Ifloiivention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j « meubiement et d’entretien des écoles sont à la charge des habitants. 66. Ils fournissent le logement aux instituteurs et aux institutrices. 67. Sur l’avis des corps administratifs, les habitants sont autorisés à faire des emprunts pour subvenir aux premiers frais, à la charge de rembourser par portions égales dans l’espace de cinq ans. 68. Le comité d’instruction publique est chargé de faire promptement composer les diffé¬ rents livres élémentaires, de présenter une instruction pour l’exécution du décret et un règlement pour les écoles. Ici nous laissons la 'parole à M. James Guil¬ laume qui, dans son remarquable ouvrage intitulé : Procès-verbaux du comité d’instruction publique de la Convention (tome 3, page 92), a cité les comptes rendus de plusieurs journaux de l’époque, et, malgré les lacunes de ces jour¬ naux, est parvenu à donner à peu près une idée de la discussion. « La discussion sur l’instruction publique, que lo décret du 19 brumaire avait fixée au Ier frimaire, et qui avait été renvoyée ensuite au 11 frimaire, ne s’ouvrit que le 18 frimaire. Ce jour-là, Romme donna lecture, au nom du comité d’instruction publique, du travail de révision des décrets fait par le comité et im¬ primé par ses ordres (1). Il annonça en même temps qu’un autre membre du comité, Bouquier, avait préparé un plan nouveau, dont le comité avait également ordonné l’impression. Bouquier se présenta ensuite à la tribune, et lut les articles de son projet, ainsi que l’exposé des motifs (2). Après ces deux lectures là Convention ajourna la discussion au lendemain. « Le procès-verbal de la Convention du 18 fri¬ maire ne dit rien des lectures faites par Romme et’ Bouquier. Nous ne les connaissons que par les comptes rendus des journaux, dont nous transcrivons ci-après les plus importants. » « Nous commençons par le Journal de la Montagne, dont le compte rendu, signé des initiales F, P., est celui qui nous donne les renseignements les plus précis et les plus com¬ plets. Compte rendu du Journal de la Montagne (3). Romme annonce que de tous les points de la République un cri unanime appelle l’ organisa - (1) Voy. ci-dessus, même séance, p. 132, le tra¬ vail de révision du comité. (2) Voy. ci-après, même séance, p. 136, le plan de Bouquier. (3) Journal de la Montagne fn° 26, du 19e jour du 3e mois de l’an II (lundi 9 décembre 1793), p. 217, col. 2]. D’autre part, la Feuille du Salut public (n° 159 du 19 frimaire an II), le Journal de Paris national (n° 343 du 19 frimaire an II), le Mo¬ niteur universel [n° 80 du 20 frimaire an II (mardi 10 décembre 1793), p. 323, col. 1] et le Journal des Débals et des Décrets (frimaire an II, n° 446, p. 248) rendent compte de la discussion sur l’instruction publique dans les termes suivants : I. Compte rendu de la Feuille du Salul public. Romme, au nom du comité d’instruction publique, présente la révision laite du décret sur les premières m tion des écoles primaires. Il soumet la rédaction des articles décrétés à cet égard, et invite la Convention à entendre an nouveau projet du comité, pour discuter de suite celui qui aura obtenu la priorité. Bouquier, membre de ce comité, obtient la parole : « Vous avez, dit-il, chargé votre comité de re viser le décret relatif à l’organisation des premières écoles. Il a rempli cette tâche, mais ©h s’en acquittant il a vu que le grand problème de l’organisation de l’instruction publique pour-écoles. Un projet est mis en concurrence par Bou-gnier (sic). La Convention ajourne à demain midi la décision sur la priorité. II. Compte rendu du Journal de Paris national. Romme, organe du comité d’instruction publique après avoir invité la Convention à s’occuper, toute affaire cessante, de l’éducation nationale que toute la France réclame impérieusement depuis longtemps, relit la révision du décret pour l’organisation des premières écoles, faite par ce comité, conformément au décret du 19 brumaire, qui ordonne que la dis¬ cussion sera ouverte le lar frimaire, soit sur le trà-vail du