SÉANCE DU 17 VENDÉMIAIRE AN III (8 OCTOBRE 1794) - N08 61-64 417 libre aux offres séduisantes des cours. Il n’est pas jusqu’à Tippoo-Saïb qui ne vous les ait enviés ; et l’un d’eux, le jeune Willemet, qui donnait les plus hautes espérances, est allé mourir à Seringapatnam. Nous serions déshonorés, si nos savants, contraints à chercher leur subsistance sur des rives étrangères, avaient plus à se louer des caresses du despotisme que le la justice républicaine. Rendez l’existence à des hommes couverts de gloire et de malheurs ; soyez sûrs que la France, l’Europe et la postérité seront de votre avis. Saisissez toutes les occasions d’inculquer au peuple que, si les lumières étaient détruites, la liberté s’ensevelirait dans le même tombeau. En dernière analyse, les récompenses accordées aux talents utiles sont un bienfait envers la société ; car elles sont l’objet d’un contrat dont les clauses sont à notre avantage. Une valeur pécuniaire pourra-t-elle jamais balancer une erreur rectifiée, une vérité acquise? Ayons la bonne foi d’avouer qu’après avoir décerné des prix au génie, nous resterons ses débiteurs. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d’instruction publique, décrète : Article premier. - Sur les fonds mis à la disposition de la commission d’instruction publique, il sera pris jusqu’à la concurrence de cent mille écus, pour encouragement, récompenses et pensions à accorder aux savans, aux gens de lettres, et aux artistes dont les talens sont utiles à la patrie. Art. II. - Le comité d’instruction publique présentera, sans délai, un rapport sur le mode de répartition de cette somme, et la Convention nationale prononcera définitivement (104). 61 La Convention nationale décrète que le comité d’instruction publique est chargé de faire un rapport sur Dombey, voyageur français, mort à l’isle de Mont-Serrat, et sur la demande d’inscrire son nom sur la colonne du Panthéon (105). Boissy d’Anglas demande que le nom de Dombey, que le désir d’acquérir des connaissances utiles à son pays a fait traverser les mers, et qui a péri dans ses voyages, soit inscrit sur la colonne élevée dans le Panthéon. (104) P.-V., XLVII, 41-42. C 321, pl. 1332, p. 14. Minute de la main de Grégoire, rapporteur. Moniteur, XXII, 193 ; Débats, n” 747, 277 ; Gazette Fr., n° 1011 ; J. Fr., n° 743 ; J. Mont., n“ 163; J. Paris, n°18; J. Univ., n° 1779; Mess. Soir, n° 781; M. U., XLIV, 267; Ré p., n° 18. (105) P.-V., XLVII, 42. C 321, pl. 1332, p. 15. Minute de la main de Boissy. Décret attribué à Romme par C* II 21, p. 7. J. Fr., n” 743; J. Mont., n" 162; Mess. Soir, n° 781; M. U., XLIV, 267; Ré p., n 18. Cette proposition est renvoyée à l’examen du comité de Salut public. Du Bouchet demande l’exécution du décret par lequel la Convention avait déclaré que, trois jours par décade, elle s’occuperait de l’instruction publique et de l’organisation des écoles primaires. Massieu annonce que, sous trois jours, le comité d’instruction publique soumettra son travail à la Convention (106). 62 La Convention nationale décrète que le comité de Sûreté générale est autorisé à prononcer définitivement sur l’affaire de la citoyenne Philippine Thiéry, fille de confiance du citoyen Menu; de Roger, Billet et Roland, tous patriotes réfugiés de Valenciennes (107). 63 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de MENUAU au nom] de son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Huteau, tailleur d’ardoises, habitant de la commune d’Angers, département de Maine-et-Loire, caporal dans le bataillon des pères de famille, blessé de trois coups de feu dans différens combats contre les brigands de la Vendée, de manière à ne pouvoir jamais travailler de son état, et père de deux enfans, décrète ce qui suit : La Trésorerie nationale fera passer sans délai à l’agent national provisoire du district d’Angers la somme de 300 livres, à titre de secours provisoire, pour être remise au citoyen Huteau. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (108). 64 Le citoyen Charles Pottier expose que la mission dont on l’a chargé ne lui a pas permis de jouir du congé de trois décades que la Convention lui a accordé le 27 fructidor. H demande que le congé qu’il a de-(106) Moniteur, XXII, 193; F. de la Républ., n° 18; Gazette Fr., n° 1011; J. Fr., n' 743; J. Paris, n° 8 ; J. Perlet, n° 745-746 ; J. TJniv., n" 1779 ; Mess. Soir, n° 781 ; M. U., XLIV, 267 ; Rép., n° 18. (107) P.-V., XLVII, 42. C 321, pl. 1332, p. 16. Minute de la main de Duhem. Décret anonyme selon C* II 21, p. 7. (108) P.-V, XLVII, 42. C 321, pl. 1332, p. 17. Minute de la main de Menuau, rapporteur. Bull., 17 vend, (suppl.). 