ÜO [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 mars 1790.J péraientêtre utiles à l’Etat dans une carrière glorieuse: voyez ces jeunes filles qui allaient devenir des mères de famille intéressantes; vous leur avez enlevé la ressource d’aller cacher dans un cloître la honte de leur infortune! Quand on veut faire un bien universel et durable, il ne faut pas le composer de maux particuliers. Nous avons assez d’ennemis de nos travaux, diminuûns-en le nombre autant qu’il est en nous. — Je conclus à ce que les assemblées de département soient chargées de prendre des renseignements sur l’état et la fortune de ceux qui possédaient des droits féodaux, et d’envoyer ces détails au comité féodal. ! M. Goupil de Préfeln. Quel était l’état des choses sous la loi ? L’ordonnance de 1669 avait supprimé les péages établis depuis 100 ans : ainsi tout péage dont la création ne remonte pas à 1569 existe contre les dispositions de la loi. La même ordonnance ne reconnaît comme légitimes que les péages onéreux et qui résultent des dépenses faites pour l’utilité publique. Vous avez maintenu cette disposition de la loi ; ainsi tout le monde a dû savoir ce que la loi défendait, et nul ne peut imputer qu’à lui la perte qu’il éprouve par les suppressions que vous avez prononcées. Ce n’est pas sérieusement qu’on vous propose de détourner à son profit le patrimoine des pauvres véritablement pauvres et indigents. M. le Président rappelle qu’on a demandé le renvoi au comité féodal, et que c’est sur ce renvoi qu’il faut délibérer. M. Muguet de IWanthou. On a employé hier uue partie de la séance à la matière qui nous occupe; le même objet nous a déjà longtemps occupés aujourd’hui. En renvoyant continuellement aux comités, après avoirdiscuté, on parvient à travailler sans rien faire. M. Genpîl de Préfeln. Je dois rappeler avec quelle perfide adresse on a cherché à vous persuader hier que vous avez manqué de respect pour les propriétés, et que dès lors vos décrets ne peuvent subsister. Vous avez attaqué, vous avez détruit la propriété qu’avaient quelques individus de tyranniser le peuple; mais non, ce n’est pas là une propriété. Quel plan avez-vous demandé à votre comité ? Vous l’avez chargé de vous offrir des dispositions conservatrices des propriétés légitimes, et de vous présenter les moyens de supprimer, pour l’ordre et l’utilité générale, les propriétés illégitimes. M. le Président remarque qu’il faut discuter successivement article par article, et s’occuper dès lors dé l’article premier. Cet article est adopté avec la modification suivante : Art. 1er. « 11 ne pourra être prétendu par les personnes qui ont ci-devant acquis de particuliers, par vente, partage, ou autre titre translatif de propriété incommutable, des droits abolis par le présent décret, aucune indemnité ni restitution de prix ; et à l’égard de ceux desdits droits qui ont été acquis du domaine de l’Etat, il ne pourra être exigé par les acquéreurs, d’autre indemnité que Ja restitution de leurs finances ou autres objets, ou biens par eux cédés à i’Elat. » (Cet article est adopté sans aucun changement.) M. Merlin. C’est ici que se place l’artiele additionnel que j’ai proposé dans la discussion à laquelle il vient d’être soumis. On a comparé les partages aux contrats de vente : il existe cependant entre ces deux actes des différences bien sensibles. Dans un contrat, on est libre d’acheter ou de ne point acheter et d’examiner ce qu’on achète; dans un partage, l’acquisition est nécessitée ; il faut prendre Ja chose telle qu’elle est. Dans un contrat, on cherche à gagner ; dans un partage, on cherche à avoir la portion qui nons revient. Vous avez décidé qu’il n’existe pas d* garantie en faveur de l’acquéreur : en effet, l’acquéreur a dû savoir les risques qu’il courait, il s’y est soumis : dans un partage il n’en est pas de même ; il n’a pas été libre aux cohéritiers de ne pas prendre un droit de banalité, un droit de mainmorte. Il est évident que le copartageant, par la nature de l’acte qu’il a souscrit, peut exercer un droit de recours