{Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [20 mai 1790.) 597 serai à déposer en vos mains, 10,500 livres, pour le quart d’uu revenu d’un capital que lu suspension de 1788 paralyse, depuis vingt et un mois, dans le portefeuille d’une société dont je suis le gérant. J’espérais, Monsieur le président, des circonstances qui m’aideraient à ne mettre aucun retard, ni condition, à cette dernière partie de mon offre; et c’est l’unique considération qui m’a rendu tardif à la présenter. J’ose vous prier de vouloir bien, même après votre présidence, rester le dépositaire de ma lettre, jusqu’à son entier effet; votre consentement là-dessus sera, en même temps, l’agrément de mes efforts, qui ne sont faibles que parce qu’ils sont proportionnés à mes moyens. J’ai l’honneur d’être, avec respect, Monsieur le président, votre très humble et très obéissant serviteur. Jean-Jacques Clavière. M. Durand de Haillane, membre du comité ecclésiastique. Vous savez, Messieurs, que les travaux du comité ont été partagés en trois sections et que la première de ces sections vous a déjà fait un rapport (1). Un second rapport , relatif au traitement à accorder au clergé actuel et un troisième rapport qui traite des fondations et patronages laïques, sont prêts. Je demande si l’Assemblée veut eu entendre la lecture ou en ordonner l’impression. L’Assemblée, désireuse de passer à son ordre du jour, décide quelesdeuxrapports seront imprimés, distribués et annexés au procès-verbal. Ils sont ainsi conçus: Rapport (2) fait à l'Assemblée nationale, au nom du comité ecclésiastique , par M. l’ahhé Expilly, recteur de Saint-Martin du Morlaix, député de Bretagne , sur le traitement du clergé actuel. Messieurs, le travail que votre comité ecclésiastique va mettre aujourd’hui sous vos yeux, est le complément des décrets que vous avez rendus sur les biens du clergé, et notamment de ceux que vous avait proposé votre comité des dîmes. Vous avez décrété, le 2 novembre, que les biens du clergé étaient à la disposition de la nation, à la charge de fournir aux frais du culte, à l’entretien de ses ministres et au soulagement des pauvres; 2° que, dans les dispositions à faire pour l’entretien des ministres de la religion, il ne pourra être assuré à la dotation d’aucun curé, moins de 1,200 livres par année, non compris le logement et le jardin en dépendant. Par vos décrets du 20 avril dernier, vous avez ordonné que l’administration des biens déclarés être à la disposition de la nation, serait confiée aux assemblées de département et de district, et qu’à compter du 1er janvier 1790, le traitement de tous les ecclésiastiques serait payé en argent aux termes et sur le pied qui seraient fixés; qu’en conséquence, les ecclésiastiques seraient (1) Voyez le rapport de M. Martineau sur la constitution du clergé, séance du 21 avril 1790 ; Archives parlementaires, lre série, tome XIII, page 166. — Voyez également le rapport de M Ghasset, séance du 9 avril 1790, sur le remplacement des dîmes ; Archives parlementaires, lr0 série, tome XII, page 611. (2) Le rapport de M. l’abbé Expiily n’a pas été inséré au Moniteur. tenus de verser leurs revenus dans les mains du receveur de leur district, sauf à se retenir leurs traitements ou pensions. Ainsi, Messieurs, les traitements des ecclésiastiques doivent recevoir une nouvelle fixation, ou plutôt une réduction, d’après les termes de votre décret. Le traitement des curés ne doit pas être moins de 1 ,200 livres. Le résultat de ce nouvel arrangement doit encore laisser à la nation de quoi satisfaire à l’engagement qu’elle a pris de fournir aux frais du culte et au soulagement des pauvres; telles sont les données qui ont dû diriger cette partie des travaux de votre comité ecclésiastique. Il ne le dissimulera pas, Messieurs, en s’en occupant, il a eu besoin de se rappeler que sa tâche n’avait pour objet que l’exécution de vos décrets; c’est en ne perdant pas de vue ce but important qu’il a pu soutenir son courage au niveau des difficultés. Que, dans la nouvelle organisation du clergé, vous établissiez plus ou moins de ministres ; que vous fixiez leurs honoraires à un taux plus ou moins élevé, si la raison vous a guidés dans votre marche, vous ne trouverez, Messieurs, aucune difficulté; nulle réclamation ne s’élèvera contre votre plan, parce que celui qui reçoit librement ne peut jamais se plaindre qu’on lui donne trop peu. Mais quelle différence entre ces travaux créateurs, et ceux dont nous vous occupons en ce moment! Ils sont commandés, sans doute, par d’impérieux motifs, il doit en résulter de très grands avantages; mais enfin ils portent l’empreinte de la destruction, et cette image toujours affligeante altère fortement l’éclat du bien qu’elle couvre. C’est à travers les intérêts et l’opinion d’une foule d’individus accoutumés à regarder comme une propriété irrévocable l’usufruit delà portion des biens de l’Église qui leur avait�été distribuée, qu’il faut se faire jour pour arriver à l’exécution de vos décrets. Dans cette carrière pénible, chaque pas peut être marqué par un obstacle; chaque individu peut se croire en droit de vous