comité, soit sur celui de la Commission nom¬ mée pour le même sujet. La discussion est ouverte. III. Compte rendu du Moniteur universel. Romme, au nom du comité d'instruction publique. C’est l’instruction publique qui m’appelle à cette tribune. De toutes parts on la demande, et on la demande impérieusement. Tous les départements sont mûrs pour les leçons que vous voulez leur don¬ ner. 11 faut donc vous occuper de cet objet, toute affaire cessante. Vous avez décrété les premières écoles, et vous avez chargé une Commission parti¬ culière de faire la révision de ce décret, en même temps que le comité ferait de son côté la même opération. Le comité a fini son travail; j’ignore si la Commission a fait le sien. Je demande que là Convention entende la rédaction de ces révisions, afin d’accorder la priorité à l’une d’elles. Romme fait la lecture des articles. L'Assemblée en ajourne la discussion à demain. IV. Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. Romme. C’est l’instruction publique qui m’appelle aujourd’hui à la tribune. On vous la demande de toutes parts. Il est donc de votre devoir de vous en occuper. Vous avez décrété l’institution des premières écoles. Vous avez ordonné ensuite qu’une Commis¬ sion révisât le décret qui avait été rendu. La Com¬ mission a été nommée. Le décret lui fut remis le len¬ demain. Vous chargeâtes aussi votre comité de révi¬ ser de son côté la loi, afin que vous puissiez déter¬ miner votre choix entre les deux travaux révisés. Le comité a fait son travail. U l’a fait imprimer; on vous l’a distribué. J’ignore si la Commission a fait le sien; mais un de ses membres en a fait un dont nous avons ordonné l’impression et qui vous a aussi été distribué. Nous allons vous faire successivement la lecture de ces deux plans, et vous discuterez sur la priorité. Romme lit la loi revisée par le comité. Lindet (sic), membre de la Commission, lit un plan, après en avoir développé les bases. L’ajournement de la discussion est fixée à demain midi. 136 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ™maire «» « rait être résolu de plusieurs manières, et il s’est déterminé à vous présenter un nouveau plan. » (Suit la reproduction textuelle de V exposé des motifs du plan de Bouquier jusqu'aux mots : « Contentons-nous d’y ajouter le peu qui manque pour compléter l'instruction publique. ») Le plan dirigé d’après ces réflexions sera discuté demain si, comme il est vraisemblable, il obtient la priorité. (Suit le texte du plan de Bouquier, d'après le document imprimé (l).j Rapport et projet de décret formant UN PLAN GÉNÉRAL D’INSTRUCTION PUBLIQUE, par G. Bouquier, membre de la Conven¬ tion NATIONALE ET DU COMITÉ D’iNSTRUC-tion. (Imprimé par ordre du comité.) Citoyens, vous avez chargé votre comité d’instruction de reviser le décret relatif à l’or¬ ganisation des premières écoles ; il a rempli cette tâche; mais en s’en acquittant il a vu que le grand problème de l’organisation de l’instruction publique pouvait être résolu de plusieurs manières; et il s’est déterminé à vous présenter un nouveau plan... un plan simple, naturel, facile à exécuter ; un plan qui proscrivît à jamais toute idée de corps académique, de société scientifique, d’hiérarchie pédagogique; un plan enfin dont les bases fussent les mêmes que celles de la Constitution : la liberté, l’égalité, la brièveté. Le premier de tous les arts utiles qu’un gou¬ vernement républicain doit honorer, est celui de l’agriculture; et les citoyens qui l’exercent sont, en tout temps, ceux qui les premiers ont bien mérité de la patrie. Les nations libres n’ont pas besoin d’une caste de savants spéculatifs, dont l’esprit voyage constamment, par des sentiers perdus, dans la région des songes et des chimères. Les sciences de pure spéculation détachent de la société les individus qui les cultivent et deviennent à la longue un poison qui mine, énerve et détruit les Républiques. Au peuple qui a conquis la liberté, il ne faut que des hommes agissants, vigoureux, robustes, laborieux; des hommes éclairés sur leurs droits, sur leurs devoirs. On