ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 18 frimaire an il [Convention nationale.] de leur part, pour pouvoir attaquer et détruire encore ce certificat de civisme que je tiens du conseil général de la commune, à l’unanimité et par acclamation. Moins de six semaines après la délivrance de ce certificat, pour le bon plaisir et le salut de l’homme à rebours du bien, on a entrepris de me noircir par des faits aussi ineptes que faux et controuvés, par des rêveries d’artifice, qui dateraient d’un ou de plusieurs mois auparavant, s’ils n’étaient imposteurs, et je le demande encore, si de tels moyens et d’aussi pitoyables ressources prouvent autre chose, que la haine, la passion, et le délire de ceux qui se le permettent. Je vais donc terminer ces observations déjà trop longues, et ce sera pour faire remarquer encore, que c’était précisément et uniquement, comme mesure de sûreté générale, qu’on avait mis à la discrétion des commissaires envoyés dans les départements, le pouvoir de mettre en état d’arrestation les malveillants qui, par leurs intrigues et leurs menées, se seraient opposés au recrutement, et d’interdire ou de suspendre ceux des fonctionnaires publics qui ne seraient pas dans le sens de la Révolution. Il fallait donc, pour me suspendre, moi pro¬ cureur syndic, et pour que cet acte de rigueur importât réellement au salut de l’Etat, il fallait dis -je, que j’eusse conspiré contre la République ou trahi la patrie; il fallait au moins que je fusse convaincu, ou de malversation, ou de prévari¬ cation ou de négligence dans les fonctions de mon ministère; il fallait enfin, que les preuves de mes erreurs ou de mes écrits, fussent prises des actes mêmes de mon administration, et jus¬ tifiées, soit par le directoire du district auprès duquel j’avais opéré, soit par l’avis des adminis¬ trateurs du département, qui avaient sur moi la surveillance immédiate. Or il résulte de la dénonciation portée contre moi, et de ces motifs créés par 1a. malveillance la plus acharnée, qui ont servi de prétexte à ma suspension, qu’il n’en est aucun d’assez grave par sa nature, pour faire soupçonner en moi le caractère de contre révolutionnaire ou pour me faire regarder comme un fonctionnaire public prévaricateur. Il n’est pas moins constant que tous ces faits et motifs sont autant de calom¬ nies démenties par les pièces les plus authen¬ tiques, que j’ai jointes à mon mémoire... Il est de même encore évident, qu’au lieu de consulter dans les actes de mon administration, les preuves qui auraient été nécessaires pour me frapper d’interdiction, on s’en est rapporté uni¬ quement aux clameurs de gens suspects et froissés même par la surveillance de mon minis¬ tère; enfin, au lieu de consulter et le directoire du district, et le directoire du département, sur mon caractère moral et politique, les commis¬ saires au contraire ont eu l’impudeur de fouler aux pieds leurs avis, de repousser leurs repré¬ sentations et arrêtés en ma faveur, et de rester sourds aux cris de l’indignation qui s’élevèrent à l’instant contre ma suspension. Il est donc certain, que je n’étais pas de ces hommes que l’activité des commissaires devait atteindre; et que leur décision à mon égard, est un acte manifeste de partialité et d’injustice, plutôt qu’une mesure de sûreté et de nécessité. Sans doute, j’aurais été traité moins inhumai¬ nement, si j’eusse été réellement coupable ! je vois tous les jours des administrateurs sus¬ pects, même en rébellion ouverte, obtenir aisé-( 8 décembre 4793 ment leur grâce; il leur suffit d’un désaveu, d une simple rétractation et de quelques marques de repentir, pour que la Convention usant envers eux d’une indulgence paternelle, jette un voile sur leurs écarts et s’empresse de les réintégrer dans leurs fonctions. Mais moi, sans crime, sans reproche et sans remord, pour¬ suivi par des malveillants, en proie à leurs calomnies, victime de leurs intrigues, je reste courbé depuis trois mois sous le poids d’une suspension arbitraire, je n’ai pu encore obtenir ma réhabilitation!... et si je pouvais en croire au propos fanfaron du député Michaud, je ne parviendrais jamais à faire entendre ma voix dans le temple des lois !... Mais non, citoyens législateurs, vous ne consa¬ crerez pas une telle injustice. Vous êtes les hommes de la Montagne, qui vengez également la patrie de ses traîtres et de ses tyrans. Mais l’homme probe et constamment civique, mais le fonctionnaire public qui ne sait penser et agir que par la loi et pour le salut de la loi; mais un père de famille qui vous montre trois de ses fils, consacrés comme lui à la défense de la Répu¬ blique; la loi lui assure, et vous lui accorderez sûrement, toute justice et toute protection. J’ai donc droit de demander comme je l’qj déjà fait par mon premier mémoire. 