[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]3 juillet 1790.] 691 M. Charles de Lameth demande la parole ; au milieu des murmures dont l’Assemblée est agitée, il ne peut parvenir à se faire entendre, et la discussion est fermée. M. Muguet demande la parole. Il ne peut l’obtenir. M. le Président annonce que M. Muguet a réclamé pour proposer qu’un ofiicier de chaque grade, parmi les officiers de l’escadre, accompagne M. d’Albert. Après des agitations très longues et très tumultueuses, la proposition de M. Nompère de Cham-pagny est mise aux voix et décrétée à une grande majorité. M . le Président. Voici le résultat du scrutin qui a eu lieu aujourd’hui pourl 'élection du président et de trois secrétaires : M. de Bonnay .................... 306 voix. M. de Menou ..................... 188 » M. de La Rochefoucauld ........... 187 » M. de Gazalès .................... 62 » Voix perdues .................... 17 » Total ....... 760 voix. Personne n’ayant obtenu la majorité absolue, il y a lieu de procéder à un nouveau scrutin. Pour les secrétaires, les voix se sont réparties de la manière suivante: M. Dupont (de Nemours) .......... 402 voix. M. Garat, l’aîné ......... ......... 252 » M. Regnaud (deSaint-Jean-d’Angély) 2i2 » Je les proclame secrétaires à la place de MM. de Pardieu, Gourdan et Dumouchel, secrétaires sortants. L’ordre du jour est le rapport de l’affaire de Haguenau. M. Victor de Broglie, au nom du comité des rapports. La ville de Haguenau était autrefois gouvernée par des magistrats qui remplissaient tout à la fois les fonctions déjugés et d’administrateurs. Les officiers municipaux nommés en 1789 exigent les comptes de ces magistrats; l’exercice de ce devoir parut un crime; les officiers municipaux furent enlevés par la maréchaussée et menacés d’un jugement de mort. Ils ont été élargis, en vertu d’un décret de l'Assemblée nationale, sur leur simple caution juratoire. Lors de la formation de la municipalité, établie par la Constitution, les mêmes officiers municipaux ont été nommés. Ils se sont occupés de nouveau de la vérification des comptes. Ils ont reconnu que, depuis 1785, il n’en avait été rendu aucun; qu’il y avait dans la caisse un déficit de 200,000 francs, et qu’on avait fait des emprunts pour 2,000,000. Les anciens administrateurs ont pris, en partie, la fuite, et le receveur a fait l’abandon de ses biens. Sur la réquisition du procureur de la commune, un décret permit la saisie sur les anciens administrateurs, déclarés solidaires, qui interjetèrent appel au conseil souverain de Colmar. Ce tribunal donna mainlevée provisoire des saisies, et motiva son arrêt d’une manière extrêmement injurieuse aux officiers municipaux, et cet arrêt fut répandu avec profusion. Les anciens administrateurs sont revenus à Haguenau: dès ce moment, le désordrea commencé. Ils sont parvenus à faire nommer l’un d’eux administrateur du département. Tels sont les faits antérieurs à l’événement qui fait l’objet du rapport. La mauvaise conduite du régiment de Salm ayant obligé à le faire sortir de cette ville, le peuple, persuadé que le ministre n’enverrait plus de garnison à Haguenau, effrayé par la perte des avantages qu’il retirait de la consommation des troupes, et enivré par les malintentionnés, se porte en foule à la maison commune et demande à grands cris le rappel du régiment de Salm. Sur le refus de la municipalité, l’hôtel de ville est attaqué, le greffe enfoncé et pillé, et les officiers municipaux menacés. Le lendemain les séditieux ont formé une nouvelle garde nationale ; ils se sont emparés de tous les postes, et ils sont maîtres de la ville. — La municipalité fait plusieurs demandes qui sont prises en considération dans le décret dont le projet va être lu. Ce récit prouve assez la nécessité de les accueillir. M. Victor de Broglie lit ce projet de décret, qui est adopté en ces termes : « L’ Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, et avoir examiné les pièces qui constatent: « 1° Les difficultés qui se sont élevées entre la nouvelle municipalité de Haguenau et les anciens magistrats de cette ville; « 2° La nullité de l’élection du sieur Schwendt, administrateur comptable, à la place de membre du département du Bas-Rhin; « 3° Les troubles qui ont eu lieu les 16 et 17 de ce mois dans la ville de Haguenau, et les violences qui ont été exercées contre les officiers municipaux de cette ville; « 4° L’illégalité de la formation de la nouvelle milice nationale de Haguenau; « Considérant que le maintien de l’ordre public est particulièrement intéressé au libre exercice des fonctions attribuées aux officiers municipaux, au respect porté à ceux qui les exercent, et à la plus parfaite soumission de tous les citoyens français, aux décrets émanés du Corps législatif acceptés et sanctionnés par le roi, a décrété et décrète : Art. 1er. « Que son président se retirera par devers le roi, à l’effet de supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour qu’il soit informé, sans aucun retard, des troubles qui ont été excités dans la ville de Haguenau, nés violences qui ont été commises contre les officiers municipaux, ainsi que de l’enlèvement des papiers lors du pillage du greffe, et pour que les auteurs, fauteurs et complices desdits excès soient poursuivis, jugés et punis suivant la rigueur des lois. Art. 2. « Qu’à l’effet de mettre les officiers municipaux à l’abri de toute violence ultérieure, et de leur assurer le libre et paisible exercice des fonctions qui leur sont confiées, le roi sera également supplié d’ordonner qu’il soit envoyé à Haguenau un régiment de cavalerie française. Art. 3. « Que le directoire du département du Bas-Rhin, auquel l’audition des comptes des ci-devant administrateurs de la ville de Haguenau est déférée par les décrets, et autorisé, pour assurer les intérêts de la commune, à permettre toutes saisies et arrêts provisoires qui pourront être requis. « Déclare, en outre, l’Assemblée nationale: « 1° Que l’élection du sieur Schwendt à la place de membre du département du Bas-Rhin est nulle, comme contraire à l’article 2 des décrets des 20, 23 mars et 19 avril derniers, et qu’en