accuser d’injustice; vous devez d’autant plus sûrement vous y attendre, que c’est à l’habitude de jouir, à des besoins factices, à la vanité, au luxe, que vous allez commander les plus grands sacrifices , et personne n’ignore jusqu'à quel point la vanité et la mollesse s’attachent à leurs jouissances. Mais, si de grandes difficultés s’élèvent devant vous, Messieurs, des motifs plus grands encore vous ordonnent d’avancer. L’intérêt de la religion, l’intérêt bien entendu de ses ministres eux-mêmes, l’intérêt de l’État justifient également et les décrets que vous avez rendus, et ceux que vous allez rendre. L’intérêt de la religion : oui, Messieurs, il est temps de faire cesser ce contraste scandaleux entre l’esprit d’une religion fondée sur l’humilité et le détachement des richesses, et l’opulence orgueilleuse dans laquelle vit une partie de ses ministres à l’ombre même du respect qu’inspire leur auguste caractère. Abus révoltant dont les ennemis de l’Eglise n’ont su que trop profiter, et qui l’a plus affaiblie peut-être que les attaques répétées de l’hérésie 1 ba religion gagnera à la réforme que vous allez introduire dans le temporel du clergé. Car de même que la sublimité de sa morale se réfléchit sur ses ministres, de même la fidélité des prêtres aux lois divines, et la régularité de leurs mœurs tournent au profit de la religion et assurent son triomphe. La reli- [Assemblée nationale, J ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [20 mai 1790.] gion y gagnera, parce que ses ministres, débarrassés des soins d’une administration temporelle, se livreront exclusivement à l’exercice de leurs fonctions, parce que le temple du Seigneur ne sera plus une maison de trafic et de commerce; parce qu’enfin, placés dans l’heureuse impuissance d’acquérir des richesses, les ecclésiastiques ne seront plus tentés d’abuser de l’autorité de la religion pour s’en procurer. Ils y gagneront eux-mêmes, Messieurs, car leur seul intérêt légitime est celui de la religion; mais d’ailleurs leur subsistance sera désormais assurée et à l’abri des vicissitudes du commerce et des saisons; enfin, le respect et la véritable considération, que l’abus des richesses avaient écartés d’autour d’eux, les attendent au sein d’une heureuse médiocrité qui leur promet de plus un asile sûr contre les traits de la calpmnie. Enfin, Messieurs, l’intérêt de l’État commandait cette réforme; je ne parle pas seulement des secours que la nation doit attendre des biens du clergé pour l’acquittement de la dette publique, mais encore des avantages que l’agriculture saura retirer de ces biens confiés jusqu’à présent à des usufruitiers peu soigneux, et surtout de l’extinction de cette inilm nce politique du clergé qui sera toujours un sujet d’étonnement pour l’homme sincèrement religieux, comme pour le philosophe. Nous ne devons pas nous arrêter à cette objection répétée si souvent et avec une confiance si étonnante. Les titulaires, dit-on, sont des usufruitiers : l'usufruit est une propriété, ils la tenaient de la loi ; ils ne peuvent donc en être privés sans recevoir une indemnité complète, comme tous autres propriétaires. Vos décrets ont déjà décidé cette question ; ils annoncent que les ecclésiastiques se retiendront, sur leurs revenus, une portion équivalente au traitement qui leur sera attribué : ces expressions annoncent formellement une réduction ; votre comité a donc dû y procéder sans s’embarrasser de l’objection dont il s’agit. Au reste, Messieurs, c’est une grande erreur de comparer à une propriété privée, à la propriété d’un citoyen qui ne la doit qu’à lui-même, l’attribution d’un usufruit faite aux ministres du culte par la puissance chargée de fournir aux frais de ce culte. Le clergé n!a jamais été qu’usu-fruitier de ces biens, vous l’avez décidé avec justice. Il tenait cet usufruit de la nation à qui appartenait la disposition de ces biens. La nation peut donc le lui retirer, de même qu’on retire un salaire à celui qui cesse de le mériter, de même qu’elle supprime des pensions accordées sans juste motif. Dans tous les cas, l’attribution d’un traitement excessif aux ministres inutiles est un abus que des milliers de siècles ne sauraient légitimer; le principe constant, le seul qu’il faille respecter, c’est que le revenu du ministre du culte doit être proportionné à ses travaux : tout ce qui n’est pas conforme à cette règle est abus et appelle la réforme. Vos décrets sont donc fondés sur des principes aussi vrais et aussi purs que leur application doit être utile. C’est en remontant aux premiers siècles de l’Eglise que nous trouverions, Messieurs, le modèle d’une fixation vraiment évangélique du traitement des ministres du culte. Ayant la nourriture et de quoi nous couvrir, soyons-en contents , dit l’Apôtre ; « un clerc, dit M. de Fleury, doit se » contenter de vivre des biens de l’Eglisé, c’est-à-» dire ne prendre que le nécessaire; s’il jouit » des biens de l’Eglise sans la servir réellement, » il charge sa conscience; et si, en la servant » bien, il prend plus que le nécessaire, soit pour » vivre délicieusement, soit pour thésauriser, il » s’attire un