s’il est évineé. M. Hébrard (de Saint-Flour) établit que la garantie est de droit dans les partages égaux* M. Gourdan. On a employé, dans la discussion, des principes qui sont absolument inapplicables à l’article. On veut faire garantir les effets de la loi politique par la loi civile, tandis que la loi civile ne peut avoir aucun effet sur la loi politique. Je n’admets point de différences entre les copartageants et les vendeurs. Le décret que vous avez rendu à l’égard des vendeurs porte également sur les copartageants. M. Camus. Je conviens avec le préopinant que ce n’est point par la loi civile qu’on peut juger la loi politique ; mais c’est par la nature inhérente aux choses qu’il faut juger les-choses. Un partage n’est pas un contrat de vente ; c’est une déclaration d’un droit, e’estune bornemiseà la propriété générale et commune par la division deeette propriété. Si ce que je croyais appartenir à la masse commune ne lui appartient pas, il faudra bien que je le rende ; mais je reviendrai, et je dirai : je n’ai rien eu de la propriété commune indivise, puisque ee que j’ai eu n’en faisait pas partie, et appartenait à un autre. Ce raisonnement seul montre assez la différence qui existe entre le contrat de vente et les partages, Votre décret déclare que les péages ne peuvent être la propriété des particuliers; un péage ne faisait donc pas partie de l’hérédité : vous me l’avez donné en partage, je n’ai pu le conserver ; vous ne m’avez donc pas donné ma portion dans l’hérédité. La garantie est donc de droit en fait de partage, puisque chacun a droit à saportion dans la chose a partager. L’article propose est donc conforme aux principes ; il doit donc être adopté, (Qn demande à aller aux voix.) M. Garat Vainé. Nous n’avons pas à rendre un jugement, mais à faire une loi. Le législateur doit s’élever à des vues supérieures à celles des magistrats. La vue du législateur est d’assurer la tranquillité des citoyens. Si nous avions un jugement à rendre, les principes du comité devraient nous déterminer. En rejetant l’article, je voudrais excepter les légitimâmes ; l’humanité même ne m’intéresse pas en faveur des aînés : je se suis pas suspect, car dans l’ordre des successions intestat et testamentaires, je suis un aîné. La grande vue des législateurs est d’étouffer le germe de tous les procès ; èn admettant l’article, vous ferez naître des milliers de procès ; et encore en cela je ne suis pas suspect, je suis avocat. M. de Teulongeon. Rejeter l’artiele, e’est [Assemblée nationale.] ÀflüIlIVJ&S PASUAiMENTAlRES. [10 mars 1790.] ]]] peut-être faire quelque injustice particulière ; l’admettre, c’est livrer tous les propriétaires à la justice des tribunaux, et leur donner des procès interminables. M. Tronchet. Je me borne à observer que cette question est des plus importantes, et que_ - l’article proposé n’a point été discuté au comité. J’en demande l’ajournement. L’Assemblée ordonne le renvoi de l’article additionnel au comité féodal. Après une courte discussion les articles 2 et 3 sont décrétés ainsi qu’il suit : Art, 2. t II sera libre aux fermiers qui ont ci-devant pris à bail aucuns des mêmes droits sans mélange d’autres biens ou de droits conservés jusqu'au rachat, de remettre leurs baux ; et, dans ce cas, ils ne pourront prétendre à la charge des bailleurs d’autre indemnité que la restitution des pots-de-vin, et la décharge des loyers ou fermages au prorata de la non-jouissance causée par la suppression desdits droits. « Quant à ceux qui ont pris à bail aucuns droits abolis, conjointement avec d’autres biens ou avec des droits rachetables, ils pourront seulement demander une réduction de leurs pots-de-vin et fermages, proportionnée à la quotité des objets frappés de* suppression. » Art. 3. « Les preneurs à rente d’aucuns droits abolis ne pourront pareillement demander qu’une réduction proportionnelle des redevances dont ils sont chargés, lorsque les baux contiendront, outre les droits abolis, des bâtiments, immeubles, ou autres droits dont la propriété est conservée, ou qui sont simplement racbetables ; et dans le cas où les baux à rente ne comprendraient que des droits abolis, les preneurs seront seulement déchargés des rentes, sans pouvoir prétendre aucune indemnité ni restitution de deniers d’entrée.» sieurs de nos colonies n’ayant pas encore envoyé de députés, et n’étant en aucune manière représentées, personne ne se trouve fondé à, lui exposer leur yqbu et à provoquer ce qu’exigent leurs intérêts. COLONIES OCCIDENTALES. 