1° Que la dénonciation contre moi, soit déclarée fausse et calomnieuse; 2° Que l’arrêté de ma suspension soit révoqué; 3° Que ma réhabilitation dans mes fonctions, soit immédiatement prononcée; 4° Enfin, que tous mes droits et actions me soient _ réservés contre mes dénonciateurs. Paris, ce 18 août, l’an II de la République française une et indivisible. Boissard, 'procureur syndic du district de Pontarlier, département du Doubs. Pièce n° 10 (1). Précis justificatif pour le citoyen Boissard, procureur syndic du district de Pontarlier. Michaud et Siblot, députés à la Convention nationale, commissaires envoyés par elle, dans le département du Doubs, ont prononoé contre moi, le 25 avril dernier, la suspension de mes fonctions. La mission de ces députés, avait un autre objet que de prononcer contre les administra¬ teurs; ils étaient venus dans le département du Doubs pour encourager et presser le recrutement, décrété à cette époque, pour obvier, par une augmentation imposante de forces, aux consé¬ quences de la trahison de Dumouriez. En voyant une suspension de mes fonctions prononcée par des Montagnards, venus pour tout autre chose, des hommes précipités dans leurs jugements, s’imagineront, sans doute, que j’ai dû être accusé d’avoir apporté quelque obs¬ tacle, ou mis au moins de la négligence à l’effec-tuation du recrutement. Cependant, Michaud, celui des deux qui est mon persécuteur direct et véritable, cependant, dis-je, Michaud n’a point osé articuler ce prétexte. Il était trop bien prouvé que c’était grâce à mon activité et à mes soins, (1) Archives nationales , carton F7 4606, dossier Boissard. 168 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j « que, lorsque ce député arriva à Besançon le con¬ tingent de Pontarlier était déjà fourni, équipé armé et en marche depuis quinzaine. En bon et zélé représentant du peuple, Mi-chaud, m’aurait dû des témoignages honorables, auprès de la Convention nationale, sur cette diligence. Mais il m’a, au contraire, frappé d’une sorte d’anathème, tout absurde qu’il est, il donne aux bonnes gens qui voient toujours la raison où est le pouvoir, lieu de croire que j’ai marché dans des voies opposées diamétralement à celles de la Révolution. A cet égard, je défie Michaud d’alléguer même le moindre prétexte plau¬ sible. Dans les écrits qu’il m’a réduit à publier, et dont je vais tracer le résumé, j’ai complètement prouvé que Michaud a perfidement et maligne¬ ment exercé contre moi ses vengeances, ses haines, et celles de ses parents et amis, à l’égard de qui je n’avais, moi, fait autre chose que rem¬ plir strictement mes devoirs. Parmi les hommes dont le député Michaud a épousé les ressentiments, je veux dire, parmi les fanatiques dont j’ai contredit officiellement les menées, parmi les aristocrates dont j’ai dérangé les mesures, parmi les royalistes dont j’ai décon¬ certé les intrigues, parmi les agioteurs dont j’ai dérouté l’active cupidité, parmi les agitateurs dont j’ai étouffé les indiscrètes clameurs, s’est trouvé un M. Lerebours. C’es� autour de celui-ci que tous se sont rangés; et c’est réellement à lui que le commissaire national Michaud m’a immolé ! Lerebours était ci-devant contrôleur des postes. Longtemps avant que je ne fusse procu¬ reur syndic du district, Lerebours s’était attiré l’animadversion de l’administration, soit par sa correspondance avec le* ennemis du dehors, soit par ses rapports avec les fanatiques dont plu¬ sieurs sont ses parents, et autres, sur la frontière ; soit encore par ses accaparements et par son agio¬ tage du numéraire. Il n’a été destitué d’un emploi dont il abu¬ sait, que parce qu’il n’a pu réussir à faire consa¬ crer par le département et le district le certificat de civisme qui lui a été accordé par la municipa¬ lité ; et c’est encore par la raison que Lerebours, à tant d’égards, était devenu plus que