terrible jugement. » Cependant, Messieurs, quelque vrais, quelque respectables que soient ces principes, nous sommes loin de croire que ce soit ici le cas d’en faire l’application ; appelés à réformer des abus, vous ne l’êtes pourtant pas à imposer aux ecclésiastiques un genre de vie qui serait pour le grand nombre un joug insupportable ; nous ne vous proposerons même point, pour le clergé actuel, le traitement que vous destinez au clergé futur. Les ecclésiastiques d’alors seront des hommes nouveaux. Ils sauront trouver, dans le traitement qui va leur être assigné, ce qui suffira aux vrais besoins. Mais il n’en est pas de même des titulaires actuels; ils ont connu les avantages que donnent les richesses ; ils ont vu naître, autour d'eux, les besoins factices qu’elles entraînent ; ils y seront encore longtemps assujettis ? N’y-a-t-il pas une sorte de justice à user d’indulgence à leur égard, à leur fixer un sort tel qu’ils puissent conserver les jouissances qui ne leur sont pas rigoureusement interdites? Votre comité, Messieurs, s’est pénétré de ces considérations dans le travail qu’il a l’honneur de vous proposer. JN’ôterqu’à ceux qui ont beaucoup trop, et donner aux ministres utiles qui n’ont pas assez ; voilà la règle qu’il s’est efforcé de suivre dans les différentes fixations. C’est sur des bénéficiers trop riches, sur des prélats dont le revenu n’éiait point proportionné à l’importance de leur diocèse, que tombent les réductions qu’on ne peut s’empêcher de faire. On n’ôte rien aux ecclésiastiques qui vivaient dans la médiocrité. Oo donne aux pasteurs, àqui, jusqu’à présent, on avait presque refusé le nécessaire. Ainsi, Messieurs, ce nest qu’une répartition des biens de l’Eglise à laquelle vous allez procéder, et la nation n’y prendra pour ses besoins que la plus petite part ; car, nous pouvons l’observer en commençant, le traitement des bénéficiers actuels s’élèvera à 140 millions. Or, les biens du clergé, suivant l’évaluation moyenne, ne rapportent que 170 millions ; la nation ne retiendra donc que 30 millions pour fournir aux frais du culte, aux charités publiques et aux impositions. Il faut, Messieurs, vous faire connaître, d’abord, le mode général, adopté par votre comité, pour la réduction des revenus des ecclésiastiques. Vous devez à tous les ministres qui continueront d’être utiles un honoraire proportionné à l’importance de leurs travaux, une indemnité relative aux biens dont ils perdent la jouissance'; cette indemnité est, au contraire, tout ce que vous devez aux ministres qui n’ont jamais été utiles ou qui cesseront de l’être; mais, d’un côté, elle ne peut pas être inférieure à ce qui confirme l’aisance ; de l’autre, elle ne doit pas non plus atteindre à l’énorme superflu, car alors vous ne parviendriez point au but de vos décrets. Le traitement des ministres utiles est déjà déterminé par les projets de décrets qui vous ont été présentés sur l’organisation du clergé futur. Votre comité a dû prendre à peu près les mêmes bases pour fixer dans le traitement des ministres, actuellement en exercice, la portion qu’on doit regarder comme leur honoraire, et qui sera le minimun de leur revenu futur. Quant à l’indemnité, elle’ a été fixée à la moitié de l’excédent [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mai 1790. J 599 du revenu actuel sur une somme déterminée pour chaque classe de bénéficier. Mais le résultat même de cette fixation a été restreint par un maximun qu’on ne pourra dépasser. Ce maximun a été soigneusement discuté, il a été attaqué, il le sera sans doute encore; c’est pourtant le seul moyen qui remplisse vos vues, et votre comité a préféré de courir, en vous le présentant, le risque de choquer quelques opinions, que d’en présenter un plus spécieux en apparence, et dont l’adoption serait dangereuse. On a prétendu qu’il était injuste d’établir un maximum qui, étant nécessairement fixé assez bas, apporterait une réduction énorme dans le revenu des riches bénéficiers, tandis que ceux dont le revenu était modéré, n’en souffriraient point. On a proposé, en conséquence, de faire supporter au marc la livre à tous les bénéficiers, l’augmentation attribuée aux curés et autres ministres utiles, les frais du culte et des aumônes. Cette forme de procéder paraît plus juste, parce qu’une taxe proportionnelle aux facultés, semble être toujours la taxe la plus équitable; elle serait cependant, Messieurs, la plus désavantageuse à l’Etat et aux bénéficiers, en même temps qu’elle serait la plus contraire à l’esprit de vos décrets. Sans parler des règles de l’Eglise, d’après lesquelles la nation aurait le droit de prélever les deux tiers des biens du clergé pour fournir au culte et au soulagement des pauvres, ce qui ne laisserait que 57 millions à répartir entre les ecclésiatiques ; en regardant, dis-je, celte évaluation comme très outrée, il résultera toujours de la répartition au marc la livre, une injustice extrême envers les bénéficiers peu riches. Supposons, en effet, que les charges dont il faudra faire la déduction sur les biens du clergé, frais du culte, impositions, charités, augmentations en faveur