment que sur des demandes en ajournement et en renvoi au comité. L’article proposé donne à l’évêque le droit d'iuvalider l’élection du peuple, et l’article suivant à un synode métropolitain celui de refuser indéfiniment l’institution canonique : ou croit corriger ces dispositions en disant, dans un autre article, que l’examen du métropolitain ou du synode ne por- 218 [Asgemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 juin 1790. tera que sur l’idonéité : il faut expliquer ce qu’on entend par l’idonéité; si elle porte sur quelque chose de civil, cet examen n’appartient pas au synode. Jamais je ne consentirai à déléguer à des eclésiastiques le pouvoir judiciaire : il faut définir l’idonéité ; il faut examiner avec soin la composition du synode métropolitain, puisqu’il peut influer sur la liberté. M. Camus. Il s’agit ici de deux choses qu’on doit distinguer; le pouvoir du métropolitain et celui du peuple. Le peuple choisit le sujet qu’il reconnaît être le plus digne de sa confiance dans les fonctions du ministère sacré. Le supérieur ecclésiastique dit à l’élu : je vous communique les pouvoirs que j’ai reçus pour les exercer et pour les transmettre. Voilà tout à la fois les principes et les faits. Que fait le supérieur ecclésiastique? Il examine les mœurs et la doctrine du sujet. Quant à la validité de l’élection, il n’v peut rien ; quand à l’idonéité il peut tout. D’après ces principes, l’article me paraît mal rédigé. Il faut d’abord y porter la fin de l’article coté 18 dans le projet de décret; il faut ensuite donner un remède à un refus injuste, par le recours au souverain, qui renverrait à un autre supérieur ecclésiastique. Je proposerais en conséquence cette rédaction ; « Le métropolitain ou l’ancien évêque aura la faculté d’examiner l’élu sur sa doctrine et sur ses mœurs. S’il le juge capable, il lui donnera l’institution canonique. S’il croit devoir refuser, les causes de son refus seront délivrées par écrit, et signées de l’évêque et de son conseil, sauf aux parties intéressées à se pourvoir par voie d’appel comme d’abus, suivant les règles qui seront énoncées. » M. le marquis de Foucault. Un des préopinants, M. l’abbé Bourdon, que je ne connais pas, a dit qu’il ne savait pas pourquoi nous nous levions après avoir dit que nous ne délibérerions pas. Que nous nous opposions, que nous résistions, que nous nous taisions ou que nous parlions, vous n’en allez pas plus vite : je crois que vous ne devez pas nous en vouloir, et qu’on ne doit pas nous inculper. M. le Président met aux voix l’article amendé par M. Camus. Il est adopté ainsi qu’il suit : « Art. 17 (ancien art. 16). Le métropolitain ou l’ancien évêque aura la faculté d’examiner l’élu, en présence de son conseil, sur sa doctrine et ses mœurs. S’il le juge capable, il lui donnera l’institution canonique. S’il croit devoir la refuser, les causes du refus seront données par écrit, signées du métropolitain et de son conseil, sauf aux parties intéressées à se pourvoir par voie d’appel comme d’abus, ainsi qu’il sera dit ci-après. » L'art. 18 est ensuite décrété sans discussion ainsi qu’il suit ; « Art. 18 (ancien art. 19). L’évêque à qui la confirmation sera demandée, ne pourra exiger de l’élu d’autre serment, sinon qu’il fait profession de la religion catholique, apostolique et romaine. » M. Martineau, rapporteur, donne lecture de l’ancien art. 20 en ces termes ; « Art. 20. Le nouvel évêque ne pourra point s’adresser à l’évêque de Rome pour en obtenir aucune confirmation; mais il pourra lui écrire comme au chef visible de l’Église universelle et en témoignage de l’unité de foi et de ia communion qu’il est dans la résolution d’entretenir avec lui.» M. l’abbé Goulard. Il est démontré que le pape est le véritable chef de l’Eglise, qu’il n’a pas seulement la primauté d’honneur, mais encore la primauté de juridiction : la tradition des SS. PP. et de tous les conciles œcuméniques le prouvent. Saint lrénée dit que c’est à l’Eglise romaine que les autres Eglises doivent s’adresser, à cause de sa primauté. Saint Athanase écrit au pape Félix : « Dieu vous a placé au haut de la forteresse sur toutes les Eglises, afin que vous veniez à notre secours. » Saint Basile mande à saint Athanase qu’il a été convenu de s’en référer à l’évêque de Rome pour que son jugement intervînt dans la réformation de ce qui a été fait au concile par violence. Un concile de Carthage déclare que c’est en vertu de l’institution divine que la primauté appartient à l’évêque de Rome sur toutes les Eglises. Le concile de Provence donne cette définition : « Le pontife romain est le chef, le père, le docteur de toutes les Eglises, sur lesquelles il a reçu un gouvernement universel. » Le concile de Bâle appelle le pape le chef et le primat de l’Eglise, le prélat et le pasteur du chrétien, le seul qui soit appelé à une plénitude de puissance... Je conclus de tous ces faits que le pape a le pouvoir de gouverner l’Eglise entière, que ce pouvoir s’étend non-seulement sur les brebis, mais encore sur les pasteurs. En adoptant l’article proposé, vous lui refuseriez cette plénitude de puissance que lui a donnée Jésus-Cnrist, et que lui reconnaît l’Eglise. M. l’abbé Gouttes. Je demande qu’on aille aux voix; le préopinant n’a rien dit qui fût contraire à l’article. Je le défie de citer un fait qui prouve qu’une demande a été faite au pape pour se faire confirmer par lui. Après quelques observations présentées par divers membres, l’article est adopté en ces termes : « Art. 19 (ancien art. 20). Le nouvel évêque ne pourra s’adresser au pape pour en obtenir aucune confirmation ; mais il lui écrira comme au chef visible de l’Eglise universelle, en témoignage de l’unité de foi et de la communion qu’il doit entretenir avec lui. * M. Martineau donne lecture des anciens art. 21 et 22. Ils sont décrétés en ces termes : « Art.20 (ancien art. 21). La consécration de l’évêque ne pourra se faire que dans son église cathédrale par l’évêque métropolitain, ou à son défaut par le plus ancien évêque de l’arrondissement dé la métropole, assisté des évêques des deux diocèses les plus voisins, un jour de dimanche, pendant la messe paroissiale, en présence du peuple et dü clergé. « Art. 21 (ancien art. 22). Avant que la cérémonie de la consécration commence, l’élu prêtera, en présence des officiers municipaux, du peuple et du clergé, le serment solennel de veiller avec soin sur les fidèles du diocèse qui lui est confié, d’être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout son pouvoir la Constitution décrétée par l’AsSemblée nationale, et acceptée par le roi. » M. Martineau annonceque l’ancien article 23, qui deviendra le 22e du décret, est ainsi conçu : « Art. 23. L’évêque aura la liberté de choisit* les vicaires de son église cathédrale dans tout le clergé de son diocèse, à la charge par lui de ne pouvoii*