[Assemblée nationale. | ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {20 mars 1791.] 231 établissements précieux à la nation ; et, pour produire ce grand avantage, il nous suffit d’être justes. Après vous avoir exposé leurs idées sur la propriété et la concession des mines en général ; après vous avoir prouvé que les substances fossiles ne peuvent être exceptées des lois qu’ils vous proposent; après vous avoir enfin démontré les droits des anciens concessionnaires, vos comités doivent vous entretenir des mines superficielles de transport ou d’alluvion, qui leur ont paru exiger un litre particulier. On appelle mines superficielles toutes celles qui, existant à la surface du globe, et disséminées même dans la terre végétale, exigent, pour leur extraction, le bouleversement du terrain qui les renferme. L'exploitation de ces mines est très différente de celle des autres; elle n’exige ni approfondissement de puits, ni percement de galeries; tous les propriétaires de terrain ont des moyens suffisants pour l’entreprendre avec avantage et sans préjudice pour la société. 11 existe des mines superficielles de toute espèce de métaux; mais les plus abondantes, surtout en France, sont les mines de fer, et le plus communément elles sont extraites à 10, 15, 20 ou 30 pieds, et pre-que jamais au delà. C’est ce qui en rend par conséquent l’exploitation beaucoup plus facile, et à la portée de presque tous les propriétaires territoriaux. 11 a paru juste à vos comités de leur en abandonner dès à présent la libre disposition, avec la précaution cependant qu’ils ne puissent en user au préjudice de la société. Vos comités ont donc pensé, qu’en laissant aux propriétaires le droit d’extraire et de vendre ce minerai aux maîtres de forges, ces derniers devaient être autorisés à faire des sondes pour les découvrir; à le dénoncer aux propriétaires, pour qu’ils en fissent l’extraction dans un certain délai; et enfin, pour qu’en cas de refus ou d’interruption de leur part, les maîtres de forges pussent eux-mêmes faire procéder à cette extraction, sous la condition, néanmoins, de la plus juste indemnité envers les propriétaires. Vos comités n’ont pas cru devoir proposer qu’il fût fixé un prix aux mines de fer extraites. Une loi générale à cet égard serait sujette à une multitude d’inconvénients. Il serait difficile d’en concilier l’uniformité avec tes variations et les différences qu’en présentent les localités. D’ailleurs, la concurrence entre les différents propriétaires et les maîtres de forges aura bientôt déterminé le prix de ce minerai, et les juges de paix en seront au besoin des arbitres. Vos comités ont cependant pensé, Messieurs, qu’il serait également dangereux, et pour l’agriculture, et pour le commerce, que le prix de celte matière première, dont le surhaussement entraînerait la ruine de nos usines, fût trop dépendant de l’estimation des experts. Pour quoi ils proposeront un maximum au delà duquel ce minerai ne pourra être taxé. C'est d’après un calcul très exact qu’ils ont pensé que le prix du minerai lavé ne doit pas être porté au delà de 2 s. 6 d. par tonneau du poids de 20U livres, lorsque l’extraction en aura été faite par le maitre de forges, qui sera tenu de le faire laver, et de payer en outre aux propriétaires toute indemnité résultant, soit de la non-jouissance, soit des dégâts faits à la superficie. On pourrait peut-être penser que le prix du minerai ainsi réglé serait trop à l’avantage du maître de forges; mais on sera bientôt revenu de cette erreur, si l’on veut faire attention que, pour alimenter un haut fourneau projetant annuellement 1,200,000 livres de fonte, il faut 12 millions pesant de gangue ou minerai brut, qui, après l’épreuve du lavage, est réduit à 4 millions pesant, ou 8,000 tonneaux du poids de 500 livres, lesquels, à 2 s. 6 d., coûtent au maître d’usines une somme de 1,000 livres, indépendamment des frais d’extraction, de lavage, de transport, et des indemnités pour les non-jouissances et dégâts. Au surplus, les articles contenus au titre second du projet de décret que vos comités vous soumettront sont fondés sur les mêmes principes de justice et d’utilité pub ique qu’ils ont déjà eu l’honneur de vous développer; et la dernière partie de ce décret ne renferme en quelque sorte que des modifications du titre Ier. Vos comités auraient encore à vous exposer leur travail sur une partie bien essentielle de l’administration des mines : celle qui concerne les moyens d’en diriger l’exploitation. Vous sentirez aisément, Messieurs, combien il importe d’avoir des hommes instruits et sûrs, en état de bien diriger les exploitations dans les différents départements, de surveiller les mines concédées, d’éclairer les concessionnaires, et d’écarter surtout Ie3 tentatives et les propositions insidieuses des charlatans, qui ont nui d’une manière effrayante et incalculable à l’exploitation des mines en France. Vous verrez avec satisfaction, Messieurs, que vous pourrez employer utilement, pour l’intérêt public, des hommes éclairés et instruits qui faisaient partie de l’ancienne administration. Vos comités se plaisent à leur rendre cette justice : c’est à eux qu’ils doivent principalement tous les renseignements qui leur sont parvenus sur l’exploitation dos mines : mais vos comités ont pensé que cotte partie d’administration, relative à l’instruction et aux moyens de réunir en quelque sorte les exploitations, en faisant tendre leur activité commune au bien général des arts et du commerce, devait faire l’objet d’un rapport particulier, concerté avec les comités de Constitution et des finances, conformément à votre décret du 15.aoùt dernier. Ce rapport vous sera présenté incessamment. Vos comités se bornent donc aujourd’hui à vous proposer le projet de décret suivant : PROJET DE DÉCRET. « L’Assemblée nationale, considérant combien il est important d’assurer à la nation le produit des richesses souterraines que le sol de la France renferme dans son sein, et de faire cesser les tributs qu’elle paye à ses voisins, pour des métaux et des combust bles de première nécessité, qui ne sont devenus rares pour elle que par leur mauvaise exploitation, suite inévitable des variations et de l’incertitude de la législation française sur cette partie si essentielle d’administration, également fuite pour rétablir la prospérité de l’agriculture et du commerce, et donner une nouvelle perfection aux arts et à l’industrie; après avoir ouï le rapport qui lui a été fait au nom de ses comités réunis de Constitution, des finances, d’agriculture et de commerce, des domaines et des impositions, décrète ce qui suit : 232 [Assen blée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. TITRE PREMIER. Des mines en général. « Art. Ier. Les mines et minières, tant métalliques que non mélalliques, ainsi que les substances fossiles, sont à la disposition de la nation, et ne peuvent être exploitées que de son consentement, à la charge d’indemniser les propriétaires de la surface, et d’après les règles qui seront prescrites par le présent décret. « Art. 2. Ne sont néanmoins compris dans l’article précédent les sables, les craies, les argiles, les pierres à chaux et à plâtre, et autres de pareille nature, qui, par leur position et leur abondance, étant dans la main de tous, continueront à être exploités par les propriétaires, comme choses à eux appartenant. « Art. 3. A défaut d'exploitation de la part des propriétaires des objets énoncés dans l’article second, et dans le cas seulement de nécessité pour les grandes routes ou pour des travaux d’une utilité publique, tels que ponts, chaus-ées, canaux de navigation, monuments publics, manufactures de porcelaine, faïence, glace et verrerie,