des curés et vicaires, n’absorbent que le tiers de ces biens. Qu’en arrivera-t-il? Que le bénéficier simple, le chanoine qui n’a que 100 pistoles de revenu, se verra réduit à 700 livres, et n’aura plus le nécessaire, tandis que l’ecclésiastique qui jouit d’un revenu de 60,000 livres, réduit à 40,000 livres, nagera encore dans les richesses. Est-ce là, Messieurs, ce que vous avez voulu faire en ordonnant une nouvelle distribution des biens de l’Eglise? Avez-vous entendu réduire à la pauvreté les prêtres qui n’ont qu’une honnête aisance et respecter le scandaleux superflu des riches? Enfin, ne ferait-on cette répartition que sur les bénéfices d’un produit un peu élevé? Dans ce cas encore, Messieurs, le sort des ecclésiatiques serait plus désavantageux que dans le plan de votre comité; ou, s’il l’était moins, la nation serait hors d’état de faire face aux engagements qu’elle a pris, et vos décrets resteraient sans exécution. On pourra, si cela devient nécessaire, vous prouver, par des calculs détaillés, la vérité de ces propositions. D’autres personnes ont pensé qu’il fallait donner à tous les bénéficiers le tiers du produit net de leurs bénéfices, sans aucune charge; mais ce plan e»t, comme le premier, contraire à l’intérêt de la masse des titulaires. Ce tiers, en évaluant toujours les revenus du clergé à 170 millions, ne s’élèverait qu’à 57 millions, au lieu de 140 que donne le plan de votre romiié. D’un autre côté, le bénéficier pauvre serait très maltraité, tandis que le riche le serait peu ; le plus grand nombre aurait moins dans ce plan où l’on ne donne que le tiers, que dans celui du comité, où on laisse plus de la moitié. Vous le voyez, Messieurs, ces deux projets ont l’inconvénient de ménager le clergé opulent aux dépens de celui qui ne l’est pas; de laisser subsister sur la tête de quelques ecclésiatiques cette masse énorme de richesses que vous devez, que vous voulez diviser, et de restreindre l’honnête médiocrité du grand nombre. Mais ce n’est pas dans cet esprit que vous avez rendu à la nation l’administration des biens ecclésiatiques; ce n’est pas ainsi que vos décrets doivent être exécutés. Votre comité croit avoir mieux saisi vos intentions, en adoptant un plan qui respecte les revenus modiques, diminue peu les revenus modérés, et ne frappe que sur l’énorme superflu. Il est sans doute des ecclésiatiques qui souffriront de la fixation du maximum. Ces hommes qui, mettant à profit une autorité passagère, se sont couverts sans pudeur des biens de l’Eglise, ceux que la faveur a comblés de ces mêmes richesses perdront beaucoup, parce qu’ils avaient beaucoup trop; mais ils sont heureusement en très petit nombre. Faut-il donc, Messieurs, sacrifier l’intérêt de l’Etat et celui de la majeure partie des ecclésiastiques à l’intérêt de quelques individus qui ne méritent que votre sévérité, et à la crainte de les ramener à un état d’où ils ne sont sortis que par des voies condamnables ! Il est temps, Messieurs, de vous dire à quelle somme est fixé le maximum dont il s’agit: nous l’avons porté à 30,000 livres pour les évêques, et à 6,000 livres pour les autres bénéficiers séculiers. Ces sommes paraîtront peut-être modiques aux défenseurs du clergé riche. Eh quoi! Messieurs, ce qui suffit à l’opulence d’une famille nombreuse, et d’un rang élevé, ne suffirait pas à un célibataire qui, par état, est tenu à une grande modération daus ses dépenses! Ah! gardons-nous de croire qu’on puisse réclamer ici, au nom de quelques ministres de la religion, en faveur du droit d’afficher une luxe affligeant et de violer ouvertement leurs premiers devoirs? Fera-t-on valoir les dettes que les bénéficiers ont contractées et l’intérêt même de leurs créanciers ? Mais un bénéficier peut-il avouer qu’il a hypothéqué les revenus de son bénéfice dont il n’est que l’usufruitier, et qu’il s’est mis dans le cas de mourir en faillite? Un créancier serait-il écouté à dire qu’il a compté sur un gage que la mort peut lui enlever à chaque instant? Non, Messieurs; de telles hypothèses ne doivent point diriger vos résolutions. Si des bénéficiers ont contracté des dettes, il faut penser qu’elles ne sont pas considérables, et, dans ce cas le traitement que vous leur attribuerez fournira facilement aux hommes sages et économes les moyens de les acquitter. Dira-t-on que les riches bénéficiers faisaient participer leurs parents à leur fortune, et qu’en dépouillant ces ecclésiastiques on peut jeter le désordre dans des familles entières? Mais cet emploi des biens de l’Eglise est déjà un abus; en second lieu, cette objection n’a de fondement que pour bien peu de bénéficiers du nombre desquels ne sont pas ceux dont le revenu doit diminuer le plus par les réductions proposées; enfin ce que vous laisserez aux ecclésiastiques leur suffira encore pour entretenir l’aisance dans leurs familles, s’ils veulent se retirer dans leur sein et y consommer leur revenu. Une dernière et grande considération ne manquera pas d’être mise en avant: c’est 1 intérêt des pauvres, sur qui quelques bénéficiers résidants et surtout les curés riches versaient leur super- g0Q [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mai 1790.