suspect, que le district, lorsqu’il a ordonné un désarme¬ ment supplétif, crut ne pouvoir se dispenser, d’y comprendre ce particulier. Comme procureur syndic du district, j’ai été expressément chargé de l’exécution de ce désarmement, en même temps que je me suis vu forcé de vaincre à cet égard, la résistance de la municipalité, Lerebours de son côté n’a omis ni manœuvres, ni intrigues, pour parvenir à l’em¬ pêcher. Revêtu de son habit de capitaine des grena¬ diers de la garde nationale, Lerebours se rendit auprès de sa troupe armée. A la tête de celle-ci, Lerebours osa publiquement insulter et menacer du geste et de la voix les membres du directoire du district en séance permanente ! Forcés alors de dresser procès-verbal d’un tel excès d’audace, et dans la vue de prévenir le soulèvement dont il était possible que cette conduite fut le signal, ces administrateurs prononcèrent, et firent effec¬ tuer l’arrestation de Lerebours. Le procès-verbal de cette arrestation, notifié à Lerebours et signé de lui, fut aussitôt envoyé au département. Et cette administration supé¬ rieure, en pleine et due connaissance de cause, donna l’ordre que Lerebours serait dénoncé et poursuivi, par moi, en ma qualité de procureur syndic, par-devant le tribunal de paix de Pontar¬ lier. Les choses en étaient à ce point, quand les deux députés Michaud et Siblot se trouvèrent de retour à Besançon. Lerebours s’y rendit; il y attira plusieurs de ses partisans et affidés, parmi les membres de la commune, plusieurs de ses dévoués dans la Société populaire. Tous ceux-ci réussirent sans peine à captiver, à sub - juguer la bienveillance des deux représentants. Tous leurs efforts se réunirent pour soustraire le coryphée de l’une et l’ami de tous, aux efforts de la loi du 19 mars, loi qui le soumettait à une pro¬ cédure criminelle; tout fut mis en œuvre pour lui faire rendre ses armes ; et pour mieux réussir, il devenait important de persuader que seul j’étais l’auteur des poursuites et désarmement dont il s’agissait, et de me rendre ainsi répréhen¬ sible aux yeux des commissaires. Ainsi prévenus, ceux-ci arrivent à Pontarlier. Aussitôt, ils se font remettre d’autorité, l’infor¬ mation faite contre Lerebours. Quoique un très grand nombre de témoins déposassent conformé¬ ment au procès-verbal du conseil général du district, dressé lui-même, pour ainsi dire, ins-tanti et flagrante delicto, les commissaires prirent, néanmoins, le 25 avril, un arrêté par lequel, annulant toute la procédure faite contre cet indi¬ vidu, ils prononcèrent son absolution plénière, ordonnèrent que les armes lui seraient rendues. Mais par l’effet d’une distraction que je laisse à la sagesse de la Convention nationale le soin de bien saisir, ils ne contraignirent point le district à révoquer l’improbation du certificat de civisme que ce dernier avait prononcée. Peut-être sans la courageuse résistance de cette administration, cette clause eut-elle servi à sauver l’inconsé¬ quence d’une décision dont l’objet était manifes¬ tement, non de faire justice, mais de m’atteindre, sans le moindre respect pour ses principes et ses règles. Contents de les avoir toutes violées dans ce premier arrêté contradictoire, le même jour, les commissaires en consacrèrent l’absurdité par un second arrêté qui me suspend, moi, moi pro¬ cureur syndic de ce même district ! de mes fonc¬ tions, pour avoir acquiescé à ce que ce district a bien prononcé, puisqu’il n’ont osé toucher à sa décision. Qu’on en juge par cet arrêté même. « Au nom de la République, « Claude -François -Bruno Siblot et Jean -Bap¬ tiste Michaud, représentants du peuple, députés de la Convention nationale, près les départe¬ ments du Doubs et de la Haute-Saône. « Sur la dénonciation qui nous a été faite par le conseil général de la commune et la Société des Amis de la Liberté et de l’Égalité de la ville de Pontarlier, que le citoyen Bois-sard, procureur syndic du district, n’a cessé jusqu’ici d’y exciter les divisions; que dans ses fonctions publiques on l’a vu constamment guidé par l’arbitraire et les passions plutôt que par l’intérêt public; que, non content d’oppri¬ mer ses concitoyens on l’a vu aussi maltraiter plusieurs étrangers; que dans le temps qu’il exerçait les fonctions de procureur de la com¬ mune de ladite ville, il s’est permis, en faveur de plusieurs