280 lAssemLlée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 janvier 1791.] rais-je quelque chose à désirer à la piété des fidèles, si je ne rendais publiquement compte des raisons qui me déterminent à cette prestation, et vont jusqu’à commander ma conduite dans ces circonstances. Peut-être même, sans cette précaution, la démonstration la plus authentique de mon patriotisme et de ma délicatesse religieuse tout à la fois, ne serait-elie regardée d’un certain nombre que comme une pierre d’achoppement et de scandale : peut-être enfi", malgré la loyauté du zèle qui m’y porte, malgré la pureté et la générosité des sentiments dont elle émane, ne serait-elle, au jugement de plusieurs, qu’un acte d’inconsidération, une suite de l’ignorance ou de l’erreur, ou le l'ruit méprisable de l’amuur-propre, de l’aveuglement et de l’orgueil. « Je déclare donc, avec ce même organe que la suprême vérité a daigné se choisir pour éclairer les consciences, édifier les âmes, et toucher les cœurs, qu’après les plus mûres réflexions sur une constitution qui a malheureusement été un sujet d’erreur et un objet de calomnie pour plusieurs, je ri’y vois rien de contraire aux quatre principaux caractères qui distinguent l’Eglise de Jésus-Christ, à son unité, à sa sainteté, à sa catholicité, à son aposiolieité. « Je déclare que j’y vois, au contraire, le plus puissant préservatif, dont aucune assemblée de principaux ministres de l’Eglise ait encore jusqu’ici conçu le projet, contre tout usage arbitraire et abusif de la puissance que Jésus-Christ a laissée à son Eglise, et par conséquent un moyen très efficace de faire respecter à jamais cette puissance parmi nous. « Je déclare que si, d’après cette constitution, il survenait quelque schisme, ce qu’a Dieu ne plaise, il ne pourrait être la suite naturelle de celte constitution, mais bien l’effet funeste de l’anti-patriotisme, de l’égoïsme, ou de la religion trompée, et de la conscience erronée des ministres opiniâtres à y refuser leur serment d’adhésion ; et que toute rés stance de cette nature pouvant seule être une semence de scission, j’ai cru que j’en devais avoir la plus vive horreur, et m’en faire le plus grand crime. « Je déclare, et ma conscience me force à publier hautement, au mépris de tout respect humain, même de tous périls et risques, que je n’ai VU, dans cette constitution, qu’un plan de réforme, dont le plus célèbre concile n’eût probablement pas été capable ; etqu’après l’avoir soigneusement médité dans tous ses points, je n’ai senti que la plus vive ardeur d’y joindre le sceau de mon serment requis, et la trop juste impatience de rendre l’hommage de mon adhésion la plus parfaite aux lumières pures et infiniment profondes dont elle est l’ouvrage. «Je déclare, enfin, qu’une seule chose ma paru, d’après le plus sérieux examen, pouvoir être encore à désirer, dans cette constitution, par tout prêtre également fervent et éclairé; ce serait un nouvel article additionnel, qui autorisât tous les ministres fonctionnaires, et notamment tous les évêques et autres pasteurs de l’Eglise, à renouveler ce même serment, tous les ans, à une époque déterminée par ledit article, pour s’entretenir dans la confiance de leurs ouailles, et à rectvo.r ensuite, de la part de celles-ci, le serment de persister jusqu’au dernier soupir dans la pratique de la foi chrétienne, et d’avoir pour les ministres des autels, qui en sont les prédicateurs, les gardiens et les défenseurs, la vénération, les égards et le respect qui leur sont dus. « Telle est ma profession particulière de foi, à laquelle je joins, comme article nécessaire et essentiel, l’engagement déjà contracté par ma première prestation de serment civique : laquelle m’oblige à toutes les conditions, à tous les sacrifices, à tous les renoncements, à tous les actes en un mot, commandés ou à commander par la loi, soit pour le maintien ou pour la perfection et la consommation de la nouvelle Constitution de ce royaume, tant que cette loi n’exige tien de contraire à l’orthodoxie de la loi ou aux bonnes mœurs. « Tels sont les grands et puissants motifs qui me guident dans ma prestation de serment, et qui me pressent irrésistiblement à l’accomplissement de la loi qui le requiert: de manière que ce n’est pas