} flu; mais que ce soin ne fasse naître aucune inquiétude sur les suites de vos décrets. Le comité que vous avez chargé de l’extinction de la mendicité vous a déjà fait part de ses travaux et de ses vues; elles doivent rassurer les hommes charitables sur le sort des indigents. Les secours que la nation leur prépare seront bien plus efficaces, plus constants, plus certains, que ceux d’une bienfaisance passagère et variable comme les titulaires. Enfin, Messieurs, les revenus que le clergé remet à la nation ne sont pas assez considérables pour permettre un maximum plus élevé. La nation doit fournir au frais du culte et au soulagement des pauvres. Ce qu’elle retient pour faire face à ces charges est peu de chose en comparaison de ce qu’elle aurait droit de prendre d’après les lois de l’Eglise. Si elle laissait plus aux bénéficiers, elle contracterait une charge trop onéreuse pour remplir ses engagements envers la religion et les pauvres, ce qu’assurément les défenseurs du clergé n’ont garde de prétendre. Les ministres de la religion doivent donc se trouver satisfaits des dispositions qui leur assurent un revenu net, liquide, certain et dégagé de toutes charges. Au reste, votre comité n’a pas perdu de vue ce qu’il devait à la vieillesse et aux talents qui ont été utiles. Vous vous réserverez la faculté d’accorder une augmentation de traitement aux ecclésiastiques, à qui leurs infirmités la rendront nécessaire, et à ceux qui, par des services rendus à l’Eglise ou à l’Etat, seront dignes de la reconnaissance publique. Les ecclésiastiques, actuellement en possession de bénéfices, peuvent être rangés sous quatre classes : la première comprend les archevêques et évêques ; la seconde, les curés et vicaires ; dans la troisième, nous placerons les abbés et prieurs-commendataires, chanoines, et tous titulaires de bénéfices séculiers, sans charge d’âmes; dans la quatrième, les abbés et tous autres supérieurs réguliers. Vous connaissez déjà à quoi peut s’élever le traitement des évêques. Il ne peut être au-dessus de 30,000 livres : voici comment se fera cette fixation. Les prélats dont tous les revenus ecclésiastiques ne sont pas supérieurs à 15,000 livres, recevront une somme équivalente; et ceux qui jouissent d’un revenu plus considérable, auront premièrement 15,000 livres, deuxièmement la moitié de l’excédent de leur revenu sur cette somme, de manière que le total n’excède point le maximum ci-dessus. Il n’est presque point d’é-véques dont tous les revenus ecclésiastiques ne montent à 45,000 livres, il n’y en aura donc point dont le traitement ne soit désormais de 30,000 livres. Cette observation doit suffire pour calmer les esprits que ce mode de fixation aurait effrayés. Nous ne vous proposons aucune différence entre les archevêques et évêques : cette hiérachie purement spirituelle n’influait point dans l’ancien régime sur les revenus des prélats; elle ne peut être ici d’aucune considération. Nous n’avons fait qu’une exception au maximum déterminé plus haut, et c’est en faveur du prélat de cette capitale. Il est inutile de vous détailler les motifs qui la justifient. A portée de juger des dépenses énormes qu’exige un rang élevé dans cette immense ville, et des nombreuses occasions qu’a un évêque d’y exercer sa charité, vous ne trouverez pas, sans doute, que 75,000 livres, pour l'archevêque de Paris, soient un traitement disproportionné avec celui des autres évêques. Votre comité ecclésiastique vous a proposé un plan d’organisation; du clergé, où plusieurs évêchés doivent être supprimés. Vos regards doivent donc s’arrêter sur le sort de ces prélats sans diocèse. Affranchis des fonctions pastorales, dont leur traitement est l’honoraire, ils doivent nécessairement s’attendre à une réduction, telle pourtant qu’en perdant leurs sièges, ils ne puissent y regretter que la faculté de faire un plus grand bien. Nous vous proposerons de leur assurer en pension de retraite les deux tiers du revenu qu’ils auraient eu, si leurs diocèses avaient été conservés. Ce n’est pas aux chefs de l’Eglise, aux successeurs des apôtres qu’il faut présenter des motifs consolateurs sur les pertes que leur cause unefré-forme indispensable; c’est d’eux, au contraire, que nous devons attendre l’exemple. N’en doutons pas, ils sauront le donner, et tous les ecclésiastiques qu’ils gouvernent, imitant le désintéressement de leurs chefs, recevront, avec soumission, les décrets qui changent leur sort. Nous devons, Messieurs, vous arrêter plus longtemps sur le traitement des curés: ici se présentent les plus sérieuses difficultés. Dans cette classe de pasteurs qui tous ont de pareils devoirs à remplir, l’inégalité d’honoraire se fait sentir de la manière la plus choquante. Ici une cure très étendue n’a de revenu qu’une chétive pension, là une cure qui n’exige pas autant de soins que la première, est très richement dotée; ici le casuel n’est rien, là il est tout. Un curé de campagne jouit d’un revenu très considérable et énormément disproportionné à ses besoins, tandis que dans les villes où les dépenses augmentent, où