personnes suspectes, des ménage¬ ments indignes d’un fonctionnaire public; que depuis qu’il est procureur syndic, il a rompu les liens d’amitié et de fraternité qui existaient entre cette administration et la municipalité; I Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. \ « fnma.re an fl 169 L 1 } 8 décembre 1/93 que contre le prescrit de la loi concernant le désarmement des personnes suspectes, et qui ordonne que les districts et municipalités seront chargés de les faire exécuter sur leur responsabi¬ lité respective, il a exigé que ladite munici¬ palité fît exécuter dans ses murs un désarme¬ ment ordonné par le district seul. Enfin, que ledit citoyen Boissard a un frère émigré dont les principes sont entièrement contraires au nouvel ordre des choses, ce qui le rend de plus en plus suspect à tous les bons citoyens. « Nous, lesdits commissaires, considérant qu’il résulte des faits ci-dessus — (oui, s’ils étaient prouvés) — que si le citoyen Boissard exerçait plus longtemps les fonctions de pro¬ cureur syndic du district de Pontarlier, la tranquillité publique pourrait être compromise, non seulement dans cette ville, mais encore dans tout le district, que ses correspondances officielles le mettraient dans le cas d’influencer, avons arrêté et arrêtons, après l’avoir entendu — (le fait est faux) — sur tous chefs d’accu¬ sations portés en ladite dénonciation : « 1° Qu’il demeurera provisoirement sus¬ pendu de ses fonctions de procureur syndic du district. » On vient de voir le texte littéral, c’est-à-dire le tissu de généralités qui sont devenues les prétextes de ma suspension : qu’on se garde bien de croire que ces prétextes sont éclos de la prud’hommie directe de mes deux juges su¬ prêmes, Siblot, le complaisant, et Michaud, le seul vrai prononçant. Non : ces prétextes n’ont été que littéralement, et sans le moindre examen, transcrits de la dénonciation fournie par mes adversaires à ces deux personnages. J’ai amplement démontré, par exposition de faits appuyés de pièces justificatives, dans mes mémoires imprimés, que de toutes les inculpa¬ tions vagues, que de tous les reproches indé¬ terminés qu’on y a fait entrer, il n’en est pas un seul dont l’auguste indolence et la crédulité partiale des deux citoyens commissaires, ne se soient dispensées d’acquérir la preuve, avec la passive dignité qu’aurait pu y mettre la grandeur d’un monseigneur l’intendant de l’abominable régime oppressif des Capet. Voulut-on même exiger de moi que je sup¬ posasse, par respect pour les collègues effectifs des Marat et des Robespierre, la vérité des faits de leur côté : il serait encore vrai qu’il n’en pourrait résulter aucune conséquence réellement assez grave pour pouvoir autoriser sans l’avoir entendu, et sans l’avoir entendu contradictoirement et avec caractère pour l’entendre, la suspension d’un fonctionnaire public républicain. Mais, non seulement j’ai réclamé contre l’arbitraire d’une pareille procédure, quant à la forme, mais au fond et en rectification de faits j’ai démontré, dans mes deux mémoires imprimés, et prouvé par production de pièces jusqu’à satiété, que dis-je ! jusqu’à effroi, aux collègues, rapporteurs désignés, l’absurdité, le mensonge de toutes ces imputations. Je pense donc avoir le droit de renvoyer à ces mémoires détaillés, ces rapporteurs qui n’ont pas rap¬ porté, ces rapporteurs qui n’ont pas même lu ! et pouvoir me dispenser de faire imprimer de nouveau les détails que j’ai déjà imprimés et réimprimés à ce sujet. Si ceux qui doivent me juger veulent bien prendre la peine de fixer leur attention sur les quatre pièces annexées à ce précis, j’ose augu¬ rer qu’ils n’auront pas même besoin do la fatiguer par la lecture de tout le papier, que jusqu’à présent, j’ai fait couvrir, avec vérité mais sans fruit, de caractères. La première de ces pièces est un certificat de civisme, pièce qui m’a été délivrée le 24 février dernier, sans besoin ni sans provocation de ma part, par la même commune de qui quelques intrigants, depuis partisans de Lerebours et de Michaud, m’ont fait, non point perdre, mais suspendre l’affection et l’estime, certificat donné à l’unanimité et par acclamation ! Pièce d’autant plus décisive qu’elle est revêtue des signatures de ceux mêmes qui, six semaines plus tard, et presque le lendemain du désar¬ mement de Lerebours, et