SÉANCE DU 22 VENDÉMIAIRE AN III (13 OCTOBRE 1794) - N° 7 97 Berlier, représentant du peuple dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, transmet à la Convention une adresse des jeunes élèves d’Arras, dans laquelle ils expriment leur attachement à la Convention, leur dévouement à la liberté, leur voeu pour l’anéantissement des tyrans ligués, et enfin leur désir de voir leur pays délivré de tous les hommes immoraux. J’ai réorganisé les autorités constituées, j’ai renouvelé ces hommes, écrit ce représentant, qui ont trop longtemps resté en place ; je les ai remplacés par des hommes probes et vertueux ; j’ai rendu à la liberté quelques malheureux cultivateurs que l’intrigue avait fait arrêter ; enfin le char révolutionnaire roule ici avec majesté, et tous sont dévoués à la Convention (11). [Le représentant Berlier au président de la Convention nationale, d’Arras, le 11 vendémiaire an III] (12) Citoyen président, Je te transmets une adresse des écoles primaires d’Arras. Tu y verras avec plaisir combien le premier essort politique de ces jeunes républicains est pour la Convention et pour les vrais principes. Salut et fraternité. Berlier. [Les élèves de l’école primaire d’Arras au représentant du peuple Berlier, s. d.] (13) Mandataire du souverain, Le sentiment naturel et républicain, qui nous tient toujours si étroitement unis à la Convention nationale nous fait députer aujourd’hui vers toi par notre jeune société littéraire républicaine : nous venons avec confiance te faire le dépositaire de nos voeux; depuis longtems nous soupirons après l’avantage autan glorieux et respectable, que digne d’envie, d’informer la Patrie, que nous ne respirons que pour elle : conjure pour nous la Convention nationale de rester à son poste, de continuer ses opérations utiles et nécessaires au bien général et individuel. Elle est à la veille de détruire pour toujours par son énergie courageuse et sans exemple les monstres ennemis de la sainte égalité et de notre chère liberté. Notre joye est sans mélange, lorsque nous t’adressons la parole : nous sommes assurés que la Convention nationale connoitra par ton moyen que nous portons et jurons une haine implacable et à mort au despotisme et au fanatisme ; aussi demandons-nous la tête de tous les infâmes conspirateurs et de leurs complices qui en ont tant imposé au peuple souverain par leur hypocrisie et lui ont (11) Moniteur, XXII, 225. (12) C 321, pl. 1338, p. 25. (13) C 321, pl. 1338, p. 24. causé et lui causent encore tant de maux et de sollicitude. Tu es envoyé au milieu de nous pour réparer ces maux inouïs et inattendus; cette mission est chère à ton coeur, elle flatte le nôtre et notre espérance; elle nous répond d’un succès certain et utile; tu la rempliras avec cette énergie républicaine, tu nous délivreras de ces hommes immoraux, qui auroient corrompu la source de l’égalité et de la liberté, si leurs trames odieuses n’avoient été découvertes par la vigilance et l’attention sans seconde de la Convention nationale, aussitôt déjouées et pu-nies ; tu nous apportes la justice ; elle est bien désirable pour nous : pour toi, fais que notre éducation soit soignée par des personnes éclairées, conformées par un usage réfléchi et versées dans cette partie si essentielle qui fera la félicité de la République et la nôtre. Ta présence nous régénère aujourd’hui, elle semble nous donner une autre existence, qui s’affermira par l’âge et nous nous verrons bientôt conduits par les vertus et les talens, en état de faire un rempart de nos corps à tous nos respectables représentans ; vrais et inébranlables soutiens de la République;... oui, représentans, nous le jurons. Signé des élèves de l’école primaire tenue par Sartiau, rue de Lorne, Legar, président. 7 Les officiers municipaux de la commune de Sigean [Aude] expriment leur amour pour la liberté, et leur reconnoissance pour le général de l’armée des Pyrénées-Orientales. Mention honorable, insertion au bulletin (14). [Les officiers municipaux de la commune de Sigean à la Convention nationale, le 5 fructidor an II] (15) Représentans d’un peuple libre, Instruits combien vous aimés à connoitre les progrêts que les français scavent faire chaque jour dans l’amour de la liberté ; nous vous adressons le résultat d’une de nos soirées dont les premiers romains se seroient aplaudis. Vous y trouverés combien les cytoiens de la commune de Sigean chérissent la vertu et abhorrent le crime ; c’en est fait que tous les tirans de l’Europe et leurs vils esclaves palissent d’efïroy et de terreur : d’un bout de la république à l’autre la guerre à mort leur est déclarée : et vous infatigables défensseurs de la cause du peuple (14) P.-V., XL VII, 128. Bull., 29 vend, (suppl.); F. de la Républ., n° 24. (15) C 321, pl. 1346, p. 19. 