l’existence est si coûteuse, un curé dont la paroisse est petite, passe sa vie dans une véritable détresse. Voilà, Messieurs, ces différences affligeantes que votre intention est de faire cesser; votre comité a fait tous ses efforts pour la seconder. Son attention s’est fixée surtout sur les curés congruistes. Il n’a pu voir, sans douleur, l’espèce d’avilissement dans lequel ont vécu si longtemps ces utiles et respectables ministres. Vous l’avez tous vu dans les campagnes ce spectacle douloureux d’un pasteur destiné à porter des secours à l’indigence, et gémissant lui-même dans la disette, méprisé par les riches et trop peu considéré par les pauvres. Mais que celte situation devenait plus affligeante dans les villes! Là, le spectacle de l’abondance et d’un luxe fastueux s’offrait sans cesse au curé congruiste, et lui seul manquait du nécessaire. Quels abus, quels inconvénients ne résultait-il pas de cet injuste traitement! Si les paroissiens affectaient de riches offrandes, s’ils s’efforçaient en attirant leur pasteur chez eux, d’adoucir son sort, n’était-il pas obligé d’acheter ces bienfaits par une dissipation pernicieuse et souvent par de lâches complaisances? Alors que devient cette considération si nécessaire aux hommes chargés de nous rappeler nos devoirs? Où est cette indépendance qui donne tant de force aux leçons delà vertu? où sont cette liberté d’esprit, cette pureté de vie, cette innocence de mœurs, celle tranquillité sur son propre sort, sans lesquelles on s’occupe si difficilement du bonheur de son prochain? Mais vous les connaissez, Messieurs, ces nombreux inconvénients: la nation entière vous lésa dénoncés, et le tableau que je pourrais en faire n’ajouterait rien, à votre empressement pour les prévenir. (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mai 1790.] Je dois me borner à vous faire part des réflexions qui ont frappé votre comité, lorsqu’il a voulu faire l’application de vos décrets. Par ceux du 4 août, vous aviez supprimé le casuel : cette loi ne paraissait s’appliquer qu’aux campagnes, et votre intention peut-être était de conserver le casuel dans les villes; mais, il faut l’avouer, cette distinction était fondée sur des raisons plus spécieuses que solides. Votre comité, averti par les faits, l’a examinée attentivement, et s’est convaincu que rien ne pouvait la justlier; il vous proposera donc de supprimer ce casuel dans les villes comme dans les campagnes. Plusieurs motifs d’intérêt majeur semblent devoir vous y déterminer. Cette suppression manquerait à la réforme que vous allez introduire dans le régime ecclésiastique; ce n’est pas au moment où vous, vous efforcerez de rendre au culte la pureté et la majestueuse simplicité qui lui conviennent que vous pouvez laisser subsister ces rétributions pécuniaires qui donnent un air mercantile aux cérémonies de l'Eglise. En second lieu, Messieurs, les raisons qui vous ont déterminés à abolir le casuel des campagnes ne subsistent-elles pas pour les villes? Celles-ci sont-elles donc entièrement peuplées de gens riches? L’indigence en est-elle bannie? Qu’elle différence pouvez-vous faire entre l’artisan de la ville et l’artisan de la campagne, qui, l’un et l’autre, ne trouvent, dans leur travail-dé chaque jour, que la subsistance du lendemain ? Pouvez-vous laisser le premier sous une charge dont vous affranchissez le second, et qu’ils n’ont, ni l’un ni l’autre, le moyen de supporter? Dira-t-on que, dans les villes même, on peut excepter du casuel la classe la plus indigente, en y soumettant celle des riches; mais où placerez-vous, Messieurs, la ligne de démarcation? Dans cette échelle de fortunes où les différences graduelles sont si peu marquées, quel sera le point qui vous fixera? Celui qui se trouvera immédiatement au-dessus, ne pourra-t-il pas révoquer en doute la justesse de votre appréciation? Ne lui sera-t-il pas facile d’éluder l’application de la loi? Non, cette bizarrerie ne saurait convenir à la simplicité de votre plan; toute distinction ici est impraticable et répugne à la nature des choses. Enfin, le peuple n’a saisi, dans votre décret du 4 août, que les motifs qui l’ont déterminé. Vous avez aboli le casuel, parce qu’il était une charge pour les citoyens peu fortunés. Les habitants des villes se sont appliqué cette exemption, et ils l’ont fait avec justice. Ils se sont persuadés que l’on ne pouvait pas exiger d’eux une espèce d’impôt qui excédait autant leurs moyens que ceux des habitants de la campagne. Déjà, dans plusieurs villes, on a refusé de payer le casuel. Dans cette capitale même, plusieurs curés ont éprouvé l’effet de cette interprétation de vos décrets. Vous tenteriez vainement de faire entendre aujourd’hui la distinction que vous avez mise entre les villes et les campagnes, et de rétablir, sur les citadins, une charge dont ils se sont déjà affranchis. Hàtez-vous donc de légitimer cet affranchissement, que, d’ailleurs, la religion, la justice et la décence réclament de concert. Mais cet exposé ne doit pa3 seulement vous prouver la nécessité de la suppression actuelle du casuel; une conséquence non moins juste, Messieurs, c’est que vous devez, dès cette année, faire jouir les curés de ville de l’augmentation de traitement que vous décréterez, afin qu’ils y trouvent . 