parvient à former de tels hommes en exer¬ çant la jeunesse à des travaux, à des arts dont l’exécution, en développant les forces, donne de la souplesse, de la dextérité, et en mettant sous les yeux des lois simples et sages, de grands exemples à suivre, de grands modèles à imiter. Le muscadin crève dans une première oam-pagne, ou au premier coup de fusil, crie, en fuyant : « Sauve qui peut ! » tandis que le jeune homme exercé dès l’enfance à des travaux pé¬ nibles, étayant son courage de la force, devient bientôt un excellent soldat. Sa vigueur brave les fatigues de la guerre; son courage affronte les (1) Bibliothèque nationale : 14 pages in-8° Le38, n° 600. Bibliothèque de la Chambre des députés : Collection Portiez (de P Oise), t. 93, n° 58 et 438, n° 7. périls. Il repousse l’ennemi, il garantit sa patrie du joug de toute domination, et devient par sa valeur, sa confiance, sa fermeté, son dévouement, le modèle du vrai républicain. C’est donc à former de tels hommes que nous devons nous attacher. Et la Révolution ne nous a-t-elle pas déjà merveilleusement servi à cet égard? Jetons un coup d’œil rapide sur la nation française... Voyons ce qu’elle était avant la Révolution, voyons ce qu’elle est aujourd’hui... Indolente, apathique, insouciante à l’excès, les sciences futiles, les arts frivoles lui tenaient lieu de tout. Elle portait les fers de la tyrannie, sans, pour ainsi dire, en sentir le poids ; à peine connaissait -elle le nom de liberté...; il a fallu que les tyrans anthropophages qui la mutilaient depuis tant de siècles l’aient arrachée, à force d’excès, de cruautés et de noirceurs, des bras du sommeil léthargique où le despotisme l’avait insensiblement plongée. Mais l’heure du réveil arrive; le tocsin de la liberté retentit au loin; la nation se lève, reprend sa puissance, et, dans un clin d’œil, un peuple d’esclaves devient un peuple de héros. Les bastilles sont renversées, les satrapes tremblent, la nation organise son pouvoir, les Sociétés populaires sont formées, la voix de la raison se fait entendre, chaque ci¬ toyen devient soldat, l’amour de. la liberté s’empare de tous les cœurs, et les conduit d’un pas rapide à la hauteur du républicanisme. Tels sont les effets miraculeux qu’a produits notre Révolution; tels sont les moyens dont elle a fait usage. Qu’avons-nous donc besoin d’aller chercher loin de nous ce que nous avons sous nos yeux ! Citoyens !...les plus belles écoles, les plus utiles, les plus simples, où la jeunesse puisse prendre une éducation vraiment républicaine sont, n’en doutez pas, les séances publiques des dépar¬ tements, des districts, des municipalités, des tribunaux, et surtout des Sociétés populaires. C’est dans ces sources pures que les jeunes gens puiseront la connaissance de leurs droits, de leurs devoirs, des lois et de la morale républi¬ caine; c’est en maniant les armes, c’est en se livrant aux exercices de la garde nationale, c’est en s’accoutumant au travail, en exerçant un art ou métier pénible, que leurs membres de¬ viendront souples, que leurs forces se dévelop¬ peront, qu’ils perfectionneront leurs facultés physiques. Tout leur présentera des moyens d’instruction : ils en trouveront au sein de leurs familles, ils en trouveront dans les livres élé¬ mentaires que vous allez publier; ils en trou¬ veront enfin dans les fêtes nationales que vous allez instituer. D’après cet exposé rapide, on doit voir clai¬ rement que la Révolution a, pour ainsi dire, d’elle-même organisé l’éducation publique et placé partout des sources inépuisables d’instruc¬ tion. N’allons donc pas substituer à oette organi¬ sation simple et sublime comme le peuple qui l’a créée une organisation factice et calquée sur des statuts académiques qui ne doivent plus infecter une nation régénérée. Conservons pré¬ cieusement ce qu’ont fait le peuple et la Révo¬ lution;... contentons-nous d’y ajouter le peu qui y manque pour compléter l’instruction pu¬ blique. Ce complément doit être simple comme l’ouvrage créé par le génie de la Révolution... Nous allons vous en présenter le projet.