1° La France possède au sud de nie de Terre-Neuve, les îles peu considérables de Miquelon et celle de Saint-Pierre plus petite encore. Le sol n’v est pas fertile; il n’y réside que très peu d’Européens, qu’y a attiré et fixé la pêche de la morue; 2° On a toujours annexé ce qui nous appartient dans Saint-Domingue, même les lies sous le vent qui se trouvent près de ces côtes. Les principales sont la Tortue» nie À vache et la Gooave, plus vaste que les deux précédentes, mais jusqu’à ce jour inhabitée ; 3° Les îles de Sainte-Marie-Galante, La Déli-Yrade, ont été considérées comme incorporées à la Guadeloupe, dont elles ne sont réellement séparées que par un trajet de mer très court. On a même réuni, par des vues d’administration, à ce groupe d’îles, la portion possédée par la France de la très petite île de Saint-Martin, quoique distante d’environ 3Q lieues ; 4® Sainte-Lucie, séparée par un canal de 8 ou 10 lieues de la Martinique, a dû jusqu’à ce jour envoyer ses députés à l’assemblée coloniale de cette île ; 5° Tabago est régie encore par des lois anglaises et a toujours eu une assemblée coloniale distincte ; 6® L’île de Cayenne n’a jamâis été, et paraît ne devoir pas être séparée de ee que nous possédons dans le continent voisin de la Guyane. M. Blvière, député de Mende, demande un congé de trois semaines. Ce congé lui est accordé. M. Brassart, député d'Artois, demande également la permission de s’absenter pendant un mois environ. Cette autorisation lui est accordée. M. le Président. J’ai reçu de M. le ministre de la marine et des colonies une lettre destinée à faire connaître à l’Assemblée nationale l 'état des possessions de la France hors de l'Europe. La voici: Paris, le 10 mars 1790. Monsieur te Président, Le roi m’ordonne de vous adresser un aperçu très succinct des possessions qui appartiennent à la France dans les autres parties au monde. Il croit absolument nécessaire que l’Assemblée nationale tixe, au moins provisoirement, (dans les instructions qu’elle a décrété d’y envoyer), l’étendue de chaque colonie, qu’elle détermine ce qui doit être annexé ou séparé, qu’elle indique les lieux qu’il convient de ne regarder que comme de simples comptoirs et qu’elle assigne la règle qui doit être suivie relativement à ce dernier genre de possessions. IL paraît d’autant plus indispensable de donner à l’Assemblée nationale des éclaircissements sur cet objet nouveau, et de la prier de faire connaître ses principes pour s’y conformer, que plu-POSSKSSIONS SUR LA CÔTE OCCIDENTALE DE L’ AFRIQUE. Le Sénégal, l’île Saint-Louis entourée par le fleuve qui baigne cette contrée; celle de Gorée près du Cap-Vert ; nos établissements de Juda, et sur d’autres points de la côte, ne sont véritablement que des comptoirs destinés à nous faciliter la traite des nègres, celle de la gomme, des dents d’éléphant, etc. Très peu d’Européens et même d’hommes de couleur libres y résident. ILES SITUÉES AU DELA DU GAP DE BONNE-ESPÉRANCE. L’île de France et celle de Bourbon dans l’océan Indien, à l’ouest de Madagascar, sont distantes l’une de l’autre d’environ 50 à 60 lieues. Quoique les productions de leur sol ne fournissent pas à la métropole l’abondance des denrées coloniales qui y afflue de nos Antilles, ces deux possessions ont un autre genre d’importance et offrent spécialement une retraite nécessaire à nos navigateurs qui veulent commercer dans l’Inde et à la Chine. 11 n’y a point eu jusqu’à ce jour d’assemblée coloniale dans ces lies. POSSESSIONS DANS LE CONTINENT DE L’ASIE. Le dernier traité nous donne la souveraineté de Pondichéry, de Karikal, de Vanaon sur la côte