39 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 février 1791.] nourriture des détenus soit suffisante et saine ; et, s’il s’aperçoit de quelque tort à cet égard contre la justice ou l'humanité, il sera tenu d’y pourvoir par lui-même, ou d’y faire pourvoir par la municipalité, laquelle aura le droit de condamner le geôlier à l’amende, même de demander sa destitution au directoire de département, sans préjudice de la poursuite criminelle contre lui, s’il y a lieu. » (Adopté.) Un membre demande, par amendement à l’article 10, que la police des maisons d’arrêt, de justice et de prison, appartienne au tribunal de district. Un membre demande la question préalable sur l’amendement. (L’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer). Art. 10. « La police des maisons d’arrêt, de justice et de prison, appartiendra à la municipalité du lieu. » (Adopté.) Art. 11. « En conséquence, si quelque détenu usait de menaces, injures ou violences, soit à l’égard du gardien ou geôlier, soit à l’égard des autres détenus, l’officier munieij al pourra ordonner qu’il sera resserré plus étroitement, renfermé seul, même mis aux fers en cas de fureur ou de violence grave, sans préjudice de la poursuite criminelle, s’il y a lieu. » (Adopté.) Art. 12. « Les maisons d’arrêt ou de justice seront entièrement distinctes des pri-ons qui pourront être établies pour peine, et jamais un homme condamné ne pourra être mis dans la maison d’arrêt, ni un homme arrêté, même décrété, dans une prison. » (Adopté.) TITRE XIII. Des moyens d'assurer la liberté des citoyens contre les détentions illégales ou autres actes arbitraires. Art. 1er. « Tout homme, quelle que soit sa place ou son emploi, autres que ceux à qui la loi donne le droit d’arrestation, qui donnera, signera, exécutera l’ordre d’arrêter un citoyen, ou qui l’arrêtera effectivement, si ce n’est pour le remettre sur-le-champ à la police, dans les cas déterminés par la présente loi, sera puni comme coupable du crime de détention arbitraire. » (Adopté.) Art. 2. « Nul homme, dans le cas où sa détention est autorisée par la loi, ne peut être conduit que dans les lieux légalement et publiquement désignés par l’administration du département pour servir de maison d’arrêt, de maison de justice ou de prison, sous la même peme contre ceux qui le conduiraient, détiendraient ou prêteraient leur maison pour le détenir. » (Adopté.) Art. 3. « Quiconque aura connaissance qu’un homme est détenu illégalement dans un lieu , est tenu d’en donner avis à un des officiers muriirijaux ou au juge de paix du canton. Il pourra aussi en faire sa déclaration, signée de lui, au greffe de la municipalité ou du juge de paix. » (Adopté.) Art. 4. « Ces officiers publics, d’après la connaissance qu’ils en auront, seront tenus de se transporter, aussitôt, et de faire remettre en liberté la personne détenue, à peine de répondre de leur négligence, et même d’être poursuivis comme coupables du crime de détention arbitraire, s’il est prouvé qu’ils avaient connaissance de la détention. » (Adopté.) Art. 5. « Personne ne pourra refuser l’ouverture de sa maison pour cette recherche : en cas de résistance, l’officier municipal ou le juge de paix pourra se faire assister de la force nécessaire, et tous les citoyens seront tenus de prêter main-forte. » (Adopté.) Art. 6. « Dans le cas de détention légale, l’officier municipal, lors de sa visite dans les maisons d’arrêt, de justice ou prison, examinera ceux qui y sont détenus, et les causes de leur détention ; et tout gardien ou geôlier sera tenu, à sa réquisition, de lui représenter la personne de l’arrêté, sans qu’aucun ordre puisse l’en dispenser; et ce, sous peine d’être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire. » (Adopté.) Art. 7. « Si l’officier municipal, lors de sa visite, découvrait qu’un homme est détenu sans que sa détention soit justifiée par aucun des actes mentionnés dans les articles 5 et 6 du tit'-e XII, il en dressera sur-le-champ procès-verbal, fera conduire le détenu à la municipalité, laquelle, après avoir de nouveau constaté le fait, le mettra définitivement en liberté, et dans ce cas poursuivra la punition du gardien ou geôlier. •> (Adopté.) Art. 8. « Les parents, voisins ou amis de l’arrêté, porteurs de l’ordre de l’officier municipal, lequel ne pourra le refuser, auront aussi le droit de se faire représenter la personne du détenu, et le gardien ne pourra s’en dispenser qu’en justifiant de l’ordre exprès du juge, inscrit sur son registre, de le tenir au secret. » (Adopté.) Art. 9. « Tout gardien qui refuserait de montrer au porteur de l’ordre de l’officier municipal la personne de l’arrêté, sur la réquisition qui lui en serait faite, ou de montrer l’ordre du juge qui le lui défend, sera poursuivi ainsi qu’il est dit article 6 et autres. » (Adopté.) Art. 10. « Pour mettre les officiers publics ci-dessus désignés, à portée de prendre les soins qui vien-runt d’être recommandés à leur vigilance et à leur humanité, lorsque l’inculpé sera mené devant les officiers municipaux, ainsi qu’il est dit article 6 du titre II, ceux-ci, après avoir pris note du mandat d’amener, entendront l’inculpé et les plaintes qu’il pourrait faire des violences ou injures exercées contre lui en l’arrêtant : ils en dresseront procès-verbal, et l’enverront au juge de paix. » (Adopté.) 