SÉANCE DU 15 FRUCTIDOR AN II (1er SEPTEMBRE 1794) - N“ 21-22 173 Paris], rendus hier à Grenelle où un incendie s’était manifesté, y ont développé tous leurs soins et leur zèle; qu’ils ont passé la nuit pour distribuer aux familles des malheureuses victimes qui ont péri dans cet incendie, la somme de 11 400 L sur celle de 12 000 L qui leur avait été délivrée à cet effet par le comité de Salut public. La Convention nationale décrète qu’il sera fait mention au procès-verbal de la conduite des membres du district du Bourg-l’Egalité (37). 22 Un adjudant-général et un secrétaire de la commission des représentants du peuple à l’armée du Nord et de Sambre-et-Meuse se présentent à la barre et remettent à la Convention onze drapeaux pris sur l’ennemi à Valenciennes : ils rendent compte du bon esprit qui règne dans l’armée, qui brûle de voler à de nouvelles victoires. La Convention nationale les admet aux honneurs de la séance. Le président annonce que le rapporteur du comité de Salut public réclame la parole, et que les drapeaux pris sur les Hollandais et Autrichiens à Valenciennes et au Quesnoy, vont être présentés par un officier de l’armée. Les citoyens Boyer, aide de camp du général de division Schérer, commandant l’armée de siège, et Lecamus, secrétaire du représentant Lacoste, se présentent à la barre et remettent les 11 drapeaux pris sur l’ennemi par les troupes de la République à Valenciennes et font connaître l’esprit public qui règne dans l’armée qui ne respire que de voler à de nouveaux succès, pour assurer à jamais le triomphe de la République. Ils sont accueillis par des transports de joie et de nombreux applaudissemens (38). Le citoyen Boyer, à la barre s’exprime ainsi : Citoyens Représentans, Envoyés par les représentans du peuple et le général commandant en chef l’armée de siège, pour vous offrir les drapeaux pris par les républicains sur les garnisons autrichiennes et hollandaises du Quesnoy et de Valenciennes, nous nous empressons de les déposer dans votre sein. Nous ne vous parlerons pas des détails sur la reddition de ces places, car vos collègues sont occupés à les recueillir pour vous en faire un rapport général. Interprète des sentimens qui animent nos frères d’armes composant l’armée de siège, nous vous répétons que nous avons juré de vaincre ou de mourir; mais dans cette circonstance, nous avons promis de vaincre, et nous le tiendrons (on applaudit). (37) P.-V., XLIV, 276. C 318, pi. 1282, p. 9, minute signée de Carrier. Décret non mentionné dans C*Il20, 15 fruct. Moniteur. XXI, 654; Débats, n° 712, 276; J. Fr., n° 707; Gazette Fr., n° 975. (38) C 318, pl. 1282, p. 34, minute signée de Bentabole. Le président. Ce n’est point en vain que nous avons juré de vivre libres; le sol de la République est purgé des brigands qui le dévastaient, et qui nous apportaient de nouveaux fers. Les rois vaincus et humiliés frémissent et s’enfuient devant le drapeau tricolore. Braves républicains, qu’il est agréable pour les représentans du peuple, d’accueillir au milieu d’eux, des braves qui ont contribué aux éclatantes victoires que vous annoncez. Vous allez redire à vos frères d’armes, que vous nous avez vus, abjurant toute autre passion que celle du bien public qui nous dévore, marcher comme eux au pas de charge vers le but commun, l’affermissement de la liberté et le bonheur de tous les citoyens (applaudissements). TREILHARD. Citoyens, le comité de Salut public m’a chargé de vous donner connaissance de la lettre suivante : Schérer, général de division, commandant l’armée du siège sous Valenciennes et Condé, aux citoyens représentants composant le comité de Salut public. Au quartier général d’Onnaing, ce 18 fructidor l’an 2e de la République, une et indivisible. Citoyens, représentans, En vous envoyant les drapeaux pris aux garnisons du Quesnoy et de Valenciennes, je m’empresse de vous annoncer que Condé a subi, à l’heure prescrite, les conditions de la capitulation que vous m’avez ordonné de lui imposer. La terreur a précédé la marche des armées victorieuses de la République. A ma première sommation, Condé s’est rendu, 1 065 hommes de garnison ont déposé leurs armes, et se sont rendus prisonniers de guerre; nous avons trouvé dans la place, cent soixante-une bouches à feu, six mille fusils, sans compter ceux de la garnison, trois cent milles livres de poudre, cent mille boulets, bombes et obus, quinze cent mille cartouches, six cent mille livres de plomb, des munitions pour six mois, la place, dans le meilleur état possible, fournie de casemates pour une garnison beaucoup plus nombreuse que celle qui y existe. Le territoire de la République ne supporte plus d’esclaves : trente bataillons et quinze escadrons, vous demandent des ordres, pour voler à de nouveaux succès. Salut et fraternité. Signé SCHERER Cette lettre excite les plus vifs applaudissements (39). Un membre fait, au nom du comité de Salut public, le rapport de la prise de Valenciennes, ainsi que des nouvelles prises faites en mer. La Convention en décrète l’insertion au bulletin (40). (39) Débats, n° 712, 259. Moniteur, XXI, 648; M. U., XLIII, 252-253; J. Mont., n° 127; C. Eg., n° 744; J. S.