moins pour suivre l’impulsion de ma conscience et obéir au secret penchant de mon cœur, que pour me conformer au décret de ladite Constitution, que je promets et jure de veiller soigneusement sur le troupeau contié à ma garde et à ma sollicitude, de remplir exactement toutes mes obligations civiques et mes fonctions curiales ou ecclésiastiques; d’être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale ; et acceptée par le roi. « Signé : Trannoy, curé de Rozov, département de l’Oise, à Beauvais, district de Cfermont-en-Beauvoisis, et chef-lieu du canton de Liancourt. <- Le 14 janvier 1791. » (L’Assemblée ordonne l’impression de cette déclaration et son insertion au procès-verbal.) M. le Président. M. Galpin,curé de Fresne, département de Paris, fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage intitulé : Serment du clergé ou dissertation théologique et politique en faveur de la constitution civile du clergé de France. (L’Assemblée ordonne qu’il en sera fait une mention honorable dans le procès-verbal.) M. le Président. J’ai reçu également de M . Du-pleicb, prêtre de la section ües Plantes, le serment suivant (1) : «. Par la grâce de Dieu, revêtu du caractère auguste du saint sacerdoce, en présence de l’Eter-nel, et pour obéir au cri de ma conscience, je jure d’être fidèle à la nation, à la lui et au roi, n’employer tous mes moyens pour soutenir, jusqu’à mon dernier moment, la Constitution en général, et en particulier la constitution civile du clergé, décrétée par l’Assemblée nationale, et acceptée par le roi. O mon Dieu! recevez mes très humbles actions de grâces pour le bonheur que vous m’avez accordé, eu me faisant naître dans un siècle où vos fidèles serviteurs sont enfin délivrés, pour toujours, de l'oppression et de la tyrannie des ennemis de ma chère patrie et de votre sainte religion ! Que toutes les saintes intelligences, de concert, célèbrent votre gloire dans l’eternité, pour le bienfait inestimable que vous avez accordé à la nation française, en lui donnant, dans votre miséricorde, cette sublime Constitution qui, en établissant sa liberté sur des bases inébranlables, sera IVffroi des oppresseurs du genre humain ! Oui, Seigneur, cette étonnante Révolution, dont vainement on chercherait des (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. [16 janvier 1791. J 281 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. exemples dans les fastes des Empires, est l’ouvrage de votre paissance : c’est vous qui avez donné à nos augustes représentants ce courageplus qu’humain, qui leur a fait renverser les obstacles que les méchants ont osé opposer à leur marche rapide; cette sagesse qui brille dans notre sublime contrat social qui n’a jamais eu de modèle, et qui fera l’admiration des générations futures : c’est vous qui, par la loi constitutionnelle de l’Etat, nous avez accordé Louis XVI, le premier des rois, ce roi citoyen, qui ne veut être heureux que du bonheur des Français : c’est vous qui avez armé des millions de citoyens pour défendre la liberté conlre les d spotes et les tyrans, qui avez reçu le serment qu’ils ont fait, de vivre libres ou mourir; c’est vous qui protégez ce grand Empire en déconcertant les complots insensés des lâches conspirateurs qui, dans leurs noires pensées, osent méditer sa ruine; c’est votre main puissante qui gi ave, eu caractères ineffaçables, sur le front de ces pervers insensibles à la voix de la nature et de la religion, leur opprobre et leur infamie; enfin c'est par votre secours que nos sages législateurs nous ont donné celte belle constitution civile du clergé, qui va faire renaître, dans le christianisme, les beaux siècles de la primitive église. Dieu de mon cœur et d_e mon âme, faites-nous la grâce de n’être point insensible à tant de bienfaits, afin qu’après avoir formé une seule famille de citoyens libres et chrétiens sur la terre, nous méritions d’obtenir lacourcnne de l'immortalité. Ainsisoit-il. « Signé : DUPLEICII, prêtre. » (L’Assemblée ordonne l’impression de ce document et son insertion dans le procès-verbal.) M. l’abbé Gouttes. Il est bien juste que l’Assemblée entende les déclarations faites par les bons patriotes, tandis que ceux qui sont les ennemis de notre sainte religion font tout ce qu’ils