[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 septembre 1789.] 185 Séance du vendredi 25 septembre 1789, au soir. On a fait la lecture de diverses adresses : L’une de la ville de Langeac en Auvergne, qui demande une justice royale. Les adresses et délibérations des villes d’Ardes, Besse, Brioude, lssoire, Lezoux et Vic-le-Comte en Auvergne; elles demandent chacune un siège royal, et qu’il soit établi un tribunal souverain à Clermont-Ferrand. Celles de la ville de Blesle et des-bourgs d’Au-lhat, Allagnat, Beauregard, Brenat, Buron.Bouzel Beaune, Châtrât et Pasredon, Bort, Cournon , Cham-peix, Chauriat, Dallet, Dreuil-en-la-Roche, Durtol, Fiat, Jussat, le Pont-du-Château, la Roche-Don-nezat, le Crest, les Martres, Lempdes, Laps, le Cendre, Lempty, Montaigu-le-Blin , Monton, Mire-fleurs, Nechers, Nohant, Nabouzat, Orbeil, Or-sonnette, Orcet, Ornon, Orleat, Plauzat, Pignols, Parent, Pérignat, Romagnat, Saint-Jean-d’Heurs, Solignat, Saint-Maurice, Saledes, Saint-Saturnin, Saint-Sandoux, Saint-Babel, Seychalles, Teix-Font-frede et Nadaillat, Vassel et Yronde, demandent de même l’établissement d’un tribunal souverain à Clermont-Ferrand. Une adresse du sieur Mongeot, maître de pension, qui supplie l’Assemblée d’agréer l’offre qu’il fait d’enseigner gratuitement à lire et à écrire à trente-deux ouvriers ou gagne-deniers de Versailles. Adresse de félicitation de la communauté de Chapelle , en Agenois , qui demande que le seigneur soit obligé de représenter le titre primitif, pour avoir le droit d’exiger les cens ra-chetables par les arrêtés du 4 août. Une adresse de félicitation et adhésion de la communauté de Château-Neuf-sur-le-Cher. Une délibération de la ville de Tarascon en Provence, portant renonciation à tous les privilèges de la province, et adhésion aux arrêtés de l’Assemblée, notamment à ceux du 4 août. Une déclaration de M. Goulliart, procureur du roi au bureau des finances de la généralité de Soissons, par laquelle il renonce au remboursement effectif de la finance de son office, jusqu’à ce que la balance entre les revenus et les dettes et charges de l’Etat soit rétablie et déclare en outre renoncer à tous émoluments et épices, dans l’exercice de sa charge. On a fait ensuite l’annonce de diverses offres patriotiques dans l’ordre qui suit : 1° Une soumission de M. Chevrier, chef de bureau de la Caisse d’escompte, qui annonce un hommage à la patrie du centième de ses appointements pendant dix ans ; 2° Une lettre de M. Boucher, qui annonce un don de 12 livres pour lui, et autant pour son voisin , comme impôt de 3 livres par croisée ; 3° Un abandon de 3 livres 0/0 des sommes dues au sieur Pajou, sculpteur du Roi, professeur de son académie de peinture et de sculpture, sur ses travaux de Versailles, Bellevue, de la fontaine des Innocents, et autres ouvrages faits depuis 1769; 4° Un citoyen, bien pauvre, qui dit n’avoir jamais senti sa pauvreté que dans ce moment de crise, où il voudrait donner beaucoup à l’Etat, offre à l’Assemblée nationale 48 livres, en deux coupons de billets, payables au porteur au Trésor royal; 5° Une lettre du sieur Brognon, marchand épicier à Paris, qui a fait à sa patrie le sacrifice d’une somme de 198 livres, qu’il fera passer à l’Assemblée nationale lorsqu’elle le jugera à propos; 6° Une lettre imprimée, des artistes typographes de Paris, et de ceux de l’imprimerie de l’Assemblée nationale de Versailles, qui renferme, tant en billets décaissé qu’en argent comptant, une somme de 1,022. liv. 14 sous, qu’ils abandonnent à la nation sans aucun intérêt ; 7° Le sieur Baudouin, imprimeur de l’Assemblée nationale, offre à la nation le cinquantième de son bien; 8° Un mandat de M. Foacier, ancien notaire au Châtelet de Paris, qui offre à la nation la somme de 3,000 livres, payable le 2 octobre 1789. L’Assemblée reprend la discussion du projet de décret concernant les impositions. M. Anson relit le décret proposé à la séance du matin avec les modifications qui ont été adoptées dans cette séance. Plusieurs membres réclament la parole. M: le marquis d’Estourmel (1). Messieurs, député du Cambrésis où l’impôt est réparti et payé également par les trois ordres, je