-Culottes, n° 564; Ann. Patr., n° 609; Ann. R.F., n° 273; Rép., n° 256; J. Fr., n° 707; F. de la Républ., n° 425; Gazette Fr., n° 975; J. Univ., n° 1742. (40) P.-V., XLIV, 276. 174 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Bréard a annoncé les prises suivantes : Courrier du 10 fructidor Prises entrées à Lorient Un navire chargé de lin, allant en Portugal, pris par la frégate La Résolue. Un navire anglais de 250 tonneaux, chargé de diverses marchandises pour la traite des noirs, pris par la frégate La Fraternité. Idem à Brest. Un navire anglais de 180 tonneaux chargé de sucre, coton et rhum, pris par la frégate La Dryade. Prise faite par la frégate l’Agricole. Un bâtiment anglais chargé de charbon de terre, cuivre, peaux, saumons et autres marchandises. Courrier du 11 fructidor Prises entrées à Brest. Un brick anglais de 180 tonneaux chargé de cables, toile et chandelles, pris par le cutter Les Trois Couleurs. Un brick de 100 tonneaux chargé de chanvre, allant au Portugal, pris par le même. Un bâtiment de 95 tonneaux, chargé de blé pour Barcelonne, pris par le même. Un dit de 150 tonneaux chargé de fer et planches, allant au Portugal, pris par le même. Courrier du 13 fructidor Prises entrées à Lorient. Un brick anglais de 100 tonneaux, chargé d’eau-de-vie et de vin. Un brick de 180 tonneaux, chargé d’huile d’olive; ces deux bâtiments pris par La Surveillante. Un navire de 150 tonneaux, chargé de brai et goudron pour l’Espagne, pris par le cutter Le Courier. Idem, à Rochefort. Un bâtiment anglais de 400 tonneaux, chargé de tabac, pris par la frégate La Concorde. Un bâtiment de 78 tonneaux, chargé de saumons salés, 150 caisses de fer blanc, fayence et charbon de terre, pris par l’aviso L’Eveillé. Idem, à Port-Malo. Un navire anglais de 500 tonneaux, chargé de bled et de farine, pris par la corvette La Surprise (41). 23 La Convention nationale, sur le rapport du comité de Salut public, et après avoir entendu la lecture de Padresse présentée par les soldats et officiers de l’armée de la Moselle, décrète que cette adresse sera im-(41) Bull., 15 fruct.; Débats, n° 713, 285-286; M. U., XLII, 158-159; J. Mont., n° 127; C. Eg., n° 745; J. S.-Culottes, n° 564; Ann. Patr., n° 609; Rép., n° 256; J. Fr., n° 707; F. de la Républ., n° 425; Gazette Fr., n° 975; J. Univ., n° 1743. primée, insérée au bulletin, et envoyée à toutes les armées de la République (42). [Les soldats de l’armée de Moselle à la Convention nationale] (43). Représentans du Peuple, Qu’elle est belle la victoire que vous avez remportée dans la journée du 9 au 10 thermidor ! Encore une fois le peuple a donc été sauvé par votre courage, par votre constante énergie. Quoi ! Jusques dans le sénat, un tyran osa paroître et menacer la liberté ! Il n’est plus, ses complices ont disparu avec lui : périsse ainsi quiconque tentera de toucher à l’indépendance nationale, et d’usurper le pouvoir qui n’appartient qu’au peuple ! Poursuivez sans relâche les successeurs, les apologistes, les imitateurs de ces nouveaux tyrans; vous ne cesserez de bien mériter de la patrie; nous disons plus, vous mériterez bien du monde entier. Quand à nous, citoyens législateurs, nous vous déclarons que nous sommes décidés à combattre, jusqu’à la mort, les ennemis extérieurs. Nous ne servirons que la liberté et l’égalité; nous ne reconnoîtrons, pour première autorité, que la Convention nationale; nous n’aurons qu’elle pour ralliement, et les lois de la République une et indivisible, sont les seules auxquelles nous voulons obéir. Voilà nos vœux, voilà nos sermens. Suivent les signatures. Cette adresse est vivement applaudie. 24 Un membre du comité de Salut public fait, au nom de ce comité et de celui de Sûreté générale, un rapport sur l’événement de l’explosion de la poudrerie de Grenelle. TREILHARD : Un jour de deuil vient se mêler à nos jours de triomphe : l’instant où nous apprenons que le sol de la République est purgé des hordes ennemies éclaire un grand désastre, l’explosion de la poudrerie de Grenelle. Faut-il attribuer cet événement à l’imprudence ? Est-il l’effet du plus horrible des complots ? Si, d’un côté, les accidents trop communs dans les ateliers où se prépare la poudre, l’immensité de l’établissement que nous regrettons, la grande quantité d’ouvriers qui y sont employés, semblent nous permettrent d’accuser le sort de ce malheur, d’un autre côté, l’active perfidie qui nous poursuit et qui nous enveloppe nous donne le droit de tout craindre et de tout soupçonner. Les comités, dont je suis l’organe, veillent sans cesse pour percer ce terrible mystère. Ils écoutent avec une attention sévère tout ce qui (42) P.-V., XLIV, 276. Décret n° 10 671. Rapporteur : Treilhard. (43) C 318, pl. 1282, p. 10-11, minute signée de Treilhard. Bull., 15 fruct.; Débats, n° 712, 277-278; M. U., XLIII, 252; J. Mont., n° 127; C. Eg., n° 744; Ann. Patr., n° 609; Rép., n° 256; J. Fr., n° 708; F. de la Républ., n° 425.