peuvent pour détruire notre travail. Voici une publication nouvellement faite d’écrits incendiaires, envoyée dans le diocèse de Toulouse. On répand à pleines mains, ou adresse aux chefs des conférences, des libelles dans lesquels on regarde la constitution du clergé comme nulle; on traite d’hérétiques tous les évêques qui seront nommés d’après vos decrets, notamment M. d’Expilly. Ces ouvrages sont imprimés chez Crapart, libraire à Paris, pont Saint-Michel. J’en fais la dénonciation afin qu’on s’occupe au plus tôt d’arrêter celte édition secrèie; car je préviens l’Assemblée que des membres qui n’osent pas rerm ttre eux-mêmes ces papiers incendiaires, courent secrètement les comités de l’Assemblée et vont les remettre aux garçons de bureaux. Je demande à être autorisé à remettre cette pièce au comité des recherches, afin qu’il en fasse son rapport. (Cette motion est adoptée.) M. ISouche. Vos commissaires inspecteurs des bureaux sont dans l’intention de vous présenter un projet de règlement contre l’abus criminel incroyable que Pou fait de votre contre-seing; on s’eu sert pour envoyer dans les provinces les ouvrages les plus incendiaires. Un de ces jours, on vous proposera un règlement par lequel les précautions les [dus sûres seront prises. Un membre du comité d'aliénation propose la vente de plusieurs biens nationaux, que l’Assemblée décrète ainsi qu’il suit ; « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l’aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites suivant les formes prescrites, déclare vendre les biens nationaux, dont l’état est annexé aux procès-verbaux respectifs des estimations ou évaluations desdits biens, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour les sommes ci-après, payables de la manière déterminée par le même décret ; Savoir : A la municipalité de Riom , département du Puy-de-Dôme, pour ..... 96,761 1. 6 s. » d. A celle de Montpensier, même département ...... 51,870 » » A celle de Noue, même département ............ 3,836 10 » A celle de Riom, môme département ............ 1,186,218 » 6 Acellede Mouton, même département ............ 194,699 3 » A celle de Montpellier, département de l’Hérault. 646,217 9 » M. Camus, Messieurs, lors des inondations de la Loire, à Roanne nommément, il y a eu des personnes qui se sont comportées avec la plus grande valeur; pareillement à Sain t-Dizier, lors de l’incendie; enfin à Metz et à Nancy, il y a des gardes nationales qui sont dignes des éloges de la nation et de ses récompenses. L’intention de l’Assemblée est-elle que ces objets passent à la direction générale de la liquidation? ou bien l’Assemblée veut-elle, pour le hou exemple et l’encouragement des braves gens, que le comité des pensions, à qui elle a renvoyé ces affaires, lui propose, sans délai, differents rapports? LLâssemblée décrète ce qui suit : « L’Assemblée nationale décrète que le comité des pensions lui fera, sans délai, et sans renvoyer préalablement à la direction de liquidation, le rapport des gratifications et récompenses qui peuvent être dues aux personnes qui ont donné des preuves de courage et de bravoure à Nancy, à Melz, à Palamini, dans les départements situés le long de la Loire, lors des inondations de ce fleuve; et à Saint-D.zier, lors d’un incendie qui a eu lieu depuis peu. » M. Camus. Plusieurs personnes se présentent au comité pour avoir part aux récompenses accordées aux vainqueurs de la bastille, et prétendent avoir été oubliées sur la liste de 833 qu’en a donnée la municipalité. Nous demandons que tous ceux qui se disent ainsi vainqueurs de la bastille soient renvoyés à la direction générale de liquidation pour vérifier scrupuleusement les faits sur lesquels ils se fondent; car nous avons peine à croire qu’il y en ait en beaucoup d’omis. Le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale décrète que les personnes qui prétendront devoir être comptées au nombre des vainqueurs de la Bastille, et sur les demandes desquelles il n’a pas été statué, seront tenues de se présenter à la direction générale de liquidation, pour y rapporter la preuve des faits qu’ils allégueront, et, sur le compte qui en sera rendu par le directeur général de liquidation au comité des pensions, être, sur le rapport duclife