suis chargé de" vous déclarer que le vœu delà noblesse de cette province est que l’impôt consenti par la nation devra être réparti , dans une juste proportion , sur toutes les propriétés généralement quelconques , revenus, industrie et commerce. J’adhère avec empressement à la proposition faite, que le montant de l’impôt, résultant à la renonciation des privilèges pécuniaires, à dater du 1er avril dernier jusqu’au premier décembre prochain, tourne au soulagement des contribuables dans chaque province, puisque par cette application le Trésor public profitera de la somme qui en était tirée annuellement et employée en fonds de charité et diverses dépenses ; mais jusqu’à présent la perception des vingtièmes a porté sur des bases fausses, même dans les généralités qui ont été le plus travaillées en finances, soit à cause des abonnements particuliers, dont l’abus vous a été développé avec la plus grande énergie, il y a quelques jours, soit parce que les déclarations ne contenaient pas l’universalité des possessions de chaque terroir; les particuliers n’avaient aucun intérêt à en faire la déclaration; l’assiette de l’impôt qui en serait résulté n’aurait pas tourné à la décharge du rôle. Il est reconnu que nous sommes les membres d’une même famille; chacun doit supporter sa part dans la charge publique. II est évident qu’il résultera de l’observation que je soumets à vos lumières une augmentation de recette pour le Trésor public. Je demande, en conséquence : 1° que tous les abonnements soient révoqués à dater du 1er avril dernier; 2° qu’il soit dressé par les municipalités de chaque ville, bourg et village, un rôle additionnel, contenant toutes les portions de terres qui ne se trouveront pas reprises dans les rôles actuels des vingtièmes, pour qu’en vertu de ce rôle qui sera rendu exécutoire, elles acquittent les vingtièmes, à dater du 1er avril dernier. (1) Le discours de M. d’Estourmel n’a pas élé inséré au Moniteur. 186 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 septembre 1789.] La discussion a continué; on a proposé divers autres amendements et diverses rédactions. On a interrogé le vœu sur la première des rédactions; celle du décret proposé le matin a été adoptée. On a fait la lecture des amendements. La question préalable a été demandée ; mais on a demandé la division de ces amendements : on en a accepté un; on en a ajourné cinq. Celui accepté porte que les curés et vicaires congruistes, ou qui, n’étant point à la portion congrue, n’ont qu’un revenu équivalent, sont exemptés de l’imposition des privilégiés jusqu’au moment où leur traitement sera augmenté. 11 a été demandé que l’établissement du droit de franc-fief fût particulièrement décrété ; l’Assemblée a adopté cette proposition. On a demandé ensuite si l’amendement relatif à l’abonnement des provinces serait ajourné ; l’Assemblée a décidé que non. On a ensuite posé la question préalable sur cet objet ; il a été décidé qu’il n’y avait pas lieu à délibérer. Le décret a été adopté comme il suit : DÉCRET. L’Assemblée nationale, considérant combien il importe à la sûreté de l’Etat, au maintien de l’ordre et au rétablissement du crédit, que le recouvrement des deniers publics ne soit interrompu sous aucun prétexte; persistant dans son décret du 17 juin dernier, par lequel elle a déclaré que les impôts et contributions continueront d’être levés pendant la présente session de la même manière qu’ils l’ont été précédemment ; et recon-naissant la nécessité de faire travailler promptement aux rôles de 1790, dans la même forme que ci-devant, jusqu’à ce qu’elle puisse faire jouir les contribuables du nouveau mode d’impositions qu’elle ordonnera pour 1791, et dont elle veut avec maturité combiner la répartition ; persistant également dans son décret du 11 août dernier, dont l’article 9 a ordonné qu’il serait avisé aux moyens d’effectuer le payement proportionnel de toutes les contributions, même pour les six derniers mois de l’imposition courante, qui, pour ce qui concerne les impositions ordinaires, finit au 30 septembre 1789, elle a ordonné et décrété, ordonne et décrète ce qui suit ; Art. 1er. Les rôles des impositions