601 le dédommagement de ce que votre décret du 4 août leur a fait perdre. Le traitement des curés congruistes est déterminé, il ne peut que devenir meilleur; mais quel sera celui des curés qui jouissent d’une riche dotation? Réduirez-vous leur revenu dans les mêmes proportions que celui des autres bénéficiers? Oui, Messieurs, parce que ce n’est pas le titre de curé que vous voulez gratifier, mais les fonctions pastorales que vous voulez récompenser. L’honoraire doit être proportionné au service. Le curé d’une petite paroisse qui jouit de grands biens ressemble plus à l’inutile bénéficier qu’au laborieux pasteur. Peut-il s’étonner si, dans la fixation de son traitement, on combine ces deux rapports? En un mot, un traitement proportionné avec l’étendue de la paroisse, une indemnité relative aux biens dont ils cessent de jouir, voilà tout cô que vous devez aux curés riches. Espérons, Messieurs, que ces hommes, qui ont si longtemps gémi sur l’inégalité qui les séparait de leurs confrères, se trouveront heureux de voir tourner au profit de ces derniers une partie de leur superflu. Par vos décrets sur l’organisation future du clergé, vous fixerez le traitement des curés; c’est ce même traitement qui doit servir de minimum à celui des curés actuels ; pour ceux dont le revenu est plus considérable, leur traitement sera augmenté de la moitié de l’exédent de leur revenu, en sorte qu’il ne passe point la somme de 6,000 livres. Ceux qui se plaignent de l’énorme disproportion qui régnait dans la répartition des biens ecclésiastiques, et surtout de ce que cette disproportion pesait si fortement sur les curés et ministres utiles, se récrieront sans doute sur ce que votre comité laisse subsister cette cruelle inégalité, entre les évêques et les curés, sur la différence du maximum des premiers à celui des seconds. Nous avouerons, Messieurs, que leurs réclamations sont mieux fondées que celles du clergé riche ; mais le nombre des curés est si grand que nous avons craint, en rendant leur sort tel qu’il devrait être, ou de réduire à rien les riches bénéficiers, ou de mettre la nation dans le cas de supporter un impôt excessif. Que les riches ecclésiastiques, de leur côté, jettent les yeux sur cette foule de pasteurs laborieux dont le revenu n’excédera guère 1,200 livres, sur le petit nombre de ceux qui atteindront le maximum, et qu’ils reconnaissent que, s’il fallait établir une nouvelle proportion entre le traitement des curés et celui des évêques, ce ne pourrait être qu’à l’avantage des premiers. L’augmentation du traitement des vicaires ne peut donner lieu à aucune discussion : leur portion congrue a formé, jusqu’à présent, tout leur revenu : elle doit augmenter avec celle des curés; nous vous proposons de la fixer aux termes déjà énoncés dans le projet de décret sur l’organisation future du clergé. Nous avons placé dans la troisième classe tous les titulaires de bénéfices séculiers, sans charge d’âmes. Gettefoule d’abbés, de prieurs-commenda-taires, de chanoines, si éloignés tous de leur institution primitive, va donc disparaître de la face de l’Eglise. Il faut l’avouer, Messieurs, retirer ces biens de leurs mains, ce n’est pas les enlever à la religion, c’est plutôt les lui rendre, c’est en faire un emploi plus conforme à ses véritables principes. Vous pourriez ici être rigoureux sans être injustes. Quels titres légitimes pourraient faire valoir des hommes qui ne se sont rangés 602 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 mai 1790.] sous les étendards de l’Eglise que pour parvenir aux richesses ; qui ne se sont pas faits prêtres, mais abbés, prieurs ou chanoines; qui étaient enfin d’autant plus inutiles à l’Eglise, qu’ils recevaient une plus grande part de ses biens? Au reste, les termes adoptés par votre comité, pour leur traitement, doivent satisfaire le plus grand nombre des bénéficiers, ceux qui n’ont pas entièrement renoncé à toute modération. Il vous proposera de ne rien retrancher à ceux qui n’ont pas plus de 1,000 livres, et d’attribuer aux autres, outre cette somme, lamoitié�de l’excédent des revenus ecclésiastiques dont ils jouissaient, sans que néanmoins leur traitement puisse s’élever au-dessus de 600 livres. Ce maximum va paraître bien modique : mais il est le même que celui des curés; et certes, Messieurs, il est impossible d’établir entre le traitement des bénéficiers sans charge d’âmes, et celui des pasteurs, une différence qui soit au préjudice de ces derniers ; si vous donnez plus aux bénéficiers simples, il faut donner plus aux curés; car il serait souverainement ridicule que l’utilité du ministre soit pour lui la cause d’un plus mauvais traitement: or,, il faut, dans ce cas, renoncer à rien réformer; car les biens du clergé ne suffiraient plus aux charges. Enfin, se présentent les abbés réguliers et tous les supérieurs inamovibles et amovibles des ordres religieux. A ne consulter que l’exactitude des principes, il semble que ces supérieurs n’ont pas