98 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE continués à connaître les traîtres et que sans aucune pitié leurs têtes abominables tombent sous la hache vengeresse de la liberté. O nos dignes représentans ; intrépides montagnards recevés en notre particulier les re-merciemens que nous devons à l’énergie que vous mettés dans vos augustes fonctions. Si dans nos travaux multipliés nous avons besoin de prendre haleine nous nous tournerons vers la montagne salutaire qui nous donnera de cet air pur qui anime le coeur et vivifie les esprits. Salut et fraternité. Vive la montagne. Qu’elle dure autant que le firmament Miquel, agent nat. et quatre autres signatures. 8 Le conseil général de la commune d’Avignon [Vaucluse] invite la Convention nationale à ne voir qu’un vain prétexte dans les cris combinés des amis de la tyrannie, des suppôts de la dictature, dont les clameurs criminelles égarent les sociétés populaires, en disant que l’aristocratie et le modérantisme lèvent la tête, et que les patriotes sont dans les fers. Mention honorable, insertion au bulletin (16). [Le conseil général de la commune d’Avignon à la Convention nationale, le 12 vendémiaire an III] (17) Représentants, Marseille alloit donc, encore une fois, se déclarer l’ennemie de la Patrie et lever l’étendard de la rébellion contre la représentation nationale ! C’étoit encore dans cette commune que se vantoient les scélérats qui vouloient faire revivre le sistème affreux de terreur de proscription et de sang, enfanté par Robespierre! C’étoit cette commune qui encourageoit, rani-moit tous les factieux du Midi, tous les voleurs favorisés par le Cromwell françois, à resaisir la proie que vous leur aviez arrachée! C’est dans cette commune que la représentation nationale a été outragée, et que vos collègues ont failli tomber sous le poignard des assassins! Et voilà donc, Législateurs, l’énigme dévoilé ! voilà le sens de ces propos insensés que débi-toient dans tout le Midi les agens bien connus de la conspiration ! ils comptoient sur le succès de leur complot liberticide; ils nourrissoient l’espoir criminel que les efforts de la perfide coalition qu’ils formoient audacieusement, sous les yeux de la représentation nationale, remet-troient encore en leurs mains le glaive de la loi (16) P.-V., XLVII, 128. Bull., 29 vend, (suppl.); F. de la Républ., n" 23; J. Mont., n° 3; J. Perlet, n" 750. (17) C 321, pl. 1346, p. 26. sous lequel ils vouloient assouvir leurs implacables vengeances et se gorger du sang des français. C’étoit donc cet espoir barbare qui les enga-geoit à annoncer que dans quinze jours tout au-roit changé de face; que la mort alloit être encore une fois à l’ordre du jour, et qu’alors ils sauroient bien se débarrasser de toutes les formes qui avoient cependant si peu arrêté leur marche. Oui, législateurs, vingt mille français assassinés dans deux mois par ces tribunaux de sang que Robespierre avoit établi, et cent mille français qui dans les horreurs des cachots s’at-tendoient au même sort, n’étoient pas même en état d’assouvir leur soif sanguinaire. L’assassinat alloit recevoir une nouvelle organisation ; de la horde barbare, alloit se lâcher comme des animaux féroces sur les amis de la République. C’étoit pour arriver à ce but que ces hommes pervers vouloient achever d’égarer les sociétés populaires ! C’étoit pour cela que d’un bout de la france à l’autre on entendoit une foule d’homme trompés s’écrier que l’aristocratie et le modérantisme levoient audacieusement la tête et que les patriotes étoient dans les fers! Ils vouloient les armes dont Robespierre les avoient pourvus et frapper le patriote pur, l’homme probe, celui qui avoit eu le courage de s’élever contre leurs manoeuvres scélérates. Ah, législateurs! Vous n’aurez sauvé la Patrie que lorsque le sol de la République sera purgé des restes impurs de cette abominable faction. N’écoutez pas ses perfides clameurs! Non; ce ne sont pas les aristocrates qui lèvent la tête ; ce sont les Patriotes de 89. Ce sont les hommes de la Révolution, ce sont les amis de la liberté, de la République. Ce ne sont pas les aristocrates que vos collègues ont mis en liberté dans le Midi ; ce sont des cultivateurs, des ma-nouvriers, des parens des déffenseurs de la Patrie, des patriotes enfin qui remplissoient les cachots bâtis par le tyran, ces mêmes cachots ne recèleront désormais que les conspirateurs, les traitres, et les tyrans; si cependant ces hommes qui avoient osé se revetir des couleurs de l’aristocratie pouvoient relever une tête al-thière au point d’allarmer les bons citoyens, que leur premier mouvement soit le signal de leur mort. Ne craignez donc rien de l’aristocratie; elle a perdu tout espoir de renaître ; si elle ose entreprendre le peuple est là, et il l’auroit bientôt terrassée. Ne voyez qu’un vain prétexte dans les cris combinés des amis de la tyrannie, des suppôts de la dictature! et dans les nouveaux efforts de ces monstres, vous découvrirez leurs vues criminelles ; vous signalerez tous ceux qui les favorisent et vous prendrez ces mesures fermes et vigoureuses qui par la destruction des tyrans de toutes espèces assurent à jamais le triomphe de la liberté, et le bonheur du peuple français. J.-F. Rochetin, maire, Fabre, agent nat. et neuf autres signatures.