418 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE mandé ne commence à courir que du jour où sa mission sera finie. La Convention décrète que le congé de trois décades, accordé à Charles Pottier, ne courra que du jour où sa mission sera achevée (109). [Le représentant Charles Pottier au président de la Convention nationale, de la papeterie nationale de Buges, près Montargis, le 13 vendémiaire an IIP] (110) Citoyen président, Lorsque j’ai demandé et obtenu de la Convention nationale, le 27 fructidor un congé de trois décades pour rétablir ma santé, je rem-plissois alors une mission qui devoit se terminer à la fin du mois. Des circonstances particulières l’ont prolongé, et elle ne finira que le 16 du courant. Le tems de mon congé s’est ainsi écoulé sans que j’aye pû en jouir. Il expi-reroit sans qu’il m’ait été possible de m’occuper de ma santé si la Convention nationale ne ju-geoit à propos de le renouveller. Je la prie de m’accorder qu’il ne commence à courir que du jour où ma mission icy sera finie. Salut et fraternité. Ch. Pottier. 65 Un membre soumet à la Convention un projet de restauration des écoles vétérinaires et d’éducation des animaux domestiques. La Convention, sur la motion d’un membre, en ordonne l’impression et le renvoi au comité d’ Agriculture (111). [Projet de restauration et de perfectionnement des écoles vétérinaires et d’éducation animale, présenté à la Convention nationale le 17 vendémiaire an III, par Ludot, député du département de l’Aube ] (112) Citoyens, la Convention nationale a invité ses membres à lui offrir tous les moyens propres à animer l’agriculture et le commerce ; je viens remplir son voeu en lui soumettant quelques idées en ce genre ; mon travail à pour objet de tirer l’art vétérinaire de l’espèce d’anéantissement auquel on a semblé l’abandonner, et de (109) P.V., XLVII, 43. C 321, pl. 1332, p. 18. Minute de la main de Lozeau. Décret attribué à Laporte par C* II 21, p. 7. (110) C 321, pl. 1332, p. 18. (111) P.-V., XLVII, 43. C 321, pl. 1332, p. 19. Minute de la main de Ludot. Décret attribué à Barailon par C* II 21, p.7. (112) Moniteur, XXII, 525-527. Mention dans F. de la Ré-publ., n° 18; Gazette Fr., n° 1011; J. Fr., n° 743; J. Perlet, n° 745; J. Paris, n°18; J. TJniv., n° 1779; Mess. Soir, n" 781; M. U., XLIV, 267. lui redonner toute l’activité dont ses différentes parties sont susceptibles. L’art vétérinaire ne se borne pas à la science de guérir les chevaux des maladies dont ils peuvent être attaqués ; il embrasse tout ce qui peut tendre à élever, à conserver, à propager l’espèce des animaux domestiques destinés au commerce et à l’agriculture. Il faut, pour parvenir à ce but, examiner quels sont les moyens qui doivent y conduire plus sûrement. Il semble qu’il consiste dans la formation d’un certain nombre d’élèves et dans l’organisation la mieux combinée de ces écoles. On peut donc considérer l’institution proposée sous les points de vue suivants : Combien d’élèves est-il nécessaire de former ? Il est bon d’observer qu’il y a peut-être plus de trente mille individus disséminés sur la surface de la République, dont l’occupation exclusive est de ferrer les chevaux, mulets boeufs, etc., et de traiter tous les animaux des maladies qu’ils essuient. Or on ne peut se dissimuler que la plupart des individus livrés à ce soin sont peu instruits. Il est donc indispensable de les remplacer successivement par des sujets versés dans l’art dont il s’agit. On sentira surtout cette nécessité si, considérant l’art vétérinaire sous le rapport particulier de la guerre, on fait attention que les pertes des chevaux qu’elle entraîne par les seules blessures ou maladies font une loi de placer auprès des armées des sujets assez habiles pour diminuer les effets de ce fléau. Ainsi il serait difficile de déterminer le nombre d’élèves à former. Mode de réception des élèves. L’art vétérinaire se divise en cours de théorie et cours de pratique. Les premiers se bornent au développement des principes; étant publics et gratuits, tous les citoyens auront le droit de s’y présenter. Quant aux autres, comme les opérations qu’ils entraînent nécessitent des frais, et qu’ils ne doivent pas être faits en pure perte, on ne pourra s’y livrer et être admis à manipuler qu’on n’ait acquis les connaissances préliminaires qui conduisent à ce genre d’instruction. Admission et entretien des élèves. On proposerait de créer un certain nombre de places gratuites dans les écoles pour perfectionner les sujets déjà imbus des premiers éléments de l’art ; les élèves à admettre seraient pris parmi les garçons maréchaux, les fils de cultivateurs indigents, pâtres et bouviers qui seraient reconnus s’être occupés de l’éducation des animaux, et qui sauraient lire et écrire, et des défenseurs de la patrie morts en combattant pour elle. Ils seraient entretenus aux frais du gouvernement pendant toute la durée des cours. Les artistes perfectionnés par cette voie, ceux qui le seraient par leurs propres moyens, suffiraient sans doute aux besoins des communes et des armées de la république.