60 [États généraux.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 mai 1789.] ÉTATS GÉNÉRAUX. Séance du samedi 30 mai 1789. COMMUNES. M. le Doyen informe l’Assemblée qu’il a écrit à M. le garde des sceaux pour le prier de demander au 'Roi l’heure à laquelle la députation sera admise; il donne lecture de la réponse de M. le garde des sceaux, qui lui fait savoir que Sa Ma-'esté étant au moment de partir, ne peut recevoir a députation des communes, et qu’elle fixera le jour et l’heure où elle voudra la recevoir ; qu’à l’égard des conférences, attendu que la délibération des communes a été prolongée jusqu’à hier au soir, elles ont été remises à aujourd’hui sur les six heures du soir. Cette lettre donne lieu à plusieurs députés de rappeler que le second amendement adopté le 29 porte ces mots : « Reprendredes conférences après une députation au Roi. » Ils observent que la conférence étant pour ce soir, la résolution ne sera pas exécutée, puisque les commissaires se trouveront en présence avant la députation. Il s’élève une contestation sur l’énoncé de l’amendement. Un grand nombre de membres soutiennent qu’il ne porte pas le mot après, mais le mot avec. On ne peut constater le fait avec certitude, attendu qu’il n’y a au bureau ni registre ni journal. On veut recourir aux notes de divers députés ; mais il y a de la dissemblance. Le marquis de Rostaing. Pour concilier tout, je demande qu’on reprenne les conférences ce soir et qu’on ne les ferme qu'après que Sa Majesté aura recula députation des communes. — Adopté. On nomme une députation pour porter au clergé l’arrêté pris hier. M. le Doyen lit le projet de discours que la députation adressera au Roi. L’Assemblée s’ajourne à lundi 1er juin. Adresse au Roi. « Sire, depuis longtemps les députés de vos fidèles communes auraient présenté solennellement à Votre Majesté le respectueux témoignage de leur reconnaissance pour la convocation des États généraux, si leurs pouvoirs avaient été vérifiés. « Us le seraient si la noblesse avait cessé d’élever des obstacles. * Dans la plus vive impatience, ils attendent l’instant de cette vérification pour vous offrir un hommage plus éclatant de leur amour pour votre personne sacrée, pour son auguste famille, et de leur dévouement aux intérêts du monarque inséparables de ceux de la nation. « La sollicitude qu’inspire à Votre Majesté l’inaction des Etats généraux est une nouvelle preuve du désir qui l’anime de faire le bonheur de la France. « Affligés de cette funeste inaction,- les députés des communes ont tenté tous les moyens de déterminer, ceux du clergé et de la noblesse à se réunir pour constituer l’Assemblée nationale. « Mais la noblesse ayant exprimé de nouveau la résolution de maintenir la vérification des pouvoirs faite séparément, les conférences concilia-toires entamées sur cette importante question se trouvaient terminées. < Votre Majesté a désiré qu’elles fussent reprises en présence de M. le garde des sceaux et des commissaires que vous avez nommés. « Les députés des communes, certains que, sous un prince qui veut être restaurateur de la France, la liberté de l’Assemblée nationale ne peut être en danger se sont erapres-és de se référer au désir qu’elle leur a fait connaître; ils sont bien convaincus que le compte exact de ses conférences, mis sous ses yeux, ne lui laissera voir dans les motifs qui nous dirigent que les principes de la justice et de la raison. « Sire, vos fidèles communes n’oublieront jamais ce qu’elles doivent à leur Roi ; jamais elles n’oublieront cette alliance naturelle du trône et de peuple contre les diverses aristocraties dont le pouvoir ne saurait s’établir que sur la ruine de l’autorité royale et de la félicité publi que. « Le peuple français, qui se fit gloire dans tous les temps de chérir ses rois, sera toujours prêt à verser son sang et à prodiguer ses biens pour soutenir les vrais principes de la monachie. « Dès le premier instant où les instructions que ses députés ont reçues leur permettront de porter un vœu national, vous jugerez, Sire, si les représentants de vos corn runes ne seront pas les plus empressés de vos sujets à maintenir les droits, l’honneur et la dignité du trône, à consolider les engagements publics et à rétablir le crédit de la nation. * Vous reconnaîtrez aussi qu’ils ne seront pas moins justes envers leurs concitoyens de toutes les classes que dévoués à Votre Majesté. » Conférences en présence des commissaires du Roi. Les commissaires nommés précédemment par les députés du clergé, par ceux de la noblesse et par ceux des communes, chargés de conférer de nouveau en présence de ceux choisis par le Roi, sur les moyens de conciliation relatifs à la vérification des pouvoirs, se réunissent le 30 mai à six heures du soir en l’hôtel de la chancellerie, à Versailles, avec M. le garde des sceaux, MM. le duc de Nivernois, de la Michodière, d’Ormesson, Vidaud de la Tour, de Chaumont de la Galaisière, le comte de Montmorin, Laurent de Villedeuil, le comte de la Luzerne, le comte de Puységur, le comte de Saint-Priest, Necker et Valdec de Lessart, nommés par le Roi. La séance est ouverte par M. le garde des sceaux. Il expose la situation respective où se trouvent les trois ordres, témoigne le désir qu’a Sa Majesté de les voir se porter à des ouvertures de conciliation et demande si l’on va procéder à l’examen de ces ouvertures ou si l’on a encore à discuter les principes. Un des membres du clergé demande d’être entendu sur un plan de conciliation ; mais il paraît à plusieurs de MM. les commissaires qu’avant de procéder à In conciliation, il est convenable de discuter les principes et les fait0. M. le comte d’Antraigues déclare que les députés de la noblesse n’ont pu se conduire autrement qu’ils ne le font. A l’appui de cetîe proposition, il lit un mémoire dont voici le précis : « Les procès-verbaux des Etats généraux de