40 (ÀMemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (8 février 1791.] Art. 11. « Lorsque le prévenu aura été envoyé à la maison d'arrêt du district, copie du mandat sera remise à la municipalité du lieu, et envoyée à celle du domicile du prévenu, s’il est connu’, celle-ci en donnera avis aux parents, voisins ou amis du prévenu. » (Adopté.) Art. 12. « Le directeur du juré donnera également avis auxdites municipalités de l’ordonnance de prise de corps rendue contre le prévenu, sous peine d’être suspendu de ses fonctions. « (Adopté.) Art. 13. « Le président du tribunal criminel sera tenu, sous la même peiDe, d’envoyer auxdites municipalités copie au jugement d’absolution ou de condamnation du prévenu. » (Adopté.) Art. 14. « Il sera tenu à cet effet dans chaque municipalité un registre particulier, pour y tenir note des avis qui leur auront été donnés/» (Adopté.) M. Duport, rapporteur, descend de la tribune au milieu des applaudissements réitérés de l’Assemblée. Plusieurs membres du comité de la marine ayant donné leur démission, l’Assemblée ordonne qu’ils seront remplacés par les suppléants élus lors de la nomination desdits membres. M. le Président annonce à l’Assemblée que M. Meunier du Breuil, membre du comité de judi-cature, a donné sa démission de commissaire. M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de demain. La scéance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. RIQUETT1 DE MIRABEAU L’AÎNÉ. Séance du jeudi 8 février 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires faitlecture du procès-verbal delà séance d’hier, qui est adopté. M. Pinterel de EiOuverny communique à l’Assemblée une adresse de la municipalité d’Es-somes, district de G bâteau-Thierry, qui lui présente sa respectueuse et profonde reconnaissance sur le décret du 26 janvier dernier, qui annonce que les droits .d’aides ne feront plus à l’avenir partie des contributions d’un peuple libre. Cette municipalité témoigne la joie la plus vive de ce bienfait; mais ce qu’elle exprime avec plus d’énergie encore, et d’une manière plus touchante, c’est son respect pour la loi, en promettant de payer tous les impôts avec la plus scrupuleuse exac-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. titude, etsondévouementahsolu à la Constitution, en portesianideJasoutenir jusqu’à ladernièregout-te de sonsang. Cetteadresse contient aussi la pétition de prendreen considération les réclamations de recouvrementsde frais et avances que la commune d’Essomes a à répéter contre la ferme des aides, dans les contestations qui ont été jugées en sa faveur dans les premiers tribunaux. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention de cetie adresse dans son procès-verbal de ce jour, et renvoie la pétition delà commune d’Ks-somes aux comités des impositions et des finances.) M. Henrtault-Lamerville, au nom du comité de commerce et d'agriculture , Messieurs, le comité d’agriculture et de commerce, après avoir pris une connaissance approfondie de l’affaire du sieur Lormov, s’est convaincu, depuis plusieurs années, que le sieur Lormoy éprouve véritablement une persécution marquée : le comité a pensé qu’il serait dans nos principes d’équité et d’un exemple très utile de renvoyer cette affaire, par un décret, au pouvoir exécutif. Voici le décret que je vous propose : « L’Assemblée nationale décrète que l’affaire du sieur Guerrier-Lormoy, jugée par arrêt du conseil rendu le 16 juillet, et dont l’exécution a été sans effet, est renvoyée au pouvoir exécutif afin que force reste à la loi. » Plusieurs membres demandent l’ordre du jour. M. Chabroud. L’exécution de la loi appartient au pouvoir exécutif; il serait peut-être dangereux que le Corps législatif fît désormais de semblables renvois. M. ‘Vernier. Prenez garde, Messieurs, qu’en voulant faire entendre au peuple que vos desseins sont de donner au pouvoir exécutif d’une façon formelle ce qui lui appartient, il faut commencer par donner l’exemple de cette déférence pour ses fonctions. Un décret fera donc plus d’effet que de passer à l’ordre du jour. Il convient, c’est le bien de la chose, de le renvoyer au pouvoir exécutif. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély.) U y a un moyen de rendre plus utile encore l’idée de M. Vernier ; car il est important que l’on apprenne que le pouvoir que vous avez créé est revêtu des fonctions que vous lui avez attribuées. Il faut donc dire qu’attendu que le pouvoir exécutif est créé pour l’exécution de la loi, il n’est pas besoin d’un nouvel ordre du pouvoir législatif, parce qu’il tient ce pouvoir de la Constitution, et passer à l’ordre du jour. En motivant ainsi la mesure que vous allez prendre, vous donnerez bien plus d’action au pouvoir exécutif, vous apprendrez plus à le respecter. M. Heurtault-Kjamer ville, rapporteur. J’adopte la motion de M. Regnaud et je propose la rédaction suivante : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de commerce et d’agriculture sur les difficultés qu’a éprouvées l’exécution d’un arrêt du conseil en faveur du sieur Guerrier-Lormoy, propriétaire dans le département de la Somme, sur la proposition que lui a faite son comité de renvoyer au pouvoir exécutif pour que la loi ait toute sa force; considérant que la Constitution