de l’année 1789 et des années antérieures arriérées, seront exécutés et acquittés en entier dans les termes prescrits par les les règlements. Art. 2. Il sera fait, dans chaque communauté un rôje de supplément des impositions ordinaires et directes, autres que les vingtièmes, pour les six derniers mois de l'année 1789, à compter du ler avril dernier, jusqu’au 30 septembre suivant, dans lesquels seront compris les noms et les biens de tous les privilégiés qui possèdent des biens en franchise personnelle ou réelle, à raison de leurs propriétés, exploitations et autres facultés ; et leur cotisation sera faite dans la même proportion et dans la même forme qui auront été suivies pour les impositions ordinaires de la même année, vis-à-vis des autres contribuables. Art. 3. Les sommes provenant de ces rôles de supplément seront destinées à être réparties en moins-imposé sur les anciens contribuables, en 1790, dans chaque province. Art. 4. Dans les rôles de toutes les impositions de 1790, les ci-devant privilégiés seront cotisés avec les autres contribuables, dans la même proportion et la même forme, à raison de toutes leurs propriétés, exploitations et autres facultés. Art. 5. A commencer du Ie* janvier 1790, tous les abonnements sur les vingtièmes, accordés à divers particuliers, sont expressément révoqués, et aucun contribuable ne pourra se soustraire, sous quelque prétexte que ce soit, à cette imposition. Art. 6. L’Assemblée nationale fera connaître, dans le courant de 1790, la forme qu’elle aura définitivement adoptée pour la conversion et la répartition générale des impositions de 1791, afin qu’il n’y ait plus à l’avenir qu’un seul et même rôle d’imposition pour tous les contribuables, sans aucune distinction, ni pour les personnes, ni pour les biens. M. le Président a levé la séance, et l’a indiquée à neuf heures du matin. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE COMTE STANISLAS DE CLERMONT-TONNERRE. Séance du samedi 26 septembre 1789, au matin (1). , A l’ouverture de la séance, M. le président a annoncé les dons patriotiques suivants ; 1° L’adresse d’uu cultivateur, qui coptient la somme de 24 livres, dont il fait hommage à l’Assemblée nationale ; 2° Celle de Pierre Carré , Poitevin , domestique à Paris, qui fait, conjointement avec son >. épouse, l’envoi de 48 livres en deux coupons, d’un billet de 600 livres de l’emprunt d’octobre 1783, en forme de loterie. Ils offrent en outre une contribution de 12 livres par an, pour deux ans, ou plus, s’il le faut, à commencer en janvier 1791; 3° Une lettre de M.Mosneron de Launay, député du commerce de Nantes auprès de l’Assemblée nationale, qui envoie, au nom de son frète ' Mosneron-Dupin, àM. le président, quatre lettres de change, formant ensemble la somme de 10,004 liv. 4 sous et qui s’engage personnellement à payer, dès qu’il l’aura reçue, celle de 2,000 livres dont il prie l’Assemblée d’agréer l’hommage ; 4° M. le marquis de Solin, président du comité permanent du bailliage de Bourbon-Lancy, fait offrande à la nation d’une rente de 108 livres sur les tailles, créée originairement, et comprise aujourd’hui dans les états du Roi pour 54 livres î. seulement, remboursable par 1,080 livres. M. le Président a annoncé que quatre députés de la Comédie française demandaient à l’Assemblée de se présenter devant elle, et de lui faire connaître la délibération par laquelle les comédiens ordinaires du Roi ont arrêté un sacrifice de 23,000 livres payables dans Je courant du mois de janvier prochain, et applicables aux besoins de l’Etat. L’Assemblée l’ayant agréé, les quatre députés ont été introduits à la barre et ont fait lecture de ladite délibération. M. le Président leur a dit : Messieurs, l’Assemblée nationale voit avec approbation votre patriotisme : on ne peut, Messieurs, faire un plus noble usage de la rétribution v qu’obtiennent des talents qui contribuent à la consolation et au bonheur de l’humanité, L’ Assemblée a permis aux quatre députés d’assister à la séance dans, la barre. M. Gervaise, docteur régent de la faculté de médecine de Paris, a fait en personne l’hommage (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.