de droit à un traitement plus considérable que les simples religieux; les mêmes vœux les lient : ils vivaient en communauté et le supérieur n’était que le premier entre les égaux; cependant, puisque, en réformant les abus, il faut encore conserver quelques égards pour les habitudes qu’ils ont fait naître, et que, dans les couvents les plus réguliers, le sort du supérieur était par le fait beaucoup plus avantageux que celui des simples religieux, nous avons cru devoir fixer leur traitement, savoir, pour les supérieurs inamovibles, à un minimum de 2,000 livres et un maximum de 6,000 livres; et pour les abbés réguliers triennaux, ainsi que les chefs d’ordres amovibles, à une somm>‘ de 1,500 livres. Voilà, Messieurs, quel est, dans le plan de votre comité, le sort de tous les ecclésiastiques, sur lesquels frappent vos décrets du 20 avril der-Dier. C’est à vous à balancer, dans votre sagesse, les raisons qui ont déterminé les réductions que j’ai eu l’honneur de vous proposer : s’il se présentait un mode de fixation plus juste, plus propre à concilier l’intérêt et de l’Etat et celui des ecclésiastiques, votre comité s’empresserait de l’appuyer ; mais celui-ci lui a paru jusqu’à présent le seul qui fût praticable, le seul qui procurât l’exécution de vos décrets d’une manière avantageuse pour l’Etat et pour Te plus grand nombre des ecclésiastiques. Il ne me reste qu’à vous parler des règles qui seront suivies pour l’évaluation de chaque bénéfice, et de la manière dont le payement sera fait à chaque bénéficier; mais tous ces objets se développeront assez dans les articles du projet que je me hâte de soumettre à votre examen. PROJET DE DÉCRET. Art. 1". A compter du premier janvier 1790, le traitement des archevêques et évêques en fonctions est fixé ainsi qu’il suit, savoir : Les archevêques et évêques, dont tous les revenus ecclésiastiques n’excèdent pas 15,000 livres, n’éprouveront aucune réduction. Ceux dont les revenus excédent cette somme auront 15,000 livres ; plus, la moitié de l’excédent, sans que le tout puisse aller au delà de 30,000 livres; et, par exception, l’archevêque de Paris aura 75,000 livres ; lesdits archevêques et évêques continueront à jouir dans leur ville épiscopale des bâtiments à leur usage et des jardins y attenant. Art. 2. Les archevêques et évêques qui, par la suppression effective de leurs sièges, resteront sans fonctions, auront pour pension de retraite, les deux tiers du traitement ci-dessus ; il en sera de même de ceux qui, sans être supprimés, jugeraient à propos de se démettre. Art. 3. A compter du premier janvier 1791, le traitement de tous les curés du royaume sera conforme à celui fixé par le décret de j’Assemblée nationale sur la nouvelle organisation du clergé, en faveur de ceux qui seront pourvus à l’avenir. A l’égard de ceux dont le revenu ecclésiastique actuel est plus considérable, ils jouiront encore de la moitié de l’excédent dudit revenu, sans néanmoins que le tout puisse aller au delà de 6,000 livres. Art. 4. Pendant le cours de la présente année 17 A0, les curés continueront à percevoir leur casuel, et ils jouiront encore, savoir : ceux dont le revenu excède 1,200 livres, de ladite somme, et de la moitié de l’excédent, pourvu que le tout n’aille pas au delà de 6,000 livres ; et à l’égard de ceux dont le revenu est inférieur à 1,200 livres, ladite somme leur sera payée, ainsi qu'il sera expliqué ci-après. Art. 5. Les vicaires continueront aussi de jouir de leur casuel jusqu’au premier janvier 1791 ; et à compter de cette époque, ils jouiront du traitement fixé par le décret sur la nouvelle organisation. Le nombre actuel des vicaires ne pourra être augmenté que dans les lieux, et à mesure que cette nouvelle organisation s’établira. Art. 6. En conséquence des articles précédents , tout casuel pour les archevêques, évêques, curés et vicaires, demeure supprimé, à compter du premier janvier 1791. Les droits affectés aux fabriques, continueront à être perçus, même après ladite époque, suivant les tarifs et règlements. Art. 7. Les abbés, prieurs-commendataires, dignitaires, chanoines, prébendés, semi-prében-dés, chapelains, et tous autres bénéficiers généralement quelconques, dont les revenus ecclésiastiques n’excèdent pas 1,000 livres, n’éprouveront aucune réduction. Ceux dont les revenus excèdent ladite somme auront: 1° 1,000 livres; 2° la moitié du surplus, sans que le tout puisse aller au delà de la somme de 6,000 livres. Art. 8. Les abbés réguliers perpétuels et les chefs d’ordres inamovibles Jouiront, savoir : ceux dont les maisons ont en revenu 10,000 livres, au moins d’une somme de 2,000 livres, et ceux dont la maison a un revenu plus considérable du cinquième de l’excédent, sans que le tout puisse aller au delà de 6,000 livres. Art. 9. Les abbés réguliers triennaux et les chefs d’ordres amovibles, jouiront d’un traitement de 1,500 livres. Art. 10. Après le décès des titulaires, les coadjuteurs entreront en jouissance d’un traitement, à raison du produit particulier du bénéfice, lequel traitement sera fixé à la moitié de ceux décrétés par les articles précédents; dans le cas néan-