des poursuites contre lui, m’ont dénoncé et calomnié. La seconde pièce est l’arrêté pris en conseil général du district, le lendemain de ma sus¬ pension. Cet arrêté, trop long pour pouvoir entrer dans ce précis, offre la réponse la plus formelle et la plus péremptoire à toutes les articulations de faits contenus dans l’arrêté qui me suspend de mes fonctions. C’est la justification la plus détaillée et la plus complète de ma vie privée et de ma vie publique, de ma conduite comme pro¬ cureur de la commune et comme procureur syndic du district. Mes collègues s’y montrent pénétrés de douleur et d’indignation de l’injus¬ tice que Siblot et Michaud m’ont faite; ils n’ont pris cet arrêté que pour réclamer contre. Dans cette vue, ils l’ont adressé au département, à la Convention nationale, longtemps même avant que les commissaires y eussent fait aucun rapport. La troisième pièce est le certificat qui m’a été délivré, le 20 mai dernier, par le conseil général du département, moi étant déjà à Paris, occupé de la poursuite du redressement des torts que m’ont fait les commissaires. Cette pièce porte ce qui suit : « Les administrateurs, composant le conseil « général du département du Doubs et le pro-« eureur général syndic attestent que le « citoyen Boissard, homme de loi, a rempli ses « fonctions de procureur syndic du district de « Pontarlier avec autant d’activité que de « zèle et d’intelligence; que dans tous ses rap-« ports avec l’administration, ils ont toujours « reconnu en lui un citoyen animé pour les « intérêts de la République; qu’il s’est même « porté avec empressement, non seulement à « suivre les affaires qui y étaient relatives, mais « encore a fait lui-même tous les mémoires et « écritures en traitant les objets avec toute la « solidité d’un homme instruit. Enfin, qu’il « est constaté par les contrôles des bataillons de « volontaires, qu’il a trois fils sur les frontières « pour la défense de la patrie; en foi de quoi « ils lui ont délivré le présent, auquel a été « apposé le sceau du départment. » « Fait au conseil à Besançon, à la séance du 20 mai 1793, l’an II de la République fran¬ çaise. « Signé : Roussel-Galle, J. Poete, Jan-son, Dan gel, Morel, Billot, pro¬ cureur général syndic; C. Kilg, Bal-land, Th. Lambert, Gogillot, Ro¬ land, Calamar, Hennier, secrétaire général. » 170 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES-j 'i 70 A cette production, j’ai ajouté deux lettres du procureur général syndic du département, avec qui ma place m’établissait une correspon¬ dance directe et immédiate. Ces deux lettres attestent l’opinion qu’on avait de mes prin¬ cipes et de mes sentiments. On y voit qu’elle était fondée sur mes actions : il est peu de pères de famille, est-il dit dans l’une, et de fonc¬ tionnaires publics qui aient aussi bien mérité que vous de la patrie. Quatrième 'pièce. C’est une adresse à la Convention nationale, de la commune et de la Société populaire de Frasne, chef -lieu de canton dans le district de Pontarlier. Elle annonce jus¬ qu’à quel point les vrais amis de la République ont été indignés de ma suspension. Je ne ferai qu’en rapporter ici le texte : tout commentaire serait superflu. Elle a été envoyée directement à la Convention nationale. « ..... L’amour de la vérité, l’intérêt pu¬ blic et notre devoir nous ordonnent de vous dénoncer les citoyens Siblot et Michaud... comme coupables d’actes contraires à l’équité et à la raison. Loin de repousser et de terrasser les intrigants et les faux amis de la patrie, ils se sont plu à leur donner le plus libre accès pendant leur séjour à Pontarlier; et prêtant une oreille complaisante à leurs insinuations perfides, ils ont inconsidérément suspendu de ses fonctions de procureur syndic, le citoyen Boissard, patriote ardent et sans reproche...; nous vous dénonçons Michaud comme ayant joué à merveille le rôle de satrape à Pontarlier, et comme ayant agi en sens inverse des vrais principes et de l’esprit républicain, pour alté¬ rer les patriotes et peut-être chercher à éteindre le feu sacré du républicanisme qui brûle dans leurs coeurs, en y versant le poison du décourage¬ ment, il a osé nous priver arbitrairement d’un homme qui réunit la confiance de la généralité du district. Nous ne pouvons que réclamer hau¬ tement contre cette suspension inspirée par la