236 [Assemblée nationale.] toujours les plus voisins, l’Assemblée fera, par cette opération simple, taire toutes ces réclamations, toutes ces demandes de districts et d’alternats, et il ne lui restera plus qu’à faire l’application de ses décrets dans l’étendue de ces nouveaux districts et départements. L’Assemblée a déjà tellement senti, Messieurs, l’inconvm et d’avoir dans une même ville deux directoires u’ administration, qu’elle a réuni dans le directoire du département de Paris le directoire de son district. Pourquoi ne ferait-elle pas la même chose? Et dans ce cas, que lui resterait-il à faire? A déclarer que tout citoyen qui aurait été jugé par son directoire de district, s’il était mécontent, appellerait à un des 5 ou 6 districts voisins, faisant alors fonction de département. 11 n’est pas, je crois, Messieurs, nécessaire de proposer en ce moment quelle sera l’organisation des directoires de districts et leurs fonctions; on conçoit que le directoire de chaque district devra être composé de membres des districts voisins, comme il devra lui-même avoir des représentants dans les districts voisins; et alors, il est évident qu’on ne peut rencontrer aucun inconvénient à accorder à chacun de ces districts le droit de s’assembler, tantôt en directoire de district, et tantôt en directoire de département, selon la nature de la question sur laquelle ils auront à se prononcer. On ne pourra contester qu’une telle organisation est absolument dans l’esprit de la Constitution, puisqu’il existe la plus parfaite égalité entre tous les districts. Si l’Assemblée accueille cet avis de ses comités de Constitution territoriale et d’emplacement, ils doivent demander que l'autre section du comité de Constitution dont il est adjoint, vis-à-vis duquel il a pu, peut-être sans sujet, et contre le vœu de l’Assemblée, former un autre comité et dont il eût mieux valu sans doute qu’il ne se séparât point, par les rapports qui doivent exister entre l’organisation du territoire et celle des citoyensqui l’habitent; le comité, dis-je deCons-titution territoriale., et celui d’emplacement, doivent demander que l’autre section du comité de Constitution s’adjoigne à eux, à l’effet de concilier cette nouvelle proposition avec les décrets antérieurs, et qu’il soit, en conséquence, présenté à l’Assemblée nationale un projet de décret conforme à ces dispositions. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CIIABROUD, EX-PRÉSIDENT. Séance du jeudi 19 mai 1791, au soir( 1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. Bonche. Des inconnus, sans aucun titre de créance, forment des onpositions au remboursement des anciens titulaires d’offices, ce qui est aussi contraire aux règles de la justice qu'aux intérêts de l'Etat. Je demande que les opposants aux remboursements soient tenus de faire connaître leurs qualités et leurs litres. (Cette motion est renvoyée au comité de judi-cature.) (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. [19 mai 1791.] M. Charrier, absent par congé depuis le 12 avril dernier, déclare revenir prendre séance à l’Assemblée. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une adresse des membres du directoire du département de l'Aisne ; ils demandent que les électeurs actuellement existants etn’ayant été nommés que depuis une année, soient chargés de la nomination des députés futurs à l’Assemblée nationale. (Cette adresse est renvoyée au comité de Constitution.) Le sieur Reynard , mécanicien, est admis à la barre. M. le Président. M. Reynard, mécanicien, présent à la barre, fait hommage à l’Assemblée d’un travail sur les monnaies; l’objet de ce travail est un moyen.de convertir en monnaie le métal des cloches. L’Assemblée trouve-t-elle bon que sou projet soit renvoyé au comité des monnaies et qu’on lui accorde les honneurs de la séance? (Marques d'assentiment.) (L’Assemblée accorde à M. Reynard les honneurs de la séance et décrète le renvoi de sou projet au comité des Monnaies.) Le sieur Dellecourt, grenadier de la garde nationale, est admis à la barre. M. le Président. M. Dellecourt, grenadier volontaire de la garde nationale, fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage de sa composition intitulé : Les adieux d'un citoyen grenadier ou les dangers d’un zèle outré. (L’Assemblée agrée cet hommage et accorde au sieur Dellecourt les honneurs de la séance.) M. le Président. Je ne sais pas si je dois faire part à l’Assemblée d’une lettre que je reçois; l’auteur prétend avoir trouvé la quadrature du cercle. (Rires. — Non ! non!) M. de Broglie, au nom du comité militaire, présente un projet de décret sur les 62 capitaines attachés aux directions de l'artillerie. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire, décrète : Art. 1er. « Les 62 capitaines qui étaient attachés aux directions de l’artillerie seront conservés; mais il n’y sera fait de remplacement qu’après que leur nombre sera réduit au-dessous de 42. Art. 2. « Les susdits 62 capitaines actuels ne seront susceptibles d’avancement que dans le cas où ils seraient employés à la guerre ; mais les seuls capitaines qui entreront dans cette classe après sa réduction au-dessous de 42 conserveront leur rang pour parvenir au commandement des compagnies, suivant leur tour d’ancienneté. » (Ce décret est adopté.) M. Lanjuinais, au nom du comité ecclésiastique, présente un projet de décret sur la réunion des paroisses de Vendôme et de Montoire. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale décrète : ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 237 [Assemblée naîioaale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 mal 179JL] Art. 1er. « Que les 4 paroisses de la ville de Vendôme, actuellement subsistâmes, sont et demeureront supprimées, et qu’il en sera établi une dans l’église de l’ancienne abbaye, sous l’invocation de la Sainte-Trinité; qu’il sera, en outre, établi une succursale dans l’église de la Madeleine, et deux oratoires; l’un dans la chapelle du grand cimetière, l’autre dans l’ancienne collégiale de Saint-Georges. Art. 2. « Que les 2 paroisses de Montoire sont et demeureront supprimées, et qu’il en sera établi une seule sous l’invocation de Saint-Laurent, dans celle des églises de Montoire qui sera jugée la plus convenable. » (Ce décret est adopté.) M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité ecclésiastique sur les actes et registres qui doivent constater l'état civil des personnes (1). M. T’reillsard, au nom du comité ecclésiastique. La pétition qui vous a été présentée par les individus composant la municipalité de Paris a pour objet de demander une loi qui assure par des formes civiles la notoriété des mariages, des baptêmes et des sépultures des catholiques ou non-catholiques, sans aucune distinction de religion ni de sexe. Tous les citoyens sont égaux devant la loi : elle ne connaît’ point la différence de leur culte, et comme elle les prend tous également sous sa protection, et qu’elle leur garantit à tous la possession paisible de leur état civil, elle doit exiger pour tous les mêmes formalités. Je pense donc que les actes de baptême, de mariage et de sépulture doivent être reçus par des officiers civils, et qu’on doit leur donner le plus grand caractère d’authenticité. Tous les citoyens seront d’ailleurs libres d’ajouter à l’acte civil quelque cérémonie religieuse que ce soit. M. Rewbell. Je prie l’Assemblée nationale d’être bien persuadée, que depuis que je sais penser, jamais une idée fanatique n’est entrée ni dans mon esprit ni dans mon cœur. Mais je crois devoir l’engager à réfléchir à la position où se trouve la France. D’où vous vient la pétition qui vous occupe? Quels sont ces pétitionnaires? Sont-ce des juifs? Sont-ce des chrétiens? ( Murmures : Ce sont des citoyens, ce sont des hommes)... Je ne le sais pas. Seraient-ce des non-conformistes? Je ne sais trop quel nom leur donner. M. Lavie. Les administrateurs du départe-du Haut-Rhin m’ont chargé de vous faire une demande dont l’objet est absolument conforme à celui de la pétition qui vous occupe. M. Rewbell. Je vous somme de montrer cette pétition. J’en ai un double; elle n’est relative qu’aux droits de citoyen actif, et non au mode de constatation de l’état civil. Je suis donc fondé à croire que les individus pour lesquels on vous a fait une pétition, sont des non-conformistes qui ne veulent pas reconnaître les fonctionnaires publics. Or, jene pense pas qu’un non-conformiste (1) Voy. ei-dessus séance du 17 mai 1791, pages 166 et suiv., le rapport et le projet de décret du comité ecclésiastique sur cet objet. puisse se plaindre de l’état actuel des choses. Il ne le gêne pas davantage que les protestants ou les luthériens. Nous avons dans notre département, en Alsace, plusieurs villes où le culte de la religion catholique est le seul public, tandis que la majeure partie des citoyens est luthérienne. Qui est-ce qui baptise? qui est-ce qui enterre? Ce sont les curés catholiques, parce qu’à cet égard ils font la fonction de fonctionnaires publics. Les luthériens n’y ont aucune répugnance par une raison toute simple, c’estqu’ils trouvent le baptême aussi bon, fait par un curé, que par un juge ou un notaire. Il en est de même de l’enterrement : le curé délivre un simple certificat d’inhumation. Ce n’est pas que je veuille contester les principes posés par M. Treilhard et je vais faire à ce sujet une profession de foi qui paraîtra sans doute bien étrange : je vous dirai que ces principes sont sages, mais je les soutiens prématurés. (. Applaudissements .) Pourquoi donner de la consistance à la secte qui veut s’élever ? Attendez, Messieurs, que l’état de vos fonctionnaires publics soit consolidé avant que de leur ravir des fonctions qui, aux yeux du public, leur avaient toujours été jusqu’à présent attribuées. Attendez que cette secte, qui veut naître, s’éteigne d’elle-même sous le poids du ridicule ( Rires à droite; applaudissements à gauche.) parce qu’ils font tant de folies qu’ils ne peuvent pas finir autrement que par s’attirer le mépris public. Mais si, au contraire, vous vous laissez entraîner parque ques pétitionnaires qui veulent, je ne sais pas pourquoi, vendre quelques églises à des non-conformistes, vous leur donnez une existence qu’ils n’auraient jamais sans un ridicule décret. Quand ces prêtres réfractaires.... M. le Président. Mo isieur l’opinant, je vous prie de vous renfermer dans la question. (Non! non! il est dans la question! ) M. Rewbell. Je prie les bons citoyens de cette Assemblée de vouloir bien avoir quelque indulgence pour moi, parce que je ne parle que pour eux. Quand une fois ces gens égarés se seront ravisés, et ils s’en ravisent tous les jours,. .. . (A droite : Au contraire) alors, Messieurs, il n'y aura rien de plus facile que de faire une loi générale, parce qu’alors vous n’aurez plus à craindre qu’on vous reproche de vouloir établir différents partis de la même religion. L’ancien évêque de Langres a fait imprimer un livre quia été dénoncé, dans lequel il espère, pour toute ressource, qu’on prendra le parti qu’on vous propose aujourd’hui. Je pense que M. Treilhard n’a certainement pas concerté ce parti avec lui ; mais moi, qui, malgré ce qu’aient pu dire certaines gens, ai toujours aimé par-dessus tout l’ordre et la tranquillité publique, qui ai toujours détesté les opinions même justes qui pourraient tendre à s’altérer et qui pourraient servir les factieux, je déclare que je regarde comme la perte de la France une discussion pareille à celle qu’on veut établir et je suis persuadé qu’en ce moment une semblable discussion causerait de très grands malheurs. Je demande donc l’ajournement. (Vifs applaudissements.) Plusieurs membres : — Aux voix, l’ajournement ! M. Legrand. Eo ajournant le projet de décret qu’on vous propose, vous écartez les questions