[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 261 principal siège de la représentation nationale au centre du département, et c’est là sans doute son crime auprès de ses dénonciateurs. Il n’est pas dans la manière franche et loyale des sans-culottes de récriminer. Cependant, représen¬ tants, permettez-nous de vous observer que ce même comité de surveillance de Montauban qui accuse Taillefer de s’entourer de fédéralistes, a induit le représentant Baudot en erreur d’une manière bien cruelle, il lui a fait placer au direc¬ toire du district un ancien membre de cette mu¬ nicipalité coupable et parricide qui, le 10 mai 1790, fit égorger ses concitoyens dans la maison commune; il a été aussi placé dans la muni¬ cipalité un homme dont les sentiments aristo¬ cratiques avaient été connus jusqu’à ce jour. « Représentants, écoutez le langage de la vérité. On vous a cruellement trompés et vous devez punir les coupables. Taillefer mérite plus que jamais votre estime, et vous devez venger un de vos collègues qui a parfaitement rempli sa mission. « Ce n’est pas tout, représentants, Taillefer ne peut abandonner le département de l’Avey¬ ron sans compromettre la chose publique. De grandes mesures ont été prises dans ce départe¬ ment, lui seul peut en suivre le fil, et si son plan n’est point conduit à son terme, il est à craindre que de nouvelles calamités n’affligent ce dépar¬ tement et ceux qui l’avoisinent. Décrétez donc que Taillefer terminera ses opérations, et vous aurez rendu un service important à la patrie. « Tel est le vœu de la Société montagnarde de Cahors, dont tous les individus périront s’il le faut pour le maintien des principes de la Montagne. « Salut et fraternité. » (Suivent 198 signatures.) II. Le citoyen Sourtiat, de Vic-sur-Allier, DÉPARTEMENT DU PUY-DE-DOME, ENVOIE SES LETTRES DE PRÊTRISE (1). Suit le texte de la lettre du citoyen Sourtiat, d'après un document des Archives nationales (2). Aux citoyens représentants de la République française. « Citoyens représentants, « Victime du préjugé, de l’ambition et de la (1) L’adresse du citoyen Sourtiat n’est pas men¬ tionnée au procès-verbal de la séance du 7 frimaire an II, mais il y est fait allusion dans le Supplément au Bulletin de la Convention de cette séance. En outre, on lit en marge du document des Archives nationales le note suivante : « Mention honorable; insertion au Bulletin et renvoyé au comité d’ins¬ truction publique le 7 frimaire an II. » (2) Archives nationales, carton F19 891, dossier Sourtiat. dureté d’un père qui était absolu chez lui, sans aucune connaissance de mes droits, je sacri¬ fiais ma liberté, j’entrais dans un cloître dès l’âge de 16 à 17 ans. « Après avoir passé par les épreuves mona¬ cales on me fit prononcer des vœux en 1761. « En 1772, par une suite de ma destinée, je fus forcé de paraître devant un homme qui était habillé comme une femme. Cet homme dit quelques paroles que je n’ai jamais com¬ prises, me mit ensuite quelque drogue sur les doigts. On me dit après que j’étais prêtre... « J’ai demeuré trente-deux ans dans le cloître. Aussitôt que l’Assemblée constituante nous a ouvert les portes de nos prisons, j’ai été un des premiers à profiter de ce décret salutaire. Je suis sorti le 28 mai 1790. Dès ce moment j’ai renoncé de cœur et d’inclination à la moinerie et à la prêtrise. « Rendu à la liberté, j’ai de suite épousé ma servante secrètement; j’en ai eu un enfant en 1791. « J’ai fait constater mon mariage par un officier public en date du 25 août 1792. « Enfin le 12 novembre, même année 1792, j’ai fait la déclaration de mon mariage et de la naissance d’un second fils, le premier étant mort en 1791, et je suis maintenant à la veille d’en avoir un troisième. « Aujourd’hui, sans autres ressources que la pension que me donne la nation, attaché à la nouvelle Constitution par principes, goût et inclination, je viens vous prier de ne pas me regarder comme un de ces druides qui ont tourmenté notre République par leurs infâmes manœuvres; de la vie je n’ai adhéré à leurs principes, je les déteste, les abhorre et renonce pour toujours à tout ce qui est prêtre. Je vous envoie en conséquence les seules marques qui me restaient de ce qu’on appelle prêtrise, vous priant de vouloir m’admettre à une place dans l’éducation nationale, dans mon canton je rem¬ plirai mes obligations et me rendrai digne de la confiance que me donnera la nation. « Citoyens représentants, votre dévoué conci¬ toyen, « Sourtiat, sans-culotte. « A Vie -sur-Allier, département du Puy-de-Dôme, le 27 brumaire, l’an II de la République, une et indivisible. » Compte rendu du Bulletin de la Convention (1). Le citoyen Sourtiat, de Vic-sur-Allier, envoie ses lettres de prêtrise à laquelle il a renoncé depuis longtemps. Mention honorable. (1) Supplément au Bulletin de la Convention du 7e jour de la lre décade du 3e mois de l’an II (mer¬ credi 27 novembre 1793).