haine, l’injustice et l’immoralité. « Qu’un décret de désapprobation à cet égard rende au citoyen Boissard des fonctions auxquelles le vœu du peuple l’a appelé, dans lesquelles il n’a jamais prévariqué, et qu’il a toujours remplies à la satisfaction de ses commettants; l’intérêt public le demande autant que la justice l’exige. » Il serait en mon pouvoir d’accumuler ici les délibérations particulières de nombre d’autres municipalités, réclamantes, toutes unanime¬ ment contre l’injustice commise envers moi par les commissaires. J’en fais ici la remarque parce qu’une des calomnies avancées par eux à l’appui de leur iniquité, a consisté à dire que l’opinion publique est contre moi. A mon tour j’assure que cette opinion, si par là on veut entendre la voix du peuple et non les témoignages des intrigants, est forte¬ ment prononcée contre eux. Ce qui suit est une preuve. « Loin, a dit la Société populaire de Frasne, « loin de repousser et de terrasser les intrigants « et les faux amis de la patrie (les commis-« saires Siblot et Michaud) se sont plu à leur « donner le plus libre accès pendant leur séjour « à Pontarlier; prêtant une oreille complaisante « à leurs insinuations perfides, ils ont inconsi-« dérément suspendu de ses fonctions de pro-« cureur syndic, le citoyen Boissard, patriote « ardent et sans reproche; ils ont agi en sens « inverses des principes et de l’esprit républi-« cain. « Pour attérer les patriotes, et peut-être chér¬ it cher à éteindre le feu sacré du républicanisme « qui brûle dans leurs cœurs et y verser le poi-« son du découragement, Michaud a osé nous « priver arbitrairement d’un homme qui réu-« nit la confiance de la généralité du district. « Nous ne pouvons que réclamer hautement « contre cette suspension inspirée par la haine, « l’injustice et l’immoralité. » Effrayé de son injustice, fort du titre de repré¬ sentant qu’elle dément en sa personne, Michaud a essayé d’accumuler a posteriori, dans ses mains, des procès-verbaux et de suspectes attestations de sa bonne foi, de son patriotisme. Il s’efforce d’en trouver des preuves même jusque dans les faits, gestes et dits (sic) pro¬ consulaires dont il a signalé sa mission pré¬ tendue ! C’est de mes dénonciateurs mêmes qu’il les tient ; c’est de mes dénonciateurs, de leurs affidés, de leurs co -sociétaires, c’est, le dirai-je ! c’est de Lerebours, destitué de son emploi pour avoir causé tous les troubles et tous les désordres qui ont divisé la ville do Pontarlier, que Michaud n’a pas eu honte de les mendier; et pour prix des armes suspectes que sa haine s’est procurées de la part d’un pareil homme, Michaud, oui, Michaud l’a absout et presque canonisé ! C’est cet acte singulier de partialité, dont il m’importe de bien établir le contraste avec le coup de foudre proconsulaire dont ce moderne Verrès m’a atteint. Oui, à côté d’un brouillon, seule cause, susci-tateur unique des zizanies dont il est question, à côté de ce brouillon destitué de sa place, sur procès-verbaux, arrêtés rendus par le district, après une information plus que convaincante, à côté de ce brouillon dont l’incivisme masqué a été manifesté, dont la grâce est une collusion, dont l’absolution est un crime, dont la canoni¬ sation est ou une sottise ou une profonde scé¬ lératesse, à côté, dis-je, de cet homme, Légis¬ lateurs ! républicains ! Ouvrez les yeux et envisagez un citoyen bien connu, un fonction¬ naire public irréprochable, le père d’une famille nombreuse, celui de trois fils volontaires com¬ battant à la frontière, celui d’un autre fils exilé par lui-même de sa maison, parce qu’il fut indiscret dans ses expressions et égaré dans ses pensées, un père de famille qui a repoussé de celle-ci, tout collatéral ennemi de la Révo¬ lution ! etc., etc. Voyez-le, dis-je, courbé depuis quatre mois sous l’arrêté arbitraire, rendu sans preuves, sans audition contradic¬ toire de ses défenses, par Michaud ! Voyez-le, sollicitant sa juste réhabilitation, à Paris, de¬ puis trois mois; songez qu’il a droit à justice autant que Michaud lui-même, ou qu’il n’y a point de République; et qu’il n’y aurait, au contraire, qu’une odieuse et déplorable oli¬ garchie. A Paris ce 2 septembre 1793, l’an II de la République française, une et indivisible. Boissard, procureur syndic du district de Pon¬ tarlier , J. Rutledge, défenseur officieux.