182 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. \ 3 nivôse an II L J décembre 17Ù3 Le président de la commune de Givonne, dis¬ trict de Sedan, annonce a la Convention natio¬ nale que ses concitoyens, oubliant qu’ils sont tous pauvres, ont déposé pour les défenseurs de la patrie, en demandant que la Convention natio¬ nale reste à son poste, 24 chemises, 3 draps, 2 paires de souliers, 4 paires de bas et 2 paires de guêtres. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). Lettre du représentant du peuple Maure, qui annonce que les volontaires de la première réqui¬ sition du district de Joigny, au nombre de 1,450, viennent de partir pour La Fère; ceux d’Avallon, de Tonnerre et d’Auxerre se mettent en route. D’après les réformes, le contingent du départe¬ ment ne s’élèvera qu’à 9,000 hommes; mais ils seront sains, robustes, et marcheront sur les traces de leurs frères d’armes, qui ont bien mé¬ rité de la patrie, L’épuration des autorités cons¬ tituées s’effectue avec sévérité. Insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre de Maure (3). Le représentant du peuple dans le département de V Tonne, au citoyen Président de la Con¬ vention nationale. « Sens, le 29 frimaire, l’an II de la République. . « Le contingent des volontaires de la pre¬ mière réquisition du district de Joigny, dépar¬ tement de l’Yonne, au nombre de 1,450 hommes effectifs et de bonne volpnté, vient de partir ce jour par La Fère; déjà 1,000 d’Avallon, 800 de Tonnerre et une partie de ceux d’Auxerre sont arrivés ou en route pour leur destination, le reste du contingent du département ne tardera pas à les suivre. Au moyen des réformes, il ne s’élèvera qu’à 9,000 hommes, mais ils seront sains, robustes et marcheront sur les traces de leurs frères d’armes qui ont bien mérité de la patrie. « L’épuration des autorités constituées s’ef¬ fectue avec sévérité, j’espère qu’elles seront dignes des fonctions nouvelles qui leur sont at¬ tribuées. « Salut et fraternité, « Maure aîné. » Le procureur syndic du district du Dorât, au nom des autorités constituées et de la Société populaire de la même commune, adressé à la Convention la nomenclature des prêtres qui ont déposé leurs lettres et renoncé à leurs fonctions. Il annonce que dejdeux églises restant dans cette commune, l’une est consacrée à la raison et l’autre aux séances de la Société populaire. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 54. (2) Ibid. (3j Archives nationales, carton C 287, dossier 860, .pièce 6, Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). Suit la lettre du procureur syndic du district du Dorât { 2 ). Le procureur syndic du district du Dorât, au citoyen Président de la Convention natio¬ nale. « Dorât, 17 frimaire de l’an. II de la République, une et indi¬ visible. « Citoyen Président, « La raison fait les plus rapides progrès dans¬ ées contrées qu’aveugla tant de siècles la supers¬ tition. Les idoles sont renversées, plus de prêtres imposteurs, plus d’absurdes cérémonies. Une fête magnifique a été célébrée à la raison ; il ne reste plus dans cette commune que deux ci-devant églises dont l’une lui est consacrée et l’autre à la Société populaire. C’est là où la masse des citoyens apprend les grandes vérités, le respect des lois et l’amour ardent de la patrie. La Convention jugera de nos sentiments reli¬ gieux par l’adresse que je te fais passer. « Vive la République ! la liberté ou la mort. « Salut et fraternité. « Aristide Nesmond, procureur syndic. » Adresse (3). La Société populaire et les autorités constituées réunies de la ville du Dorât, à la Convention nationale. « Dorât, le quartidi frimaire, l’an II de la République française, Une et indivisible. « Délégués du peuple, « Enfin les nuages .obscurs de la supersti¬ tion et du fanatisme sont dissipés. Le torrent des lumières vient de faire disparaître pour tou¬ jours la fange de l’ignorance. La nuit des pré¬ jugés est passée, le soleil de la raison répand ses rayons bienfaisants sur la terre de la liberté; le règne du mensonge est fini, celui de la vérité s’affermit. « Le peuple, depuis longtemps esclave des prêtres, vient d’en secouer le joug odieux; les prêtres eux -mêmes viennent d’abjurer dans le temple de la raison les titres ridicules qui leur donnaient l’infernal pouvoir d’abrutir le peuple. Plus de culte que celui de la raison. « Qu’elle est belle et qu’elle est auguste cette religion qui ne fait de tout un peuple qu’une société nombreuse d’hommes sages. « Législateurs, celle-là est la nôtre; les mar¬ tyrs de la liberté sont nos saints, l’égalité et la (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 55. (2) Archives nationales, carton C 288, dossier 883, pièce 19. (3) Archives nationales, carton C 288, dossier 883, pièce 21. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J nivôse an II iëâ 1 J I ‘il décembre 1793 fraternité, voilà nos dogmes ; les principes purs de la raison, voilà notre religion. - « Les idoles du fanatisme viennent d’être abattues solennellement, le peuple en les brisant a juré de ne plus reconnaître d’autre divinité que sa souveraineté. Une foule immense de républicains viennent de célébrer ici la fête 'de la raison avec cet enthousiasme qui caractérise le réveil., d’un peuple pour la vérité. La raison, représentée par une jeune, aimable et jolie fille, était la seule divinité qui recevait nos hom¬ mages. Jamais les siècles du bigotisme dans tout leur faste orgueilleux n’enfantèrent rien de plus majestueux et de si digne d’admiration. Qu’on ne nous vante plus les faux miracles de l’ancien régime, le génie de la liberté vient d’en opérer un véritable mille fois plus grand, celui de la régénération d’un peuple, jadis supersti¬ tieux, devenu philanthrope. « O vous, législateurs intrépides qui voyez du sommet de la Montagne les progrès de la raison parmi les Français, frappez le coup terrible des¬ tructeur des rois, décrétez la perte de tous les despotes et la République universelle. Déjà le tocsin sonne, les peuples se réveillent, les tyrans tremblent, le rocher de la philosophie est sus¬ pendu sur leurs têtes. Encore une commotion, tous les rois seront poussière et l’Europe Répu¬ blique. L’univers entier retentira des cris que nous répétons tous les jours : Vive la Montagne ! Vive la raison! Vive la République éternelle et universelle. (Suivent 54 sigtuilures.) Extrait du registre des délibérations de la Société populaire de la ville et district du Dorât (1). Séance frimaire 4 dudit mois, l’an II de la République française une et indivisible. Le président ayant ouvert la séance, le citoyen Bonnet, curé constitutionnel de cette commune, a obtenu la parole, a demandé à la Société de recevoir ses lettres dé prêtrise et les a déposées sur le bureau. De suite le citoyen Massard aîné, ex-chanoine et vicaire de cette commune, a déposé sur le bureau ses lettres de prêtrise et acte de nomina¬ tion de ci-devant chanoine et a déclaré qu’il renonçait dès ce moment à ses fonctions. Le citoyen François Massard cadet, vicaire de cette même commune, a déposé ses lettres de prêtrise et sa nomination au quart de pré¬ bende, et déclaré renoncer à ses fonctions. De suite, le citoyen Jevardet, maire de cette commune, ex-chanoine, a déposé pareillement ses lettres de prêtrise avec celles de maître Ezard (sic) de tout son quinquinium (sic), ainsi que sa nomination au ci-devant canonicat. De suite, le citoyen Desperoux, ex-moine, a déposé pareillement ses lettres de prêtrise. De suite, le citoyen Junien, ex-chanoine, a déposé pareillement ses lettres de prêtrise, celle de maître Ezard et sa nomination au ci-devant canonicat. De plus il a offert gratuitement un calice en argent doré; la Société a reçu son offre avec applaudissements. La Société a donné acte à tous les ci-dessus (1) Archives nationales, carton C 288, dossier 883, pièce 20. dénommés de leur dépôt de lettres de prêtrise et autres actes, qui a été inséré au procès-verbal de ladite séance et a fait brûler sur-le-champ toutes lesdites lettres et actes dé nomination. Extrait de la séance du 6 frimaire, Van II de la République. Le président ayant ouvert la séance, le citoyen Chêne, ex-chanoine, a déclaré à la Société qu’il déposait ses lettres de prêtrise. La Société les a reçues et les a fait brûler et lui a donné acte de la déposition desdites lettres et en a fait men¬ tion dans le procès-verbal dudit jour. Séance extraordinaire du 6 frimaire, an susdit Le citoyen Razès, malade, a fait offrir par le citoyen Jevardat, maire, ses lettres de prêtrise, sa nomination de chanoine et un calice d’argent. Le citoyen Jevardat a déposé le tout sur le bureau. La Société a reçu son offre avec applau¬ dissements. De suite le citoyen Junien, sous-diacre, a déposé également ses lettres de sous-diacre ainsi que sa nomination d’ex-chanoine et leur a donné acte de leur dépôt par le procès-verbal de la séance et a fait brûler lesdites lettres et nomination. Séance du 10 frimaire, an susdit. Le citoyen Marcoux, curé de la Bazeuge, a déposé ses lettres de prêtrise; le citoyen Pel-legrain, de suite, a présenté les lettres de prê¬ trise de la part du citoyen Maurat, curé de Saint-Ouen, et sa nomination à ladite cure; il a pareillement déposé les lettres de prêtrise du citoyen de Loménie, curé de Voulon. La Société leur a donné acte de cettd! dépo¬ sition et en a fait mention dans le procès-verbal de sa séance et les a fait brûler. Séance du 12 frimaire, Van II de la République française, une et indivisible. Le président ayant ouvert la séance, le ci¬ toyen Massard a présenté les lettres de prêtrise du citoyen Dardant, curé constitutionnel de Saint-Sornin-la-Marehe, lesquelles ont été dépo¬ sées sur le bureau; il lui en a été donné acte et elles ont été brûlées de suite. Un membre a fait la motion, après la déposi¬ tion des lettres de prêtrise dudit curé de Saint-Sornin, de faire expliquer les prêtres qui envoyaient leurs lettres pour savoir s’ils enten¬ daient renoncer à toute fonction et que désor¬ mais on ne recevrait plus aucune lettre de prê¬ trise que de ceux à qui elles appartiendraient et de leur aveu. La motion, appuyée par un membre, il a été fait sommation au citoyen Bonnet, curé constitutionnel de cette commune, de s’expliquer sur le brûlement de ses lettres. De suite, ledit citoyen Bonnet a répondu qu’ayant fait brûler ses lettres de prêtrise, il entendait avoir renoncé à toutes ses fonctions et qu’il avait cessé dès ce moment de les exer¬ cer; mais puisqu’il était obligé de s’expliquer, il déclarait renoncer à toutes ses fonctions. De suite, le citoyen Jevardat, maire, pareil¬ lement sommé, a répondu qu’il ne connaissait aucune loi de la Convention qui l’empêchât de dire la messe et que, conséquemment, il conti-